CARACAS: Recherche d'un hôpital ou d'une clinique, d'une bonbonne d'oxygène, de médicaments? Des applications vénézuéliennes ont surgi pour tenter d'aider gratuitement malades du Covid-19 et leurs proches dans un pays durement touché par la pandémie mais aussi par la crise économique.
Une deuxième vague de coronavirus survenue en mars fait des ravages dans ce pays de 30 millions d'habitants qui a connu huit années consécutives de récession économique. Le pays recense officiellement plus de 220 000 cas et 2 500 décès mais des ONG dénoncent des chiffres sous-estimés alors que les hôpitaux et cliniques sont débordés.
A quatre heures de Caracas, dans l'Etat de Anzoategui (Nord Est), Wilmer Toyo a développé Docti.App, une sorte d'annuaire interactif comprenant les pharmacies avec notamment les gardes, les services d'urgence ou les sites où l'on peut louer des bonbonnes d'oxygène.
"Toute cette information était dispersée", explique ce programmateur de 30 ans, qui a tout centralisé sur son application téléchargeable gratuitement.
"Quand tu as une urgence, ce qu'on veut c'est avoir des réponses rapidement, l'application est géniale parce que tu gagnes du temps", assure Maria Ramos, ingénieure, 30 ans, qui a utilisé "l'app" pour trouver des médicaments et surtout de l'oxygène pour sa mère atteinte par le coronavirus en avril.
Comme les hôpitaux sont débordés, de nombreux patients restent à leur domicile même quand ils ont des difficultés respiratoires. Dans un contexte de pénurie, la recherche de bonbonnes (et leur chargement) est un casse-tête et il y a souvent de longues queues devant les sites de recharge malgré le coût de 30 dollars environ (8 ou 9 fois le salaire minimum).
«Collaborer»
Autre difficulté, les coupures chroniques de courant et la faiblesse d'internet dans ce pays où il y a 14,4 millions d'abonnements pour smartphones. Selon l'indice global Speedtest, seuls Cuba et Haïti ont une bande passante plus petite sur le continent et le Venezuela se classe au 139e rang mondial (176 pays recensés).
Les développeurs travaillent donc dans des conditions difficiles et faute de financement, les utilisateurs sont souvent mis à contribution.
A Caracas, José Miguel Avendaño a lui développé "Javenda" une application avec une carte interactive regroupant 1 020 hôpitaux, cliniques et centres de santé. Quand on clique sur le logo de l'hôpital désiré, l'application se connecte à Google maps pour donner l'itinéraire.
"Au lieu de critiquer et de me lamenter sur notre sort, j'ai essayé de résoudre le problème", assure M. Avendaño, spécialiste de données de 46 ans. Il espère que sa carte et son application seront actualisés par les utilisateurs comme Daniel Torres, programmateur qui a ajouté les centres de santé de l'Etat de Carabobo (Nord) où il réside.
"Pourquoi ne pas collaborer? C'est une manière de lutter contre le Covid-19", dit-il.
Pour participer à un concours réunissant des jeunes du monde entier, Rebeca Paredes et Wanda Tremont, 16 ans toutes les deux, ont elles développé "Nezha", une "appli sur la sécurité" des établissements accueillant du public.
"Voir les autorisations, les mesures de sécurité appliquées, leur taille, leur capacité, les sorties de secours, etc." explique Rebeca en naviguant sur plusieurs écrans à la fois.
Là aussi, elles comptent sur les utilisateurs, les propriétaires mais aussi clients: "parfois, tu vois un vendeur avec le masque sous le menton et tu te dis, "est-ce que c'est vraiment sûr d'acheter dans cet endroit", s'interroge Rebeca qui vit non loin du "23 janvier" le grand quartier populaire de l'ouest de Caracas.
Les deux jeunes cherchent des aides extérieures pour continuer à développer leur application dont le symbole est une fleur de lotus.