PARIS: La suppression de l'ENA, l'école des élites qui forme les hauts fonctionnaires en France, a franchi mercredi une étape clé avec la présentation d'une ordonnance en Conseil des ministres.
Le président Emmanuel Macron, lui-même passé par l’Ecole Nationale d'Administration, comme trois autres des six derniers chefs de l’Etat français, avait annoncé le 8 avril cette suppression de l'ENA et la naissance d'un nouvel Institut National du Service Public (INSP).
Le but est de sélectionner des profils moins déterminés socialement, réforme promise après la crise des « gilets jaunes » en 2019.
La réforme a suscité une levée de boucliers de la part des principaux intéressés. Outre la « colère » d'anciens élèves de l'ENA, des diplomates, inspecteurs et magistrats sont sortis de leur réserve pour mettre en garde contre un « danger pour nos institutions » et « pour la démocratie ».
Le texte vise à remplacer l'ordonnance du général de Gaulle de 1945, prise « pour refonder l'État » et « reconstruire un pays meurtri par la guerre », a déclaré, à l'issue du Conseil, la ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Amélie de Montchalin, qui l'a préparé.
75 ans après « nous devons pleinement réactiver cette promesse face aux défis du XXIe siècle », a-t-elle estimé.
L'ordonnance a été validée dans ses grands principes par le Conseil d'Etat. Les futurs hauts fonctionnaires seront tous issus d'un grand corps général d'administrateurs de l'État, créé pour « répondre » à ses besoins, « décloisonner l'administration » et « faciliter les mobilités », selon la ministre. Les « carrières à vie » sont « supprimées ».
Conséquence directe, fixées par l'ordonnance: la « disparition de certains grands corps » dont celui des préfets et des inspections générales, au profit d'une « logique de métiers » qui seront adaptés par décrets, selon la ministre.
L'ordonnance généralise « l'évaluation des cadres supérieurs » et institue une formation initiale et continue dans le futur INSP qui remplacera, à compter du 1er janvier 2022, la prestigieuse ENA.
L'INSP doit former l'ensemble des cadres de l'État avec un « tronc commun » pour 14 écoles du service public. L'ordonnance « sera suivie d'un immense chantier réglementaire » pour un « point d'étape » début juillet. Une consultation des plus de 10 000 cadres de l'Etat a été lancée la semaine dernière pour alimenter ce travail.