NEW YORK: La guerre des salaires a commencé aux États-Unis, où McDonald's et Amazon viennent à leur tour d'annoncer des paies plus élevées pour attirer les employés, tandis que plusieurs États vont réduire ou supprimer dès juin les allocations chômage supplémentaires liées à la Covid.
Les entreprises voient leur activité repartir à mesure que la population est vaccinée. Mais elles peinent à recruter, en particulier dans les secteurs où les salaires sont les plus bas, à commencer par la restauration.
Pour attirer la main-d’œuvre, une seule solution: aligner les billets verts.
McDonald's va ainsi augmenter certains salaires face à «une situation compliquée au niveau du recrutement», a expliqué jeudi Joe Erlinger, responsable aux États-Unis de la célèbre chaîne de restauration rapide.
Pour recruter rapidement 10 000 personnes, le groupe augmente donc les salaires à l'embauche dans les établissements qu'il gère directement – et non ceux des franchisés – désormais entre 11 et 17 dollars de l'heure pour les employés, 15 et 20 dollars pour les managers.
Le salaire minimum est de 7,25 dollars dans le pays même si plusieurs États imposent un niveau plus élevé.
«Proche du socialisme»
Une autre chaîne de restauration rapide, Chipotle, avait déjà annoncé lundi une hausse du salaire minimum à l'embauche, à 11 dollars de l'heure, avec l'objectif d'un salaire horaire moyen dans ses restaurants de 15 dollars d'ici juillet.
Selon les derniers chiffres disponibles du ministère américain du Travail, la rémunération horaire médiane des employés de fast-food était de 11,47 dollars en mai 2020.
Le géant du commerce en ligne Amazon, qui a annoncé jeudi vouloir recruter 75 000 personnes supplémentaires aux États-Unis et au Canada, propose de son côté un salaire horaire moyen à l'embauche de plus de 17 dollars, et jusqu'à 1 000 dollars de prime.
Les enseignes de distribution Target et Costco ont aussi relevé leurs salaires minimums pour atteindre ou dépasser 15 dollars.
Car de très nombreux Américains, licenciés avec la crise, choisissent d'attendre avant de chercher un boulot dans l'espoir de décrocher un meilleur emploi, profitant d'allocations chômage inhabituellement généreuses.
D'autres ne sont pas encore en mesure de retourner travailler, à cause des problèmes de garde d'enfants notamment.
«Nous entendons régulièrement les entreprises nous dire qu'elles augmentent les salaires, mais ne parviennent quand même pas à attirer les travailleurs», a commenté jeudi Christopher Waller, un gouverneur de la Banque centrale américaine (Fed).
Pour lui, pas d'inquiétude, «ce décalage est temporaire», et se résorbera avec la vaccination, la réouverture complète des écoles, et l'expiration des allocations chômage supplémentaires.
Car les chiffres de l'emploi en avril ont semé la zizanie: la reprise économique laissait espérer un million d'emplois créés, mais seuls 266 000 ont vu le jour.
Pour l'opposition républicaine, la responsabilité vient des allocations chômage.
Face à l'hémorragie d'emplois provoquée par la pandémie, le gouvernement a en effet, à plusieurs reprises, étendu les droits. Les chômeurs peuvent désormais toucher une allocation jusqu'au 6 septembre, même si leurs droits sont épuisés, et les travailleurs indépendants peuvent aussi y prétendre.
Mais ce sont surtout les 300 dollars supplémentaires accordés chaque semaine par l'État fédéral à tous les bénéficiaires qui font grincer des dents.
«C'est plus proche du socialisme que tout ce que j'ai vu», avait réagi le gouverneur de Caroline du Sud, Henry McMaster, mardi sur la chaîne Fox News.
609 000 personnes sans allocation
Les pouvoirs publics américains n'avaient pas habitué les chômeurs à une telle générosité. Selon les États, le chômage est habituellement versé pendant 3 à 6 mois, de 235 dollars maximum par semaine dans le Mississippi, à plus de 800 dollars dans le Massachusetts.
Caroline du Sud, mais aussi Arkansas, Missouri, Dakota du Nord ou encore Wyoming, vont donc refermer le porte-monnaie.
«Au moins 11 États» vont réduire, voire supprimer, les aides supplémentaires, dès juin ou juillet, a souligné Nancy Vanden Houten, analyste pour Oxford Economics.
Cela signifie qu'au moins «609 000 personnes (...) perdront toute allocation chômage», en plus des «279 000 personnes (qui) perdront leurs 300 dollars supplémentaires», a-t-elle calculé.
Or, «il manque encore des millions d'emplois» par rapport à avant la pandémie, «ce n'est pas comme si c'était quasiment réglé», a déploré le secrétaire aux Transports Pete Buttigieg jeudi sur la chaîne CNBC, défendant la nécessité de maintenir ces aides.
Le président Joe Biden avait refusé mardi, de supprimer ce filet de sécurité, mettant cependant en garde: «si vous touchez une allocation chômage et que l'on vous offre un emploi convenable, vous ne pouvez pas refuser cet emploi pour continuer à toucher le chômage».