TUNIS: Le mois de juin a été fatal à ce petit pays du Maghreb qu’est la Tunisie: le nombre de cas et de décès a été multiplié par quatre en autant de semaines, et la situation ne devrait pas à s’améliorer avant la fin juillet.
Annoncée depuis quelques mois déjà par les spécialistes, la catastrophe sanitaire est bel et bien en marche. Bénigne dans sa première vague, en décembre 2020, la pandémie de Covid-19 fait des ravages aujourd’hui, avec une aggravation notable au cours du mois de juin dernier.
En quatre semaines, tous les indicateurs se sont détériorés. D’abord, le nombre de nouveaux cas a progressé de 400% entre le 9 juin (2 373) et le 9 juillet (9 286) pour dépasser la barre des 490 000. Principalement, explique un spécialiste, parce que le nombre de tests réalisés a fortement augmenté. Par ailleurs, le nombre de cas actifs est passé de 288 seulement en août 2020 à 86 760 aujourd’hui. Enfin, le nombre de décès a pratiquement été multiplié par quatre, passant de 52 à 194 par jour, soit une moyenne de 140 sur les sept derniers jours et un total de 16 244.
Et ce n’est pas fini. En effet, le pic n’a sans doute pas encore été atteint. D’après les spécialistes, il ne le sera pas avant la fin du mois de juillet. Le nombre total de décès pourrait alors s’établir à 20 000 – sauf, bien sûr, si le nombre de morts maintient son rythme de progression quotidienne actuel.
Cette dégradation catastrophique de la situation sanitaire a récemment fait l’objet d’une polémique entre les différents responsables du secteur de la santé. Jeudi 8 juillet, le Dr Nissaf ben Alaya, porte-parole du ministère de la Santé, a affirmé sur la chaîne de radio Mosaïque FM:«Le système sanitaire s’est effondré.»
Cette déclaration a fait le tour du monde, mais le ministère de la Santé l’a démentie dès le lendemain à travers un communiqué. Un confrère de Dr Alaya rappelle quant à lui qu’«on parle d’effondrement lorsque les hôpitaux ne peuvent plus soigner les malades de la Covid-19 ni les autres; or ce n’est pas encore le cas».
D’après un témoin qui souhaite garder l’anonymat, les hôpitaux manquent avant tout d’équipement et de ressources humaines, et notamment de médecins, de techniciens et d’infirmiers de réanimation. Cela n’a rien d’étonnant, car, parmi les quelque 9 000 compétences qui ont quitté la Tunisie depuis 2011, on dénombrait en 2018 1 500 médecins, parmi lesquels près de 500 spécialistes de la réanimation, c’est-à-dire plus que ceux restés en Tunisie: ils seraient 410 d’après Habib Ghedira, membre du comité scientifique qui lutte contre le coronavirus, et seulement 160 dans les hôpitaux publics.
Selon un médecin qui a fait partie de ce comité, il en faudrait une cinquantaine de plus, ainsi que quatre cents infirmiers, pour que la situation se décante un peu.