Hengameh Golestan
Untitled (1979) ou sans titre
Cette photo provient de la série de photos intitulée « Witness '79 » et réalisées par la photographe autodidacte Hengameh Golestan. Cette dernière a documenté une manifestation durant laquelle plus de 100 000 femmes ont défilé dans les rues de Téhéran pour protester contre la décision qui venait d'être rendue à la suite de la révolution et qui exigeait aux femmes de porter le hijab. « Il régnait une atmosphère d'anticipation et de frénésie, accompagnée d'un soupçon de crainte », dit-elle en évoquant cette manifestation. « A cette époque, nous étions en train de façonner notre avenir par les actions plutôt que par les mots, et ce sentiment était extraordinaire ». Bien que Golestan ait développé le film à cette époque, ce n'est qu'en 2015 que les photos ont été tirées.
Hayv Kahraman
« Honor Killing » ou Le Crime d'honneur
L'artiste américaine d'origine kurde - qui a fui l'Irak en compagnie de sa mère et de sa sœur à l'issue de la première guerre du Golfe - incorpore à son travail des influences internationales allant de l'art européen de la Renaissance aux gravures sur bois japonaises en passant par les techniques du Moyen-Orient. « Par son vocabulaire particulier, elle évoque sa maison à Bagdad, l'exil et la guerre, ainsi que des thèmes plus vastes touchant les femmes », peut-on lire dans les notes du musée. En 2017, Hayv Kahraman a confié au magazine Glass : « C'est le collectif qui m'intéresse, pas le moi. Il ne s'agit pas uniquement de mon histoire personnelle ». Cette œuvre réalisée en 2006 - qui renferme des touches de calligraphie - montre des femmes portant le hijab pendues à un arbre. Elle « aborde un sujet qui continue de toucher les femmes [...] à travers le monde », souligne le musée. « Elle fait allusion aux femmes abattues sous prétexte de déshonorer leur famille en transgressant les règles de la société qui régissent les relations entre les sexes ».
Monir Shahroudy Farmanfarmaian
Untitled (2005) ou Sans titre
Monir Shahroudy Farmanfarmaian doit sa notoriété internationale à ses œuvres minimalistes et géométriques (Andy Warhol, son ami pendant les années d'études à la Parsons School of Design de New York, aurait gardé sur son bureau l'une de ses célèbres boules à facettes en miroir). Connue principalement pour ses œuvres en miroir, elle a également conçu des dessins minimalistes et abstraits tels que ce dessin, dont « la figure centrale en dodécagone est soulignée par des cubes en miroir, avec plusieurs motifs triangulaires en grille qui partent du point central », selon les notes du musée.
Khalil Joreije and Joanna Hadjithomas
Face ou Les «Visages»
Le travail des artistes libanais du multimédia porte en grande partie sur la guerre civile de 15 ans, qui continue de marquer leur pays. Le projet dont est tirée cette œuvre datant de 2009 est axé sur les victimes de cette violence ; les « martyrs » dont les photos encadrées ornent les rues. Le musée précise que les artistes ont parcouru le Liban à la recherche d'affiches de « martyrs de toutes confessions et de toutes tendances politiques ». Ils ont surtout choisi les affiches qui étaient installées depuis longtemps et qui s'étaient dégradées, les traits disparaissant peu à peu, ne laissant que le contour du visage, comme une ombre esquissée et peu reconnaissable. ... Ils travaillaient sur les photos, renforçant la forme de l'œil ou de la bouche avec du graphite, comme s'ils cherchaient à faire revenir les personnages des ténèbres de la mort ».
Rafa Nasiri
A Library Set On Fire (Une bibliothèque en feu)
Cette sérigraphie de 2008, appartenant à une série de six œuvres, a été réalisée par le célèbre artiste irakien pour marquer l'incendie de la Bibliothèque nationale d'Irak, l’un d’une série de sinistres qui ont frappé son pays lors de la guerre d'Irak en 2003. Chaque sérigraphie comprend un extrait du poème d'Al-Moutanabbi « En entendant, en Égypte, que sa mort avait été annoncée à Saif Al-Dawla à Alep ». Le poème comporte les vers suivants : « Malheureux je vis, sans ami, sans abri/Solitaire, dépourvu de toute joie, de toute consolation ». Le musée précise que les mots sont « insérés dans une composition abstraite sombre, dont les couleurs rappellent les flammes orange et rouges d'un incendie ». La note poursuit : « Comme l'a souligné l'écrivaine irakienne May Muzaffar, ‘L'incendie qui a consumé les livres et les manuscrits va de pair avec la mise à feu du mystique al-Hallaj, corps humain, et annonce la mort du livre en tant que chose/être humain, mais aussi la mort de la civilisation et de l'humanité’ ».
Sulafa Hijazi
Untitled (2012) ou Sans titre
C'est en 2011 que l'artiste syrienne a inauguré sa série « Ongoing » - dont est tirée cette œuvre. Au départ, elle publiait ses œuvres sur les médias sociaux, qui, comme le souligne le musée, « ont pris une importance croissante en tant que plateforme par laquelle les artistes syriens pouvaient communiquer leurs œuvres ». Dans son ouvrage de 2012, intitulé « Culture in Defiance : Continuing Traditions of Satire, Art and the Struggle for Freedom in Syria » (ou Une culture au mépris : Les traditions persistantes de satire, d'art et de lutte pour la liberté en Syrie), Malu Halasa cite Sulafa Hijazi : « Avant de quitter le pays en 2012, les gens cherchaient encore à réaliser quelque chose de positif. Nous espérions vivement pouvoir changer la donne dans notre pays par des moyens pacifiques. Notre société offrait encore la possibilité de le faire. Ensuite, la violence a pris le dessus ; (...) (aujourd'hui) les armes étouffent les voix des militants pacifiques».
Taysir Batniji
Untitled (2016) ou Sans titre
Le déplacement et l'exil prédominent dans les œuvres de Taysir Batniji, où la valise apparaît comme un symbole récurrent. « Dans cette aquarelle, la figure masculine en tailleur, éclipsée par les dimensions de la valise, peut être vue comme étant l'insertion de l'artiste lui-même », précisent les notes du musée qui soulignent que l'œuvre de l'artiste palestinien explore « la notion de vivre entre deux mondes - le monde dans lequel il vit, à savoir la France, et son pays, Gaza, qu'il n'a pas visité depuis 2012 ».
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com.