RABAT : Le ministère marocain de l'Intérieur a accusé mercredi soir l'historien franco-marocain Maati Monjib de « porter atteinte à l'image du royaume en matière des droits de l’Homme » avec des « déclarations irresponsables » faites à sa sortie de prison.
« Ces manœuvres abjectes ne sauront dissuader les institutions de l'État de poursuivre l'application correcte et ferme des dispositions juridiques à l'encontre de tous ceux qui croient bénéficier de l'immunité juridique pour le simple fait qu'ils détiennent la double nationalité », a averti le ministère dans un communiqué.
Incarcéré depuis trois mois pour des accusations de fraude, le défenseur des droits humains a été remis en liberté provisoire mardi soir sur décision du juge d'instruction, après 19 jours de grève de la faim.
A sa sortie de prison, l'intellectuel connu pour ses critiques ouvertes contre le pouvoir a affirmé que son arrestation était liée à un article récent intitulé « l'infrastructure secrète qui menace la sécurité des Marocains » dans lequel il évoquait notamment « l'Etat parallèle » qui « cible » les militants au Maroc.
« Les accusations contre moi sont fabriquées par la police politique (...) maintenant que je jouis de la liberté provisoire, je vais militer pour la libération des autres détenus »" d'opinion, a déclaré le sexagénaire, visiblement amaigri mais toujours combattif.
Le ministère de l'Intérieur a « réfuté catégoriquement » ces « allégations tendancieuses » dans son communiqué.
M. Monjib « a porté atteinte aux institutions de l’État », en évoquant « de mauvaise foi (...) et loin de la réalité (...) des concepts comme la "police politique", la "sécurité politique" et "l’existence d'une structure secrète menaçant la sécurité des Marocains" », dit ce texte.
Les propos de l'historien ont été largement partagés sur les réseaux sociaux et sa libération a été saluée par ses soutiens au Maroc et à l’étranger : l'ONG Human Rights Watch a notamment appelé à « rester vigilants, car ce n'est pas fini », tandis que RSF demandait « l'abandon de toutes les poursuites iniques lancées contre des journalistes au Maroc ».
M. Monjib, 60 ans, avait été interpellé fin décembre dans le cadre d'une enquête préliminaire pour « blanchiment de capitaux », une arrestation « abusive », selon lui.
Parallèlement, il a été condamné à un an de prison pour « fraude » et « atteinte à la sécurité de l'Etat », fin janvier, au terme d'un procès ouvert en 2015 et plusieurs fois reporté. Ses avocats et son comité de soutien s'étaient indignés de ce jugement, rendu en l'absence de l'accusé et sans convocation de sa défense.