LONDRES: Un ancien ingénieur logiciel chez Facebook dénonce les tortures psychologiques qui lui ont été infligées par les services secrets iraniens. Il explique les pressions qu’il a subies dans le but de le forcer à espionner ses proches et il parle des conséquences dramatiques de cet épisode sur sa vie.
Le Canado-Iranien Behdad Esfahbod était un ingénieur logiciel de haut vol chez Facebook. Icône de la communauté technologique iranienne, il était très apprécié des jeunes Iraniens qui remplissaient régulièrement les amphithéâtres pour l’entendre parler.
Cependant, il révèle dans une publication sur son blog personnel que son statut de superstar parmi les jeunes Iraniens passionnés de technologie n’a pas pu le sauver lorsque les services secrets l’ont kidnappé dans les rues de Téhéran et ont tenté de le faire chanter pour qu’il espionne ses amis.
En rendant son histoire publique, Esfahbod affirme qu’il a voulu reprendre le pouvoir sur le régime et à le montrer tel qu’il est vraiment.
« Téhéran et ses agents, ajoute-t-il, sont des agresseurs professionnels et, comme tout agresseur, leur plus grande crainte est que je les dénonce. Alors, c’est ce que je fais… »
Enlevé dans les rues de Téhéran alors qu’il rendait visite à sa famille, Esfahbod raconte qu’il a été emmené à la célèbre prison d’Evin, que son portable a été confisqué, qu’il a été victime de torture psychologique et a subi des interrogatoires pendant sept jours. « J’ai été détenu à l’isolement pendant sept jours et interrogé quotidiennement, dont une fois pendant plus de six heures », confie-t-il.
Des agents des services secrets du Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI) l’ont menacé de dix ans de prison pour des motifs fallacieux.
Sa seule issue était « d’accepter d’espionner ses amis, des activistes iraniens et toute personne cherchant à contourner le voile de la censure sur Internet en Iran qui coupe le pays du reste du monde », affirme-t-il.
Il explique que, sous la contrainte, il a dû accepter l’accord pour pouvoir quitter le pays en vie et avoir une chance de raconter son histoire.
Mais le calvaire d’Esfahbod n’a pas cessé après sa fuite hors d’Iran. Les agents du service de renseignements du CGRI l’ont poursuivi sur Instagram pour qu’il commence à espionner. Lorsqu’il a ignoré leurs demandes, ils ont saturé de messages tous ses comptes sur les réseaux sociaux.
Alors qu’aujourd’hui Esfahbod explique clairement qu'il n'espionnera pas pour Téhéran, il est terrifié pour sa famille qui est toujours dans le pays.
« Ils m’ont dit : Tu as un frère aux États-Unis et une sœur ici. Te souviens-tu de l’avion que nous avons abattu ? Te souviens-tu que nous avons déclaré qu’il s’agissait une erreur humaine ? La même chose pourrait t’arriver ainsi qu’à ta famille », a-t-il rapporté.
« Quel sera leur prochain coup ? Vont-ils faire pression sur ma famille, l’emprisonner et la torturer ? Je ne sais pas de quel acte inhumain ils sont capables contre mon entourage ».
Tandis qu’Esfahbod attendait le prochain coup de Téhéran, les fondations de sa propre vie se sont effondrées. Les séquelles du traumatisme subi lors de son incarcération ne lui permettent plus de travailler chez Facebook. Il a renoncé à son contrat d’1,5 million de dollars par an et il a également rompu avec sa compagne. Isolé et paranoïaque, sa santé mentale s’est rapidement détériorée au point de le faire plonger dans la « folie totale ».
Son histoire a touché les jeunes Iraniens, consternés par leur gouvernement. « J'explose de colère quand j’entends ce qu'ils ont fait à Behdad Esfahbod », lit-on dans une publication Twitter d'un Iranien, Mohammed Hossein Hajivandi.
L’utilisateur Ali Rastegar a écrit sur Twitter : « Pourquoi n’y a-t-il aucune limite à vos crimes et à vos “conneries”? N’avons-nous pas le droit de réussir dans un autre pays sans espionner pour vous ? »
Ce texte est la traduction d’un article paru sur ArabNews.com