La dramaturge Sara Shaarawi parle de son «drame sur la vengeance» intitulé «Niqabi Ninja»

La pièce « Niqabi Ninja » est née d'un monologue que Shaarawi a composé en 2013, lorsqu'on lui a demandé d'écrire une pièce sur les femmes au cours de la révolution égyptienne de 2011 (Photo, fournie).
La pièce « Niqabi Ninja » est née d'un monologue que Shaarawi a composé en 2013, lorsqu'on lui a demandé d'écrire une pièce sur les femmes au cours de la révolution égyptienne de 2011 (Photo, fournie).
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Publié le Dimanche 11 juillet 2021

La dramaturge Sara Shaarawi parle de son «drame sur la vengeance» intitulé «Niqabi Ninja»

  • Cette fantaisie relate l'histoire d'une femme super-héros ; elle a été écrite en réponse aux agressions sexuelles commises par la foule au Caire
  • «Niqabi Ninja» raconte l'histoire de Hana, une illustratrice qui réalise une bande dessinée relatant toutes les expériences terrifiantes qu'elle a vécues

AMSTERDAM: « Il ne faut pas s'attendre à une histoire réjouissante ». Par ses mots la scénariste Sara Shaarawi, née au Caire et basée en Écosse, revient sur « Niqabi Ninja », sa pièce à deux personnages présentée à Londres dans le cadre du festival Shubbak - une célébration des arts et de la culture contemporains du monde arabe – et présentée par la suite dans cinq villes d'Écosse. « Il s'agit d'un drame sur la vengeance ».

La pièce « Niqabi Ninja » est née d'un monologue que Shaarawi a composé en 2013, lorsqu'on lui a demandé d'écrire une pièce sur les femmes au cours de la révolution égyptienne de 2011. Mme Shaarawi raconte qu'elle s'est d'abord montrée « méfiante, surtout parce que je ne faisais pas partie de ces femmes ». C'est vrai qu'elle était au Caire au moment de la révolution, mais « je n'étais pas en première ligne ».

« Je n’exploite pas le traumatisme des gens pour culpabiliser l’audience - ce genre de théâtre ne m'intéresse pas du tout », souligne-t-elle. « Je ne voulais pas non plus incarner le regard que porte l'Occident sur les personnes issues du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord - ces rôles très étriqués de réfugié, de révolté ou de terroriste - je ne voulais pas me couler dans cette catégorie ».

La scénariste de « Niqabi Ninja », Sara Shaarawi. (Beth Chalmers)

Cependant, ce sont les agressions sexuelles sur la place Tahrir et ses environs, lors du soulèvement et des manifestations qui ont suivi, qui l'ont incitée à écrire une pièce « sur une jeune femme qui passe en revue tous les événements qui ont marqué sa vie: les regards insistants, les cris, l'humiliation, le rabaissement et la sexualisation. En effet, les agressions sexuelles ont incité cette femme à acheter un niqab (ou voile en français), pour prendre sa revanche ».

Le monologue ayant rencontré un écho favorable, on a encouragé Mme Shaarawi à l'adapter en une pièce d'une heure. C'est à partir de là que la pièce a pris sa forme actuelle.

L'une des planches réalisées par l’artiste Gehan Mounir pour la pièce. (Fourni)

« J'ai écrit le monologue dans un moment de colère », explique Mme Shaarawi.

« Je me suis rendue compte par la suite que ce qui m'intéressait, et ce que je cherchais surtout à faire, c'était de montrer comment nous avons normalisé certains comportements, comme les commentaires que l'on fait sur le corps d'une personne qu'on ne connaît pas... ces comportements jugés inoffensifs parce qu'ils ne vous blessent pas physiquement, ces comportements qui nous ont amenés à dire : ‘Les garçons seront des garçons. Voilà!’. Or, en normalisant tous ces comportements, les agressions sexuelles commises par la foule à Tahrir devinrent  inévitables. Il faut s'attendre à ces agissements lorsque les agresseurs s'en tirent à bon compte et pensent que tout est permis. Voilà ce que la pièce aborde réellement ».

« Niqabi Ninja » raconte l'histoire de Hana, une illustratrice qui réalise une bande dessinée relatant toutes les expériences terrifiantes qu'elle a vécues, lorsque les hommes la transformaient en objet ou la sexualisaient, en particulier dans les espaces publics. Elle discute avec le personnage principal de sa BD, qui n'est rien d'autre que son ombre, son double fantasmatique extrêmement violent, qui la pousse à agir, selon Shaarawi. Ce personnage dit tout ce qu'elle refuse de dire. C'est un super-héros narcissique. C'est une femme obsédée par son apparence, par les armes qu'elle va posséder et par ce qu'elle va faire subir aux hommes - leur fracasser la tête, entre autres. C'est un personnage particulièrement sinistre. Mais au final, ce n'est qu'un fantasme. La pièce porte sur son parcours pour devenir ce super-héros justicier qu'elle a créé dans sa tête. Ainsi, elle finit par se transformer en Ninja Niqabi ».  La scénariste s'arrête là. « Spoiler, désolée ».

La « scène » où se déroule la pièce « Niqabi Ninja » n'est autre que les rues de la ville. Muni d'un lecteur MP3 et d'un casque, le public emprunte un itinéraire établi tout en écoutant la pièce enregistrée. Celle-ci est interprétée par Rebecca Banatvala et Juliana Yazbeck, sur un fond sonore signé par la compositrice et oudiste égyptienne BalQeis. Ce parcours est agrémenté d'illustrations tirées de la bande dessinée de Hana, créée par l'artiste égyptienne Gehan Mounir.

Comme le précise Shaarawi, « Niqabi Ninja » est loin d'être une histoire joyeuse. Cependant, elle recèle une part d'humour, un humour très noir. En outre, Shaarawi tient à préciser qu'il s'agit d'une fantaisie, et non d'une tentative de trouver une solution concrète aux problèmes qu'elle aborde.

Rebecca Banatvala enregistre son rôle dans la pièce « Niqabi Ninja ». (Fourni)

Pourtant, même si la pièce a été écrite en fonction d'un moment très particulier de l'histoire de l'Égypte, il est clair qu'elle a trouvé un écho favorable auprès des femmes non arabes. Contrairement à tous les écrivains, Shaarawi ne se réjouit pas de voir que son œuvre touche une corde sensible auprès de tant de personnes.

« Ce sujet continue de faire débat chaque année, de manière urgente et pertinente. Il ne s'arrête jamais », dit-elle. « À chaque présentation, en Écosse comme à Londres, les femmes viennent me parler pour me remercier. Peu importe d'où elles viennent, elles s'y identifient. C'est un problème universel. Les thèmes qu'il aborde sont d'actualité, et c’est vraiment triste à mon avis ».

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com.


Vers l’infini et au‑delà – Goldorak, 50 ans d’inspiration

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  •  50 ans après sa création, la série animée Goldorak continue de marquer l’imaginaire arabe
  • Arab News Japan s’entretient avec son créateur Go Nagai, des fans du Moyen-Orient, et revient sur l’histoire du robot OVNI chargé de protéger notre planète

​​​​​​LONDON: Peu d’importations culturelles ont franchi les frontières de manière aussi inattendue — et aussi puissante — que Goldorak, le robot géant japonais qui, il y a un demi-siècle, est devenu un héros de l’enfance à travers le monde arabe, et plus particulièrement en Arabie saoudite.

Créé au Japon au milieu des années 1970 par le mangaka Go Nagai, Goldorak s’inscrivait dans la tradition des « mecha », ces récits de robots géants. Le genre, façonné par l’expérience japonaise de la Seconde Guerre mondiale, explorait les thèmes de l’invasion, de la résistance et de la perte à travers le prisme de la science-fiction.

Si la série a rencontré un succès modéré au Japon, c’est à des milliers de kilomètres de là, au Moyen-Orient, que son véritable héritage s’est construit.

L’anime « UFO Robot Goldorak » est arrivé à la télévision dans la région en 1979, doublé en arabe et diffusé pour la première fois au Liban, en pleine guerre civile. L’histoire du courageux Actarus, prince exilé dont la planète a été détruite par des envahisseurs extraterrestres, a profondément résonné chez les enfants grandissant dans un contexte de conflits régionaux et d’occupation par Israël.

Ses thèmes — la défense de la patrie, la résistance à l’agression et la protection des innocents — faisaient douloureusement écho aux réalités de la région, transformant la série d’un simple divertissement en un véritable refuge émotionnel.

Une grande partie de l’impact de la série tenait à la réussite de son arabisation. Le doublage arabe puissant et le jeu vocal chargé d’émotion, notamment celui de l’acteur libanais Jihad El-Atrash dans le rôle d’Actarus, ont conféré à la série une gravité morale inégalée par les autres dessins animés de l'époque.

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Au début des années 1980, Goldorak s'était répandu à travers le Moyen-Orient, inspirant des communautés de fans en Arabie saoudite, au Koweït, en Irak et au-delà. (Fourni)

Le générique de la série, interprété par Sami Clark, est devenu un hymne que le chanteur libanais a continué à interpréter lors de concerts et de festivals jusqu’à son décès en 2022.

Au début des années 1980, Goldorak s’était répandu à travers le Moyen-Orient, inspirant des communautés de fans en Arabie saoudite, au Koweït, en Irak et au-delà. Pour beaucoup, il s’agissait non seulement d’un premier contact avec les anime japonais, mais aussi d’une source d’enseignements sur des valeurs telles que la justice et l’honneur.

L’influence de Goldorak dans la région a été telle qu’il a fait l’objet de recherches universitaires, qui ont non seulement mis en lumière la manière dont le sort des personnages résonnait auprès du public du Moyen-Orient, mais ont aussi relié sa popularité aux souvenirs générationnels de l’exil, en particulier à la Nakba palestinienne.

Un demi-siècle plus tard, Goldorak demeure culturellement vivant et pertinent dans la région. En Arabie saoudite, qui avait pleinement adopté la version originale de la série, Manga Productions initie aujourd’hui une nouvelle génération de fans à une version modernisée du personnage, à travers un jeu vidéo, The Feast of The Wolves, disponible en arabe et en huit autres langues sur des plateformes telles que PlayStation, Xbox et Nintendo Switch, ainsi qu’une nouvelle série animée en langue arabe, «  Goldorak U », diffusée l’an dernier.

Cinquante ans après les débuts de la série, « Goldorak » est de retour — même si, pour toute une génération de fans de la série originale, dont les étagères regorgent encore de produits dérivés et de souvenirs, il n’est en réalité jamais vraiment parti.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com
 


En ce Noël, unissons-nous pour souhaiter la paix dans toute la région

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  • Noël au Moyen-Orient incarne un message puissant d’harmonie interconfessionnelle, de résilience et de respect mutuel
  • De Bethléem à Riyad, les célébrations deviennent un acte d’espoir partagé et un appel sincère à la paix régionale

RIYAD : Fidèle à une tradition initiée en décembre 2022, Arab News souhaite un joyeux Noël à ses lecteurs chrétiens et à tous ceux qui célèbrent cette fête. Cette édition spéciale met cette année en lumière Noël à travers le Moyen-Orient, en soulignant l’harmonie interconfessionnelle, la résilience et l’intégration culturelle. Le tout est porté par un message particulier, sincère et plein d’espoir : voir la paix se diffuser dans toute la région en 2026.

En tête de cette couverture figure une tribune exclusive du grand érudit Dr Mohammad bin Abdulkarim Al-Issa, secrétaire général de la Ligue islamique mondiale et président de l’Organisation des savants musulmans. Son message rappelle un principe essentiel : « Il n’existe aucun texte de la charia interdisant de féliciter les non-musulmans à l’occasion de leurs fêtes religieuses, y compris Noël. » Il présente cette bienveillance non comme un affaiblissement de la foi, mais comme l’expression de sa force — une force qui affirme la dignité humaine et favorise l’harmonie sociale si nécessaire aujourd’hui.

Ce même esprit de solidarité face à la souffrance résonne depuis Bethléem, où le pasteur palestinien, le révérend Dr Munther Isaac, explique que le christianisme palestinien est indissociable de l’identité nationale. En réponse à la dévastation de Gaza, sa communauté a érigé une crèche faite de gravats, l’enfant Jésus enveloppé dans un keffieh. « C’était un message de foi », affirme-t-il. « Le Christ est solidaire de ceux qui souffrent… parce qu’il est né dans la souffrance. »

De cette profondeur naissent aussi des récits de renouveau. À Damas, les illuminations festives réapparaissent alors que des Syriens de toutes confessions s’accrochent à une paix fragile. Au Liban, les célébrations percent la morosité politique par des instants de joie. En Jordanie, les espaces publics s’illuminent de sapins et des hymnes de Noël de Fairouz, tandis qu’aux Émirats arabes unis, la diaspora multiculturelle s’anime dans une effervescence festive et unitaire.

La profondeur historique et intellectuelle de l’héritage chrétien de la région est mise en lumière par le Dr Abdellatif El-Menawy, qui rappelle le rôle indispensable de l’Égypte dans la transformation du christianisme, passé d’un message spirituel à une véritable civilisation. Cet héritage ancien trouve aujourd’hui une expression moderne et dynamique.

En Arabie saoudite, la période des fêtes est reconnue à travers une hospitalité innovante, où des chefs réinventent les menus de Noël en y intégrant des saveurs locales et une identité culinaire créative.

Cette édition spéciale offre bien plus qu’une simple atmosphère festive. Elle dépeint un Moyen-Orient où les différentes confessions approfondissent leurs propres racines en respectant celles des autres, où les célébrations sont tissées de résistance historique, et où le message de Noël — espoir, paix et humanité partagée — résonne avec confiance et optimisme.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le prince héritier parraine le lancement d’un centre de calligraphie arabe à Médine

Le ministre de la Culture, le prince Badr ben Abdullah ben Farhane, prend la parole lors de l'inauguration du Centre mondial pour la calligraphie arabe Prince Mohammed ben Salmane. (Fourni)
Le ministre de la Culture, le prince Badr ben Abdullah ben Farhane, prend la parole lors de l'inauguration du Centre mondial pour la calligraphie arabe Prince Mohammed ben Salmane. (Fourni)
Un nouveau centre dédié à la calligraphie arabe, placé sous le patronage du prince héritier Mohammed ben Salmane, a officiellement ouvert ses portes lundi à Médine. (Fourni)
Un nouveau centre dédié à la calligraphie arabe, placé sous le patronage du prince héritier Mohammed ben Salmane, a officiellement ouvert ses portes lundi à Médine. (Fourni)
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  • Le Centre mondial Prince Mohammed ben Salmane pour la calligraphie arabe a été inauguré par le prince Salman ben Sultan ben Abdulaziz

RIYAD : Un nouveau centre dédié à la calligraphie arabe, sous le patronage du prince héritier Mohammed ben Salmane, a officiellement ouvert ses portes à Médine lundi.

Le Centre mondial Prince Mohammed ben Salmane pour la calligraphie arabe a été inauguré par le prince Salman ben Sultan ben Abdulaziz, gouverneur de la région de Médine.

Il était accompagné du ministre de la Culture, le prince Badr ben Abdallah ben Farhane, qui a visité les espaces d’exposition du nouveau centre et assisté à des présentations sur la programmation culturelle et les réalisations du centre.

Ils ont également découvert des collections mettant en valeur l’importance artistique et historique de la calligraphie arabe.

Lors de l’inauguration, le prince Badr a déclaré : « Depuis cette terre d’érudition et de savoir, nous lançons fièrement une plateforme mondiale dédiée à la calligraphie arabe, un patrimoine culturel inestimable. »

Il a ajouté que le soutien « généreux et illimité » du prince héritier envers le secteur culturel avait rendu ce projet possible.

Le ministre a précisé que le centre montrait au monde l’héritage de la calligraphie arabe tout en soulignant l’engagement de l’Arabie saoudite à préserver son identité et son patrimoine culturel.

Selon le prince Badr, le centre représente une vision ambitieuse visant à élever la calligraphie arabe comme outil universel de communication et élément central de l’héritage, de l’art, de l’architecture et du design arabes.

Le centre a également pour objectif de renforcer l’identité culturelle du Royaume et sa présence internationale, en ciblant calligraphes, talents émergents, artistes visuels, chercheurs en arts islamiques, institutions éducatives et culturelles, ainsi que les passionnés d’art et de patrimoine à travers le monde.

Il proposera des programmes spécialisés, incluant services de recherche et d’archivage, enseignement de la calligraphie, bourses académiques, musée permanent, expositions itinérantes, association internationale de calligraphie et incubateur soutenant les entreprises liées à la calligraphie.

D’autres initiatives incluent des programmes de résidence d’artistes, des ateliers dirigés par des experts, l’élaboration de programmes pédagogiques standardisés, ainsi que des partenariats éducatifs internationaux visant à la conservation du patrimoine et à la promotion mondiale de cet art ancestral.

L’établissement du centre à Médine revêt une signification particulière, compte tenu du rôle historique de la ville comme berceau de la calligraphie arabe et de son association avec la transcription du Coran et la préservation du savoir islamique.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com