L’annonce du retrait des troupes américaines d’Afghanistan attise la violence des talibans

La police afghane de sécurité monte la garde dans un point de contrôle de Jalalabad, en Afghanistan, mercredi 21 avril 2021. (AP)
La police afghane de sécurité monte la garde dans un point de contrôle de Jalalabad, en Afghanistan, mercredi 21 avril 2021. (AP)
Short Url
Publié le Mercredi 28 avril 2021

L’annonce du retrait des troupes américaines d’Afghanistan attise la violence des talibans

  • «En dépit de l'engagement auquel ils ont souscrit dans le cadre de l'accord […], aucun signe ne laisse supposer que les talibans se soient démarqués d'Al-Qaïda»
  • Pour les experts, il est difficile de déterminer dans quelle mesure les revendications des deux parties ne constituent pas une simple «publicité de guerre»

KABOUL: Les talibans intensifient leurs attaques en Afghanistan, ce qui se traduit par une recrudescence de la violence depuis que le président américain, Joe Biden, a annoncé le retrait des troupes américaines du pays avant le 11 septembre. C’est ce qu’a indiqué mardi dernier le chef de la Direction nationale de la sécurité (service de renseignement) de l'Afghanistan.

«Les talibans ont multiplié leurs opérations de 24% depuis la conclusion de l'accord avec les États-Unis, et leurs offensives atteignent un pic depuis que M. Joe Biden a annoncé le retrait des troupes américaines», explique Ahmad Zia Saraj lors d'une conférence de presse à Kaboul.

Ce dernier accuse par ailleurs les talibans de conserver des relations étroites avec Al-Qaïda en Afghanistan, ce qui constitue une violation d'une des principales conditions de l'accord controversé qu'ils ont conclu avec les États-Unis à Doha il y a plus d'un an.

«En dépit de l'engagement auquel ils ont souscrit dans le cadre de l'accord […], aucun signe ne laisse supposer que les talibans se soient démarqués d'Al-Qaïda. Bien au contraire, nous disposons de preuves suffisantes qui montrent qu'ils aident les membres de cette organisation terroriste qui se cachent dans la région à se regrouper dans le pays», déclare M. Saraj.

L'accord du Qatar a ouvert la voie à un retrait intégral d'Afghanistan des troupes étrangères dirigées par les États-Unis, au terme de plusieurs mois de pourparlers intensifs entre les talibans et l'administration Trump, alors que le président Ashraf Ghani était exclu des pourparlers.

Au début de ce mois, le président Biden a annoncé que les troupes américaines, dans leur ensemble, quitteraient l'Afghanistan avant le 11 septembre, et non le 1er mai, ce qui mettra fin à la plus longue guerre menée par l'Amérique.

En effet, le retrait de près de 3 000 soldats américains coïncide avec la commémoration du 20e anniversaire des attentats terroristes du 11 septembre 2001, qui ont entraîné l'éviction des talibans lors d'une invasion menée par les États-Unis cette même année.

Le président Ghani annonce qu’il respecte la décision des États-Unis de retirer leurs forces, ajoutant que l'armée afghane est «parfaitement capable de défendre son peuple et son pays».

Selon M. Saraj, Kaboul n'envisage pas de libérer les milliers de prisonniers talibans – condition indispensable à la signature de l'accord du Qatar selon le groupe d'insurgés – dans la mesure où «un bon nombre» des 5 000 prisonniers libérés auparavant par le gouvernement afghan «ont rejoint le champ de bataille». 

«De ce fait, rien ne justifie la libération de nouveaux prisonniers talibans. Après le départ des armées étrangères, le gouvernement concentrera ses efforts sur la sécurisation des autoroutes dans le cadre de sa prochaine stratégie», indique-t-il.

Selon lui, le gouvernement afghan a décimé la menace de Daech dans la région lorsque, au cours des derniers mois, il a arrêté plus de 500 affiliés à ce réseau, parmi lesquels des dizaines d'enfants et de femmes. «Ils se limitent désormais à de petits groupes installés dans les villes et tentent de ressurgir pour contrôler une zone géographique, mais nous sommes parvenus à réduire leur pouvoir de nuisance», déclare M. Saraj.

«Ils ne représentent plus la menace qui pesait autrefois sur la région [...] Si, à Dieu ne plaise, nous ne parvenons pas à les étouffer complètement et que d'autres pays ne coopèrent pas avec nous, ils risquent alors de constituer à nouveau une menace pour la région», précise-t-il, avant d'ajouter que les talibans entretiennent également des «relations opérationnelles étroites avec Daech».

Dans un entretien accordé mardi dernier à Arab News, le porte-parole des talibans, Zabihullah Mujahid, dément les allégations de Saraj. Il souligne que Kaboul ne fait que «semer l'inquiétude partout dans le monde de manière à convaincre les forces d'occupation de prolonger la présence de leurs troupes dans le pays».

Selon M. Mujahid, «les talibans n'ont pas multiplié leurs attaques. Ils ne font que riposter aux offensives» du président Ghani, qu’il accuse de chercher à «saboter les efforts internationaux en faveur de la paix en Afghanistan dans le but de rester plus longtemps au pouvoir».

Pour les experts, il est difficile de déterminer dans quelle mesure les revendications des deux parties ne constituent pas une simple «publicité de guerre».

Au sujet des allégations selon lesquelles d'anciens détenus talibans seraient retournés sur le front des combats, Said Azam, analyste afghan qui habite au Canada, explique que «le bon sens veut que les prisonniers libérés retournent normalement sur le champ de bataille, ne serait-ce que pour subvenir aux besoins de leurs familles, car le gouvernement n'a pas réussi à les réintégrer ni à les aider».

Torek Farhadi, ancien conseiller du gouvernement, a validé une partie des propos de Saraj. Il a toutefois fait observer que «le départ des troupes étrangères priverait Kaboul des ressources et des biens financiers qui se sont accumulés au fil de la longue lutte contre les talibans».

«Les statistiques sont toujours matière à interprétation, en particulier lorsqu'elles proviennent du chef de la Direction nationale de la sécurité de l’Afghanistan, avide de fonds supplémentaires», affirme M. Farhadi à Arab News.

«On sait ce que [Saraj] veut montrer: que les talibans sont violents. Malheureusement, cette réalité est bien connue des Afghans et du reste du monde depuis plus de vingt ans. La question est de savoir ce qu'il compte faire pour mieux protéger les civils afghans, avec les moyens considérables dont il dispose», fait savoir M. Farhadi.

«Cette question est essentielle dans un contexte où, en raison de la violence perpétrée par les deux camps, les Afghans fuient le pays, ce qui ne tardera pas à engendrer une crise de réfugiés dans la région», déplore-t-il.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Israël devant la CIJ pour se défendre d'accusations de « génocide »

Dans un arrêt en janvier, la CIJ a ordonné à Israël de faire tout ce qui est en son pouvoir pour prévenir tout acte de génocide et permettre l'entrée de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza. (AFP)
Dans un arrêt en janvier, la CIJ a ordonné à Israël de faire tout ce qui est en son pouvoir pour prévenir tout acte de génocide et permettre l'entrée de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza. (AFP)
Short Url
  • Pretoria a demandé à la Cour internationale de justice (CIJ), qui siège à La Haye, d'enjoindre à Israël de cesser son incursion à Rafah
  • Israël a précédemment souligné son engagement "inébranlable" envers le droit international et qualifié l'affaire de l'Afrique du Sud de "totalement infondée" et "moralement répugnante"

LA HAYE: Israël va répondre vendredi devant la plus haute juridiction de l'ONU aux allégations de l'Afrique du Sud selon lesquelles il aurait intensifié une campagne "génocidaire" avec son opération militaire à Rafah.

Pretoria a demandé à la Cour internationale de justice (CIJ), qui siège à La Haye, d'enjoindre à Israël de cesser son incursion à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, essentielle selon Israël pour éliminer les militants du mouvement islamiste palestinien Hamas.

Israël a précédemment souligné son engagement "inébranlable" envers le droit international et qualifié l'affaire de l'Afrique du Sud de "totalement infondée" et "moralement répugnante".

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, qui a juré d'anéantir le Hamas, est déterminé à lancer une offensive terrestre d'envergure à Rafah, où sont retranchés selon lui les derniers bataillons du mouvement islamiste palestinien.

Israël a annoncé jeudi que son armée allait "intensifier" ses opérations au sol à Rafah, malgré les mises en garde internationales contre une offensive d'envergure dans cette ville surpeuplée du territoire palestinien.

Les avocats de Pretoria ont déclaré jeudi devant la CIJ que "le génocide" commis par Israël "a atteint un niveau horrible", évoquant notamment des fosses communes, des actes de torture et un blocage de l'aide humanitaire.

"L’Afrique du Sud avait espéré, lors de notre dernière comparution devant cette cour, mettre un terme à ce processus génocidaire afin de préserver la Palestine et son peuple", a déclaré Vusimuzi Madonsela, le représentant de Pretoria.

"Au lieu de cela, le génocide d'Israël s’est poursuivi à un rythme soutenu et vient d’atteindre un nouveau et horrible niveau", a-t-il ajouté.

Nouvelles mesures 

Dans un arrêt en janvier, la CIJ a ordonné à Israël de faire tout ce qui est en son pouvoir pour prévenir tout acte de génocide et permettre l'entrée de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza.

Mais la cour n'est pas allée jusqu'à ordonner un cessez-le-feu. Or pour Pretoria, l'évolution de la situation sur le terrain – notamment l'opération à Rafah – nécessite une nouvelle ordonnance de la CIJ.

L'opération israélienne à Rafah "est la dernière étape de la destruction de Gaza et de son peuple palestinien", a déclaré Vaughan Lowe, un avocat de l'Afrique du Sud.

"C'est Rafah qui a amené l'Afrique du Sud devant la cour. Mais ce sont tous les Palestiniens en tant que groupe national, ethnique et racial qui ont besoin de la protection contre le génocide que la cour peut ordonner", a-t-il ajouté.

Les ordonnances de la CIJ, qui tranche les différends entre Etats, sont juridiquement contraignantes mais elle n'a aucun moyen de les faire respecter.

Pretoria demande à la CIJ trois nouvelles mesures d'urgence en attendant qu'elle se prononce sur le fond de l'affaire, l'accusation selon laquelle Israël viole la Convention des Nations unies sur le génocide de 1948.

L'Afrique du Sud souhaite que la cour ordonne à Israël de cesser "immédiatement" toutes les opérations militaires à Gaza, y compris à Rafah, de permettre l'accès humanitaire et de rendre compte des mesures prises dans l'exécution de ces ordonnances.


Plus d'un tiers des zones humides de Méditerranée menacées par la montée des eaux

Plus d'un tiers des zones humides du bassin méditerranéen sont menacées par les risques de submersion marine causés par le réchauffement climatique, qui risque de détruire un habitat précieux pour les oiseaux côtiers, alerte vendredi une étude scientifique. (AFP).
Plus d'un tiers des zones humides du bassin méditerranéen sont menacées par les risques de submersion marine causés par le réchauffement climatique, qui risque de détruire un habitat précieux pour les oiseaux côtiers, alerte vendredi une étude scientifique. (AFP).
Short Url
  • Les zones humides côtières figurent parmi les zones les plus menacées par le réchauffement climatique: en raison de la montée des eaux,
  • Le parc naturel régional de Camargue, plus grande zone humide française, "pourrait par exemple subir la submersion d'une surface de terre équivalente à quatre fois la superficie de Paris"

PARIS: Plus d'un tiers des zones humides du bassin méditerranéen sont menacées par les risques de submersion marine causés par le réchauffement climatique, qui risque de détruire un habitat précieux pour les oiseaux côtiers, alerte vendredi une étude scientifique.

Les zones humides côtières figurent parmi les zones les plus menacées par le réchauffement climatique: en raison de la montée des eaux, plus de la moitié d'entre elles dans le monde pourraient disparaître sous les eaux d'ici 2100, ont déjà montré de précédentes études.

Cette nouvelle étude, parue dans la revue Conservation Biology, a modélisé les futurs risques de submersion en fonction des différents scénarios du Giec (le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU) sur 938 sites côtiers du pourtour méditerranéen.

Elle révèle que 34,4% de ces sites, soit 320 zones humides côtières, sont menacées de disparition d'ici à 2100 par la hausse du niveau de la mer, même dans les scénarios climatiques les plus optimistes (avec un réchauffement de +1,8 degré).

Dans les scénarios pessimistes (jusqu'à +4,4 degrés), ce chiffre pourrait monter à 495, soit plus de la moitié.

Le parc naturel régional de Camargue, plus grande zone humide française, "pourrait par exemple subir la submersion d'une surface de terre équivalente à quatre fois la superficie de Paris", indique un communiqué du Museum national d'histoire naturelle, qui a participé à l'étude avec l'Institut de recherche pour la conservation des zones humides méditerranéennes de la Tour du Valat.

Parmi ces zones menacées, figurent entre 54,1% et 60,7% de sites d'importance internationale pour les oiseaux d'eau, comme les flamants roses, les avocettes élégantes ou le canard chipeau, notamment lors de la période d'hivernage ou de nidification. Ces oiseaux ne disposant pas d'habitat alternatif, ces menaces pourraient "affecter négativement" leur nombre et les écosystèmes qui y sont associés.

"Ces chiffres sont sans doute sous-estimés", notent les auteurs de l'étude, soulignant que de nombreuses zones côtières, notamment en Espagne, n'ont pas été incluses et que d'autres menaces (érosion côtière, salinisation, surtourisme...) n'ont pas été prises en compte.

Pour toutes ces raisons, ils recommandent "la mise en place urgente de mesures d'adaptation" dans ces sites, comme la construction de digues mais surtout, plus efficaces à long terme, la mise en place de solutions fondées sur la nature (fixation de dunes avec de la végétation) ou encore une extension des aires protégées pour lutter notamment contre une urbanisation non maitrisée.


Inde: l'opposition fustige Modi et ses propos anti-musulmans

Le Premier ministre indien et chef du parti au pouvoir Bharatiya Janata (BJP), Narendra Modi (Photo, AFP).
Le Premier ministre indien et chef du parti au pouvoir Bharatiya Janata (BJP), Narendra Modi (Photo, AFP).
Short Url
  • M. Modi a offert au parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) deux victoires écrasantes en 2014 et 2019
  • Les analystes politiques l'ont donné vainqueur avant même les élections générales qui ont débuté le 19 avril

NEW DELHI: L'opposition indienne a accusé jeudi le Premier ministre Narendra Modi de tenir des propos stigmatisant les musulmans et alimentant, en plein processus électoral, les tensions sectaires dans la plus grande démocratie du monde, constitutionnellement laïque.

M. Modi déploie "son jeu habituel consistant à diviser les hindous et les musulmans", a déclaré jeudi P. Chidambaram, ancien ministre des Finances et membre influent du Congrès, principal parti d'opposition,

"Le monde observe et analyse les déclarations du Premier ministre indien, qui ne sont pas à la gloire de l'Inde", a-t-il ajouté.

M. Modi a offert au parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) deux victoires écrasantes en 2014 et 2019 en jouant sur la fibre religieuse de l'électorat hindou.

Agé de 73 ans et encore très populaire dans l'ensemble du pays, le Premier ministre brigue un troisième mandat à la tête du pays.

Les analystes politiques l'ont donné vainqueur avant même les élections générales qui ont débuté le 19 avril et se déroulent en sept phases jusqu'au 1er juin.

M. Modi a présenté mardi sa candidature au siège de député de Varanasi (Bénarès), cité sacrée de l'hindouisme, dans l'Etat de l'Uttar Pradesh (nord), qu'il occupe depuis une décennie.

L'opposition et les défenseurs des droits accusent M. Modi de favoriser les hindous, majoritaires dans le pays, au détriment d'importantes minorités, dont 210 millions d'Indiens musulmans, inquiètes pour leur avenir.

M. Modi a récemment suscité l'indignation dans les rangs de l'opposition en accusant le Congrès de vouloir distribuer la "richesse nationale" aux "infiltrés", "à ceux qui ont le plus d'enfants", désignant ainsi la communauté musulmane.

L'opposition a saisi les autorités électorales qui n'ont pas sanctionné le Premier ministre. L'Inde est constitutionnellement laïque et son code électoral interdit toute campagne fondée sur des "sentiments communautaires".

Dans un entretien mardi sur la chaîne d'information continue News18, le chef du gouvernement s'est défendu d'alimenter et d'exploiter tout clivage entre hindous et musulmans.

Discrimination 

"Le jour où je commencerai à parler des hindous-musulmans sera celui où je perdrai ma capacité à mener une vie publique", a-t-il affirmé en hindi.

Le lendemain, en plein rassemblement électoral, Narendra Modi accusait le Congrès d'orchestrer un "jihad par le vote" pour que les musulmans se prononcent contre lui.

Au début de la semaine, Madhavi Latha, actrice et candidate du BJP à Hyderabad (sud), s'est autorisée, dans un bureau de vote, à vérifier que la carte électorale de musulmanes correspondait à leur identité, exigeant qu'elles ôtent leur voile.

La police de la ville a ouvert une enquête sur l'incident.

Au total, 968 millions d'Indiens sont appelés à élire les 543 membres de la chambre basse, soit plus que la population totale des Etats-Unis, de l'Union européenne et de la Russie réunis.