BEYROUTH : La liberté guide Ali Zaraay. «Pendant des années, je m'étais arrêté à l'idée que j'étais un photographe documentaire. Actuellement, je découvre d'autres horizons. J'ai commencé à faire du collage», raconte-t-il. Cette liberté se conjugue avec une authenticité, celle de ne pas tomber dans le piège de la recherche du beau et du politiquement correct. Le photographe a une opinion tranchée en la matière «Il n'existe pas de photo parfaite. Le photographe distingué est celui qui cherche une histoire intéressante ou bien qui complète cette histoire. La photographie, ce n'est pas une question de position ou de lumière.»

Le projet d'Ali Zaraay avec les bédouins nomades du Delta ne raconte pas seulement une histoire. Tel un effet miroir et grâce à un regard anthropologique, ce travail met en lumière les questionnements et les luttes du jeune homme.
Effet miroir
En janvier 2016, Ali Zaraay est allé à la rencontre des tribus bédouines nomades du Delta. Avec le temps, il a décidé en suivant leurs conseils de s'intéresser à la vie quotidienne de la famille de Hajj Hani. Il a expliqué à Arab News en français ses motivations : « Au départ, j'avais le désir de découvrir des situations et choses qui diffèrent de mon environnement familial et familier. Je ne photographiais pas pour un journal ou une agence. Ma relation avec eux est devenue personnelle. »

Il ne s'agit pas pour lui de faire découvrir une population donnée. Les Bédouins nomades sont présents en Égypte depuis des siècles. «Ce sont des gens ordinaires», aime-t-il à rappeler.
Ses échanges avec Farah Hallaba en 2018 lui font découvrir que son travail entre dans le champ de l'anthropologie visuelle, notamment l'étude des différences. Ces deux jeunes Égyptiens vont collaborer et produire Ramper sur la poussière, un documentaire sorti en 2020. Le titre renvoie au mouvement incertain et décousu que parcourt les bédouins nomades mais aussi à son échelle au parcours d’Ali. « Nos différences nous ont unis. Nous aimons discuter de nos intérêts culinaires et musicaux. Un climat d'amitié s'est installé. Cela m'a permis d'évoquer des sujets qui me dérangent et me tourmentent. »

Regard authentique
L'œuvre d'Ali Zaraay se caractérise par le souci de partager le quotidien des Égyptiens. «Je m'intéresse à la jeunesse, à notre génération. Un artiste ne doit pas être coupé de la vie ordinaire, de ce qui est en train de passer», estime le photographe.
Il regrette que dans son pays, une petite partie du monde artistique soit superficielle, et adopte un regard de classe. Ainsi dans le choix des chanteurs dans les festivals, c’est le politiquement correct qui prime. Ali Zaraay déplore cette réalité qui ne prend pas en compte les goûts du grand public. «Il faut que l'on reste authentique, et que l’on conserve une voix qui montre la réalité.»

Son travail a été mis en exergue par le compte Everyday Egypt, très populaire sur Facebook et Twitter. L'idée principale de ce compte est de capturer les moments de la vie quotidienne des Égyptiens.
En compagnie de 24 autres photographes, Ali Zaraay a participé à l'exposition Everyday lors de la deuxième édition du festival égyptien de Cairo Photo Week.