SYRIE: Le groupe jihadiste Etat islamique (EI) représente toujours un grand danger, ont mis en garde mardi dans l'est de la Syrie les Forces démocratiques syriennes (FDS) dominées par les Kurdes, qui marquent le deuxième anniversaire de la chute du « califat ».
Fer de lance de la lutte anti-EI en Syrie, les FDS, soutenues par une coalition internationale dirigée par Washington, avaient annoncé le 23 mars 2019 avoir pris Baghouz, ultime bastion des jihadistes en Syrie au terme d'une bataille longue, meurtrière et dévastatrice.
La mise en déroute de l'EI dans ce petit village aux confins orientaux de la Syrie en guerre, tout près de la frontière avec l'Irak, signifiait la fin du « califat », autoproclamé en 2014 sur un vaste territoire à cheval sur les deux pays.
« La chute du dernier carré de territoire de l'EI (...) ne signifie pas la défaite totale », a lancé mardi un porte-parole des FDS, en marge d'une parade militaire au champ pétrolier d'Al-Omar, au nord de Baghouz.
« Nous sommes au stade le plus difficile de notre lutte contre le terrorisme », a-t-il souligné.
Car deux ans après, le groupe jihadiste lance encore des attaques meurtrières dans le vaste désert syrien, visant les forces kurdes comme l'armée du régime de Bachar al-Assad.
L'organisation ultra-radicale mobilise toujours quelque 10 000 combattants en Irak et en Syrie, selon un récent rapport onusien.
Et c'est sans compter les 11 0000 jihadistes détenus dans les prisons kurdes, selon l'ONU, ou leurs femmes et enfants retenus dans des camps, que certains considèrent comme de véritables bombes à retardement.
« Attentats terroristes »
Mardi, des combattants des FDS en treillis ont défilé sous le regard de hauts responsables kurdes, chefs des tribus locales et représentants de la coalition internationale anti-EI.
Sur un mur, les drapeaux des FDS et des milices kurdes encadraient une série de photos des hommes et des femmes tombés au combat dans la lutte contre les jihadistes.
Pendant plusieurs années, l'organisation ultra violente, qui a su attirer des milliers d'étrangers, a fait régner la terreur, enchaînant les attentats spectaculaires au Moyen-Orient et dans des capitales européennes, comme Paris ou Bruxelles.
Sur les territoires qu'il contrôlait, le groupe avait instauré une véritable administration, frappant sa propre monnaie et prélevant des impôts, établissant une police des moeurs.
En octobre 2019, le chef de l'EI Abou Bakr al-Baghdadi a été tué dans une opération américaine dans le nord-ouest de la Syrie.
Avec son successeur, qui se fait appeler Abou Ibrahim al-Hachimi al-Qourachi, l'organisation poursuit son insurrection, revendiquant des attentats en Afrique de l'Ouest mais aussi en Afghanistan ou encore en Syrie et en Irak.
En février dernier, 26 combattants pro-régime ont péri dans une embuscade dans la province syrienne de Deir Ezzor (est).
Le chef du Commandement central américain, le général Kenneth McKenzie, évoquait en février le « projet » de l'EI de »maintenir son insurrection en Irak et Syrie ainsi qu'une présence cyber planétaire, tout en conservant une structure cellulaire qui lui permet de commettre des attentats terroristes ».
« Autre Guantanamo »
Quelque 43 000 étrangers sont toujours retenus par les Kurdes dans le nord-est de la Syrie, des hommes dans les prisons, des femmes et des enfants dans les camps, selon Human Rights Watch (HRW).
Parmi eux se trouvent environ 27 500 mineurs étrangers, dont au moins 300 dans des prisons, précise l'ONG.
Ces étrangers « entament une troisième année de détention illégale dans des conditions qui mettent leur vie en danger, tandis que leurs gouvernements détournent le regard », a fustigé l'experte de HRW Letta Tayler dans un communiqué.
L'organisation va jusqu'à dénoncer « la création d'un autre Guantanamo ».
Si les Kurdes n'ont de cesse d'appeler les pays concernés à rapatrier femmes et enfants, la plupart des Etats, Occidentaux en tête, sont frileux.
Certains, dont la France, ont permis le retour d'enfants, souvent orphelins, ou d'un nombre très limité de femmes.
La majorité des familles étrangères affiliées à l'EI se trouvent dans le camp surpeuplé d'Al-Hol (nord-est), où vivent près de 62.000 personnes, dont 93% de femmes et d'enfants.
« Le danger de l'EI ça reste les milliers de détenus et les milliers de familles dans les camps d'Al-Hol et de Roj, qui gardent l'idéologie extrémiste », ont averti mardi les FDS, pointant du doigt « le manque d'action sur la scène internationale pour résoudre ce dossier ».