Les descendants de pieds-noirs en quête d'une mémoire qui disparaît

Une famille française expulsée d’Algérie débarque à Marseille le 26 mai 1962 (Photo, AFP).
Une famille française expulsée d’Algérie débarque à Marseille le 26 mai 1962 (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 17 mars 2021

Les descendants de pieds-noirs en quête d'une mémoire qui disparaît

  • Ils veulent tourner la page de la «nostalgérie» pour lui substituer une mémoire apaisée, faite «d'histoires et de légendes»
  • Fille de rapatriés d'Algérie, née en Provence, Céline Lanzo, 44 ans, aura mis plusieurs décennies avant d'assumer son identité pied-noire

PARIS: C'est un monde dont les derniers témoins s'éteignent les uns après les autres : près de 60 ans après la guerre d'Algérie, des descendants de pieds-noirs veulent tourner la page de la « nostalgérie » pour lui substituer une mémoire apaisée, faite « d'histoires et de légendes ».

Longtemps, elle a refusé d'en parler, ne serait-ce même que d'y penser. Fille de rapatriés d'Algérie, née en Provence, Céline Lanzo, 44 ans, aura mis plusieurs décennies avant d'assumer son identité pied-noire.

« ‘Française c'est tout’, c'est ce que je disais lorsqu'on me demandait, à l'école ou ailleurs, mes origines », explique la cadre commerciale lyonnaise.

Ses deux parents, Manuel et Françoise, ont respectivement 21 et 22 ans lorsqu'ils quittent, comme des centaines de milliers de pieds-noirs, l'Algérie dans le courant de l'année 1962. « Traumatisés » par la guerre d'indépendance (1954-1962), ils s'installent près de Marseille où ils tentent de refaire leur vie.

« Mal à l'aise »

Ce traumatisme ne disparaîtra jamais. « A la maison, on ne parlait que de ça : la guerre et ses horreurs, la trahison de de Gaulle, l'arrachement injuste de notre terre... C'était un monde empreint de hargne, de colère. Je n'avais qu'une obsession : en sortir », se souvient-elle.

Ce n'est qu'en 2018, après le décès de sa mère, qu'elle commence à se renseigner sur son histoire familiale, avec la promesse de le faire sans « sans amertume et sans nostalgie ».

Se sentir à la fois « concernée » mais aussi « complètement étrangère » à la douloureuse histoire familiale, c'est « le dilemme » de Laura Pujol, 29 ans, de grands-parents pieds-noirs. L’Algérie, ses propres parents, nés en France, ne l'ont pas connue et pourtant son enfance a été bercée par des récits « nostalgiques » sur ce pays.

« Je me suis toujours sentie mal à l'aise avec ça », confie-t-elle. « Pour moi, ça fait partie de mon histoire mais ça ne me définit pas. Je ne suis pas contre la transmission mais je veux pouvoir filtrer et exercer mon esprit critique sur ce qu'on me raconte ».

Pour la chercheuse spécialiste de l'histoire des pieds-noirs Emmanuelle Comtat, cette rupture mémorielle entre les générations est en partie liée au traumatisme du rapatriement que les pieds-noirs n'ont jamais surmonté.

« Beaucoup de descendants ont voulu faire table rase du passé parce qu'ils n'ont pas envie de vivre dans la souffrance familiale. Ils ont conscience qu'il y a une blessure dans la famille mais n'ont pas envie de perpétuer la nostalgie », décrypte-t-elle.

« Ça coince avec la troisième génération », estime Christian Fenech, 59 ans, président et fondateur de l'association « Racines pieds-noirs », qui a fêté ses 20 ans en 2019 et dont la moyenne d'âge des membres tourne autour de 55-58 ans.

Faille mémorielle

Né à Cassis, près de Marseille, en 1962, il explique avoir fondé cette association dans un but mémoriel. « Il y a la génération du souvenir et du vécu. Moi je suis la génération de la mémoire », explique-t-il. 

Mais c'est celle de ses enfants pour laquelle il est inquiet : « Ils savent qu'une part d'eux n'est pas comme les autres mais ils ne s’y intéressent pas plus que ça. »

Selon lui, la mémoire des pieds-noirs n'a pas disparu mais s'est « diffusée » - modestement - dans la société française. Et cela passe par des mots comme « scoumoune » (la guigne, ndlr) ou « tchatche », désormais employés dans le langage courant. Ou l'anisette qui se déguste encore dans le sud de la France.

« Ce qui reste, ce sont principalement des valeurs liées à la famille, les réunions familiales, parfois même une façon de parler, l'accent pour certains », complète la chercheuse.

Une faille mémorielle que Christian Fenech explique par la volonté farouche des rapatriés à d'abord chercher à s'intégrer économiquement, faisant des questions de mémoire quelque chose de secondaire.

Aujourd'hui, Emile Serna, 90 ans, pied-noir originaire d'Oran (nord-ouest de l'Algérie), a compris l’urgence de la transmission. Cet ancien instituteur devenu inspecteur d'académie explique avoir parlé de l’Algérie à ses trois enfants sans toutefois jamais mentionner la guerre d'indépendance.

Mais désormais, c'est sur ses petits et arrières petits-enfants qu'il se concentre : « Je veux leur laisser en mémoire un héritage d’histoires et de légendes. Je leur apprends des blagues amusantes, des chansons et des fables... en attendant, vu mon âge, de retrouver l’Algérie éternelle ».


La coalition arabe met en garde contre toute action militaire compromettant la désescalade au Yémen

Des membres yéménites des tribus Sabahiha de Lahj lors d'un rassemblement pour manifester leur soutien au Conseil de transition du Sud (STC) dans la ville portuaire côtière d'Aden, le 14 décembre 2025. (AFP)
Des membres yéménites des tribus Sabahiha de Lahj lors d'un rassemblement pour manifester leur soutien au Conseil de transition du Sud (STC) dans la ville portuaire côtière d'Aden, le 14 décembre 2025. (AFP)
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  • Le porte-parole de la coalition, le général de division Turki Al-Maliki, a indiqué que cet avertissement fait suite à une demande du Conseil présidentiel yéménite pour prendre des mesures urgentes

DUBAÏ : La coalition arabe soutenant le gouvernement yéménite internationalement reconnu a averti samedi que tout mouvement militaire compromettant les efforts de désescalade serait traité immédiatement afin de protéger les civils, a rapporté l’Agence de presse saoudienne.

Le porte-parole de la coalition, le général de division Turki Al-Maliki, a déclaré que cet avertissement fait suite à une demande du Conseil présidentiel yéménite visant à prendre des mesures urgentes pour protéger les civils dans le gouvernorat de Hadramout, face à ce qu’il a qualifié de graves violations humanitaires commises par des groupes affiliés au Conseil de transition du Sud (CTS).

Le communiqué précise que ces mesures s’inscrivent dans le cadre des efforts conjoints et continus de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis pour réduire les tensions, faciliter le retrait des forces, remettre les camps militaires et permettre aux autorités locales d’exercer leurs fonctions.

Al-Maliki a réaffirmé le soutien de la coalition au gouvernement yéménite internationalement reconnu et a appelé toutes les parties à faire preuve de retenue et à privilégier des solutions pacifiques, selon l’agence.

Le CTS a chassé ce mois-ci le gouvernement internationalement reconnu de son siège à Aden, tout en revendiquant un contrôle étendu sur le sud du pays.

L’Arabie saoudite a appelé les forces du CTS à se retirer des zones qu’elles ont prises plus tôt en décembre dans les provinces orientales de Hadramout et d’Al-Mahra.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Les Émirats arabes unis saluent les efforts de l’Arabie saoudite pour soutenir la stabilité au Yémen

Les Émirats arabes unis ont également réaffirmé leur engagement à soutenir toutes les initiatives visant à renforcer la stabilité et le développement au Yémen. (WAM)
Les Émirats arabes unis ont également réaffirmé leur engagement à soutenir toutes les initiatives visant à renforcer la stabilité et le développement au Yémen. (WAM)
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  • Les Émirats arabes unis ont salué le rôle constructif du Royaume dans la promotion des intérêts du peuple yéménite

DUBAÏ : Les Émirats arabes unis ont salué vendredi les efforts de l’Arabie saoudite pour soutenir la sécurité et la stabilité au Yémen, a rapporté l’agence de presse officielle WAM.

Dans un communiqué, les Émirats ont loué le rôle constructif du Royaume dans la promotion des intérêts du peuple yéménite et dans le soutien de leurs aspirations légitimes à la stabilité et à la prospérité.

Les Émirats ont également réaffirmé leur engagement à soutenir toutes les initiatives visant à renforcer la stabilité et le développement au Yémen, en soulignant leur appui aux efforts contribuant à la sécurité et à la prospérité régionales.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le Liban adopte le projet de loi sur le gap financier malgré l’opposition du Hezbollah et des Forces libanaises

Le Premier ministre libanais Nawaf Salam s'exprimant lors d'une conférence de presse après une réunion du Conseil des ministres à Beyrouth, le 26 décembre 2025. (AFP)
Le Premier ministre libanais Nawaf Salam s'exprimant lors d'une conférence de presse après une réunion du Conseil des ministres à Beyrouth, le 26 décembre 2025. (AFP)
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  • Le texte vise à trancher le sort de milliards de dollars de dépôts bloqués et devenus inaccessibles pour les citoyens libanais depuis l’effondrement financier du pays

BEYROUTH : Le Conseil des ministres libanais a approuvé vendredi un projet de loi controversé visant à encadrer la relance financière et à restituer les dépôts bancaires gelés aux citoyens. Cette décision est perçue comme une étape clé dans les réformes économiques longtemps retardées et exigées par le Fonds monétaire international (FMI).

Le texte a été adopté par 13 voix pour et neuf contre, à l’issue de discussions marathon autour du projet de loi dit du « gap financier » ou de récupération des dépôts, bloqué depuis des années après l’éclatement de la crise bancaire en 2019. Les ministres de la Culture et des Affaires étrangères étaient absents de la séance.

La législation vise à déterminer le sort de milliards de dollars de dépôts devenus inaccessibles pour les Libanais durant l’effondrement financier du pays.

Le projet a été rejeté par trois ministres des Forces libanaises, trois ministres du Hezbollah et du mouvement Amal, ainsi que par la ministre de la Jeunesse et des Sports, Nora Bayrakdarian, le ministre des Télécommunications, Charles Al-Hajj, et le ministre de la Justice, Adel Nassar.

Le ministre des Finances, Yassin Jaber, a rompu avec ses alliés du Hezbollah et d’Amal en votant en faveur du texte. Il a justifié sa position par « l’intérêt financier suprême du Liban et ses engagements envers le FMI et la communauté internationale ».

Le projet de loi a suscité une vive colère parmi les déposants, qui rejettent toute tentative de leur faire porter la responsabilité de l’effondrement financier. Il a également provoqué de fortes critiques de l’Association des banques et de plusieurs blocs parlementaires, alimentant les craintes d’une bataille politique intense au Parlement, à l’approche des élections prévues dans six mois.

Le Premier ministre Nawaf Salam a confirmé que le Conseil des ministres avait approuvé le texte et l’avait transmis au Parlement pour débat et amendements avant son adoption définitive. Cherchant à apaiser les inquiétudes de l’opinion publique, il a souligné que la loi prévoit des audits judiciaires et des mécanismes de reddition des comptes.

« Les déposants dont les comptes sont inférieurs à 100 000 dollars seront intégralement remboursés, avec intérêts et sans aucune décote », a déclaré Salam. « Les grands déposants percevront également leurs premiers 100 000 dollars en totalité, le reste étant converti en obligations négociables garanties par les actifs de la Banque centrale, estimés à environ 50 milliards de dollars. »

Il a ajouté que les détenteurs d’obligations recevront un premier versement de 2 % après l’achèvement de la première tranche de remboursements.

La loi comprend également une clause de responsabilité pénale. « Toute personne ayant transféré illégalement des fonds à l’étranger ou bénéficié de profits injustifiés sera sanctionnée par une amende de 30 % », a indiqué Salam.

Il a insisté sur le fait que les réserves d’or du Liban resteront intactes. « Une disposition claire réaffirme la loi de 1986 interdisant la vente ou la mise en gage de l’or sans l’approbation du Parlement », a-t-il déclaré, balayant les spéculations sur une utilisation de ces réserves pour couvrir les pertes financières.

Reconnaissant que la loi n’est pas parfaite, Salam l’a néanmoins qualifiée de « pas équitable vers la restitution des droits ».

« La crédibilité du secteur bancaire a été gravement entamée. Cette loi vise à la restaurer en valorisant les actifs, en recapitalisant les banques et en mettant fin à la dépendance dangereuse du Liban à l’économie du cash », a-t-il expliqué. « Chaque jour de retard érode davantage les droits des citoyens. »

Si l’Association des banques n’a pas publié de réaction immédiate après le vote, elle avait auparavant affirmé, lors des discussions, que la loi détruirait les dépôts restants. Les représentants du secteur estiment que les banques auraient du mal à réunir plus de 20 milliards de dollars pour financer la première tranche de remboursements, accusant l’État de se dédouaner de ses responsabilités tout en accordant de facto une amnistie à des décennies de mauvaise gestion financière et de corruption.

Le sort du texte repose désormais sur le Parlement, où les rivalités politiques à l’approche des élections de 2025 pourraient compliquer ou retarder son adoption.

Le secteur bancaire libanais est au cœur de l’effondrement économique du pays, avec des contrôles informels des capitaux privant les déposants de leurs économies et une confiance en chute libre dans les institutions de l’État. Les donateurs internationaux, dont le FMI, conditionnent toute aide financière à des réformes profondes du secteur. 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com