JÉRUSALEM: Le secrétaire d'État Antony Blinken a annoncé mardi que les États-Unis vont rouvrir leur consulat général à Jérusalem, une initiative qui rétablit les liens, négligés par l'administration Trump, avec les Palestiniens.
Le consulat a longtemps servi de bureau autonome chargé des relations diplomatiques avec les Palestiniens. Mais l'ancien président américain Donald Trump a déclassé ses activités et les a placées sous l'autorité de son ambassadeur en Israël lorsqu'il a transféré l'ambassade à Jérusalem.
La décision de Trump a suscité la colère des Palestiniens, qui considèrent Jérusalem-Est comme un territoire occupé et la capitale de leur futur État.
Toutefois, Blinken n'a pas donné de date précise pour la réouverture du consulat.
Blinken a annoncé la décision après une réunion avec le président palestinien Mahmoud Abbas à Ramallah, en Cisjordanie occupée.
«Comme je l’ai précisé au président, je suis ici dans le but de souligner l’engagement des États-Unis à reconstruire les relations avec l’Autorité palestinienne et le peuple palestinien, (et promouvoir) une relation fondée sur le respect mutuel et la conviction partagée que les Palestiniens et les Israéliens méritent autant les uns que les autres des dispositions égales de sécurité, d'opportunité, de liberté et de dignité», a affirmé Blinken.
Blinken est en visite dans la région afin d’aider à consolider le cessez-le-feu de la semaine dernière, et qui a mis fin à une guerre dévastatrice de 11 jours entre Israël et les militants du Hamas de Gaza. Cette guerre qui a fait plus de 250 victimes, pour la plupart des Palestiniens, et a causé des destructions généralisées dans le territoire côtier appauvri.
Il a promis de «rallier le soutien international» de manière à aider Gaza à la suite de la guerre. Il a plus tard annoncé une aide de près de 40 millions de dollars aux Palestiniens, dont 5,5 millions de dollars d'aide d'urgence dédiés à l’enclave en ruines. Un chiffre qui porte l'aide américaine totale aux Palestiniens sous l'administration Biden à plus de 360 millions de dollars, après que l'administration Trump ait coupé la quasi intégralité de leur aide.
Blinken s’est engagé à garder toute aide inaccessible au Hamas, qui ne reconnaît pas le droit d’Israël d’exister, et que Tel Aviv et Washington considèrent comme une organisation terroriste.
Les États-Unis essaient de soutenir Abbas, qui a été mis à l'écart par les événements récents, dans sa rivalité avec le Hamas et sur la scène internationale. Le président dirige l'Autorité palestinienne soutenue par la communauté internationale, qui gère une partie de la Cisjordanie occupée mais dont les forces ont été expulsées de Gaza lorsque le Hamas a pris le pouvoir en 2007.
De nombreux Palestiniens estiment que Abbas a perdu toute légitimité. Mais il est toujours considéré sur le plan international comme le représentant du peuple palestinien, et un partenaire crucial dans le processus de paix, au point mort depuis longtemps.
La trêve qui a mis fin à la guerre de Gaza vendredi a tenu bon jusqu'à présent, mais elle n’a abordé aucun des problèmes sous-jacents du conflit israélo-palestinien, ce que Blinken a reconnu après s'être entretenu plus tôt dans la journée avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou .
«Nous savons que pour empêcher un retour à la violence, nous devons profiter de l'espace créé afin d’évoquer tout une panoplie de problèmes et de défis sous-jacents. Et il faudra débuter, sans aucun doute, par s'attaquer à la situation humanitaire grave à Gaza et lancer ainsi à l’opération de la construction», a-t-il assuré.
Le haut diplomate américain fait face aux mêmes obstacles qui ont étouffé un processus de paix plus large pendant plus d'une décennie, à savoir un leadership israélien belliciste, des divisions palestiniennes et des tensions profondément enracinées autour de Jérusalem et de ses lieux saints. L'administration Biden avait initialement espéré éviter d'être entraînée dans le conflit insurmontable et se concentrer sur d'autres priorités de politique étrangère avant que la violence n'éclate.
La guerre a été déclenchée par des semaines d'affrontements à Jérusalem entre la police israélienne et des manifestants palestiniens à l’intérieur et autour de l'enceinte de la mosquée d’Al-Aqsa, un site vénéré par les juifs et les musulmans qui a connu plusieurs flambées de violence israélo-palestinienne au fil des ans. Les manifestations se sont insurgées contre les agissements des forces de l’ordres israéliennes pendant le mois sacré musulman du Ramadan et la menace d'expulsion de dizaines de familles palestiniennes par des colons juifs.
La trêve reste toutefois fragile car les tensions restent vives à Jérusalem, et le sort des familles palestiniennes n'est pas encore connu.
Les expulsions ont été suspendues juste avant le début des combats à Gaza, mais le processus judiciaire doit reprendre dans les semaines prochaines. La police a brièvement affronté des manifestants à Al-Aqsa vendredi, quelques heures après l'entrée en vigueur du cessez-le-feu.
Pour ajouter aux tensions, un soldat israélien ainsi qu’un civil ont été poignardés et blessés lundi à Jérusalem-Est, avant que la police ne tire et tue l'assaillant dans ce qui a été qualifié d'attaque terroriste.
Mardi matin, un Palestinien a été tué par la police secrète israéliennes près de la ville de Ramallah, en Cisjordanie, selon l'agence de presse Wafa. Des images qui circulent en ligne montrent l'homme ensanglanté, sans vie dans la rue.
L'armée a référé les questions concernant l’incident à la police des frontières, qui n'a pas répondu aux demandes de commentaires.
Netanyahou , quant à lui, se bat pour sa vie politique après une quatrième élection non concluante en deux ans. Il fait face à des critiques croissantes de la part des Israéliens qui pensent qu'il a mis fin prématurément à l'offensive, sans arrêter de force les attaques à la roquette ni porter un coup plus dur au Hamas.
Netanyahou a à peine mentionné les Palestiniens dans ses remarques après sa rencontre avec Blinken, mettant en garde contre une riposte «très puissante» si le Hamas rompt le cessez-le-feu.
Netanyahou dit vouloir «relancer la croissance économique» en Cisjordanie occupée, mais a révélé qu'il n'y aura pas de paix tant que les Palestiniens ne reconnaîtront pas Israël comme un «État juif». Les Palestiniens s’opposent depuis longtemps à cette réalité, et affirment que cela porte atteinte aux droits de la propre minorité palestinienne d’Israël.
Blinken se rendra également en Égypte et en Jordanie voisines, qui ont joué le rôle de médiateurs dans le conflit. L'Égypte a réussi à négocier la trêve de Gaza après que l'administration Biden ait pressé Israël de mettre fin à son offensive.
L'administration Biden avait été vivement critiquée pour sa réaction initiale apparente à la violence meurtrière, notamment de la part des alliés démocrates au Congrès qui ont exigé qu'elle adopte une ligne plus dure à l'égard d'Israël. Biden a réitéré à plusieurs reprises ce qu’il affirme être le droit d’Israël de se défendre contre les attaques à la roquette à partir de Gaza.
L'administration Biden a aussi défendu sa position en assurant être engagée dans une diplomatie de haut niveau, intense mais silencieuse, dans l’intention de promouvoir un cessez-le-feu.
Blinken a estimé que le moment n’est pas propice à une reprise immédiate des négociations israélo-palestiniennes, mais que des mesures pourraient être prises afin de réparer les dommages causés par les frappes aériennes israéliennes, qui ont détruit des centaines de maisons et endommagé des infrastructures à Gaza.
La petite enclave côtière, qui abrite plus de 2 millions de Palestiniens, est soumise à un blocus israélo-égyptien paralysant depuis que le Hamas a pris le pouvoir. Israël juge que le blocus est nécessaire pour empêcher le Hamas d'importer des armes, tandis que les Palestiniens et les groupes de défense des droits de l'homme le considèrent comme une forme de punition collective.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com