PARIS : C'est une inversion des pôles dans le football européen: Erling Haaland et Kylian Mbappé ont aimanté les regards cette semaine en ouverture des 8es de finale aller de Ligue des champions, esquissant une rivalité prometteuse qui a éclipsé Lionel Messi et Cristiano Ronaldo, déboussolés.
Les jeunes loups affamés
Alors que le débat fait rage entre dirigeants autour du format de la Ligue des champions à partir de 2024, sur le terrain, l'avenir de la compétition phare européenne est tout tracé.
De performance marquante en performance marquante, Mbappé (22 ans) et Haaland (20 ans) redessinent le paysage façonné depuis plus d'une décennie par les exploits de Messi (33 ans) et Ronaldo (36 ans).
L'attaquant parisien est devenu le premier joueur à réussir un triplé au Camp Nou en C1 depuis Andreï Chevtchenko en 1997, mardi, lors du large succès du PSG face au FC Barcelone (4-1).
Le lendemain, le Norvégien de Dortmund a inscrit un doublé pour s'imposer sur le terrain du FC Séville (3-2).
«Quand j'ai vu Mbappé marquer trois buts hier (mardi), cela m'a motivé. Donc merci à lui!», a souri Haaland.
Vitesse et dribbles pour l'un, puissance et frappes de loin pour l'autre... Au-delà des statistiques, c'est leur style qui a marqué les esprits.
«Je crois que le PSG a une future très grande star, qui va être au niveau de Leo ou de Cristiano», a reconnu le Barcelonais Antoine Griezmann au sujet de son coéquipier en équipe de France.
Le «cyborg» du Borussia (1,94 m) appartient aux «meilleurs joueurs au monde devant», a assuré de son côté l'entraîneur sévillan Julen Lopetegui.
D'ailleurs, il n'est qu'à une réalisation d'égaler le record de «Kyky» (19 buts) sur le nombre de buts marqués en C1 avant 21 ans. A cet âge, Messi en comptait huit, et Ronaldo... zéro.
«C'est la passation des pouvoirs. Cela pourrait être la prochaine rivalité qui durera dix ans», assure l'ancien défenseur international Rio Ferdinand, consultant pour la chaîne britannique BT Sport.
«La relève: Mbappé et Haaland volent la vedette à Messi et Ronaldo en Ligue des champions», a résumé en Allemagne Sportschau, célèbre émission de sport sur la chaîne publique ARD.
En Espagne, les internautes se déchirent pour savoir lequel des deux le Real Madrid doit recruter, pour combler le vide provoqué par le départ de «CR7» à la Juve en 2018.
«Haaland semble être un joueur de finition, pour le but pur, tandis que Mbappé a plus de ressources», s'essaye Alfredo Relaño, éditorialiste du quotidien sportif As.
Les vieux lions contestés
Onze Ballons d'Or à eux deux, neuf Ligues des champions... Messi et Ronaldo ont survolé la décennie, comme des fauves ne laissant que les miettes aux autres.
Mais cette saison, ils doivent se contenter d'une petite part de gateau.
Leurs équipes ont perdu, et pour l'Argentin, il faudrait une incroyable «remontada» lors du match retour au Parc des Princes le 10 mars pour éviter une nouvelle élimination prématurée.
L'attitude de la «Pulga», tête basse, silencieux, tranche avec la colère de «CR7», après la défaite de la Juventus à Porto (2-1) mercredi.
Dans le temps additionnel, le Portugais a réclamé en vain un penalty après un contact avec un défenseur adverse. Mais jeudi matin, la presse italienne retenait plutôt sa prestation d'ensemble, ratée.
«Mbappé ne l'a pas motivé, il semblait presque avoir envie d'imiter Messi. Penalty ou non, il n'y a pas d'excuses», écrit la Gazzetta dello Sport.
Le ciel s'est couvert au-dessus des deux superstars: Messi, en fin de contrat, alimente les rumeurs d'un départ l'été prochain, pendant que la «Juve» de Ronaldo, mal en point, pourrait ne pas remporter le Championnat d'Italie pour la première fois depuis 2011.
Pourtant, individuellement, Messi (20 buts) et Ronaldo (23) partagent des statistiques comparables à Haaland (25) et Mbappé (21) cette saison.
«Si vous regardez les performances de Messi et de Ronaldo, ils sont toujours là. J'entendais certains qui demandaient si Mbappé pouvait s'assoir à leur table. Non, non, non... C'est un joueur exceptionnel, fantastique, mais c'est un jeune joueur. Quand il aura trois ou quatre Ballons d'or, on pourra discuter», a rappelé l'entraîneur de Nantes Antoine Kombouaré.
Les vieux lions sauront-ils mordre à nouveau lors des huitièmes retours, pour repousser le spectre du déclin ?