PARIS: Les électeurs du Rassemblement national (ex Front national) sont toujours plus nombreux chez les moins diplômés, les moins riches et les actifs, et se font plus rares chez les étudiants et les retraités, selon une étude de la Fondation Jean-Jaurès parue mercredi.
Son auteur Jérôme Fourquet, le directeur du département Opinions de l'institut Ifop, souligne "la solidité" de l'électorat RN, loin d'un "feu de paille" poujadiste, qui a à chaque fois réuni depuis 1988 -sauf en 2007- au moins 15% des voix au premier tour des présidentielles.
Les moins diplômés s'avèrent de plus en plus réceptifs au vote FN/RN. En 1988, 16% des Français n'ayant pas le bac votaient FN. Ils sont ensuite 19% en 1995, 22% en 2002, 34% en 2012, et 31% en 2017. Ils seraient 33% en 2022, selon les intentions de vote.
Le vote lepéniste reste en revanche stable à un niveau faible chez les plus diplômés, qui évoluent "dans un bain culturel et idéologique valorisant l'altérité, l'ouverture au monde et rejetant les postures d'autorité", note M. Fourquet.
Le non bachelier est en effet devenu minoritaire, alors que ne pas disposer du bac était fréquent dans les années 80. "Comme si le parti lepéniste avait progressivement capitalisé sur le ressentiment et le sentiment de relégation culturelle et sociale des publics les moins diplômés au fur et à mesure que le niveau éducatif moyen était rehaussé", avance l'auteur.
Si l'électorat de Jean-Marie Le Pen était en 1988 "interclassiste", avec un score quasi identique dans tous les milieux (de 14% chez les cadres à 17% chez les ouvriers), les ouvriers et employés sont devenus de plus en plus perméables à la rhétorique frontiste.
Jean-Marie Le Pen a viré en tête dans l'électorat populaire en 2002 avec moins d'un quart des voix, mais sa fille Marine Le Pen, à la tête du parti depuis 2011, rassemble désormais plus de 40% des suffrages dans ces catégories "davantage exposées à la délinquance et plus souvent en contact avec les populations issues de l'immigration".
Si l'électorat de Jean-Marie Le Pen se répartissait de manière égale quel que soit l'âge, celui de Marine Le Pen s'affirme davantage dans les tranches intermédiaires (de 25 à 64 ans), soit les actifs, confrontés à davantage de contraintes et de charges financières, explique M. Fourquet. L'électorat s'est réduit en revanche chez les étudiants et les retraités.
L'électorat du RN s'est aussi féminisé. Sous Jean-Marie Le Pen, l'écart entre le vote FN des hommes et celui des femmes était de 7 points, alors qu'en 2012 il s'est réduit à 3 points et en 2017 à 1 point.