CASABLANCA. Née à Tanger en 1988, Ghizlane Agzenaï est une plasticienne et street artist, reconnue pour la création de «totems» colorés et monumentaux. Elle vit et travaille à Casablanca, parcourt les quatre coins du monde afin d’y instiller son art aux tonalités vives. Précises, incarnées, ses pièces aux contours géométriques tracent de nouvelles perspectives aux lignes de l’abstraction. Artiste autodidacte, ces «totems» inspirés d’un esprit bienveillant se déclinent en peintures, collages papier et puzzles, créés selon un processus d’assemblage unique: peints à l’aérosol, découpés au laser et poncés avec soin, ils sont façonnés par un ébéniste. Ses œuvres majeures oscillent entre dessins muraux et tableaux qui fleurissent l’espace de multiples expositions et festivals d’art urbain notamment à Berlin, à Barcelone, à Paris, à Casablanca ou encore à Rabat. Entre 2018 et 2019, elle habille les murs de Vigo Ciudad de Color, l’US Barcelona, le Mural Harbor en Autriche, le mur d’Oberkampf à Paris. Lors du festival Jidar, ses formes géométriques colorées se sont déployées sur une façade du musée Mohammed VI d’art moderne et contemporain à Rabat.
Comment êtes-vous devenue plasticienne? D’ailleurs, comment vous définissez-vous?
Je me considère plutôt comme une artiste urbaine et contemporaine. Ma passion pour l’art urbain m’a naturellement menée à investir les rues et ensuite les travaux en galerie ont peu à peu complété mes interventions urbaines. Aujourd’hui, j’alterne entre ces deux pratiques qui me nourrissent l’une et l’autre.
Parlez-nous de votre inclination pour la couleur…
La couleur a toujours été un élément central dans mon travail. Elle me permet d’insuffler du dynamisme à mon art. Je ne me limite jamais à une seule couleur dans mes totems. De plus, j’aime jouer avec une large palette de couleurs pour chaque œuvre dans le but de créer de l’harmonie et de transmettre de l’énergie positive.
Quel est le processus de création de vos œuvres appelées «totem»?
J’appelle toutes mes œuvres «totem» car l’une des définitions du mot «totem» est un objet qui représente un esprit bienveillant. Je trouvais que le mot «totem» était en parfaite adéquation avec ma vision et ce que je voulais exprimer à travers mon art, dès lors, je l’ai adopté pour donner encore plus de poids à mon message. Un totem peut en effet naître sous la forme d’un dessin réalisé à la main ou d’un collage en papier. Ensuite, je transfère l’un ou l’autre sur mon ordinateur afin de pouvoir lui définir une palette de couleurs et jouer avec les formes. Une fois que le résultat me plaît, je choisis le support du totem; bois, toile, mur ou Plexiglas, puis le processus de production commence.
Vos œuvres ont-elles des titres? Si oui, peut-on parler d’un indice aidant à deviner le caractère de l’œuvre?
Oui. La majorité de mes œuvres ont des titres. Leur choix évolue au fil du temps: au début, il s’agissait de numéros puis je me suis tournée vers des noms d’étoiles, de planètes du fait de mon attrait pour la science-fiction. Toutefois, il peut aussi s’agir de noms de villes lorsqu’un totem a été créé dans un endroit particulier. En revanche, les titres ne sont pas forcément révélateurs du caractère de l’œuvre.
Vous incarnez une artiste inscrite dans un entre-deux, votre art est présenté à la 193 Gallery à Paris et à la galerie 38 à Casablanca, comment est née votre collaboration avec la 193 Gallery?
La 193 Gallery m’a approchée au début de l’année 2021 afin de me proposer une exposition collective, Colors of Abstraction 2. J’ai été invitée par la commissaire d’exposition, Fouzia Marouf, en charge de la curation et j’ai d’emblée trouvé la vision de la galerie très intéressante. On partage cette curiosité et cette ouverture sur le monde; après quelques échanges, j’ai accepté de faire partie de l’exposition qui s’est déroulée au mois de mars avec le sculpteur et designer ivoirien, Jean Servais Somian et la plasticienne, Valentina Canseco.
Quels peintres et forme d’art vous inspirent?
Je suis très inspirée par des artistes comme Frank Stella et Victor Vasarely, pour leur esthétique ou encore Felipe Pantone, pour sa vision et son énergie. Un artiste comme Christo m’inspire aussi beaucoup par ses installations monumentales et poétiques. Je trouve aussi mon inspiration dans le futurisme, dans le mouvement du Bauhaus et dans l’architecture brutaliste.