LONDRES/ BRUXELLES/ NEW DELHI: Ecoles, commerces et déplacements ont repris lundi après des mois de restrictions dans plusieurs pays d'Europe, sous l'oeil prudent des gouvernements, tandis que la pandémie de coronavirus continue de faire des ravages en Inde.
Les campagnes de vaccination menées activement dans plusieurs pays occidentaux ont permis aux autorités d'entreprendre une réouverture de leurs économies et une levée des restrictions individuelles.
Mais la pandémie de Covid-19, qui a coûté la vie à près de 3,3 millions de personnes, continue de progresser ailleurs dans le monde, ravivant les craintes sur l'inégalité de l'accès aux vaccins.
Au Royaume-Uni, pays le plus endeuillé d'Europe avec plus de 127 000 morts, les autorités sanitaires ont abaissé lundi le niveau d'alerte relatif à la pandémie, le passant de quatre à trois sur une échelle en comptant cinq. Et le Premier ministre Boris Johnson devait confirmer dans l'après-midi l'assouplissement de restrictions.
Cette nouvelle étape, la troisième de la feuille de route gouvernementale, prendra effet le 17 mai. Les Britanniques devraient être autorisés à se rencontrer dans des endroits clos à six personnes maximums tandis que pubs et restaurants devraient pouvoir servir leurs clients en salle.
Depuis le lancement de la campagne début décembre, plus de 35 millions des 68 millions d'habitants du Royaume-Uni ont reçu une première dose de vaccin.
« Nous pouvons maintenant déconfiner avec prudence mais de manière irréversible », a commenté M. Johnson dans un communiqué.
En Espagne, un vent de liberté s'est levé dimanche avec la fin de l'état d'urgence sanitaire. Les habitants ont pu sortir de leur région ou se rassembler dans la rue le soir.
Dans plusieurs villes du pays, cris, applaudissements et musique ont marqué, à 00H00, la fin de ce régime d'exception imposé depuis octobre et la levée dans la plupart des régions du couvre-feu.
Mais les images de centaines de fêtards sans respect des gestes barrières à Madrid et ailleurs ont entraîné un appel à « la responsabilité » : « la fin du régime d'exception ne veut pas dire la fin des restrictions », a averti le ministre de la Justice Juan Carlos Campo.
En Allemagne, les plus de 7 millions de personnes vaccinées bénéficient désormais d'assouplissements des strictes règles sanitaires.
A Milan, dans le nord de l'Italie, c'est le célèbre théâtre de la Scala qui rouvre lundi soir au public. « Je suis sûr qu'avec le retour des spectateurs à la Scala, il y aura des larmes de bonheur », a estimé son directeur, le Français Dominique Meyer.
L'île méditerranéenne de Chypre rouvre ses frontières lundi aux touristes vaccinés en provenance de 65 pays, tandis qu'en Grèce, toutes les écoles ont rouvert après six mois de fermeture.
L'Irlande aussi peut souffler un peu: après de longs mois de confinement, les déplacements à l'intérieur du pays sont autorisés et les commerces non essentiels peuvent rouvrir, sur rendez-vous.
LE PASS SANITAIRE EUROPÉEN EN PHASE DE TESTS POUR ÊTRE OPÉRATIONNEL EN JUIN
Le pass sanitaire européen, qui fait toujours l'objet de négociations politiques au sein de l'UE, a commencé lundi une phase de tests qui doit lui permettre d'être opérationnel techniquement en juin, avant la saison estivale, a annoncé la Commission européenne.
La France et Malte sont les deux premiers pays à tester lundi l'interopérabilité du système. Il s'agit de vérifier la capacité des Etats membres à se connecter à la « passerelle » européenne mise en place. Cette phase pilote, qui s'échelonne sur deux semaines, concerne au total 18 pays de l'UE plus l'Islande, a indiqué un porte-parole de l'exécutif européen, Johannes Bahrke.
Cette phase n'implique pas l'utilisation de données réelles ni la participation de citoyens. Mais dès le 1er juin, les pays membres pourront commencer à se servir du système dans des conditions réelles s'ils sont prêts, a précisé le porte-parole.
Ce certificat sanitaire européen est destiné à fournir un cadre harmonisé pour faciliter la libre circulation au sein de l'UE cet été.
Il contient un code QR indiquant que son titulaire a été vacciné, ou qu'il a passé un test négatif ou encore qu'il dispose d'une immunité après avoir été infecté par le Covid-19. Il s'accompagne d'une signature électronique qui atteste de son authenticité. Lors du contrôle du certificat par l'autorité compétente (garde-frontière, police), le code QR est scanné et la signature électronique est vérifiée.
Il revient aux Etats membres de décider s'ils intègrent ce certificat dans leur application de traçage nationale -comme en France- ou s'ils utilisent une application distincte.
Le système est développé par les entreprises allemandes T-Systems et SAP.
Parallèlement à ces préparatifs techniques, le règlement sur le certificat sanitaire européen fait l'objet de discussions entre les eurodéputés et les représentants du Conseil, institution représentant les Etats membres.
Les désaccords portent notamment sur la gratuité ou le plafonnement du prix des tests, réclamés par le Parlement européen.
Les eurodéputés demandent aussi qu'il soit impossible à un Etat membre d'imposer des restrictions supplémentaires, comme une quarantaine, au détenteur d'un certificat sanitaire européen qui arrive sur son territoire. Or les pays membres veulent se réserver cette possibilité.
Une nouvelle session de négociation doit avoir lieu mardi. Un éventuel compromis devra ensuite être approuvé par le Conseil et faire l'objet d'un vote en plénière au Parlement européen. La Commission espère voir adopter le règlement avant la fin juin.
Efficacité face aux variants, dit BioNTech
Sur le front de la stratégie vaccinale, l'Union européenne n'a pas renouvelé pour l'instant son contrat de fourniture avec AstraZeneca pour après le mois de juin, a indiqué dimanche le commissaire européen Thierry Breton.
Pour autant, ce responsable a laissé planer le doute quant à savoir si cette décision signifiait une fin de non-recevoir définitive pour le vaccin AstraZeneca. « Ce n'est pas encore fait, attendez », a-t-il dit.
Le vaccin d'AstraZeneca a pâti de très forts retards de livraison qui ont poussé l'UE à introduire une action en justice contre le laboratoire suédo-britannique.
En Norvège, un comité d'experts mis en place par le gouvernement a pour sa part recommandé de renoncer à ce vaccin mais aussi à celui de l'américain Johnson & Johnson, cette fois en raison des risques d'effets secondaires rares mais graves.
L'Agence européenne des médicaments se rend de son côté lundi en Russie pour inspecter les sites de production du vaccin Spoutnik V, toujours pas autorisé dans l'UE, même si la Hongrie a commencé à l'utiliser.
« Ligne de démarcation » sur l'Everest
Ailleurs dans le monde, la pandémie connaît un regain parfois spectaculaire, comme en Inde où le pays de 1,3 milliard d'habitants enregistre record macabre sur record macabre.
Pour la première fois samedi, plus de 4 000 personnes sont mortes de la Covid-19 en 24H et plus de 400 000 nouvelles contaminations ont été enregistrées, selon les chiffres officiels que certains experts estiment largement sous-évalués.
Le variant du coronavirus découvert dans ce pays est plus contagieux et présente des caractéristiques qui pourraient rendre les vaccins moins efficaces, contribuant à l'accélération de l'épidémie en Inde, a averti samedi la scientifique en chef de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) Soumya Swaminathan.
L'allemand BioNTech a néanmoins assuré lundi que face aux variants actuels, il n'était pas nécessaire de modifier la formule de son vaccin développé avec l'américain Pfizer.
L'Inde, qui est le plus grand producteur mondial de vaccins, n'a jusqu'à présent administré deux doses qu'à 2% de sa population.
La Chine, premier pays frappé par la pandémie dès la fin 2019, va quant à elle installer une « ligne de démarcation » au sommet de l'Everest pour éviter tout risque de contamination à la Covid-19 par des alpinistes en provenance du Népal.
Au Japon, la recrudescence de la pandémie a entraîné le report d'une visite prévue les 17 et 18 mai du président du Comité international olympique (CIO), Thomas Bach. Les JO à Tokyo doivent s'ouvrir dans 74 jours (23 juillet-8 août).
Et avant la fête musulmane de l'Aïd al-Fitr, marquant la fin du ramadan cette semaine, la Malaisie a annoncé de nouvelles restrictions après une forte hausse des contaminations.
INDE: DES DIZAINES DE CORPS PRÉSUMÉS MORTS DE LA COVID-19 S'ÉCHOUENT SUR LES RIVES DU GANGE
Des dizaines de corps de personnes présumées mortes de la Covid-19 se sont échoués sur les rives du Gange dans le nord de l'Inde, ont annoncé lundi les autorités.
La pandémie s'étend à toute allure dans le vaste arrière-pays rural indien, submergeant les structures sanitaires, les crématoriums et les cimetières.
Un fonctionnaire local, Ashok Kumar, a indiqué qu'une quarantaine de corps s'étaient échoués dans le district de Buxar, près de la frontière entre le Bihar et l'Uttar Pradesh, deux des plus pauvres Etats indiens.
« Nous avons ordonné aux fonctionnaires concernés de s'occuper des corps, et de soit les enterrer, soit les brûler », a dit M. Kumar.
Certains médias ont affirmé que le nombre de cadavres pourrait atteindre la centaine.
Les mêmes sources citent d'autres fonctionnaires précisant que certains corps sont boursouflés et partiellement brûlés et ont pu passer plusieurs jours dans le fleuve.
Des habitants ont déclaré qu'ils pensaient que les cadavres ont été jetés à l'eau parce que les crématoriums étaient débordés ou parce que les proches des victimes ne pouvaient payer le bois nécessaire pour les bûchers funéraires.
« C'est vraiment choquant pour nous », a déploré un habitant, Kameshwar Pandey.