Liban: Schenker appelle à des réformes drastiques

Le Secrétaire adjoint américain pour les affaires du Proche-Orient David Schenker (Photo, Fichier/AFP).
Le Secrétaire adjoint américain pour les affaires du Proche-Orient David Schenker (Photo, Fichier/AFP).
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Publié le Jeudi 03 septembre 2020

Liban: Schenker appelle à des réformes drastiques

  • Des sources diplomatiques ont déclaré à Arab News que le programme de réunions de Schenker était «inhabituel et inattendu »
  • L'avertissement de Macron déclenche des discussions pour former un conseil des ministres de crise

BEYROUTH: Le secrétaire adjoint américain aux Affaires du Proche-Orient, David Schenker, a appelé les dirigeants libanais à mettre en œuvre des réformes drastiques et de grande envergure alors qu'il entame une visite de deux jours dans le pays en crise.

Schenker a déclaré qu'il souhaitait voir des réformes qui « répondent aux aspirations du peuple libanais ». Il aussi exprimé son désir de « voir un gouvernement soumis à la transparence, à l'obligation de rendre des comptes et qui ne soit pas exposé à la corruption. »

Des sources diplomatiques ont déclaré à Arab News que le programme de réunions de Schenker était « inhabituel et inattendu ».

Le responsable américain rencontrera des leaders civils et des chefs d'entreprise pour des discussions liées à l'aide américaine après l'explosion du port de Beyrouth le 4 août.

L’arrivée de Schenker intervient au lendemain de la deuxième visite du président français Emmanuel Macron au Liban au cours de laquelle il a conditionné tout sauvetage financier de la France à un cabinet qui mettrait en œuvre des réformes généralisées.

Macron a donné aux responsables libanais « 15 jours pour former le gouvernement et huit semaines pour mettre en œuvre les promesses ».

Dans un communiqué de presse, le président français a déclaré: « Si vous respectez vos engagements, nous honorerons les nôtres. Sinon, il n'y aura pas de chèque en blanc et nous ne pourrons pas soutenir le Liban. »

Il a également déclaré que si le nouveau gouvernement ne respectait pas ses engagements, « ceux qui entravent ces efforts seront nommés ».

Macron a réussi à réunir des responsables des partis rivaux à la Résidence des Pins, la résidence de l'ambassadeur de France, pour une réunion à laquelle ont participé Saad Hariri (Courant du futur), Walid Joumblatt et son fils Taymour Joumblatt (Parti socialiste progressiste), Gebran Bassil (Courant patriotique libre) , Samir Geagea (Forces libanaises), Mohammed Raad (Hezbollah), Samy Gemayel (Kataeb), Sulaiman Frangieh (Marada) et Ibrahim Azar (bloc de Nabih Berri).

Mustapha Adib, le Premier ministre libanais désigné, a déclaré mercredi qu'il souhaitait former rapidement un gouvernement de technocrates pour mettre en œuvre des réformes urgentes susceptibles de regagner la confiance des Libanais et de la communauté internationale.

Plus tôt, le diplomate de 48 ans avait eu des entretiens avec des députés sur la formation d'un nouveau conseil des ministres de crise.

Pourparlers

Au cours des pourparlers, le Mouvement du futur a appelé à « la formation rapide d'un gouvernement de technocrates », tandis que le bloc du Hezbollah a déclaré qu'il souhaitait voir un gouvernement «efficace, productif et cohérent qui se rend compte de la réalité politique ».

Cependant, le bloc de Berri a insisté pour garder le portefeuille des finances comme une « question fondamentale », signe d'un différend imminent relatif à la personne qui dirigera le ministère des Finances.

Le Parti socialiste progressiste a appelé à « un gouvernement capable qui procède d'abord aux réformes, à commencer par l'initiative française qui est selon lui la toute dernière chance ».

Le bloc des Forces libanaises a exigé pour sa part un gouvernement « indépendant, composé de technocrates et engagé dans la neutralité ». Il a également annoncé que son parti ne ferait pas partie de ce gouvernement.

Pendant ce temps, le Mouvement patriotique libre a appelé à des « ministères alternants», avec une réaffectation des portefeuilles alloués à d'autres partis.

Le député Osama Saad a décrit les événements comme « un maquillage d'un système expiré », « les crises et les effondrements ne s'arrêteront jamais au Liban », a-t-il dit.

À l'issue des pourparlers, Adib a déclaré qu’«il y a plus de terrain d'entente entre les Libanais que les points de désaccord, qui ne peuvent être résolus que par le dialogue ».

Après une rencontre avec le patriarche maronite Béchara Al-Rai mercredi, les évêques maronites ont appelé à « un gouvernement de salut sans parti ni affiliation politique, avec les pouvoirs exceptionnels nécessaires pour pouvoir effectuer des réformes, combattre la corruption et réaliser le progrès économique. »

Les évêques ont déclaré que « les préoccupations arabes et internationales devraient être la clé de voûte d’un sauvetage remarquable du Liban ».

Ce texte est la traduction d'un article paru sur ArabNews.com


Au Liban, la plupart des sites militaires du Hezbollah ont été cédés à l'armée dans le sud du pays

L'armée libanaise est entrée mercredi dans la ville de Hawsh Al-Sayyid Ali, à la frontière orientale du Liban avec la Syrie. (X/@mdbarakat)
L'armée libanaise est entrée mercredi dans la ville de Hawsh Al-Sayyid Ali, à la frontière orientale du Liban avec la Syrie. (X/@mdbarakat)
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  • « Sur les 265 positions militaires du Hezbollah identifiées au sud du fleuve Litani, le mouvement en a cédé environ 190 à l'armée », a indiqué la source, qui a requis l'anonymat.
  • Le président libanais, Joseph Aoun, dont l'élection a été permise par l'affaiblissement du Hezbollah, a affirmé lundi que la question devait être résolue « par le dialogue », car le « Hezbollah est une composante libanaise ».

BEYROUTH : Selon une source proche du mouvement pro-iranien, l'AFP a appris samedi que la plupart des sites militaires du Hezbollah dans le sud du Liban avaient été placés sous le contrôle de l'armée libanaise.

« Sur les 265 positions militaires du Hezbollah identifiées au sud du fleuve Litani, le mouvement en a cédé environ 190 à l'armée », a indiqué la source, qui a requis l'anonymat.

Dimanche, une émissaire américaine en visite à Beyrouth a exhorté les autorités libanaises à accélérer le désarmement du Hezbollah.

« Nous continuons d'exhorter le gouvernement à aller jusqu'au bout pour mettre fin aux hostilités, ce qui inclut le désarmement du Hezbollah et de toutes les milices », a déclaré Morgan Ortagus sur la chaîne locale LBCI. 

Le président libanais, Joseph Aoun, dont l'élection a été permise par l'affaiblissement du Hezbollah, a affirmé lundi que la question devait être résolue « par le dialogue », car le « Hezbollah est une composante libanaise ».

« Nous allons bientôt élaborer une stratégie de défense nationale dans ce cadre », a-t-il ajouté.

Le Hezbollah est le seul groupe libanais à avoir conservé ses armes après la fin de la guerre civile en 1990, au nom de la « résistance » contre Israël.

Depuis le début de la guerre à Gaza, le Hezbollah a ouvert un front contre Israël en tirant des roquettes à partir du sud du Liban pour soutenir son allié palestinien.

Ces hostilités ont dégénéré en guerre ouverte en septembre 2006 avec des bombardements israéliens intenses au Liban, principalement contre les bastions du Hezbollah, dont la direction a été quasiment décimée. La guerre a fait plus de 4 000 morts.

Israël, qui a maintenu sa présence militaire au Liban dans cinq points « stratégiques » le long de la frontière, continue de mener régulièrement des frappes au Liban, disant viser des infrastructures et des membres du Hezbollah.


Gaza : une délégation du Hamas est attendue au Caire samedi pour discuter d'une trêve

Des Palestiniens prient pour l'Aïd Al-Adha près des ruines de la mosquée Al-Al Rahma détruite par les frappes aériennes israéliennes à Khan Younis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 juin 2024. Le Hamas a déclaré qu'il était prêt à conclure un accord global pour la paix à Gaza. (Reuters)
Des Palestiniens prient pour l'Aïd Al-Adha près des ruines de la mosquée Al-Al Rahma détruite par les frappes aériennes israéliennes à Khan Younis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 juin 2024. Le Hamas a déclaré qu'il était prêt à conclure un accord global pour la paix à Gaza. (Reuters)
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  • « Nous espérons que cette rencontre permettra d'avancer concrètement vers un accord mettant fin à la guerre a déclaré ce responsable sous couvert d'anonymat.
  • « Mais les contacts et les discussions avec les médiateurs sont en cours », a-t-il affirmé.

LE CAIRE : Une délégation du Hamas est attendue samedi au Caire pour des discussions avec les médiateurs égyptiens en vue d'une nouvelle trêve dans la bande de Gaza, a indiqué à l'AFP un responsable du mouvement islamiste palestinien.

« Nous espérons que cette rencontre permettra d'avancer concrètement vers un accord mettant fin à la guerre et à l'agression, et garantissant le retrait complet des forces d'occupation de la bande de Gaza », a déclaré ce responsable sous couvert d'anonymat, en référence à Israël.

Selon lui, le Hamas n'a reçu aucune nouvelle offre de trêve, malgré des informations de médias israéliens rapportant que l'Égypte et Israël avaient échangé des projets de documents portant sur un accord de cessez-le-feu et de libération d'otages.

« Mais les contacts et les discussions avec les médiateurs sont en cours », a-t-il affirmé.

La délégation est conduite par Khalil al-Hayya, le négociateur en chef du Hamas, a-t-il précisé.

Selon le Times of Israel, la proposition égyptienne prévoirait le retour en Israël de 16 otages, huit vivants et huit morts, en échange d'une trêve de 40 à 70 jours ainsi que de la libération d'un grand nombre de prisonniers palestiniens.


Reconnaissance de l'État palestinien : de nombreuses conditions à réunir pour que la France agisse

Emmanuel Macron a répété vendredi dans un message posté sur X en français, anglais, arabe et hébreu que la seule solution au conflit israélo-palestinien était « politique » (Photo AFP)
Emmanuel Macron a répété vendredi dans un message posté sur X en français, anglais, arabe et hébreu que la seule solution au conflit israélo-palestinien était « politique » (Photo AFP)
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  • - Le projet du président français : « Je défends le droit légitime des Palestiniens à un État et à la paix, comme celui des Israéliens à vivre en paix et en sécurité, l'un et l'autre reconnus par leurs voisins », a résumé Emmanuel Macron. 
  • Il a dévoilé le projet d'une telle reconnaissance par Paris dans une « dynamique collective », impliquant la reconnaissance de l'État d'Israël par les pays avoisinants.

PARIS : Toute reconnaissance de l'État palestinien par la France ne contribuera à mettre la solution des deux États avec Israël sur les rails que si elle réunit une myriade de conditions qui semblent pour le moment inatteignables.

Emmanuel Macron a répété vendredi dans un message posté sur X en français, anglais, arabe et hébreu que la seule solution au conflit israélo-palestinien était « politique ». Les obstacles sont de taille.

- Le projet du président français : « Je défends le droit légitime des Palestiniens à un État et à la paix, comme celui des Israéliens à vivre en paix et en sécurité, l'un et l'autre reconnus par leurs voisins », a résumé Emmanuel Macron. 

L'an passé, il avait déclaré que la reconnaissance d'un État palestinien n'était pas un tabou, à condition que ce geste symbolique soit « utile ».

Mercredi, il a dévoilé le projet d'une telle reconnaissance par Paris dans une « dynamique collective », impliquant la reconnaissance de l'État d'Israël par les pays avoisinants.

La conférence pour les deux États, prévue en juin à New York sous l'égide de la France et de l'Arabie saoudite, doit être « un tournant », a-t-il dit. 

Des frontières à définir 

« Les attributs juridico-politiques de l'État palestinien en question n'existent pas aujourd'hui. C'est une pure fiction diplomatique », souligne néanmoins David Khalfa, de la Fondation Jean-Jaurès à Paris.

« Pour qu'un État palestinien soit viable, il faut une continuité territoriale entre Gaza et la Cisjordanie », note Karim Bitar, enseignant à Sciences Po Paris. Or, « on ne voit pas aujourd'hui le gouvernement israélien accepter d'entamer un processus de décolonisation, de mettre un terme à l'occupation de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est, et de demander aux 700 ou 800 000 colons israéliens de quitter ces territoires occupés », dit-il. 

Une autre question épineuse est celle du désarmement du Hamas, qui a perpétré les attentats sanglants du 7 octobre 2023 en Israël et provoqué les représailles meurtrières de l'armée israélienne à Gaza.

Israël a fait de l'éradication du groupe sa priorité. 

Démilitarisation du Hamas et exfiltration

Quoiqu'affaibli, le groupe « a réussi à recruter des milliers de jeunes miliciens » et dispose encore d'un arsenal lui permettant de « mener des actions de guérilla contre les soldats israéliens et de réprimer dans le sang les leaders de la contestation anti-Hamas à Gaza », observe-t-il.

S'agissant de l'exfiltration de certains cadres du Hamas, la question est complexe à explorer avec ceux qui parlent au Hamas, reconnaît-on à Paris. Comment les exfiltrer et vers quelle destination, en plus du Qatar et de la Turquie ? Des interrogations  qui restent sans réponse actuellement. 

Revitaliser l'Autorité Palestinienne

« Les Israéliens doivent être convaincus que le Hamas va être désarmé, qu'il est exclu de la gouvernance de Gaza et que l'Autorité palestinienne va réellement se réformer », a expliqué à l'AFP une source diplomatique française.

Cela passe par le renforcement de la légitimité de l'Autorité palestinienne, alors que la popularité du Hamas augmente au sein de la population. 

Normalisation avec Israël

Selon Hasni Abidi, enseignant au Global Studies Institute de l'Université de Genève, il faut un changement de personnel politique en son sein pour qu'une Autorité palestinienne revitalisée soit en mesure d'assurer une gouvernance crédible dans la bande de Gaza. Or, ses dirigeants ne manifestent aucun désir de passer la main, ce qui permet à Israël d'entretenir l'idée qu'ils n'ont pas d'interlocuteur crédible.

La source diplomatique rappelle que la normalisation est un processus et pas un acte isolé. Elle souligne que ce processus peut se faire progressivement et que d'autres pays peuvent participer. Cependant, la France est réaliste et ne s'attend pas à un règlement immédiat du conflit israélo-palestinien.