Pour les migrants, les lourdes séquelles d'une année de pandémie

Des policiers français entourent des migrants qui débarquent d'un bateau après avoir été secourus lorsque leur embarcation de fortune a rencontré des difficultés lors d'une tentative de traverser la Manche pour rejoindre l'Angleterre, le 1er avril 2021 dans la ville portuaire française de Calais.  (BERNARD BARRON / AFP)
Des policiers français entourent des migrants qui débarquent d'un bateau après avoir été secourus lorsque leur embarcation de fortune a rencontré des difficultés lors d'une tentative de traverser la Manche pour rejoindre l'Angleterre, le 1er avril 2021 dans la ville portuaire française de Calais. (BERNARD BARRON / AFP)
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Publié le Vendredi 16 avril 2021

Pour les migrants, les lourdes séquelles d'une année de pandémie

  • Il y a eu un premier choc, au printemps dernier, celui de la fermeture des frontières extérieures de l'Union européenne, accompagnée de la chute des flux migratoires
  • D'ores-et-déjà, 13% des migrants interrogés estiment que "les confinements ont exacerbé l'isolement et les problèmes de santé mentale"

PARIS : Au moment où s'entrevoit l'après-Covid, les migrants, eux, commencent à en subir pleinement les effets en France: un  an de pandémie a exacerbé leur fragilité, renforcé leur isolement et réuni tous les ingrédients pour que succède à la crise sanitaire une "crise de l'intégration". 

Il y a eu un premier choc, au printemps dernier, celui de la fermeture des frontières extérieures de l'Union européenne, accompagnée de la chute des flux migratoires. Un peu plus de douze mois plus tard, où que l'on regarde, la santé, les démarches administratives, les conditions de vie, l'accès à l'emploi, tout s'est compliqué. 

C'est en substance l'enseignement des premières études, présentées cette semaine, qui tentent de mesurer les conséquences de la pandémie sur le quotidien des exilés.

"Il y a un impact immédiat, mais il y a aussi des impacts longs. Nous n'en maîtrisons pas encore les conséquences durables, que j'imagine au moins sur une décennie", un peu comme la crise financière de 2008 qui continuait, des années plus tard, à faire basculer certains dans la grande exclusion, a résumé Alain Régnier, délégué interministériel à l'accueil et l'intégration des réfugiés (Diair), lors d'une table ronde organisée par l'Observatoire de l'immigration et de l'asile de l'Ifri (Institut français des relations internationales).

10 ans effacés

D'ores-et-déjà, 13% des migrants interrogés estiment que "les confinements ont exacerbé l'isolement et les problèmes de santé mentale", un sur dix déplore des "retards dans les procédures" administratives, tandis que 23% d'entre eux pointent "l'interruption de l'enseignement et de la formation" comme le principal point noir, selon une étude du réseau Share présentée mardi.

"Plus le statut administratif est précaire, par exemple pour les sans-papiers, plus la qualité de vie est dégradée, et plus l'isolement social et l'impact des mesures sanitaires sont grands", abonde Gesine Sturm, de l'université de Toulouse 2, qui a supervisé une autre étude présentée cette semaine.

Sous la houlette de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), cette enquête continentale conduite par plusieurs universités européennes s'intéressait surtout à l'impact social et de santé publique de l'épidémie. 

Premiers résultats: non recours aux soins, dépression et isolement pour un migrant sur deux, ou encore "impact significatif" sur l'accès à l'emploi.

Sur ce dernier point, quand bien même la crise sanitaire a mis en évidence la part des ressortissants étrangers, y compris sans-papiers, dans les métiers dits de "première ligne", "il y a un fort risque que le Covid réduise à néant les progrès réalisés ces dix dernières années en matière d'intégration professionnelle des immigrés", a déploré Thomas Liebig, de l'OCDE, en marge de la présentation d'un autre rapport sur le sujet.

La dématérialisation, « c'est la fin des files d'attentes devant les préfectures »

La dématérialisation des procédures administratives pour les étrangers, au coeur d'une vague de contestation, vise à "simplifier" les démarches et signe "la fin des files d'attente" devant les préfectures, défend auprès de l'AFP sa responsable au ministère de l'Intérieur, Franceline Forterre-Chapard.

Question: Qui est concerné par cette dématérialisation ?

Réponse: "La dématérialisation de bout en bout concerne toutes les procédures d'immigration, c'est-à-dire les titres de séjour et l'accès à la nationalité. L'administration numérique pour les étrangers en France (Anef), c'est avant tout un portail web, dans lequel un usager peut déposer en ligne l'intégralité de son dossier et récupérer des informations (état civil, biométrie...). 

Depuis septembre 2020, on a commencé avec les titres de séjour étudiant et depuis le 6 avril, on a mis en service la possibilité pour les employeurs d'effectuer des demandes d'autorisation de travail pour un salarié étranger. En 48 heures, 1.000 demandes ont été déposées. 

Nous allons élargir mi-mai aux passeports talents et en fin d'année aux cartes de résident. Fin 2021, on aura couvert 80% de la volumétrie annuelle de demandes de titres en préfecture. Au total, cela concernera 10 millions d'utilisateurs par an." 

Q: Quel en est l'objectif ?

R: "L'objectif numéro un, c'est simplifier la vie de nos usager et désengorger les préfectures. C'est aussi la fin des files d'attentes devant les préfectures.

En moyenne, dans le cadre d'une procédure séjour ou accès à la nationalité, on a 4 passages en préfecture. Ça peut monter à 5, 6, selon la complexité de la procédure. L'un des buts, c'est de limiter ces déplacements au strict minimum et permettre à l'agent de prendre une décision directement sans faire venir l'usager en préfecture.

Si on a vraiment besoin de faire venir en préfecture, on prend rendez-vous et on complète. Bien sûr, il y a des rendez-vous obligatoires, par exemple pour la remise du titre de séjour ou l'entretien d'assimilation: il y a des choses que la dématérialisation ne peut pas remplacer. La dématérialisation n'a absolument pas pour objectif de couper ce lien indispensable."

Q: De nombreux ressortissants étrangers et les associations qui les soutiennent multiplient depuis plusieurs mois les recours devant la justice, partout en France, pour obtenir un accès aux préfectures, afin de régulariser leur situation. Que leur répondez-vous ?

R: "Une fois qu'on aura mis en place la dématérialisation, on n'aura plus ce problème d'accès aux préfectures. D'ailleurs, cela permet de réduire les délais d'instruction. On le voit avec les étudiants étrangers, qui n'ont plus besoin de prendre rendez-vous dans une préfecture puisqu'ils déposent leur dossier en ligne: on est passé en moyenne de 45 jours de traitement à 15/20 jours.

Tout cela n'empêche pas que les préfectures resteront ouvertes et mobilisées pour accompagner notamment les gens qui ont du mal avec l'outil numérique. Il y aura un accompagnement. L'optique de l'Anef, ce n'est pas de dire +terminé, l'usager ne rentrera plus dans une préfecture+.

L'accueil en préfecture par des agents qui connaissent la matière (du droit des) étrangers, c'est primordial de le conserver. Et c'est prévu." 

Pas de McDo, pas de papiers 

Certes, fin 2020, le gouvernement a annoncé la naturalisation de quelque 700 travailleurs étrangers de "première ligne" (professionnels de santé, femmes de ménage...), qui ont montré "leur attachement à la nation".

Mais l'ampleur de la crise dépasse largement ce coup de pouce symbolique, estime Thomas Liebig: "Le Covid augmente les inégalités, ce sont les plus vulnérables qui en souffrent le plus. Tout est réuni pour que cette crise devienne une crise de l'intégration".

Car les répliques du séisme sont partout, y compris dans la rue, où la baisse drastique des arrivées conjuguée aux places d'hébergement d'urgence créées spécialement pour la crise n'ont même pas réussi à faire disparaître les tentes et les campements, qui rejaillissent à intervalles réguliers.

"Le processus de sortie des dispositifs d'accueil a diminué assez fortement, notamment au premier semestre 2020", avec -20% de personnes accédant au logement, a reconnu Alain Régnier.

A l'heure où les préfectures tournent encore au ralenti, et que nombre de ressortissants étrangers peinent à y accéder pour régulariser leur situation, la dématérialisation complète et imminente de ces services se heurte à un principe de réalité: "La fermeture des McDo, gares, médiathèques, des lieux où il y avait du Wifi libre et gratuit", constate le Diair, qui a lancé un programme d'inclusion numérique.

Pour juguler les défis à venir, "il faudra continuer d'identifier les signaux faibles", prévient le préfet. "Et garder comme boussole la valeur cardinale de l'accueil".


Voter une loi pour «sauver Marine Le Pen» est «impensable», estime Xavier Bertand

Xavier Bertrand a martelé que Marine Le Pen "n'était pas une victime" et regrette que certains soient tombés dans le "piège de la victimisation", appelant les responsables politiques à préserver "la stabilité des institutions et donc le respect de la séparation des pouvoirs". (AFP)
Xavier Bertrand a martelé que Marine Le Pen "n'était pas une victime" et regrette que certains soient tombés dans le "piège de la victimisation", appelant les responsables politiques à préserver "la stabilité des institutions et donc le respect de la séparation des pouvoirs". (AFP)
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  • Il a dénoncé la pression que subissaient les magistrats, ajoutant ne pas vouloir "qu'on joue un mauvais remake du Capitole", faisant référence à l'assaut du Capitole par les soutiens de Donald Trump après sa défaite à l'élection présidentielle de 2020
  • Xavier Bertrand a déploré un traitement de faveur envers la patronne des députés RN à l'Assemblée pour laquelle "on trouverait la place pour une loi d'exception pour (la) sauver", alors qu'"on ne trouve pas la place" pour voter les "urgences"

PARIS: Il est "impensable" de faire un traitement de faveur avec "une loi d'exception pour sauver Madame Le Pen", a fustigé mercredi Xavier Bertrand, en référence à la proposition de loi pour supprimer l'exécution provisoire qu'Eric Ciotti veut déposer.

"Ce serait impensable parce que ça voudrait dire que l'Assemblée nationale remplace la Cour d'appel, que l'Assemblée nationale intervient avant la Cour d'appel, arrêtons cette confusion des genres", s'est insurgé le président LR de la région Hauts-de-France sur RTL.

Eric Ciotti, patron des députés UDR à l'Assemblée et allié du RN, a annoncé mardi que son groupe déposerait une proposition de loi en juin pour "supprimer" l'exécution provisoire après la condamnation choc de Marine Le Pen à une peine d'inéligibilité de cinq ans avec effet immédiat.

Xavier Bertrand a déploré un traitement de faveur envers la patronne des députés RN à l'Assemblée pour laquelle "on trouverait la place pour une loi d'exception pour (la) sauver", alors qu'"on ne trouve pas la place" pour voter les "urgences", évoquant notamment la loi sur les homicides routiers ou celle sur la justice des mineurs.

Pour l'élu LR, cette proposition de "loi Ciotti, Le Pen" reviendrait à "contourner la justice".

Il a dénoncé la pression que subissaient les magistrats, ajoutant ne pas vouloir "qu'on joue un mauvais remake du Capitole", faisant référence à l'assaut du Capitole par les soutiens de Donald Trump après sa défaite à l'élection présidentielle de 2020.

M. Bertrand se réjouit de l'annonce de la Cour d'appel qui devrait rendre une décision à "l'été 2026", qui prouve selon lui qu'"il n'y a aucun complot contre Madame Le Pen" qui va pouvoir "épuiser les voies de recours".

Xavier Bertrand a martelé que Marine Le Pen "n'était pas une victime" et regrette que certains soient tombés dans le "piège de la victimisation", appelant les responsables politiques à préserver "la stabilité des institutions et donc le respect de la séparation des pouvoirs".


L'Assemblée s'empare de la sensible réforme du scrutin à Paris, Lyon et Marseille

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  • La commission des lois doit examiner dans la matinée une proposition de loi initialement portée par le député Sylvain Maillard, ancien président du groupe Renaissance, et chef des macronistes à Paris.
  • Le texte a le soutien du Premier ministre, à défaut de celui de Bruno Retailleau.

PARIS : Modifier le mode d'élection à Paris, Lyon et Marseille à un an des municipales : une gageure, tant le sujet est épineux et les oppositions nombreuses, y compris au sein de la coalition gouvernementale. Mais alors que le sujet fait ses premiers pas à l'Assemblée mercredi, les défenseurs du texte veulent croire au succès d'une réforme « populaire ».

La commission des lois doit examiner dans la matinée une proposition de loi initialement portée par le député Sylvain Maillard, ancien président du groupe Renaissance, et chef des macronistes à Paris. Son arrivée dans l'hémicycle est prévue en début de semaine prochaine.

Le texte a le soutien du Premier ministre, à défaut de celui de Bruno Retailleau, qui se fait l'écho des sénateurs LR dont il était encore il y a peu le chef. 

Selon les promoteurs de la proposition de loi, les sénateurs LR de Paris rejettent une réforme qui fragiliserait leur réélection.

Pour l'essentiel, cette réforme prévoit de mettre en place deux scrutins distincts pour les trois métropoles : l'un pour élire les conseillers d'arrondissement ou de secteur, l'autre pour élire ceux du conseil municipal, sur une circonscription unique.

Actuellement, les électeurs votent dans chaque arrondissement pour une liste de conseillers d'arrondissement, et les élus du haut de la liste siègent à la fois au conseil d'arrondissement et au conseil municipal.

Ce mode de scrutin est décrié, car il peut aboutir à l'élection d'un maire ayant réuni une minorité de voix. De plus, l'élection se joue dans une poignée d'arrondissements clés.

Dans ces trois villes, « tout se joue sur deux ou trois arrondissements, tout le reste ça ne compte pas », ce qui conduit les maires à s'occuper « en priorité » des arrondissements qui les ont élus, explique M. Maillard à l'AFP. « On pense que c’est un problème démocratique », ajoute-t-il, en défendant le principe « un électeur, une voix », et en soulignant le soutien dont bénéficie la réforme dans l'opinion.

Le texte prévoit aussi de modifier la prime majoritaire accordée à la liste arrivée en tête, en l'abaissant à 25 % au lieu de 50 % comme c'est le cas actuellement dans l'ensemble des communes.

- LR grand perdant ? 

Mais les oppositions sont multiples, issues de la droite comme de la gauche hors LFI (le RN et les Insoumis se montrant plus enclins au changement, alors qu'ils n'ont quasiment pas d'élus dans ces villes). Les députés Léa Balage, El Mariky (EELV), Sandrine Runel (PS) et Olivier Marleix (LR) ont ainsi déposé des amendements de suppression du principal article du texte.

La porte-parole du groupe écologiste dénonce une « réforme précipitée, sources d'inégalités, de déséquilibres démocratiques et d'évidentes difficultés pratiques ».

Sur le fond, certains s'étonnent notamment qu'une réforme prétendant rapprocher le scrutin municipal des trois villes opte pour une prime majoritaire spécifique. D'autres encore craignent une dilution du rôle des arrondissements.

Sur la forme, beaucoup contestent la volonté d'appliquer le texte dès 2026, alors que le code électoral prévoit qu'on ne puisse modifier le mode de scrutin ou le périmètre des circonscriptions moins d'un an avant le premier tour d'une élection.

Désigné rapporteur du texte, le député MoDem Jean-Paul Mattei s'est efforcé de déminer le sujet en multipliant les rencontres et en proposant des amendements de réécriture avec différents scénarios.

Cet effort a contribué à décaler l'examen en commission, initialement prévu le 12 mars. Il a aussi conduit le président de la Commission des lois, Florent Boudié (Renaissance), à demander au ministère de l'Intérieur des projections sur les conséquences des modifications envisagées, en se fondant sur les résultats de 2020.

Selon ces projections consultées par l'AFP, le nombre de sièges de LR connaîtrait un très net recul, tandis que celui des macronistes augmenterait. À Paris, par exemple, la droite aurait obtenu, avec la réforme proposée par Sylvain Maillard, 34 sièges de conseillers de Paris, contre 55, et les listes conduites par Agnès Buzyn et Cédric Villani 31 sièges, au lieu de 11.

« On ne peut pas dire qu'il y ait un énorme consensus », convient M. Mattei, qui ne désespère pas cependant de parvenir à une réforme qui s'applique dès 2026.


Après les tensions, Paris et Alger entament un nouveau chapitre

Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune sont convenus de relancer les échanges bilatéraux et de jeter les bases de cette reprise. (AFP)
Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune sont convenus de relancer les échanges bilatéraux et de jeter les bases de cette reprise. (AFP)
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  • Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune ont décidé de relancer les échanges bilatéraux
  • L'échange téléphonique a permis de formaliser une feuille de route ambitieuse et pragmatique

Après avoir frôlé la rupture, un nouveau chapitre s'ouvre dans les relations entre la France et l'Algérie.

Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune sont convenus de relancer les échanges bilatéraux et de jeter les bases de cette reprise.

Le communiqué publié par le palais de l'Élysée fait suite à plusieurs signes récents de rapprochement, notamment l'entretien accordé par Tebboune aux journalistes des médias publics algériens, où il a exprimé sa volonté de renouer le dialogue avec son homologue français et de mettre fin à ce qu'il a qualifié de «période d'incompréhension» entre leurs deux pays.

L'échange téléphonique a permis de formaliser une feuille de route ambitieuse et pragmatique, centrée sur trois axes prioritaires: la coopération sécuritaire, la gestion des flux migratoires et les questions mémorielles.

Le communiqué conjoint, publié à l’issue de cet échange, souligne la volonté des deux chefs d’État de dépasser les crises récentes pour amorcer une relation apaisée et mutuellement bénéfique.

Premier résultat concret dans le cadre de cette volonté affichée, le ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot se rend à Alger le 6 avril pour des entretiens avec son homologue algérien Ahmed Attal.

Les ministres devront détailler un programme de travail ambitieux et en décliner les modalités opérationnelles et le calendrier de mise en œuvre.

La coopération sécuritaire doit reprendre sans délai, notamment pour lutter contre le terrorisme au Sahel et sécuriser les frontières de la région.

La gestion des migrations irrégulières et la question des réadmissions de ressortissants algériens en situation irrégulière en France sont au cœur des discussions. 

Cette dynamique s’inscrit dans la continuité de l’engagement du président français, exprimé dès le début de son premier mandat et même avant, lors de sa campagne électorale en Algérie, où il avait qualifié la colonisation de «crime contre l’humanité».

Plus tard et dès son élection en 2017, Macron a affiché sa volonté de regarder «la vérité en face». Sa première visite officielle en Algérie marquait la priorité qu’il entend donner à la relation franco-algérienne, en posant les bases d’un dialogue sincère et apaisé. 

Cet engagement a été réaffirmé par la déclaration d’Alger en août 2022, qui prévoyait la mise en place d’une «commission mixte des historiens» chargée d’examiner les archives et de favoriser une meilleure compréhension mutuelle.

Les enjeux de ce rapprochement, dont l’objectif est la poursuite du travail de refondation des relations bilatérales, dépassent le cadre strictement bilatéral et s’inscrivent dans un contexte géopolitique et sécuritaire complexe.

La coopération entre Paris et Alger est essentielle pour répondre aux défis régionaux, notamment dans le Sahel, où le terrorisme et l’instabilité menacent la sécurité de l’Afrique du Nord et de l’Europe. 

La France et l’Algérie partagent un intérêt commun pour la lutte contre les groupes armés et leur coopération stratégique revêt une importance capitale pour stabiliser la région.

La gestion des flux migratoires reste un point de tension récurrent, car si la France souhaite des mécanismes de réadmission efficaces, l’Algérie demande le respect de la dignité et des droits de ses ressortissants. 

Malgré la volonté de réconciliation affichée, le dossier mémoriel reste un obstacle majeur.

La question des excuses officielles pour les crimes coloniaux demeure sensible. Si Emmanuel Macron a reconnu des «crimes contre l’humanité» en 2017, les demandes d’excuses formelles de l’Algérie n’ont pas encore été pleinement satisfaites. 

Les travaux de la commission mixte des historiens, lancés à l’été 2022, doivent permettre d’approfondir la recherche sur cette période sombre et de poser les bases d’un dialogue apaisé.

Malgré les gestes d’ouverture, les relations entre Paris et Alger restent fragiles, en partie en raison d’une méfiance réciproque, alimentée par des perceptions contradictoires des enjeux bilatéraux.

L’un des points de friction les plus marquants est la question du Sahara occidental. La position française, perçue comme favorable au Maroc, a suscité des crispations du côté algérien, allant jusqu’au rappel de l’ambassadeur d’Algérie en France. 

Pour Alger, le soutien implicite de Paris au plan d’autonomie marocain est perçu comme un alignement qui remet en cause l’équilibre diplomatique régional.

Bien que la France ait tenté de clarifier sa position, en affirmant vouloir accompagner une dynamique internationale de sortie de crise, ce dossier demeure une source de tension. 

Au-delà des relations diplomatiques, les opinions publiques des deux pays jouent un rôle crucial dans l’évolution du partenariat.

En Algérie, une partie de la population reste méfiante vis-à-vis des intentions françaises, nourrie par un sentiment de souveraineté exacerbée et par la mémoire toujours vive des exactions coloniales. 

En France, la question algérienne suscite également des clivages politiques. Certains considèrent les gestes mémoriels comme une forme de repentance excessive, tandis que d’autres appellent à une reconnaissance plus franche des torts commis pendant la colonisation. 

La relance des relations entre la France et l’Algérie repose sur un équilibre délicat entre la reconnaissance du passé, la gestion des défis actuels et la mise en œuvre d’une coopération tournée vers l’avenir. 

Malgré la volonté politique manifeste, la concrétisation de ce partenariat dépendra de la capacité des deux dirigeants à dépasser les clivages historiques et à impulser une dynamique durable.