LONDRES : Plus de cinquante anciens ministres des Affaires étrangères, premiers ministres et personnalités internationales d’envergure ont publié une lettre ouverte qui condamne les tentatives d’entraver les efforts de la Cour pénale internationale (CPI) pour enquêter sur de potentiels crimes de guerre dans les territoires palestiniens occupés par Israël.
Ceci survient après les mesures prises par l'ancienne administration Trump aux États-Unis pour sanctionner les fonctionnaires du tribunal. Les sanctions ont depuis été inversées par l'administration Biden.
Le Premier ministre britannique Boris Johnson serait également impliqué dans la campagne pour empêcher l’enquête.
Johnson a déclaré le mois dernier qu'une enquête de la CPI ouverte en mars «donne l'impression d'être une attaque subjective et préjudiciable contre un ami et allié du Royaume-Uni».
De son côté, Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu affirme que toute enquête de la CPI n’est que «pur antisémitisme».
La lettre ouverte condamne «la multiplication des attaques contre la CPI, son personnel et les associations de la société civile qui collaborent avec la Cour», et place la campagne de l’administration Trump contre le tribunal dans le cadre d’un effort plus large de la part de groupes pro-israéliens de premier plan.
«Nous avons assisté avec une vive inquiétude au décret émis aux Etats-Unis par l’ancien président Donald Trump et aux sanctions désignées contre le personnel de la Cour et les membres de leurs familles», peut-on lire sur la lettre.
«Nous sommes maintenant profondément préoccupés par la critique publique injustifiée de la Cour concernant son enquête sur les crimes présumés commis dans le territoire palestinien occupé, y compris les accusations infondées d’antisémitisme», poursuit la missive.
«Il est bien établi et reconnu que la responsabilité des violations graves des droits humains commises par toutes les parties à un conflit est essentielle pour parvenir à une paix durable et viable. C’est le cas en Israël-Palestine, tout comme au Soudan, en Libye, en Afghanistan, au Mali, au Bangladesh/Myanmar, en Colombie et en Ukraine», estiment les signataires.
«Les tentatives visant à discréditer la Cour et à entraver son travail ne peuvent être tolérées si nous voulons sérieusement promouvoir et faire respecter la justice dans le monde. Nous comprenons les craintes à l’égard de plaintes et d’enquêtes qui s’appuieraient sur des motivations politiques. Pourtant, nous sommes fermement convaincus que le Statut de Rome garantit les critères de justice les plus élevés et constitue un moyen décisif pour lutter contre l’impunité des crimes les plus graves commis dans le monde. Ne pas intervenir aurait de graves conséquences», prévient le groupe.
L'enquête de la CPI fait aussi l'objet de critiques de la part des principaux pays européens, notamment de l'Allemagne, qui signale que la cour «n'a aucune compétence en raison de l'absence des caractéristiques propres à un État en ce qui concerne les Palestiniens, et qui sont requises par le droit international».
Mais Mogens Lykketoft, ancien ministre danois des Affaires étrangères et ancien président de l'Assemblée générale des Nations Unies, a défendu l'enquête de la CPI. Il déclare au Guardian qu’un «ordre mondial fondé sur des règles repose sur l'idée que les violations à l’encontre du droit international doivent avoir des conséquences».
La CPI «est un outil crucial à cette fin, et il est de notre devoir de protéger son indépendance et de renforcer sa capacité de travail», a-t-il ajouté. «Bien au contraire, remettre en cause de l'indépendance du tribunal c’est remettre en cause la protection d'un ordre mondial fondé sur des règles».
L'enquête de la CPI «peut être un élément important de ce processus, et la communauté internationale doit faire son possible afin de protéger l'indépendance de la Cour dans l’exécution de son mandat», affirme Lykketoft.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com