Charlie Hebdo: 5 ans après les faits, ce procès, des plus attendus, sera intégralement filmé

Le parquet national antiterroriste a entamé, mercredi, le procès de la Cour d’assises spéciale concernant les attentats terroristes commis les 7, 8, 9 janvier 2015. (Photos Fournies)
Le parquet national antiterroriste a entamé, mercredi, le procès de la Cour d’assises spéciale concernant les attentats terroristes commis les 7, 8, 9 janvier 2015. (Photos Fournies)
Olivier Cousi.
Olivier Cousi.
Short Url
Publié le Jeudi 03 septembre 2020

Charlie Hebdo: 5 ans après les faits, ce procès, des plus attendus, sera intégralement filmé

  • « La réponse de la justice française est une réponse qui est à la hauteur des enjeux de ce procès », nous confie le Bâtonnier Olivier Cousi
  • Cinq ans après les faits, ce procès, des plus attendus, sera intégralement filmé pour constituer « des archives historiques »

PARIS: Le parquet national antiterroriste a entamé, mercredi, le procès de la Cour d’assises spéciale concernant les attentats terroristes commis les 7, 8, 9 janvier 2015. Quatorze personnes doivent être jugées aux Assises de Paris dans le cadre du procès des attentats commis contre de Charlie Hebdo, Montrouge et de l’Hyper en janvier 2015 à Paris

« Depuis la loi du 9 septembre 1986 relative à la lutte contre le terrorisme, la cour d'assises est compétente pour juger des actes de terrorisme est exclusivement composée de magistrats professionnels, et composée du président et de quatre assesseurs », précise le parquet de Paris

Un procès historique

Cinq ans après les faits, ce procès, des plus attendus, sera intégralement filmé pour constituer « des archives historiques ».  « Sur réquisitions du parquet national antiterroriste en date du 4 juin 2020, le Premier président de la cour d’appel de Paris a autorisé l’enregistrement du procès des attentats de janvier 2015 », lit-on dans le dossier de presse du Parquet national antiterroriste. De son côté, Olivier Cousi, bâtonnier de Paris, et chargé de l’organisation du travail des avocats, souligne « qu’il est important pour l’histoire de garder des traces ».

Tenu sous haute surveillance au tribunal judiciaire de Paris, le procès concerne les attentats commis par les frères Saïd et Chérif Kouachi contre le journal satirique Charlie Hebdo, un attentat qui a couté la vie à douze personnes, dont les dessinateurs Cabu et Wolinski.

Le lendemain, Amedy Coulibaly, un délinquant radicalisé, tuait, une policière municipale dans la ville de Montrouge, et exécutait, le 9 janvier 2015, quatre personnes lors de la prise d’otages dans le magasin de l’Hyper Cacher, dans l’est parisien, lors d’un attentat contre la communauté juive de France.

Pendant deux mois, la Cour D’assises entendra 144 témoins et 14 experts afin de déterminer le rôle de chacun dans l’organisation et l’exécution des actes terroristes. Les audiences, qui se déroulent du 2 septembre au 10 novembre 2020, sont présidées par Régis de Jorna, premier président de la Chambre à la Cour d’appel de Paris. Quant à l’accusation, elle est représentée par deux avocats généraux, Jean-Michel Bourles, procureur de la République antiterroriste adjoint, et Julie Holveck, vice-procureur de la République.

Sollicité par Arab News en français, entre deux prises de paroles, Olivier Cousi, Bâtonnier de Paris, nous explique : « Mon rôle ne consiste pas à participer au procès comme avocat des parties, je suis, comme Bâtonnier, en charge de la bonne organisation du travail des avocats. On a pu constater, ce matin, qu’il y avait beaucoup d’émotions, de tensions sur les enjeux de ce procès, puisque ce dernier est disproportionné par rapport à ce qu’on l’habitude de voir en termes de nombre de parties civiles, d’avocats, de volume de la documentation. Donc, la réponse de la justice française est une réponse qui est à la hauteur des enjeux de ce procès ».

Soupçonnés de soutien logistique aux frères Saïd et Chérif Kouachi et à Amedy Coulibaly, auteurs des attaques qui ont terrorisé les Français durant trois jours, quatorze personnes doivent être jugés lors de ce procès. Dix d’entre elles sont placées en détention provisoire, une personne est sous contrôle judiciaire, et trois autres sont visées par un mandat d’arrêt.

« Ce procès historique est constitué de 200 membres de parties civiles, 94 avocats, 144 témoins et 14 experts cités à l’audience », précise le Parquet de Paris.

Les accusés

Les accusés, renvoyés devant la Cour d’assises spécialement composée par une ordonnance de mise en accusation du 17 janvier 2019, concerne aussi Hayat Boumeddiene, visée par un mandat d’arrêt du 25 septembre 2018, à laquelle on reproche deux infractions:  la participation à une association de malfaiteurs terroristes criminels et le financement des actes de terrorisme, commis par Amedy Coulibabaly et les frères Kouachi. Elle encourt vingt ans de réclusion criminelle.

Mehdi Belhocine est également visé par un mandat d’arrêt du 26 septembre 2018. Il encourt la même peine pour sa participation à une association de malfaiteurs terroristes, de crime d’atteintes aux personnes (assassinats et séquestration, commis par Amedy Coulibaly, lequel a prêté allégeance à l’organisation État islamique. Mehdi Belhocine est, lui, accusé d’avoir organisé et effectué, en lien avec Amedy Coulibaly et Mohamed Belhocine, le déplacement et l’acheminement jusqu’en zone irako-syrienne de Hayat Boumeddiene avant la commission des crimes terroristes en 2015.

Quant à Mohamed Belhocine, visé par un mandat d’arrêt du 26 septembre 2018, il est accusé de deux infractions: complicité des crimes et délits commis par Amedy Coulibaly dont l’assassinat sur personne dépositaire de l’autorité publique commis à Montrouge, le 8 janvier 2015, au préjudice de Clarissa Jean-Philippe, de tentative d’assassinat sur personne dépositaire de l’autorité publique commis, le même jour, à l’encontre  de Jonathan Berdal et de la séquestration, le 9 janvier 2015, de 30 personnes, dans les locaux de l’Hyper Cacher. Il encourt une condamnation à perpétuité.

D’autres accusés ont été cités dans le cadre de ce procès: Amar Ramdani, Nezar Mickaël Alwatik, Willy Prevost (détenus depuis le 20 janvier 2015), Saïd Makhlouf (détenu depuis le 13 mars 2015), Michel Catino, Metin Karasular et Metin Karasular (détenus depuis le 2 juin 2017), Abdelaziz Abbad et Miguel Martinez (détenus depuis le 28 avril 2017) et Mohamed – Amine Fares (détenu depuis le 23 mars 2018), ils encourent vingt ans de réclusion criminelle.

Quant à Ali Riza Polat (détenu depuis le 28 mars 2015), il est accusé de deux infractions – complicité des crimes et délits commis par les frères Kouchi et Amédy Coulibaly, des infractions pour lesquelles, il encourt une de prison à perpétuité. Christophe Raumel, lui, est placé sous contrôle judiciaire depuis 2015 et risque une peine de dix ans de détention.

« Le parquet va permettre aux avocats d’effectuer un travail efficace. C’est difficile de rendre une justice sereine pour des actes aussi terribles, explique Olivier Cousi. Le dossier est hors normes, un nombre disproportionné de pièces et de documents, un nombre très important d’avocats de la partie civile. On va avoir des mois d’audiences, c’est la première fois qu’un procès d’une telle ampleur est organisé ici », poursuit-il.

Interrogé par Arab News en français sur le déroulement du procès, le Bâtonnier nous confie qu’il y aura des séances assez lentes, qui n’attirent pas beaucoup l’attention, mais aussi « des périodes qui seront plus importantes, plus intenses, dans lesquelles il y aura des plaidoiries, des réquisitions des procureurs, des témoignages et des prises de positions, explique-t-il. Car ces attentats ont été vécus comme un traumatisme terrible en France, ils remettent en cause des acquis fondamentaux comme la liberté de la presse, le délit de blasphème qui n’existe pas dans notre pays ». Olivier Cousi explique que, lors de ce procès, un débat philosophique autour de questions essentielles sera abordé. « L’attentat commis contre l’Hyper Cacher, par exemple, qui a fauché la vie à des victimes, par des motivations que l’on ne comprend pas. Le procès permettra, peut-être, de mieux comprendre, d’expliquer mais certainement pas excuser le contexte de ces attentats ». 

Nombreux sont les intervenants qui constatent qu’il y a beaucoup d’attentes autour de ce procès. « Nous constatons que les parties civiles attendent des explications, et la compréhension de ce qui s’est passé, cette attente risque d’être un peu déçue, car les auteurs principaux ne sont plus là », nous explique-t-il.   

De son côté, maître Isabelle Coutant-Peyre, avocate de la défense, affirme: « Dans un procès d’assises, la défense a une mission tout aussi importante, voire plus difficile que les représentants des familles. Je persiste à dire que toute cette souffrance ne serait pas arrivée si les services de renseignements avaient continué à surveiller les frères Kouachi et Amedy Coulibaly. » Pointant du doigt la responsabilité de l’État, l’avocate de l’un des prévenus persiste et considère que « le système judiciaire n’a pas voulu poursuivre les fournisseurs des armes identifiés dans le cadre de ce procès. Je demande à ce qu’ils soient poursuivis pour complicité dans les attentats ».


Agriculteurs: la Coordination rurale bloque toujours le port de Bordeaux

 La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais. (AFP)
Short Url
  • La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place
  • Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine

BORDEAUX: La Coordination rurale (CR), principal syndicat agricole mobilisé sur le terrain jeudi, maintient son blocage du port de commerce de Bordeaux et la pression sur le gouvernement, dont la ministre de l'Agriculture visite une exploitation dans le Pas-de-Calais.

La ministre Annie Genevard est arrivée peu avant 10H30 dans une exploitation d'endives à La Couture, première étape de son déplacement dans le Pas-de-Calais, sans s'exprimer immédiatement auprès de la presse sur place.

Les panneaux d'entrée et de sortie du village et des alentours étaient barrés d'autocollants "Paraguay", "Brésil" ou "Argentine", en référence à l'accord de libre-échange UE-Mercosur en négociation avec ces pays d'Amérique latine et auquel les agriculteurs comme la classe politique française s'opposent.

Il s'agit de la première visite de la ministre sur le terrain depuis le retour des paysans dans la rue, une mobilisation surtout marquée en fin de semaine par les actions des bonnets jaunes de la Coordination rurale.

A Bordeaux, ils bloquent ainsi les accès au port et au dépôt pétrolier DPA: des pneus, des câbles et un tracteur entravent l'entrée du site.

Sous une pluie battante, les agriculteurs s'abritent autour d'un feu et de deux barnums tanguant avec le vent. Une file de camions bloqués dont des camions citernes s'allonge aux abords.

Les manifestants ont tenté dans la matinée de joindre Annie Genevard, sans succès.

"On bloque tant que Mme Genevard et M. Barnier [Michel Barnier, Premier ministre] ne mettent pas en place des solutions pour la profession. Des choses structurelles, (...), on ne veut pas un peu d'argent aujourd'hui pour rentrer dans nos fermes, on veut des réformes pour vivre, avoir un salaire décent", a déclaré à l'AFP Aurélie Armand, directrice de la CR du Lot-et-Garonne.

"Le temps est avec nous parce que quand il pleut on ne peut pas travailler dans les fermes, donc c'est très bien", a-t-elle lancé, alors qu'une pluie battante balaye la Gironde avec le passage de la tempête Caetano.

Plus au sud, dans les Landes, des agriculteurs de la CR40 occupent toujours une centrale d'achat Leclerc à Mont-de-Marsan mais les autorités leur ont donné jusqu'à vendredi inclus pour libérer les lieux, a-t-on appris auprès de la préfecture.

Tassement du mouvement, avant une reprise 

La préfète du département a par ailleurs condamné "les dégradations commises par des membres de la Coordination rurale" mercredi soir sur des sites de la Mutualité sociale agricole (MSA), visée par des dépôts sauvages, et de la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), ciblée par un incendie "volontairement déclenché" dans son enceinte.

Sur Europe1/Cnews, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a redit que les agriculteurs avaient "parfaitement le droit de manifester", mais qu'il y avait "des lignes rouges" à ne pas dépasser: "pas d'enkystement", "pas de blocage".

A l'autre bout de la France, à Strasbourg, des membres de la CR se sont installés dans le centre avec une dizaine de tracteurs pour y distribuer 600 kilos de pommes aux passants.

"Nous, on propose un pacte avec le consommateur, c'est-à-dire lui fournir une alimentation de qualité en quantité suffisante et en contrepartie, le consommateur nous paye un prix correct", a souligné le président de la CR départementale, Paul Fritsch.

Les autorités constatent une "légère baisse" de la mobilisation à l'échelle du pays par rapport au début de la semaine, quand les syndicats majoritaires FNSEA et JA étaient aussi sur le terrain.

Ce nouvel épisode de manifestations agricoles intervient à quelques semaines d'élections professionnelles. La CR, qui préside aujourd'hui trois chambres d'agriculture, espère à cette occasion briser l'hégémonie de l'alliance FNSEA-JA et ravir "15 à 20 chambres" supplémentaires.

Le président de la FNSEA Arnaud Rousseau a annoncé mercredi que les prochaines manifestations emmenées par ses membres auraient lieu la semaine prochaine, "mardi, mercredi et jeudi", "pour dénoncer les entraves à l'agriculture".

FNSEA et JA avaient prévenu qu'ils se mobiliseraient jusqu'à la mi-décembre contre l'accord le Mercosur, contre les normes selon eux excessives et pour un meilleur revenu.

Troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne organise aussi des actions ponctuelles, contre les traités de libre-échange ou les installations énergétiques sur les terres agricoles.


Les députés approuvent en commission l'abrogation de la réforme des retraites

L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
L'ancien Premier ministre français Elisabeth Borne arrive pour son audition devant une mission d'information du Sénat français sur la dégradation des finances publiques de la France depuis 2023 au Sénat français à Paris le 15 novembre 2024. (Photo / AFP)
Short Url
  • La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.
  • La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation.

PARIS : La gauche a remporté mercredi une première victoire dans son offensive pour abroger la très décriée réforme des retraites : sa proposition de ramener l'âge de départ de 64 à 62 ans a été adoptée en commission des Affaires sociales, avant son arrivée dans l'hémicycle le 28 novembre.

Le texte, présenté par le groupe LFI dans le cadre de sa niche parlementaire, a été approuvé par 35 voix (celles de la gauche et du Rassemblement national), contre 16 (venues des rangs du centre et de la droite).

La réforme, adoptée en 2023 sous le gouvernement d'Élisabeth Borne, était « injuste démocratiquement et socialement, et inefficace économiquement », a plaidé le rapporteur (LFI) du texte, Ugo Bernalicis.

Le Rassemblement national, qui avait présenté une proposition similaire fin octobre, mais que la gauche n'avait pas soutenue, a voté pour le texte de La France insoumise. « C'est le même que le nôtre et nous, nous ne sommes pas sectaires », a argumenté le député Thomas Ménagé.

La proposition de loi approuvée mercredi touche non seulement à l'âge de départ (c'est-à-dire à la réforme Borne), mais également à la durée de cotisation : celle-ci est ramenée de 43 à 42 annuités, ce qui revient à abroger également la réforme portée en 2013 par la ministre socialiste Marisol Touraine pendant le quinquennat de François Hollande.

Un amendement, présenté par les centristes du groupe Liot pour préserver la réforme Touraine, a été rejeté. Les socialistes, qui auraient préféré conserver cette réforme de 2013, ont décidé d'approuver le texte global malgré tout.

La gauche affirme qu'elle est en mesure de porter sa proposition d'abrogation jusqu'au bout : après l'examen du texte dans l'hémicycle la semaine prochaine, elle a déjà prévu de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat le 23 janvier, à l'occasion d'une niche communiste, puis en deuxième lecture à l'Assemblée nationale le 6 février, cette fois dans un créneau dédié aux écologistes.

Les représentants de la coalition gouvernementale ont mis en garde contre un texte « pas sérieux » ou « irresponsable ».

« Il faut être honnête vis-à-vis des Français : si cette réforme des retraites est abrogée, certes ils pourront partir à 60 ans, mais avec une retraite beaucoup plus basse », a ainsi argumenté la députée macroniste Stéphanie Rist.


Censure du gouvernement : Le Pen fait monter la pression avant sa rencontre avec Barnier

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. (Photo RTL)
Short Url
  • "Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure"
  • Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget

PARIS: Marine Le Pen fait monter la pression sur Michel Barnier, avant leur rencontre lundi à Matignon : elle assure que son parti n'hésitera pas à censurer le gouvernement à la veille de Noël si "le pouvoir d'achat des Français est amputé" dans le projet de budget 2025.

"Nous n'accepterons pas que le pouvoir d'achat des Français soit encore amputé. C'est une ligne rouge. Si cette ligne rouge est dépassée, nous voterons la censure", a affirmé mercredi la cheffe de file des députés du Rassemblement national sur RTL.

Le vote de cette motion de censure interviendrait alors dans la deuxième quinzaine de décembre lorsque le gouvernement aura recours à l'article 49.3 de la Constitution, comme c'est probable faute de majorité, pour faire adopter sans vote le budget de l'Etat.

Si le RN et la gauche votaient conjointement cette motion alors la coalition Barnier, fragile attelage entre LR et la macronie, serait renversée et le projet de budget rejeté.

Si elle n'a pas détaillé la liste précise de ses revendications, Marine Le Pen a en particulier jugé "inadmissible" la hausse envisagée par le gouvernement pour dégager trois milliards d'euros des taxes sur l'électricité, une mesure toutefois supprimée par l'Assemblée nationale en première lecture.

"Taper sur les retraités, c'est inadmissible", a-t-elle aussi affirmé, insatisfaite du compromis annoncé par le LR Laurent Wauquiez. Celui-ci prévoit d'augmenter les retraites de la moitié de l'inflation au 1er janvier, puis d'une deuxième moitié au 1er juillet pour les seules pensions sous le Smic.

Depuis quelques jours, les responsables du Rassemblement national brandissent plus fortement la menace de la censure tout en assurant que cela n'a rien à avoir avec les réquisitions du parquet dans l'affaire des assistants parlementaires au Parlement européen. Si elles étaient suivies, celles-ci pourraient empêcher Mme Le Pen de participer à une quatrième élection présidentielle.

Face à cette menace de censure, Michel Barnier va recevoir en début de semaine prochaine, un par un, l'ensemble des présidents de groupes parlementaires, à commencer par Marine Le Pen dès lundi matin.

Ce premier tête à tête, depuis son entrée à Matignon, suffira-t-il ?

"Et-ce que M. Barnier va respecter l’engagement qu’il a pris, que les groupes d’opposition puissent reconnaître dans son budget des éléments qui leur paraissent essentiels ?", s'est interrogée la cheffe de file des députés RN.

Les demandes de notre parti étaient "de ne pas alourdir la fiscalité sur les particuliers, de ne pas alourdir sur les entrepreneurs, de ne pas faire payer les retraités, de faire des économies structurelles sur les dépenses de fonctionnement de l'Etat", a-t-elle récapitulé. "Or nous n'avons pas été entendus, nous n'avons même pas été écoutés".

Poker menteur 

Alors qu'il a déjà lâché du lest sur les économies demandées aux collectivités locales, aux retraités et aux entreprises face aux critiques de sa propre majorité, le Premier ministre, confronté à la colère sociale des agriculteurs, des fonctionnaires ou des cheminots, a très peu de marge de manoeuvres.

"L'objectif est d'arriver à un équilibre entre les ambitions des groupes parlementaires et les impératifs de rigueur" budgétaire, répète Matignon, alors que le déficit public est attendu à 6,1% du PIB fin 2024 contre 4,4% prévu initialement.

L'exécutif agite, à destination du RN mais aussi des socialistes, la menace du chaos.

"Celui ou celle qui renversera le gouvernement privera le pays d'un budget et le précipitera dans le désordre et la chienlit", a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, sur CNews.

"Le pire pour le pouvoir d'achat des Français, ce serait une crise financière", a alerté de son côté sur LCI sa collègue Astrid Panosyan-Bouvet (Travail).

Une question demeure: le RN bluffe-t-il ?

"Si le gouvernement tombe, il faudra attendre juin pour qu'il y ait des élections législatives parce qu'il ne peut pas y avoir de dissolution pour le moment!", a semblé nuancer le porte-parole du RN Julien Audoul.

Dans tous les cas, ce jeu de poker menteur risque de durer jusque la veille de Noël, lorsque l'Assemblée nationale aura à se prononcer définitivement sur le projet de budget 2025 de l'Etat.

Le RN n'entend, en effet, pas déposer ou voter de motion de censure sur les deux autres textes (fin de gestion de 2024 et projet de budget de la Sécurité sociale) qui pourraient être adoptés par 49.3 avant.