SAINT-MALO: Carla Sozzani, la présidente de la fondation Azzedine Alaïa, confie à Arab News en français: «Pendant le confinement, nous avons évoqué les amis [d’Azzedine Alaïa] en fouillant dans ses archives; nous nous sommes rendu compte qu’il possédait une collection incroyable de photographies. En particulier, il a travaillé avec les photographes Bruce Weber, Paolo Roversi et Peter Lindbergh.»
Ainsi est née l’idée de l’exposition Azzedine Alaïa/Peter Lindbergh qui se tiendra du 20 mai au 14 novembre prochains à Paris, dans la galerie Azzedine Alaïa. Sous la direction de Benjamin Lindbergh et d’Olivier Saillard, cette rétrospective racontera une histoire de la mode depuis les années 1980. «En effet, Azzedine et Peter ont connu le succès en France au début de cette décennie. Et, pendant près de quarante ans, ils ne se sont plus quittés. Plus qu’une collaboration professionnelle, ce sont une amitié et une admiration réciproques entre les deux hommes qui nous sont révélées. Elles se sont poursuivies jusqu’en 2017, lorsqu’Azzedine nous a quittés», explique Carla Sozzani.
Il faut dire que, si leurs lieux de naissance sont très distants – le premier a grandi à Tunis, le second à Duisbourg, en Allemagne –, ces deux créateurs de génie cultivent des horizons proches. «Ils étaient à Paris deux étrangers; ils partageaient la même vision de la femme. Quand Peter photographiait un mannequin, il le faisait toujours avec respect. Azzedine, lui, créait des robes sensuelles, mais dans lesquelles les femmes pouvaient bouger. Ils aimaient tous les deux le noir et n’étaient guère portés sur le maquillage», souligne Carla Sozzani.
Quelles surprises attendent le visiteur de l’exposition? «Nous avons mis en miroir le vrai vêtement et la photographie. Par ailleurs, une salle est dédiée à Tina Turner. Les visiteurs pourront également découvrir un film documentaire retrouvé par Benjamin Lindbergh, tourné au moment où l’artiste réalisait l’une de ses plus célèbres séries de clichés sous la tempête du Touquet. Le vêtement et la photo ne font plus qu’un.» Tout simplement sublime!
Rappelons qu’Azzedine Alaïa a fréquenté le département de sculpture des beaux-arts de Tunis. «Il le disait lui-même: la sculpture lui a appris l’amour du corps, avec les statues grecques notamment. Cet art a influencé son travail de couturier. Il n’envisageait pas la mode à plat, mais comme un sculpteur», se souvient Carla Sozzani, qui évoque la haute technicité du Tunisien, qui ne révélait ses secrets qu’à ses clientes de haute couture.
C’est à l’école d’arts appliqués de Krefeld que s’est formé Peter Lindbergh, avant d’aiguiser son œil dans la ville industrielle de Duisbourg et sur les plages néerlandaises. Le destin voulait que ces deux artistes, qui ont tant contribué à écrire l’histoire de la mode moderne, se rencontrent…
Cette exposition est accompagnée d’un livre, Azzedine Alaïa, Peter Lindbergh, édité chez Taschen.