À l’heure où des ingénieurs égyptiens arrivent à Gaza pour retirer les décombres et reconstruire ce que la guerre dévastatrice de 11 jours a détruit, il convient de retenir les leçons tirées de cet épisode.
La première leçon nous a fait réaliser que, contre toute attente, les investissements massifs en termes de temps, d'argent et d'efforts visant à améliorer l'image d'Israël, n'ont pas suffi à donner à ce pays l'image favorable qu'il est censé avoir sur la scène internationale. Il jouit, en revanche, du soutien d'amis puissants, notamment des États-Unis.
À mesure que le monde dénonçait Israël dans les rues des grandes villes, mais aussi sur les médias sociaux et dans les discours critiques des dirigeants mondiaux, une évidence s'est imposée - probablement pour la première fois depuis des décennies : Israël a besoin de la paix, non seulement parce que c'est la bonne chose à faire, mais aussi parce que cette paix sert ses intérêts et son image à l'échelle mondiale.
Contrairement aux croyances largement répandues, Israël ne jouit pas d'une image internationale positive. Ce dont il jouit, bien sûr, c'est du soutien d'amis puissants.
Faisal J. Abbas
Ce n'est certes pas une simple intuition venant d'un écrivain qui n'a jamais visité Israël ou les territoires occupés. C'est une réalité que Simon Anholt, conseiller politique chevronné du gouvernement, a évoquée l'année dernière.
En effet, M. Anholt est réputé dans le monde entier pour avoir développé ce qui est devenu l'Indice des Marques Nations (Nation Brand Index). Dans un article paru dans The Jewish Chronicle en octobre 2020, M. Anholt soutenait qu'Israël se positionnait, sans surprise et à travers l'histoire, au plus bas niveau de ce classement. A ses yeux, cette situation tient à l'association du pays avec les conflits. Pour être équitable, il suggère également que la Palestine serait tout aussi mal classée si elle figurait dans cette hiérarchie.
L'article en question, extrêmement franc, portait ironiquement le titre « Pourquoi Israël doit renoncer à la Hasbara ». Ce terme, pour ceux qui l'ignorent, désigne la propagande par euphémisme. Il passe en revue les campagnes de relations publiques que mènent le gouvernement israélien et ses partisans en vue de propager des informations favorables à l'État d'Israël, à son comportement et à ses actions.
En d'autres termes, M. Anholt estime que la propagande ne sert à rien, dans la mesure où les actions restent bien plus éloquentes que les paroles. Transposons maintenant ce principe aux événements qui se sont déroulés dernièrement à Gaza. Ainsi, les responsables israéliens peuvent clamer sur tous les toits que leur pays possède l'armée la plus éthique du monde, mais la réalité n'est autre que ce que les téléspectateurs du monde entier ont vu : des images d'enfants en pleurs expulsés de leurs maisons, ainsi que des images de destruction de bâtiments qui abritent la presse internationale.
À l’envers de la médaille, nous avons ENFIN vu quelques Palestiniens reprendre le récit et exprimer leurs doléances de la façon la plus efficace.
Cependant, je tiens à préciser que lorsque je parle de « Palestiniens », je ne fais en aucun cas référence aux dirigeants palestiniens, de quelque manière que ce soit. Je parle plutôt des jeunes hommes et femmes, éduqués et très éloquents, qui ont réussi à attirer l'attention du monde sur les événements survenus à Gaza et à Cheikh Jarrah, en présentant leurs arguments de manière logique loin des émotions.
Je dirais également que les jeunes Palestiniens que nous avons vus sur les chaînes d’informations internationales ont finalement réussi à rompre avec le stéréotype négatif qui les dépeint depuis si longtemps comme des extrémistes analphabètes et inciviques qui défendent une cause injuste.
Dans la même optique, les médias sociaux ont permis à de nombreux Arabes de découvrir des Israéliens et des Juifs compatissants qui, pour beaucoup d'entre nous, n'existaient même pas. Aux côtés de colons qui croient en l'occupation et se targuent d'opinions légitimant la confiscation de maisons et de terres palestiniennes, nous avons vu des Israéliens hostiles à l'occupation et même d'anciens soldats des FDI se prononcer contre ces pratiques inhumaines.
Toutefois, je crains que les dirigeants palestiniens ne sachent pas tirer, de la récente guerre, les leçons retenues par bon nombre de personnes.
Bien entendu, s'ils avaient adhéré à l'un des accords de paix négociés auparavant par les États-Unis, cette guerre et les événements de Cheikh Jarrah ne se seraient jamais produits. Par ailleurs, ce scénario aurait probablement accordé aux Palestiniens un État reconnu par la communauté internationale et protégé par les lois internationales, ce qui leur aurait permis, le cas échéant, de recourir à la Cour pénale internationale (CPI) si nécessaire.
C'est avec regret que l'on a vu certains dirigeants palestiniens ternir leur image publique et se mettre leurs amis à dos à force d'applaudir les attaques visant des civils israéliens.
Quels avantages leurs relations étroites avec l'Iran ont-elles apporté aux Palestiniens, si ce n'est davantage de division et de destruction ?
Faisal J. Abbas
Par ailleurs, aucune personne raisonnable ne trouverait matière à célébrer le lourd bilan de cette guerre de 11 jours. Mais les dirigeants du Hamas, eux, ont eu l'audace de déclarer la victoire... et de remercier l'Iran ?
Malheureusement, peu de personnes ont appris la leçon évidente : Téhéran agit uniquement pour son propre compte, sans jamais se soucier de la « cause ». C'est la vérité, sinon pour quelle raison les brigades iraniennes dites d'Al-Qods occupent-elles de nombreuses capitales arabes plutôt que de libérer la capitale des Palestiniens ?
Une réalité a émergé des décombres : les véritables amis de la Palestine sont les pays arabes modérés.
Pour mémoire, l'Arabie Saoudite et l'Égypte ont pris la tête des efforts diplomatiques visant à rétablir la stabilité.
Au moment où la reconstruction de Gaza démarre, nous espérons sincèrement que les Palestiniens ne subiront pas une nouvelle guerre ni les mêmes épreuves dans les années à venir.
Cependant, c'est par le leadership que les conflits sont résolus, et non par l'espoir seul. Ainsi, si le leadership fait défaut, les conflits se multiplieront et l'espoir s'estompera.
Faisal J. Abbas est le rédacteur en chef de Arab News.
Twitter: @FaisalJAbbas.
NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.