GAZA : Le Conseil de sécurité de l'ONU discute dimanche des tensions entre Israël et le Hamas, au lendemain de bombardements ayant fauché la vie d'enfants et pulvérisé les locaux de médias internationaux dans la bande de Gaza, d'où les salves de roquettes se multiplient vers des grandes villes israéliennes.
Depuis le début lundi de ce nouveau cycle de violences entre l'Etat hébreu et des groupes palestiniens de la bande de Gaza, au moins 157 personnes, en majorité des Palestiniens, ont été tuées.
Dix Palestiniens, parmi lesquels deux femmes et huit enfants, membres de deux familles cousines, ont en effet péri à l'aube dans une frappe israélienne dans le camp de réfugiés d'Al-Shati, dans la ville de Gaza.
Les enfants « ne portaient pas d'armes, ils n'ont pas tiré de roquettes », a témoigné Mohammad Al Hadidi, l'un de pères éplorés, disant que les gamins « portaient leurs habits de fête », en référence à la coutume de porter de beaux vêtements durant l'Aïd el-Fitr, marquant la fin du ramadan.
Puis, un Israélien de 50 ans, au volant de sa voiture, a été tué dans la banlieue de Tel-Aviv par des tirs du Hamas, qui a dit avoir frappé le centre d'Israël pour « venger » la frappe « contre des femmes et des enfants » à Gaza.
Plus tard, l'immeuble de 13 étages qui abritait notamment les équipes de la chaîne d'information qatarie Al-Jazeera et l'agence de presse américaine Associated Press (AP) a été pulvérisé par des frappes de l'armée israélienne qui avait demandé préalablement l'évacuation de l'immeuble.
Les forces israéliennes ont affirmé que l'immeuble abritait « des entités appartenant au renseignement militaire » du mouvement islamiste armé Hamas, qui se sert selon elle des civils comme « boucliers humains » dans la bande de Gaza, territoire palestinien de deux millions d'habitants sous son contrôle.
Et le Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui s'est entretenu après le président américain après ses frappes, est apparu tard en soirée à la télévision, affirmant avoir le soutien « sans équivoque » de Joe Biden. Ce dernier a quant à lui soutenu le droit d'Israël « à se défendre » contre les attaques du Hamas, tout en faisant part de préoccupation au sujet de « la sécurité des journalistes ».
Tard en soirée samedi, un immeuble d'une dizaine d'étages, la tour al-Andalous, a été gravement endommagé par des frappes, ont constaté des journalistes de l'AFP à Gaza.
Et sur le coup de minuit, le Hamas a lancé un nouveau barrage de roquettes vers des villes israéliennes dont la métropole Tel-Aviv.
Conseil de Sécurité
En coulisses, les tractations diplomatiques s'intensifient pour tenter de mettre un terme aux violences avec une réunion virtuelle du Conseil de sécurité prévue dimanche, alors qu'en Amérique du Nord et en Europe, des dizaines de milliers de manifestants sont descendus dans la rue en soutien aux Palestiniens.
Un haut responsable du département d'Etat américain, Hady Amr, doit par ailleurs rencontrer des dirigeants israéliens à Jérusalem dimanche et se rendre en Cisjordanie occupée pour des discussions avec des responsables palestiniens.
Le président américain Joe Biden a d'ailleurs discuté samedi au téléphone avec le chef du gouvernement israélien Benjamin Netanyahu et, pour la première fois depuis son arrivée à la Maison Blanche, avec le président palestinien Mahmoud Abbas.
Et le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres s'est d'ailleurs « consterné » par le « nombre croissant de victimes civiles » et « profondément perturbé » par l'attaque israélienne contre un bâtiment abritant les bureaux d'Al-Jazeera et d'Associated Press (AP).
AP « choquée et horrifiée »
La direction d'AP s'est dite « choquée et horrifiée » par la frappe israélienne. « Nous avons évité de justesse de terribles pertes humaines », a dit dans un communiqué le patron de l'agence, Gary Pruitt.
Le chef du bureau d'Al-Jazeera en Israël et dans les Territoires palestiniens Walid al-Omari a lui estimé qu'Israël avait « décidé non plus de causer des destructions et des morts, mais aussi de faire taire ceux qui le montrent », a t-il déclaré à l'AFP.
L'AFP a elle exprimé sa « solidarité » avec les « collègues d'Associated Press et d'Al-Jazeera ». « L'AFP tient à exprimer toute sa solidarité avec les médias dont les bureaux ont été détruits à Gaza. Le droit à l'information doit être scrupuleusement respecté par toutes les parties à un conflit », a déclaré le PDG de l'Agence France-Presse, Fabrice Fries.
En 2012, le bâtiment où se trouvait le bureau de l'AFP à Gaza avait été visé par des missiles israéliens, sans que les journalistes présents, trois étages en dessous de l'impact, ne soient touchés.
« Nakba »
Alors que la flambée de violence entre Israël et le Hamas à Gaza ne montre aucun signe d'accalmie, le dernier bilan des autorités palestiniennes fait état de 145 morts, parmi lesquels 41 enfants et 1 100 blessés dans les bombardements sur l'enclave palestinienne depuis lundi.
Cette opération israélienne, la plus importante depuis la guerre de 2014 avec le Hamas a commencé en réponse à un barrage de roquettes du Hamas sur Israël, tirées en « solidarité » avec les centaines de Palestiniens blessés dans des heurts avec la police israélienne sur l'esplanade des Mosquées à Jérusalem-Est, secteur palestinien occupé par Israël.
Les autorités israéliennes étaient par ailleurs en état d'alerte samedi, alors que de nouvelles manifestations de colère ont eu lieu à travers la Cisjordanie occupée.
Les Palestiniens commémorent chaque 15 mai la Nakba, la « catastrophe » qu'a représentée à leurs yeux la création d'Israël en 1948, et synonyme d'exode pour des centaines de milliers d'entre eux.
Et samedi soir, deux Palestiniens ont été tués dans des confrontations avec les forces israéliennes en Cisjordanie, au lendemain des affrontements parmi les plus violents depuis des années dans ce territoire (11 morts), selon les services de santé palestiniens.
Le ministre israélien de la Défense Benny Gantz a pour sa part menacé, en cas de troubles dans ce territoire occupé par Israël, « d'annuler les mesures d'aide à l'économie et à la société palestinienne après l'année de (crise du) corona ».
Sur son territoire, Israël est également confronté à une escalade inédite d'une violence inter-communautaire et de menaces de lynchages dans ses villes « mixtes », où vivent Juifs et Arabes, notamment à Lod (centre), Jaffa près de Tel-Aviv ou encore Acre, dans le nord du pays.