Des partis chrétiens libanais appellent à sauver la souveraineté de la menace du Hezbollah

Moawad a appelé à «la formation d'une opposition véridique, capable et unie pour faire face à la mafia et à la milice». (Photo, AFP/Archives)
Moawad a appelé à «la formation d'une opposition véridique, capable et unie pour faire face à la mafia et à la milice». (Photo, AFP/Archives)
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Publié le Jeudi 29 avril 2021

Des partis chrétiens libanais appellent à sauver la souveraineté de la menace du Hezbollah

  • Moawad estime que «reprendre l'État à la mafia et à la milice passe par le rétablissement de la souveraineté sur toutes nos frontières et le rapatriement du pouvoir décisionnel»
  • «Le chaos actuel confirme la collusion flagrante entre la mafia et la milice»

BEYROUTH: Des partis chrétiens au Liban ont appelé à la démission collective du Parlement mercredi, et ont accusé le Hezbollah de dominer le pays.

Le chef du Mouvement pour l'indépendance, Michel Moawad, député démissionnaire et fils de l'ancien président René Moawad, a déclaré lors d'une conférence de presse que «chaque jour qui passe, nous sommes de plus en plus convaincus que nous avons affaire à une autorité de conspirateurs, criminelle et corrompue».

«Les Libanais paient le prix de la coexistence entre l'État et le mini-État», ajoute-t-il, insistant que le Hezbollah devrait «nous laisser tranquilles».

Moawad, qui a démissionné du Parlement à la suite de l'explosion du port de Beyrouth le 4 août, estime que «reprendre l'État à la mafia et à la milice passe par le rétablissement de la souveraineté sur toutes nos frontières et le rapatriement du pouvoir décisionnel».

«Quel intérêt avons-nous à appartenir à un axe contre l'autre? Quel intérêt avons-nous à être hostiles envers les pays qui ne nous attaquent pas? Quel intérêt avons-nous à être hostiles aux Arabes ou à la communauté internationale et à combattre au Yémen et ailleurs? Quel intérêt avons-nous à exporter des roquettes, des milices et de la drogue? Comment bâtir une économie productive? Comment protégeons-nous les ressortissants libanais à l'étranger?»

Il a ajouté: «La souveraineté signifie faire respecter l’autorité de l’État libanais, en utilisant ses propres capacités, sur l’ensemble du territoire. Il ne devrait donc pas y avoir de zones surveillées, d’armes illégales à l’intérieur ou à l’extérieur des camps de réfugiés, d’entrepôts d’armes, de roquettes, de camps d’entrainement pour former des Houthis et des non-Houthis ainsi que des usines de Captagon».

Moawad a également appelé à «la formation d'une opposition véritable, capable et unie pour faire face à la mafia et à la milice et se concentrer sur la récupération de l'État».

Après avoir rencontré le patriarche maronite Béchara Raï le bloc parlementaire des députés des Forces libanaises a renouvelé ses appels à la tenue d’élections législatives anticipées.

La députée Sethrida Geagea a exprimé son soutien à l'appel de Raï à la neutralité. «Notre pays est un petit pays situé dans une région de troubles. Il n’est pas sage de le placer au cœur des conflits de la région, car cela l’isolerait complètement de son environnement arabe et de ses amis internationaux».

«Il n'y a aucun espoir qu’un gouvernement soit formé par la majorité au pouvoir car, même si c’est le cas, il serait une réplique exacte de ceux qui ont précédé. Ceci signifie que les vraies réformes ne sont pas une possibilité. La solution réside dans la création d’une nouvelle classe dirigeante afin de mettre fin à l’hégémonie de cette majorité parlementaire sur le pays en raison de la situation désastreuse à laquelle elle nous conduit. Cela ne peut être fait que par la seule étape réalisable disponible, la tenue d'élections législatives anticipées».

Le bureau politique du parti Kataëb a souligné que «Le chaos actuel confirme la collusion flagrante entre la mafia et la milice, qui vise à transformer le Liban en un État en faillite, l'entraînant dans des programmes qui servent les intérêts étrangers au détriment de l'identité du pays et son rôle historique, et l'isoler des pays qui peuvent l'aider à surmonter la crise actuelle afin de l'étouffer davantage.

«La situation ne changera pas tant que le Liban aura un parlement dominé par la volonté du Hezbollah, et qui n’est pas en mesure d’empêcher les violations car il a perdu sa légitimité nationale».

Camille Chamoun, nouveau chef du Parti national libéral, a ajouté: «Le Liban est vraiment en difficulté».

Arab News a demandé à l'ancien député d'opposition Farès Saïd si les mesures prises par les partis politiques chrétiens sont une tentative d'établir un nouveau Front libanais face aux autorités et au Hezbollah, similaire au Front libanais qui a été créé pendant la guerre civile.

«Les mesures prises par ces partis sont naturelles. Cependant, je crois que l'objectif principal devrait être de mettre fin à l'occupation iranienne du Liban, c’est la priorité», estime Saïd.

«Ce qu'il faut, c'est que le Hezbollah rende ses armes conformément à la constitution et aux résolutions de légitimité internationale. Cette solution n’est pas faisable actuellement, ce qui a incité Raï à appeler à la tenue d’une conférence internationale en vue de garantir la neutralité du Liban. C'est une proposition sérieuse qui pourrait nous conduire à la solution désirée. Le défunt patriarche Nasrallah Sfeir a exigé le départ des forces syriennes qui occupaient le Liban en 2000. Cette demande a été exaucée en 2005», a-t-il ajouté.

Concernant la position du Courant patriotique libre à la lumière de l’appel des partis chrétiens à restituer la souveraineté du Liban loin du Hezbollah, Saïd affirme qu’il ne fait aucun doute que le Hezbollah a encore beaucoup de partisans parmi les chrétiens en raison de l’alliance en vigueur. «Si cette alliance est rompue, la scène politique pourrait alors changer».

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le ministre irakien des Affaires étrangères en visite officielle aux États-Unis

 Le ministre irakien des affaires étrangères, Fuad Hussein. (File/AFP)
Le ministre irakien des affaires étrangères, Fuad Hussein. (File/AFP)
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  • La visite s'inscrit dans le cadre de l'engagement diplomatique continu entre les deux pays dans un contexte d'évolution de la dynamique régionale
  • "Nous discuterons des moyens de renforcer la sécurité commune et la coopération dans divers domaines", a déclaré le ministre des affaires étrangères.

DUBAI : Le ministre irakien des Affaires étrangères, Fuad Hussein, s'est envolé jeudi pour les Etats-Unis afin de participer à une série de réunions bilatérales visant à renforcer les liens entre Bagdad et Washington.

Dans une déclaration partagée sur la plateforme X et rapportée par l'Agence de presse irakienne, M. Hussein a déclaré que la visite se concentrera sur le renforcement des relations irako-américaines et la coordination des efforts sur les questions régionales et internationales clés.

"Nous discuterons des moyens de renforcer la sécurité commune et la coopération dans divers domaines", a déclaré le ministre des affaires étrangères.

Cette visite s'inscrit dans le cadre d'un engagement diplomatique continu entre les deux pays, dans un contexte d'évolution de la dynamique régionale.


Gaza: 22 morts dans des bombardements israéliens, selon secouristes et hôpitaux

L'hôpital indonésien à Jabalia dit avoir reçu les corps de neuf victimes après un bombardement israélien sur un commissariat de police de cette ville du nord du territoire palestinien. (AFP)
L'hôpital indonésien à Jabalia dit avoir reçu les corps de neuf victimes après un bombardement israélien sur un commissariat de police de cette ville du nord du territoire palestinien. (AFP)
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  • L'armée israélienne a confirmé dans un communiqué avoir effectué une frappe dans la région de Jabalia, précisant qu'elle ciblait "des terroristes opérant dans un centre de commandement et de contrôle du Hamas et du Jihad islamique"
  • Une autre frappe aérienne sur une maison dans le nord de la ville de Gaza, dans le nord du territoire palestinien, a tué une famille de six personnes, un couple et ses quatre enfants, a indiqué la Défense civile à Gaza

GAZA: Au moins 22 personnes, dont six membres d'une même famille, ont été tuées dans de nouveaux bombardements israéliens sur la bande de Gaza jeudi matin, ont annoncé la Défense civile palestinienne et des sources hospitalières.

L'hôpital indonésien à Jabalia dit avoir reçu les corps de neuf victimes après un bombardement israélien sur un commissariat de police de cette ville du nord du territoire palestinien.

L'armée israélienne a confirmé dans un communiqué avoir effectué une frappe dans la région de Jabalia, précisant qu'elle ciblait "des terroristes opérant dans un centre de commandement et de contrôle du Hamas et du Jihad islamique".

Une autre frappe aérienne sur une maison dans le nord de la ville de Gaza, dans le nord du territoire palestinien, a tué une famille de six personnes, un couple et ses quatre enfants, a indiqué la Défense civile à Gaza.

Cette organisation de secouristes a aussi fait état de deux morts dans une frappe sur une tente de personnes déplacées à Khan Younès, dans le sud.

Toujours à Khan Younès, l'hôpital Nasser annonce avoir reçu les dépouilles de deux victimes après une frappe sur une maison familiale. L'hôpital des martyrs d'al-Aqsa dit, lui, avoir reçu trois corps après une frappe sur une tente de personnes déplacées dans le camp de Nuseirat (centre).

Rompant une trêve de près de deux mois dans la guerre déclenchée il y a plus d'un an et demi, Israël a repris le 18 mars son offensive aérienne puis terrestre dans la bande de Gaza, où au moins 1.928 Palestiniens ont été tués depuis selon le ministère de la Santé du Hamas.

Ce bilan porte à 51.305 le nombre de morts dans la bande de Gaza, selon la même source, depuis le début de l'offensive israélienne lancée en représailles à l'attaque du Hamas en Israël le 7 octobre 2023.

L'attaque sans précédent du Hamas a entraîné la mort de 1.218 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Sur les 251 personnes enlevées le 7-Octobre, 58 sont toujours otages à Gaza dont 34 sont mortes, selon l'armée israélienne.

 


1982 – Le massacre de Sabra et Chatila

Les corps des victimes du massacre de Sabra et Shatila sont transportés par le personnel de la Croix-Rouge pour être enterrés à Beyrouth. (Getty Images)
Les corps des victimes du massacre de Sabra et Shatila sont transportés par le personnel de la Croix-Rouge pour être enterrés à Beyrouth. (Getty Images)
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  • Le massacre, qui s'est déroulé au plus fort de la guerre civile libanaise, et les raisons qui l'ont motivé mettent en lumière les dimensions régionales complexes qui ont entouré le conflit
  • Arab News a publié des images saisissantes du massacre, qualifié de crime commis «avec la connivence des envahisseurs israéliens»

LONDRES: Le massacre de Sabra et Chatila, survenu en 1982, reste l’un des épisodes les plus tragiques et emblématiques de l’histoire politique mouvementée du Liban.

Des membres d’une milice chrétienne libanaise de droite ont pénétré dans le quartier de Sabra, au sud de Beyrouth, ainsi que dans le camp de réfugiés palestiniens de Chatila, tout proche. Ils y ont massacré des centaines de personnes. Certaines estimations font état de plus de 3 000 victimes, majoritairement des civils palestiniens et des Libanais musulmans.

Au moment où les atrocités ont eu lieu, le quartier, où résidaient de nombreux dirigeants palestiniens, ainsi que le camp, étaient sous le contrôle des forces d'occupation israéliennes à la suite de leur invasion du Liban-Sud trois mois plus tôt.

Selon certaines sources, les meurtres de masse ont été commis au vu et au su des forces israéliennes, de 18 heures environ le 16 septembre à 8 heures du matin le 18 septembre. Certains ont même affirmé que les milices chrétiennes avaient reçu l'ordre des Israéliens de «chasser» les combattants de l'Organisation de libération de la Palestine de Sabra et Chatila, dans le cadre de l'avancée israélienne dans la partie ouest de Beyrouth, majoritairement musulmane. Des rapports ultérieurs ont suggéré que les Israéliens avaient reçu des rapports sur les atrocités, mais qu'ils n'avaient pris aucune mesure pour les prévenir ou les arrêter.

Le massacre, qui s'est déroulé au plus fort de la guerre civile libanaise, et les raisons qui l'ont motivé mettent en lumière les dimensions régionales complexes qui ont entouré le conflit.

Comment nous l'avons écrit

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Arab News a publié des images saisissantes du massacre, qualifié de crime commis «avec la connivence des envahisseurs israéliens», provoquant une onde de choc et des réactions d’horreur à travers le monde.

Au Liban, le sectarisme a presque toujours été un facteur central des conflits qui ont façonné les équilibres politiques et redessiné les cartes du pouvoir. Bien avant la chute de l’Empire ottoman à la fin de la Première Guerre mondiale, dont le territoire libanais faisait alors partie, la région du Mont-Liban avait déjà été le théâtre de violences confessionnelles. Ces tensions ont débuté en 1840 et ont atteint leur paroxysme en 1860, avec des massacres d'une telle ampleur qu'ils ont entraîné une intervention militaire française. L’Empire ottoman avait alors réagi avec fermeté, cherchant à contenir l’avancée française, dans un contexte de pressions diplomatiques exercées par les grandes puissances européennes.

Le bouleversement politique majeur consécutif aux massacres de 1860 fut la création, en 1861, du district autonome du Mont-Liban, gouverné par un fonctionnaire ottoman chrétien dont la nomination devait être validée par les puissances européennes.

Mais après la défaite de l’Empire ottoman à l’issue de la Première Guerre mondiale, la Conférence de paix de Paris en 1920 annexa plusieurs régions au Mont-Liban – notamment Beyrouth – et plaça le nouvel État élargi du Liban sous mandat français.

Dans ce Grand Liban, la population chrétienne, auparavant majoritaire dans la région montagneuse du Mont-Liban, vit son poids démographique réduit par l’intégration de grandes villes et districts à majorité sunnite et chiite. Néanmoins, les chrétiens comptaient sur le soutien du mandat français pour préserver leur domination politique. Une illusion qui s’estompa rapidement, surtout après l’indépendance du Liban en 1943.

À cette date, selon de nombreuses estimations, les musulmans – sunnites, chiites et druzes – formaient déjà une majorité démographique. Parallèlement, l’émergence du nationalisme arabe, alimenté par la Nakba palestinienne de 1948, radicalisa la scène politique régionale. L’afflux de réfugiés palestiniens au Liban, comme en Jordanie, accentua les tensions et contribua à fragiliser davantage l’équilibre confessionnel libanais.

Le processus de radicalisation a été encore accéléré par la défaite arabe lors de la guerre israélo-arabe de juin 1967, qui a donné naissance, ainsi qu'une énorme crédibilité, au mouvement de résistance palestinien (les «fedayins»).

À l'automne 1970, à la suite de batailles entre les fedayins et l'armée jordanienne, les mouvements de résistance palestiniens ont transféré leur quartier général d'Amman à Beyrouth.

Les musulmans libanais, les nationalistes arabes et les dirigeants de gauche se rangent aux côtés des Palestiniens et font cause commune avec eux. De l'autre côté, l'élite politique chrétienne et les masses chrétiennes au Liban craignaient que cette alliance naissante ne constitue une menace mortelle pour leur position dominante dans le pays et, par conséquent, pour son régime, son identité et sa souveraineté.

J'ai vécu cette époque et je m'en souviens très bien. En 1973, l'armée libanaise, dirigée par les chrétiens, a tenté de contenir le pouvoir des fedayins dans les camps de réfugiés, mais le tollé soulevé par la gauche musulmane contre les actions de l'armée a ouvert la voie à une guerre civile imminente. Très vite, les milices chrétiennes ont été ouvertement armées et entraînées par des officiers de l'armée, tandis que les milices gauchistes et arabisantes ont également obtenu des armes et un entraînement par l'intermédiaire des Palestiniens et de certains régimes arabes.

La guerre a éclaté en 1975 et s'est poursuivie, en plusieurs phases, jusqu'en 1990. L'invasion israélienne de juin 1982 avait pour but d'achever l'infrastructure militaire et politique palestinienne et d'établir un régime «ami» à Beyrouth. Israël a tenté d'y parvenir en utilisant sa puissance militaire pour forcer les mouvements de résistance palestiniens à quitter le Liban, puis en confiant la présidence libanaise à Bachir Gemayel, chef des Forces libanaises, la milice chrétienne la plus puissante, en août 1982.

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Des familles pleurent les victimes du massacre dans le quartier de Sabra à Beyrouth et dans le camp de réfugiés adjacent de Chatila, où vivent des milliers de réfugiés palestiniens. (Images Getty) 

Cependant, Gemayel a été assassiné le 14 septembre 1982, avant même d'avoir pu prêter serment. Son assassinat, dans une explosion massive à Beyrouth, a choqué les chrétiens et rendu furieuses leurs milices, qui ont riposté en attaquant Sabra et Chatila deux jours plus tard.

À cette époque, le monde arabe est affaibli et profondément divisé à la suite de la reconnaissance d'Israël par l'Égypte dans les accords de Camp David de 1979, qui a entraîné la suspension de l'adhésion du pays à la Ligue arabe.

Les Israéliens ont donc pu participer au massacre de Sabra et Chatila sans craindre d'importantes représailles de la part des Arabes. En fait, c'est le tollé général suscité par ce massacre qui a conduit à la création d'une commission d'enquête présidée par Sean MacBride, assistant du secrétaire général des Nations unies et président de l'Assemblée générale des Nations unies à l'époque.

Le rapport de la commission, publié en 1983, concluait qu'Israël, en tant que puissance occupante, portait la responsabilité des violences et que le massacre constituait une forme de génocide.

La réaction de choc au massacre a été forte même en Israël, où les autorités ont créé leur propre commission Kahan pour enquêter sur l'incident. Son rapport, également publié en 1983, conclut que, bien que consciente de l'existence d'un massacre, l'armée israélienne n'a pris aucune mesure sérieuse pour y mettre un terme.

La commission a déclaré qu'Israël était indirectement responsable «d'avoir ignoré le danger d'effusion de sang et de vengeance» et que le ministre de la Défense, Ariel Sharon, en portait personnellement la responsabilité, ce qui l'a contraint à démissionner.

Eyad Abu Shakra est le rédacteur en chef d'Asharq Al-Awsat.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com