Enquête sur l’ «islamo-gauchisme» à l’université

La ministre française de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation, Frédérique Vidal, lors d'une séance à l'Assemblée nationale. (Photo, AFP)
La ministre française de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation, Frédérique Vidal, lors d'une séance à l'Assemblée nationale. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 18 février 2021

Enquête sur l’ «islamo-gauchisme» à l’université

  • Frédérique Vidal est mise sous pression jusqu'au sein de la majorité pour s'être trompée de « priorités »
  • Pour le CNRS, « la polémique actuelle est emblématique d’une regrettable instrumentalisation de la science »

PARIS : La ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche Frédérique Vidal est mise sous pression jusqu'au sein de la majorité pour s'être trompée de « priorités » en diligentant une enquête sur « l'islamo-gauchisme » à l'université, quand l'exécutif peine déjà à atténuer les stigmates de la crise chez les étudiants.

Le timing a fait s'étrangler plus d'un. Après avoir épinglé dimanche soir sur CNews l' « islamo-gauchisme » qui, selon elle, « gangrène la société dans son ensemble et l'université n'est pas imperméable », Mme Vidal a enfoncé le clou mardi en annonçant avoir demandé au CNRS « un bilan de l'ensemble des recherches » qui se déroulent en France, afin de distinguer ce qui relève de la recherche académique et ce qui relève du militantisme. Une « étude scientifique » plutôt qu'une enquête, s'empresse-t-on de préciser au ministère.

Pourquoi cette sortie ? « Je n'en sais rien... », se gratte la tête un conseiller de l'exécutif, relevant que Mme Vidal fait « un peu lapin dans les phares » après cette sortie.

Le recadrage du sommet est parvenu en termes policés à l'issue du Conseil des ministres mercredi. D'abord, M. Macron a répété son « attachement absolu à l'indépendance des enseignants-chercheurs », selon le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal.

Puis, « la priorité pour le gouvernement, c'est évidemment la situation des étudiants dans la crise sanitaire, c'est évidemment la possibilité d'apporter un soutien financier aux étudiants en difficulté, c'est évidemment de permettre aux étudiants qui le souhaitent de pouvoir revenir progressivement en présentiel à l'université », a encore rappelé M. Attal, rejoignant plusieurs voix au sein de la majorité appelant Mme Vidal à se concentrer d'abord sur ces points.

« Quand elle est sur un plateau de télévision, elle devrait être obsédée par la vie des étudiants, pas sortir ce genre de choses », se désole un cadre de la majorité.

LE CNRS DÉNONCE

Le CNRS, à qui la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche Frédérique Vidal a confié une étude sur « l'islamo-gauchisme » à l'université, a accepté mercredi d'y participer mais en regrettant une « polémique emblématique d'une instrumentalisation de la science ».

 « "L’islamogauchisme", slogan politique utilisé dans le débat public, ne correspond à aucune réalité scientifique » a répondu dans un communiqué le CNRS, qui « condamne » notamment « les tentatives de délégitimation de différents champs de la recherche, comme les études postcoloniales ».

Pour l'organisme public, « la polémique actuelle autour de l’"islamogauchisme", et l'exploitation politique qui en est faite, est emblématique d’une regrettable instrumentalisation de la science ».

« Il y a des voies pour avancer autrement, au fil de l'approfondissement des recherches, de l'explicitation des méthodologies et de la mise à disposition des résultats de recherche », fait valoir le CNRS.

« C’est dans cet esprit que le CNRS pourra participer à la production de l’étude souhaitée par la Ministre », précise l'institution.

L'enjeu politique est énorme pour l'exécutif qui voit fleurir les images d'étudiants dans les files d'attente devant des banques alimentaires, et les témoignages de détresse psychologique chez les jeunes.

Ce hiatus a d'ailleurs été exploité par l'opposition, à l'image du sénateur communiste Pierre Ouzoulias qui, interpellant le gouvernement sur les aides économiques pour les jeunes, a proposé avec ironie à Mme Vidal de « demander au CNRS à lancer une enquête sur le sujet ».

« Arguties de café du commerce »

Sur le fond, la sortie de Mme Vidal a provoqué la « stupeur » de la Conférence des présidents d'université (CPU) dans un communiqué au vitriol vilipendant les "représentations caricaturales" et "arguties de café du commerce" du gouvernement.

« On va demander à nos chercheurs du CNRS de devenir des flics qui enquêtent sur leur propre université, c'est absurde, il s'agit d'un dérapage incompréhensible », abonde Michel Deneken, administrateur provisoire à l'université de Strasbourg, mettant cette initiative sur le compte d'une stratégie politique pour « rallier la droite avant les élections régionales et la présidentielle ».

Le sillon, qui avait déjà été emprunté en octobre par le ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer, était en effet creusé depuis plusieurs mois par la droite, dont le député LR Julien Aubert, qui réclamait une mission parlementaire sur la question.

« Vous n'avez rien d'autre à faire que de lancer une police de la pensée ? », s'est insurgée mardi la députée LFI Bénédicte Taurine, son collègue François Ruffin réclamant la démission de la ministre.

La polémique relance en tout cas les critiques autour de Mme Vidal, universitaire reconnue spécialiste de la génétique moléculaire, mais accusée de manquer de poids et sens politiques.

L'adoption en novembre de la loi de programmation pour la recherche, son texte phare, a ainsi été polluée par des amendements controversés, notamment sur le « délit d'entrave » dans les facs.

« On lui a confié une loi historique, et le truc passe sous les radars », tempête encore un poids lourd de la majorité.

Mais beaucoup mettent en avant aussi la difficulté du poste, dans un contexte où le sanitaire et l'économique emportent tout.

« Elle a commis une erreur de communication », consent ainsi le député MoDem Philippe Berta, « mais ça ne remet pas en cause son activité. C'est une femme très courageuse ».


Un influenceur franco-iranien jugé en juillet pour apologie du terrorisme

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
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  • La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels
  • Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient

BOBIGNY: Un influenceur franco-iranien sera jugé début juillet devant le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour apologie du terrorisme, ont indiqué jeudi à l'AFP le parquet et ses avocats.

Shahin Hazamy, 29 ans, s'est vu "délivrer une convocation à une audience du 3 juillet pour apologie du terrorisme par un moyen de communication en ligne en public", a déclaré le parquet, confirmant son arrestation mardi révélée par le magazine Le Point.

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels.

Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient.

"En s'en prenant à un journaliste la justice envoie un très mauvais signal à la liberté de la presse. Notre client Shahin Hazamy a subi un traitement inadmissible, avec une perquisition devant ses enfants en bas âge alors que les faits reprochés ont bientôt deux ans", ont déclaré à l'AFP ses avocats Nabil Boudi et Antoine Pastor.

Ces poursuites font suite à l'arrestation fin février d'une autre Iranienne en France, Mahdieh Esfandiari, actuellement écrouée pour apologie du terrorisme dans le cadre d'une information judiciaire confiée au Pôle national de lutte contre la haine en ligne (PNLH).

Annonçant cette nouvelle arrestation en France d'un de ses ressortissants, la télévision d'Etat iranienne a fustigé mercredi une "violation flagrante de la liberté d'expression dans un pays qui prétend être une démocratie".


Macron appelle à intégrer Mayotte dans la Commission de l'océan Indien

Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
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  • "Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo
  • Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale

ANTANANARIVO: Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores.

"Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo.

La COI réunit les États insulaires (Madagascar, Comores, Maurice, Seychelles et La Réunion pour la France) dans le sud-ouest de l'océan Indien.

Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale.

"L'implication de nos populations, l'intégration de toutes nos îles dans les efforts de la COI pour la prospérité et la sécurité, dans la pluralité de ses dimensions maritime, alimentaire et pour la santé sont dans l'intérêt de nos peuples et de la région", a insisté M. Macron.

Il a suggéré toutefois d'"avancer de manière pragmatique vers cet objectif", sans réclamer l'intégration pleine et entière immédiate de l'archipel.

"La France est le premier bailleur de la COI", a-t-il aussi souligné, en précisant que l'Agence française du développement (AFD) gérait un "portefeuille de 125 millions d'euros de projets" de l'organisation.

"La COI est un modèle de coopération (...) Aucune de nos îles ne peut relever seule le défi", a-t-il ajouté, évoquant un "océan Indien profondément bousculé" par les défis planétaires actuels.

"Ensemble, en conjuguant nos atouts (..) nous pouvons tracer une voie nouvelle singulière", a-t-il assuré.

L'Union des Comores s'oppose à l'intégration de Mayotte dans la COI car elle conteste la souveraineté de la France sur Mayotte, restée française lorsque l'archipel des Comores est devenu indépendant en 1975.

Mayotte, tout comme les îles Éparses, autre territoire français hérité de la colonisation et revendiqué par Madagascar, sont au cœur du canal du Mozambique, voie majeure de transport maritime qui renferme d'importantes réserves en hydrocarbures.


Narcobanditisme à Marseille: le ministre de l'Intérieur annonce 21 arrestations dans «le haut du spectre»

Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
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  • Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme"
  • Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail

MARSEILLE: Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a annoncé jeudi un coup de filet avec 21 interpellations de trafiquants appartenant au "haut du spectre" du narcobanditisme marseillais, lors d'un déplacement à Marseille.

Une opération "a eu lieu très tôt ce matin avec 21 interpellations liées au narcobanditisme, dans le haut de spectre, qui doit nous permettre de démanteler un réseau important sur Marseille", qui tenait la cité de la Castellane, dans les quartiers populaires du nord de la ville, a déclaré Bruno Retailleau lors d'une conférence de presse.

Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme", a insisté M. Retailleau.

Selon une source policière, cette enquête portait notamment sur du blanchiment.

Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail.

Au total, 170 enquêteurs ont été mobilisés pour ce coup de filet qui est, selon le ministre, "un coup dur", "sinon mortel", porté à ce réseau.

La cité de la Castellane, vaste ensemble d'immeubles blancs en bordure d'autoroute, est connue pour être un haut lieu marseillais de ces trafics de stupéfiants qui empoisonnent le quotidien des habitants. En mars 2024, Emmanuel Macron s'y était rendu pour lancer des opérations "place nette XXL" contre les trafiquants et depuis la présence policière y était quasi constante, mais si le trafic était moins visible il se poursuivait notamment via les livraisons.

Ce coup de filet n'a a priori "pas de lien" avec les récents faits visant des prisons en France, a également précisé le ministre.

Le ministre était à Marseille pour dresser un premier bilan des plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien, lancés en février, avec par exemple mercredi 1.000 fonctionnaires mobilisés dans les Bouches-du-Rhône qui ont procédé à 10.000 contrôles d'identité.

Au total, 106 personnes ont été interpellées, dont une trentaine d'étrangers en situation irrégulière, dans le cadre d'une opération "massive" et "visible".