ALEXANDRIE: Un tribunal contrôlé par les Houthis à Sanaa a ouvert le procès d'une mannequin yéménite qui a été enlevée par la milice soutenue par l'Iran.
Entesar Al-Hammadi a été arrêtée par les Houthis le 20 février avec deux de ses collègues. Leur capture et leur emprisonnement ont déclenché une condamnation locale et internationale.
Le militant pour les droits de l’homme Abdel Wahab Qatran précise que le tribunal a refusé de fournir à son avocat les documents relatifs au dossier, et notamment les charges retenues contre elle.
Son avocat, Khaled Mohammed Al-Kamal, a refusé les demandes d'Arab News de commenter l’affaire, rappelant que le tribunal interdit la médiatisation du procès.
Les Houthis n'ont pas officiellement commenté l'affaire ou les accusations, mais des médias affiliés aux miliciens rapportent qu'elle a été détenue en raison d'informations sur son implication dans un réseau de drogue et de prostitution.
Des groupes de défense des droits de l’homme locaux et internationaux affirment que les Houthis ont forcé Al-Hammadi à faire des aveux, et que l'enlèvement fait partie d'une répression des Houthis contre les voix libérales qui contestent leurs opinions radicales.
Al-Hammadi se vantait de son rêve de devenir une mannequin internationale, et avait publié des images d'elle en tenue traditionnelle yéménite.
Furieux face à l'intense couverture médiatique de l'enlèvement, les Houthis ont démis de ses fonctions un procureur qui avait ordonné la libération d'Al-Hammadi après l'avoir interrogée, ont placé la mannequin en isolement cellulaire et l'ont agressée verbalement et physiquement.
Ils ont également intensifié l'intimidation et le harcèlement des militants locaux, des avocats et des juges qui ont demandé la libération des femmes.
La semaine dernière, les Houthis ont licencié Al-Kamal de son poste au Secrétariat de la capitale, un complexe abritant des bureaux gouvernementaux, où il travaille depuis 20 ans, pour le forcer à abandonner l'affaire. Al-Kamal a déclaré sur les réseaux sociaux que son patron lui avait dit qu'il était licencié, sans lui donner d'explication.
Qatran, ainsi qu’Ahmed Hashed, membre du parlement contrôlé par les Houthis et critique virulent de la milice, ont déclaré avoir reçu des menaces de mort.
Des militants yéménites des droits humains ont accusé les Houthis d'utiliser les instances judiciaires dans les zones sous leur contrôle pour dépénaliser leur enlèvement d'activistes, d'artistes et de critiques du groupe.
Huda Al-Sarari, avocate et directrice de l'Organisation de défense des droits et libertés, suit le dossier d’Entesar Al-Hammadi depuis le début. Elle estime que les mesures des Houthis contre la mannequin montrent qu'elle ne serait pas libérée de sitôt.
«À la lumière de la répression, de la confiscation des droits et libertés, et de l'utilisation de la justice pour légitimer leurs crimes, il est difficile pour les autorités Houthis de libérer leurs victimes avec les mécanismes de pression locaux actuels», déclare-t-elle à Arab News.
Elle a exhorté les organisations internationales de femmes à coopérer avec leurs homologues yéménites pour des campagnes plus agressives afin de garantir la libération des femmes enlevées.
La milice n'a pas respecté les lois internationales relatives aux droits des hommes, a-t-elle ajouté, appelant la communauté internationale à imposer davantage de sanctions aux Houthis qui ont enlevé et maltraité des Yéménites.
«Malheureusement, les retards dans la garantie de la libération de la mannequin ne sont pas dus à la faiblesse de la mobilisation. L'autorité Houthi n'est soumise à aucune pression et reste intransigeante sur ces questions. C’est d’abord et avant tout une milice qui ne respecte pas les accords internationaux, les résolutions ou les mouvements de mobilisation».
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com