Dans les ruines de palais afghans, les réfugiés ont remplacé les sultans

«Il n’y a aucun endroit dans le monde islamique où on ait quelque chose de ce genre-là, un ensemble aussi cohérent, aussi élaboré, et malgré tout pour l’instant encore relativement bien conservé». (Photo, AFP)
«Il n’y a aucun endroit dans le monde islamique où on ait quelque chose de ce genre-là, un ensemble aussi cohérent, aussi élaboré, et malgré tout pour l’instant encore relativement bien conservé». (Photo, AFP)
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Publié le Lundi 24 mai 2021

Dans les ruines de palais afghans, les réfugiés ont remplacé les sultans

  • «Nous avons vraiment peur que notre histoire ne soit détruite»
  • Ces deux dynasties ont régné entre le Xe et le XIIIe siècles sur une région qui incluait l'Afghanistan actuel, diffusant l'art islamique jusque dans le nord de l'Inde

LASHKAR GAH: Sur les flancs de la rivière Helmand, dans le sud de l’Afghanistan, reposent les ruines d’une cité royale millénaire. Mais les archéologues s’inquiètent pour l’avenir de cet ensemble exceptionnel, aujourd’hui occupé par des centaines de personnes déplacées par les combats alentour.

En surplomb du cours d'eau presque asséché, dans les faubourgs de Lashkar Gah, la capitale de la province du Helmand, apparaît un étonnant complexe de palais d'argile ocre, aux contours adoucis par le temps, appelé par les locaux Qala-e-Kohna et datant du XIe siècle.

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Dénommé Lashkari Bazar par les archéologues, il forme le seul exemple connu d'une résidence d'hiver des sultans Ghaznévides puis Ghorides. (Photo, AFP)

Dénommé Lashkari Bazar par les archéologues, il forme le seul exemple connu d'une résidence d'hiver des sultans Ghaznévides puis Ghorides. Ces deux dynasties ont régné entre le Xe et le XIIIe siècles sur une région qui incluait l'Afghanistan actuel, diffusant l'art islamique jusque dans le nord de l'Inde.

D'autres constructions éparses s'étendent sur une dizaine de kilomètres vers le sud, jusqu'à la citadelle de Bost, connue pour son arche. Le tout a suscité l'intérêt pour son ampleur, sa remarquable architecture et ses peintures murales.

«Il n’y a aucun endroit dans le monde islamique où on ait quelque chose de ce genre-là, un ensemble aussi cohérent, aussi élaboré, et malgré tout pour l’instant encore relativement bien conservé», déclare Philippe Marquis, le directeur de la Délégation archéologique française en Afghanistan (Dafa).

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Il «est important de le préserver parce qu'on est sûr que ça nous apprendrait beaucoup sur cette période-là». (Photo, AFP)

«On en connaît finalement peu de choses», souligne-t-il, ajoutant qu'il «est important de le préserver parce qu'on est sûr que ça nous apprendrait beaucoup sur cette période-là».

Mais ces monuments, faits de briques et de pisé, sont menacés par les habitations modernes de la ville en expansion, et par la présence dans leurs murs de familles chassées de zones rurales dont les talibans ont pris le contrôle.

Celles-ci ont pris place au milieu des arches ornées, des tours en partie écroulées, des niches ayant un temps abrité peintures et sculptures. Les nouveaux occupants ont ajouté des fenêtres, portes et barbelés, recouvrant les murs d'un mélange d'argile et de paille pour éviter qu'ils ne s'écroulent.

Un endroit pour les fantômes

Une porte de fer forgé bleue ouvre sur la «maison» d'Agha Mohammad, composée de deux petites salles aux très hauts murs qu'il a enduits de cette mixture. Dans l'une des pièces, il a rajouté une toiture en bambou, à laquelle pend un berceau de fortune.

«Quand le district de Nad Ali (près de Lashkar Gah) est tombé, je suis venu ici» il y a quelques mois, raconte Agha, un policier de 33 ans.

«Je veux que le gouvernement me donne un endroit où vivre. Regardez les fissures dans le toit. J'ai peur que ça ne tombe une nuit», ajoute-t-il. Quelques centaines de personnes vivraient ici, pour beaucoup des familles de policiers trop démunies pour louer de vrais logements.

Ils ne reçoivent aucune aide et n'ont accès ni à l'électricité ni à l'eau courante. «Je devrais avoir le soutien du gouvernement, car j'ai perdu trois fils qui le servaient», soupire Bibi Halima, 48 ans, qui a fui le district proche de Grishk, où les combats font rage.

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A Lashkar Gah, il se murmure que des officiels ont saisi la majeure partie des ruines pour les louer aux réfugiés, mais le silence sur le sujet reste de mise. (Photo, AFP)

C'est «un endroit pour les fantômes, pas pour les humains», déplore Khudai Nazar, 54 ans, un autre déplacé. «Chaque maison est pleine de veuves (...) Si nos enfants meurent, personne ne s'y intéresse», ajoute Sayed Agha, 55 ans, qui se dit prêt à partir à tout moment si on le lui propose.

A Lashkar Gah, il se murmure que des officiels ont saisi la majeure partie des ruines pour les louer aux réfugiés, mais le silence sur le sujet reste de mise.

«Le site a été accaparé par des gens qui louent des maisons à ceux qui ont fui les zones dangereuses», admet toutefois à Kaboul Farid Haidari, un responsable du département d'archéologie de la capitale.

Conserver le site 

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La Dafa avait exploré le site dans les années 1950 et il n'y a pas eu de travaux archéologiques depuis lors. (Photo, AFP)

La Dafa avait exploré le site dans les années 1950 et il n'y a pas eu de travaux archéologiques depuis lors. Elle avait identifié les palais, la mosquée et les autres bâtiments annexes, comme les ateliers de poterie et d'artisanat, ou les glacières qui permettaient des conserver des aliments frais. 

Elle avait aussi excavé les fameuses peintures composées de scènes de cour, rares pour une époque à laquelle la représentation d'images figuratives d'êtres vivants était déjà mal vue dans l'islam.

Ces peintures, qui avaient été placées au musée de Kaboul, y ont ensuite été détruites ou dérobées lors de la guerre civile des années 1990. Mais des photos subsistent.

Philippe Marquis s'inquiète des destructions causées par les «squatteurs» et pilleurs. Il craint aussi les effets du réchauffement climatique, qui pourraient provoquer une crue de la rivière susceptible de ravager le site.

Il aimerait le transformer en «parc archéologique», en impliquant les déplacés dans sa conservation pour qu'ils gagnent ainsi leur vie et puissent quitter les lieux. «Le paradoxe c'est qu'à leur manière les gens protègent l'endroit, parce que c'est leur maison», admet-il.

Shah Mahmud Haseat, 74 ans, qui a écrit un livre sur la citadelle de Bost, laquelle est restée inoccupée car située plus loin de Lashkar Gah, est cependant plus circonspect sur l'avenir du lieu. 

«J'ai tenté de convaincre (le gouvernement) de protéger le site, mais ils n'ont rien fait», regrette-t-il. «Nous avons vraiment peur que notre histoire ne soit détruite.»


Le Parlement libanais approuve un projet de loi sur le secret bancaire

Le Parlement a adopté des amendements à "la loi relative au secret bancaire" et à la législation monétaire, selon le bureau de son président, Nabih Berri. (AFP)
Le Parlement a adopté des amendements à "la loi relative au secret bancaire" et à la législation monétaire, selon le bureau de son président, Nabih Berri. (AFP)
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  • La communauté internationale exige depuis longtemps d'importantes réformes pour débloquer des milliards de dollars afin d'aider à la relance de l'économie libanaise, plongée depuis 2019 dans une profonde crise
  • Selon le groupe de défense des droits libanais Legal Agenda, les amendements autorisent "les organes de contrôle et de régulation bancaire (...) à demander l'accès à toutes les informations" sans fournir de raison particulière

BEYROUTH: Le Parlement libanais a approuvé jeudi un projet de loi sur la levée du secret bancaire, une réforme clé réclamée par le Fonds monétaire international (FMI), au moment où des responsables libanais rencontrent à Washington des représentants des institutions financières mondiales.

Le Parlement a adopté des amendements à "la loi relative au secret bancaire" et à la législation monétaire, selon le bureau de son président, Nabih Berri.

La communauté internationale exige depuis longtemps d'importantes réformes pour débloquer des milliards de dollars afin d'aider à la relance de l'économie libanaise, plongée depuis 2019 dans une profonde crise imputée à la mauvaise gestion et à la corruption.

La récente guerre entre Israël et le Hezbollah a aggravé la situation et le pays, à court d'argent, a désormais besoin de fonds pour la reconstruction.

Selon le groupe de défense des droits libanais Legal Agenda, les amendements autorisent "les organes de contrôle et de régulation bancaire (...) à demander l'accès à toutes les informations" sans fournir de raison particulière.

Ces organismes pourront avoir accès à des informations telles que les noms des clients et les détails de leurs dépôts, et enquêter sur d'éventuelles activités suspectes, selon Legal Agenda.

Le Liban applique depuis longtemps des règles strictes en matière de confidentialité des comptes bancaires, ce qui, selon les critiques, rend le pays vulnérable au blanchiment d'argent.

En adoptant ce texte, le gouvernement avait précisé qu'il s'appliquerait de manière rétroactive pendant 10 ans. Il couvrira donc le début de la crise économique, lorsque les banquiers ont été accusés d'aider certaines personnalités à transférer d'importantes sommes à l'étranger.

Le feu vert du Parlement coïncide avec une visite à Washington des ministres des Finances, Yassine Jaber, et de l'Economie, Amer Bisat, ainsi que du nouveau gouverneur de la Banque centrale, Karim Souaid, pour des réunions avec la Banque mondiale et le FMI.

M. Jaber a estimé cette semaine que l'adoption des amendements donnerait un "coup de pouce" à la délégation libanaise.

En avril 2022, le Liban et le FMI ont conclu un accord sous conditions pour un programme de prêt sur 46 mois de trois milliards de dollars, mais les réformes alors exigées n'ont pour la plupart pas été entreprises.

En février, le FMI s'est dit ouvert à un nouvel accord avec Beyrouth après des discussions avec M. Jaber. Le nouveau gouvernement libanais s'est engagé à mettre en oeuvre d'autres réformes et a également approuvé le 12 avril un projet de loi pour restructurer le secteur bancaire.


Syrie: Londres lève ses sanctions contre les ministères de la Défense et de l'Intérieur

Abdallah Al Dardari, chef régional pour les Etats arabes au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), lors d'une interview avec l'AFP à Damas le 19 avril 2025. (AFP)
Abdallah Al Dardari, chef régional pour les Etats arabes au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), lors d'une interview avec l'AFP à Damas le 19 avril 2025. (AFP)
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  • "Les entités suivantes ont été retirées de la liste et ne sont plus soumises à un gel des avoirs: ministère de l'Intérieur, ministère de la Défense", indique notamment le communiqué du département du Trésor
  • Des agences de renseignement sont également retirées de la liste. La totalité d'entre elles ont été dissoutes par les nouvelles autorités en janvier

LONDRES: Le Royaume-Uni a annoncé jeudi avoir levé ses sanctions contre les ministères syriens de l'Intérieur et de la Défense ainsi que contre des agences de renseignement, qui avaient été imposées sous le régime de Bachar al-Assad.

"Les entités suivantes ont été retirées de la liste et ne sont plus soumises à un gel des avoirs: ministère de l'Intérieur, ministère de la Défense", indique notamment le communiqué du département du Trésor.

Des agences de renseignement sont également retirées de la liste. La totalité d'entre elles ont été dissoutes par les nouvelles autorités en janvier.

Ces autorités, issues de groupes rebelles islamistes, ont pris le pouvoir le 8 décembre.

Le Royaume-Uni avait début mars déjà levé des sanctions à l'égard de 24 entités syriennes ou liées à la Syrie, dont la Banque centrale.

Plus de trois cents individus restent toutefois soumis à des gels d'avoirs dans ce cadre, ainsi qu'une quarantaine d'entités, selon le communiqué du Trésor.

Les nouvelles autorités syriennes appellent depuis la chute d'Assad en décembre dernier à une levée totale des sanctions pour relancer l'économie et reconstruire le pays, ravagé après 14 années de guerre civile.


1983 – L'attaque contre les Marines américains à Beyrouth

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  • Les dégâts sont énormes au quartier général des Marines
  • Quatre couches de ciment s'étaient effondrées pour former des tas de décombres, des incendies brûlaient et l'on entendait beaucoup de cris au milieu du sang

BEYROUTH: Le 23 octobre 1983, aux alentours de 6h25, une violente déflagration secoue Beyrouth et sa banlieue, jusque dans les hauteurs montagneuses. Le souffle, sourd et diffus, fait d’abord penser à un tremblement de terre.

Mais sept minutes plus tard, une seconde explosion, bien plus puissante, déchire la ville et ses environs, dissipant toute confusion: Beyrouth venait de vivre l’un des attentats les plus meurtriers de son histoire.

Je travaillais alors pour le journal libanais As-Safir en tant que correspondant de guerre. Beyrouth était assiégée, dans sa banlieue sud, dans les montagnes et dans la région du Kharoub, par des affrontements entre le Parti socialiste progressiste et ses alliés d'une part, et les Forces libanaises d'autre part, dans ce que l'on appelait la «guerre des montagnes».

Le sud du pays a également été le théâtre de la résistance armée des combattants libanais contre l'occupation israélienne. Ces combattants étaient liés à des partis de gauche et, auparavant, à des factions palestiniennes.

Des forces multinationales, notamment américaines, françaises et italiennes, avaient été stationnées à Beyrouth après le retrait des dirigeants et des forces de l'Organisation de libération de la Palestine, à la suite de l'agression israélienne contre le Liban et de l'occupation de Beyrouth en 1982.

Quelques minutes après les explosions, la réalité s’impose avec brutalité: le quartier général des Marines américains, situé sur la route de l’aéroport de Beyrouth, ainsi que la base du contingent français dans le quartier de Jnah, ont été ciblés par deux attaques-suicides coordonnées.

Les assaillants, non identifiés, ont lancé des camions piégés – chargés de plusieurs tonnes d’explosifs – contre les deux sites pourtant fortement sécurisés, provoquant un carnage sans précédent.

Comment nous l'avons écrit

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Au lendemain des attentats, Arab News faisait état de 120 morts parmi les Marines et de 20 morts parmi les Français, un chiffre nettement inférieur au décompte final.

L'attaque de la base américaine a tué 241 militaires américains – 220 Marines, 18 marins et trois soldats – et en a blessé des dizaines. Le bombardement du site militaire français a tué 58 parachutistes français et plus de 25 Libanais.

Ces attentats étaient les deuxièmes du genre à Beyrouth; un kamikaze avait pris pour cible l'ambassade des États-Unis à Aïn el-Mreisseh six mois plus tôt, le 18 avril, tuant 63 personnes, dont 17 Américains et 35 Libanais.

Les dégâts sont énormes au quartier général des Marines. Quatre couches de ciment s'étaient effondrées pour former des tas de décombres, des incendies brûlaient et l'on entendait beaucoup de cris au milieu du sang, des morceaux de corps et de la confusion. Voici ce que nous, journalistes, avons pu voir au milieu du chaos qui régnait immédiatement après la catastrophe, et ce qui reste gravé dans ma mémoire plus de 40 ans plus tard.

La nuit précédente, un samedi, les Marines avaient fait la fête, divertis par un groupe de musique qui avait fait le voyage depuis les États-Unis pour se produire devant eux. La plupart dormaient encore lorsque la bombe a explosé.

Aucun groupe n'a revendiqué les attentats ce jour-là, mais quelques jours plus tard, As-Safir a publié une déclaration qu'il avait reçue et dans laquelle le «Mouvement de la révolution islamique» déclare en être responsable.

Environ 48 heures après l’attentat, les autorités américaines pointent du doigt le mouvement Amal, ainsi qu’une faction dissidente dirigée par Hussein al-Moussawi, connue sous le nom d’Amal islamique, comme étant à l’origine de l’attaque.

Selon la presse locale de l’époque, la planification de l’attentat aurait eu lieu à Baalbeck, dans la région de la Békaa, tandis que le camion utilisé aurait été aperçu garé devant l’un des bureaux du mouvement Amal.

Le vice-président américain, George H.W. Bush, s'est rendu au Liban le lendemain de l'attentat et a déclaré: «Nous ne permettrons pas au terrorisme de dicter ou de modifier notre politique étrangère.»

La Syrie, l'Iran et le mouvement Amal ont nié toute implication dans les deux attentats.

En riposte à l’attaque visant leurs soldats, les autorités françaises ont lancé une opération militaire d’envergure: huit avions de chasse ont bombardé la caserne Cheikh Abdallah à Baalbeck, que Paris considérait comme un bastion de présences iraniennes.

À l’époque, les autorités françaises ont affirmé que les frappes avaient fait environ 200 morts.

Un responsable de l'Amal islamique a nié que l'Iran disposait d'un complexe dans la région de Baalbeck. Toutefois, il a reconnu le lien idéologique fort unissant son groupe à Téhéran, déclarant: «L’association de notre mouvement avec la révolution islamique en Iran est celle d’un peuple avec son guide. Et nous nous défendons.»

Le 23 novembre, le cabinet libanais a décidé de rompre les relations avec l'Iran et la Libye. Le ministre libanais des Affaires étrangères, Elie Salem, a déclaré que la décision «a été prise après que l'Iran et la Libye ont admis qu'ils avaient des forces dans la Békaa».

Un rapport d'As-Safir cite une source diplomatique: «Les relations avec l'Iran se sont détériorées en raison des interventions, pratiques et activités illégales qu'il a menées sur la scène libanaise, malgré de nombreux avertissements.»

Les attentats du 23 octobre étaient jusqu'alors le signe le plus évident de l'évolution de l'équilibre des forces régionales et internationales au Liban et de l'émergence d'un rôle iranien de plus en plus important dans la guerre civile.

Le chercheur Walid Noueihed m'a expliqué qu'avant 1982, Beyrouth avait accueilli toutes les formes d'opposition, y compris l'élite éduquée, appelée «opposition de velours», et l'opposition armée, dont les membres étaient formés dans des camps ou des centres d'entraînement palestiniens dans la vallée de la Békaa et au Liban-Sud.

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Vue aérienne de l'ambassade américaine à Beyrouth après l'explosion qui a fait 63 morts, dont 46 Libanais et 17 Américains. (AFP)

Il a indiqué que l'opposition iranienne au chah était présente parmi ces groupes et a décrit Beyrouth comme une oasis pour les mouvements d'opposition jusqu'en 1982. Toutefois, cette dynamique a changé lorsqu'Israël a envahi le Liban et assiégé Beyrouth, ce qui a entraîné le départ de l'OLP en vertu d'un accord international qui exigeait en échange qu'Israël s'abstienne de pénétrer dans Beyrouth.

Si les factions palestiniennes ont quitté le Liban, ce n'est pas le cas des combattants libanais associés à l'OLP, pour la plupart des chiites qui constituaient la base des partis de gauche libanais.

Les attaques contre les bases militaires américaines et françaises ont entraîné le retrait des forces internationales du Liban, explique M. Noueihed, laissant une fois de plus Beyrouth sans protection. Les opérations de résistance se sont multipliées, influencées par des idéologies distinctes de celles de la gauche traditionnelle, des groupes comme l'Amal islamique affichant ouvertement des slogans prônant la confrontation avec Israël.

En 1985, le Hezbollah est officiellement créé en tant qu'«organisation djihadiste menant une révolution pour une république islamique». Il s'est attiré le soutien des partis de gauche libanais et palestiniens, en particulier après l'effondrement de l'Union soviétique.

Selon M. Noueihed, l'émergence du Hezbollah a coïncidé avec le déclin des symboles existants de la résistance nationale, ce qui semble indiquer une intention d'exclure toutes les autres forces du pays du mouvement de résistance, laissant le Hezbollah comme parti dominant.

L'influence iranienne au Liban est devenue évidente lors des violents affrontements entre le Hezbollah et Amal, qui ont fait des dizaines de victimes et se sont terminés par la consolidation du contrôle du Hezbollah au milieu de la présence des forces militaires syriennes.

Beyrouth se vide peu à peu de son élite intellectuelle, a souligné M. Noueihed. Des centaines d’écrivains, d’intellectuels, de chercheurs et de professionnels des médias ont fui vers l’Europe, redoutant pour leur sécurité, laissant derrière eux une ville désertée par ceux qui faisaient autrefois vibrer sa vie culturelle et académique.

Najia Houssari est rédactrice pour Arab News, basée à Beyrouth. Elle était correspondante de guerre pour le journal libanais As-Safir au moment du bombardement de la caserne des Marines américains.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com