Lever des fonds, le parcours du combattant des femmes entrepreneuses

La statue de la Fille sans peur à Wall Street, New York. Les femmes du secteur financier américain applaudissent les signes de progrès de géants financiers comme Cititgroup, qui est devenu la première grande banque de Wall Street à nommer une femme directrice générale. (Kena Betancur/AFP)
La statue de la Fille sans peur à Wall Street, New York. Les femmes du secteur financier américain applaudissent les signes de progrès de géants financiers comme Cititgroup, qui est devenu la première grande banque de Wall Street à nommer une femme directrice générale. (Kena Betancur/AFP)
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Publié le Lundi 08 mars 2021

Lever des fonds, le parcours du combattant des femmes entrepreneuses

  • Lever des fonds pour une jeune pousse tient souvent à la confiance que son fondateur inspire aux financiers. Or les fondatrices en inspirent visiblement beaucoup moins
  • Le circuit officieux qui relie les entrepreneurs aux fonds de capital-risque est principalement ouvert aux hommes blancs issus d'universités prestigieuses comme Stanford dans la Silicon Valley

SAN FRANCISCO : "Je ne dis pas qu'il faut faire des cadeaux aux femmes, je dis simplement qu'elles n'ont pas accès au même nombre de transactions", résume l'entrepreneuse Lauren Foundos, après des années d'expérience et de rendez-vous avec des investisseurs pour financer sa start-up, Fortë.

Lever des fonds pour une jeune pousse tient souvent à la confiance que son fondateur inspire aux financiers. Or les fondatrices en inspirent visiblement beaucoup moins, d'après Lauren Foundos et d'autres femmes interviewées par l'AFP.

"Parfois, avant même que je présente mon projet, ils me demandaient si j'étais prête à laisser la place de patron à quelqu'un d'autre", raconte-t-elle.

Cette New-Yorkaise a toujours excellé à tout ce qu'elle a tenté, du hockey sur gazon à l'université aux marchés de Wall Street, où elle était courtière en bourse, jusqu'à la création en 2015 de Fortë, une plateforme de cours de gym en ligne qui a décollé pendant la pandémie.

Elle est habituée à ce que le chemin soit plus ardu en tant que femme, mais les entretiens avec les fonds de capital-risque, "c'était un autre niveau", constate-t-elle.

Régulièrement, les investisseurs parlaient d'elle à la troisième personne, comme si elle n'était pas là, pour se demander si elle tiendrait le coup émotionnellement et qui s'occuperait des finances.

"Quand ça arrive, je leur dis que je suis là. Et que je suis la personne responsable des finances. J'ai travaillé dans de grandes banques pendant 10 ans."

Aux États-Unis, un pourcentage très faible des sommes investies dans des start-up vont à des sociétés fondées par des femmes, d'après Allyson Kapin, associée du W Fund, un fonds qui privilégie les dirigeantes.

Harcèlement contre financement

Elle explique que les apports aux dirigeantes de start-up ont plongé en 2020, qui a pourtant été une année record pour les financements par les fonds de capital-risque.

Et surtout elle s'indigne de ce manque de clairvoyance, alors que ces entreprises délivrent de meilleurs retours sur investissement selon ses données: "Ce n'est pas une question d'altruisme ou de charité... Il est question de gagner plein de fric !".

Lauren Foundos a récolté plus de 8 millions de dollars en tout, ces dernières années. Elle est en train de conclure sa quatrième levée de fonds, de loin la plus rapide et la plus fructueuse, après des mois de pandémie qui ont fait exploser la demande pour les cours de sport à distance.

Lors des entretiens, elle amène avec elle son "bras droit", un associé à l'accent britannique, très prisé aux Etats-Unis, pour améliorer ses chances de succès.

Souvent, elle demande aux hommes de l'autre côté de la table s'ils ont déjà investi dans des sociétés dirigées par des femmes. La réponse est toujours "non".

Parfois, c'est pire. Selon une étude récente de l'association Women Who Tech ("les femmes qui font de la tech"), les propositions de relations sexuelles en échange de financements ou de présentation à des contacts sont monnaie courante pour les fondatrices de jeunes pousses.

Quelques 44% des dirigeants interviewées ont mentionné du harcèlement pendant le processus des levées de fonds, comme des allusions sexuelles ou des contacts physiques non voulus.

Priorité aux hommes blancs

Le circuit officieux qui relie les entrepreneurs aux fonds de capital-risque est principalement ouvert aux hommes blancs issus d'universités prestigieuses comme Stanford dans la Silicon Valley, selon Allyson Kapin et d'autres.

"Ce n'est pas représentatif du monde dans lequel on vit et c'est problématique parce que vous essayez de résoudre des problèmes mondiaux à travers le prisme d'une poignée de personnes - essentiellement des hommes blancs", analyse-t-elle.    

Les femmes non blanches ont ainsi encore plus de mal à obtenir l'argent nécessaire.

Fonta Gilliam a travaillé à l'étranger pour le gouvernement américain, avec des institutions financières, avant de créer la start-up Invest Sou Sou, spécialisée dans la banque sociale.

Inspirée par les villages africains qui mettent leurs économies en commun, cette entrepreneuse afro-américaine a créé une application mobile gratuite qui reprend cette idée, en ajoutant de l'intelligence artificielle.

Elle a démontré avec un prototype la capacité du concept à générer des revenus, mais a tout de même eu l'impression de se heurter à un mur.

"Nous devons toujours sur-performer et sur-compenser", constate-t-elle. "Les hommes sont crus sur parole alors que nous devons prouver les choses dix fois."

Certains investisseurs lui ont offert des valorisations tellement insultantes qu'elle a quitté des rendez-vous.

"On avance à la force du poignet, mais je pense que ça finira par payer", raconte-t-elle. "Le truc avec les start-up de femmes noires, c'est que la barre est tellement haute pour obtenir du soutien que les entreprises sont généralement plus solides, plus résistantes."

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Trump fait vaciller le lien transatlantique

Trump fait vaciller le lien transatlantique
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  • le rapprochement opéré par le président américain avec la Russie de Vladimir Poutine, au détriment de l'Ukraine, porte un coup sérieux à ce lien et place les Européens devant leurs responsabilités.
  • Le président américain, qui déclare vouloir mettre rapidement fin au conflit ukrainien, a provoqué un séisme politique en renouant le contact avec le président russeSSIE,

WASHINGTON : En l'espace de quelques jours, Donald Trump a ébranlé le lien transatlantique.S'il est trop tôt pour parler de la fin de ce lien historique, qu'il aura fallu 80 ans pour consolider, le rapprochement opéré par le président américain avec la Russie de Vladimir Poutine, au détriment de l'Ukraine, porte un coup sérieux à ce lien et place les Européens devant leurs responsabilités.

Témoignant d'un sentiment d'urgence, le président français Emmanuel Macron, qui a multiplié les appels à son homologue américain, se rend lundi à Washington pour s'en expliquer avec Donald Trump.

Il sera suivi de peu par le Premier ministre britannique Keir Starmer, qui sera reçu à la Maison Blanche jeudi.

« Je vais lui dire : “Au fond, tu ne peux pas être faible face au président Poutine” », a expliqué le président français jeudi.

« Je vais lui dire : “Si tu laisses l'Ukraine aux mains de Poutine, la Russie sera inarrêtable pour les Européens, pour tous”.  Il a également mis en garde contre une « faute stratégique énorme ».

Le président américain, qui déclare vouloir mettre rapidement fin au conflit ukrainien, a provoqué un séisme politique en renouant le contact avec le président russe, persona non grata auprès des Européens et de l'administration précédente américaine.

Cette initiative a été suivie mardi dernier à Ryad, en Arabie saoudite, par une réunion sans précédent depuis l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022 entre hauts responsables américains et russes, au cours de laquelle ils se sont engagés à nommer des équipes de négociation. Ni Kiev ni les Européens n'ont été invités à la table des négociations.

Parallèlement, Donald Trump monte la pression sur le président ukrainien Volodymyr Zelensky en le qualifiant de « dictateur » et en disant qu'il n'avait « aucune carte en main ».

Il ne cache pas sa colère envers le dirigeant ukrainien, qui a refusé de conclure un accord sur l'exploitation des minerais dans son pays.

- « Un moment dangereux » -

« Je pense que nous vivons actuellement un moment assez difficile et très dangereux où les deux côtés de la communauté transatlantique, pour ainsi dire, s'éloignent de plus en plus l'un de l'autre », a-t-il déclaré à l'AFP, en marge d'une conférence de conservateurs américains près de Washington.

Pour Nigel Gould-Davies, de l'Institut international des études stratégiques (IISS) à Londres, « il s'agit d'une crise transatlantique sans précédent ».

« Pendant la guerre froide, on craignait que l'Amérique ne se découple de l'alliance, n'abandonne l'Europe et ne retombe dans l'isolement. Ce qui commence maintenant est pire : en négociant avec la Russie par-dessus les Européens et en intervenant dans la politique européenne, les États-Unis ne se contentent pas de se découpler de l'Europe, mais décident pour elle et la perturbent », écrit-il.

Pour Donald Trump, l'Europe a mangé son pain blanc.

Le président américain accuse les Européens de ne pas partager le fardeau et de pratiquer une concurrence déloyale en matière commerciale.

Il exhorte les pays européens à prendre davantage de responsabilités en matière de défense, soulevant même des doutes quant à la volonté des États-Unis d'apporter leur aide à leurs alliés de l'OTAN en Europe en cas de besoin.

Donald Trump avait déjà fortement secoué les Européens lors de son premier mandat, de 2017 à 2021.

Son successeur, le président démocrate Joe Biden, a donc pu se vanter d'avoir « restauré » les alliances de l'Amérique, y compris au sein de l'OTAN.

Selon Jeremy Shapiro, du European Council on Foreign Relations à Bruxelles, il ne s'agit pas d'un complot contre l'Europe, mais d'une nouvelle démonstration de l'insignifiance croissante de l'Europe sur le plan géopolitique.

- « Tête froide » -

Les Européens entendront-ils ce message ?

L'Europe « doit en faire beaucoup plus, non seulement pour assurer notre propre défense, mais aussi pour soutenir l'Ukraine, car nous traversons une période extrêmement critique de l'histoire mondiale », a concédé le chef de la diplomatie danoise, Lars Løkke Rasmussen, dans un entretien à l'AFP mercredi.

De son côté, la haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Kaja Kallas, a appelé jeudi la population du Vieux Continent à « garder la tête froide ».

Reste que selon Max Bergmann, du Centre pour les études stratégiques et internationales (CSIS) à Washington, « la situation sécuritaire est très précaire en ce moment ; pour les Européens, c'est le feu aux poudres ; c'est un peu la panique ».

« Mais je pense que ce que l'on demande à l'Europe maintenant, ce n'est pas seulement qu'elle en fasse un peu plus, mais qu'elle prenne effectivement des mesures qui la feraient émerger, franchement, comme une superpuissance », a-t-il déclaré à l'AFP. 


Cinq candidats retenus pour la présidence de la Banque africaine de développement

Akinwumi Adesina, président de la Banque africaine de développement (BAD), s'exprime lors de la célébration du 60e anniversaire de l'institution à l'hôtel Sofitel Ivoire d'Abidjan, le 10 septembre 2024. (AFP)
Akinwumi Adesina, président de la Banque africaine de développement (BAD), s'exprime lors de la célébration du 60e anniversaire de l'institution à l'hôtel Sofitel Ivoire d'Abidjan, le 10 septembre 2024. (AFP)
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  • Cinq candidats ont été officiellement retenus pour succéder au Nigérian Akinwumi Adesina à la tête de la Banque africaine de développement (BAD), lors de l'élection prévue le 29 mai
  • La BAD, fondée en 1964, compte 81 pays membres, dont 54 pays africains

Abidjan, Côte d'Ivoire: Cinq candidats ont été officiellement retenus pour succéder au Nigérian Akinwumi Adesina à la tête de la Banque africaine de développement (BAD), lors de l'élection prévue le 29 mai, a annoncé vendredi l'institution basée à Abidjan.

Deux candidats viennent d'Afrique de l'ouest: les anciens ministres de l'Economie du Sénégal (2019-2022), Amadou Hott et de Mauritanie (2008-2015) Sidi Ould Tah.

Deux autres sont originaires d'Afrique australe: l'économiste zambien Samuel Munzele Maimbo et la Sud-Africaine Bajabulile Swazi Tshabalala qui a été vice-présidente de l'institution.

Le dernier candidat est l'ancien gouverneur de la Banque des Etats d'Afrique centrale (2017-2024), le Tchadien Abbas Mahamat Tolli.

La BAD, fondée en 1964, compte 81 pays membres, dont 54 pays africains.

Elle fait partie des grandes banques multilatérales de développement et ses ressources proviennent notamment des souscriptions des pays membres, des emprunts effectués sur les marchés internationaux, et des remboursements et revenus des prêts.

Elle aide les pays africains en favorisant l'investissement dans des projets dans divers secteurs comme l'agro-industrie, le transport ou encore l'énergie ou la santé.

M. Adesina passe la main à la tête de l'institution après deux mandats de cinq ans pendant lesquels le capital souscrit de la BAD a plus que doublé, à près de 200 milliards de dollars.

Il avait été réélu en 2020, unique candidat, malgré des accusations de mauvaise gestion et de favoritisme. Il avait été disculpé peu avant par un comité d'experts.

Le président de la BAD est élu par le conseil des gouverneurs constitué des représentants des 81 pays membres, qui sont habituellement les ministres des Finances et du Plan ou des gouverneurs de banques centrales.

L'élection doit se tenir le 29 mai à Abidjan, siège de l'institution.


L'UE conditionne son aide au Liban à une réforme bancaire et un accord avec le FMI 

La Banque centrale du Liban. (AFP)
La Banque centrale du Liban. (AFP)
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  • Vendredi, la commissaire européenne pour la Méditerranée, Dubravka Suica, a précisé que, sur les fonds alloués, "500 millions avaient déjà été adoptés en août dernier, et 500 millions supplémentaires seront bientôt débloqués"
  • "La principale condition préalable est la restructuration du secteur bancaire (...) ainsi qu'un bon accord avec le FMI", a-t-elle déclaré lors d'une conférence de presse après sa rencontre avec le président Joseph Aoun

BEYROUTH: Une responsable de l'Union européenne (UE) en visite au Liban a déclaré vendredi que le versement d'un demi-milliard d'euros de financement était conditionné à une restructuration du secteur bancaire et à la conclusion d'un accord avec le Fonds monétaire international (FMI).

En mai dernier, l'UE avait annoncé une aide d'un milliard d'euros pour le Liban afin d'endiguer l'immigration clandestine vers l'Europe. Cette aide vise à renforcer les services de base, notamment l'éducation et la santé, alors que le pays traverse une grave crise économique.

Vendredi, la commissaire européenne pour la Méditerranée, Dubravka Suica, a précisé que, sur les fonds alloués, "500 millions avaient déjà été adoptés en août dernier, et 500 millions supplémentaires seront bientôt débloqués, mais certaines conditions doivent être remplies".

"La principale condition préalable est la restructuration du secteur bancaire (...) ainsi qu'un bon accord avec le FMI", a-t-elle déclaré lors d'une conférence de presse après sa rencontre avec le président Joseph Aoun.

"Une fois ces conditions remplies, nous poursuivrons bien sûr le versement" des fonds, a-t-elle ajouté.

La communauté internationale réclame depuis longtemps que le Liban mette en oeuvre des réformes pour débloquer des milliards de dollars d'aide et relancer son économie, après la crise financière de 2019, imputée à la gabegie et la corruption.

Le mois dernier, le Liban a élu un nouveau président après plus de deux ans de vacance du pouvoir, et un gouvernement a été formé ce mois-ci, remplaçant l'administration intérimaire.

Cette semaine, le FMI a déclaré être ouvert à un nouvel accord de prêt avec le Liban après des discussions avec son nouveau ministre des Finances.

Mme Suica a également dit avoir discuté avec Joseph Aoun d'un "nouveau pacte pour la Méditerranée", ce qui signifie, selon elle, que "nous allons entamer des accords globaux de partenariat stratégique bilatéraux avec des pays, dont le Liban".

L'UE cherche à stabiliser le pourtour méditerranéen afin d'éviter d'importants flux migratoires vers l'Europe. Le Liban affirme accueillir environ deux millions de Syriens, soit le plus grand nombre de réfugiés par habitant au monde, et constitue également un point de départ pour les migrants en route vers l'Europe.