PARIS : « Une seule dose » de vaccin contre le Covid-19 suffit pour les patients qui ont déjà eu la maladie, ont recommandé vendredi les autorités sanitaires françaises, une mesure qui permettrait d'économiser un nombre important de doses dans un contexte d'approvisionnement contraint.
Ces personnes « ont déjà élaboré (...) une mémoire immunitaire. La dose unique de vaccin jouera ainsi un rôle de rappel », explique la Haute autorité de santé dans son avis, qui doit encore recevoir l'aval du gouvernement.
L'autorité recommande d'attendre « au-delà de trois mois » après la maladie, « et de préférence six mois », avant d'injecter cette dose unique.
« A ce jour, aucun pays ne s'est clairement positionné sur une vaccination en une dose pour les personnes ayant contracté la Covid-19 antérieurement à la vaccination », souligne la HAS.
Les experts à l'origine de cette recommandation ont même envisagé la possibilité de ne pas vacciner du tout les anciens malades, considérant que « comme d'autres infections comme la rougeole, comme la varicelle, il y a une immunité qui s'est mise en place », qui « va permettre de protéger sur une très longue durée », a expliqué l'infectiologue Olivier Epaulard, lors d'un point de presse en ligne.
« Mais étant donné qu'on manque de recul et que, par ailleurs, on a des vaccins, on a préféré dire qu'on allait quand même vacciner ces personnes », a-t-il ajouté.
« Doses économisées »
Les autorités misent beaucoup sur la campagne de vaccination pour faire face à une situation épidémique qui demeure fragile, mais le chemin est encore long: jeudi, 2 135 333 personnes avaient reçu au moins une dose de vaccin, dont 535 775 deux doses.
Les objectifs du gouvernement en termes de personnes vaccinées ont été perturbés notamment par les annonces de livraisons inférieures aux prévisions du laboratoire britannique AstraZeneca.
Les trois vaccins contre le Covid-19 actuellement autorisés dans l'Union européenne (Pfizer/BioNTech, Moderna et AstraZeneca/Oxford) nécessitent deux doses pour être pleinement efficaces chez les personnes n'ayant jamais été en contact avec le virus.
Celui de Johnson & Johnson, en cours d'examen par l'Agence européenne du médicament, nécessite en revanche une seule injection.
Depuis le début de la pandémie de Covid-19, 3,4 millions de cas d'infections confirmées par un test de dépistage ont été enregistrées en France.
Les personnes concernées « ne sont pas toutes prioritaires pour la vaccination mais (...) cela fait autant de doses économisées », a souligné la présidente de la HAS, Dominique Le Guludec.
Davantage de personnes ont probablement contracté le virus, notamment pendant la première vague, lorsque les tests n'étaient pas largement disponibles.
Dans ce cas, la HAS recommande d'administrer les deux doses et de ne pas réaliser exprès un test sérologique démontrant ou non la présence d'anticorps.
Logistique
La recommandation d'une dose unique de vaccin ne s'applique pas non plus aux personnes immunodéprimées, par exemple les personnes greffées qui suivent un traitement immunosuppresseur.
« La présence de symptômes persistants après une Covid-19 n'est pas une contre-indication à la vaccination. Toutefois, dans ce cas, une consultation médicale adaptée est nécessaire » pour « juger au cas par cas de l'intérêt » de se faire vacciner, ajoute la HAS.
Le gouvernement suit généralement les avis de cet organisme. Fin janvier, il avait toutefois choisi de ne pas augmenter le délai entre les deux doses de vaccin Pfizer, contrairement à la recommandation émise quelques jours plus tôt par la HAS.
L'autorité fonde notamment son avis sur l'analyse des études scientifiques concernant la réponse immunitaire des personnes guéries du Covid-19 et leur tolérance aux vaccins.
Ces derniers jours, plusieurs études réalisées aux Etats-Unis et en Italie, pas encore évaluées par d'autres scientifiques, évoquaient cette solution d'une dose unique pour les ex-malades du Covid.
« Chez les individus avec une immunité pré-existante, la réponse des anticorps à la première dose est équivalente, voire supérieure, à celle qu'on détecte après la deuxième dose » chez des personnes qui n'ont jamais été infectées par le coronavirus, écrit l'une de ces équipes, basée à l'école de médecine Icahn à New York.
« Mettre cela en oeuvre dans le cadre d'un programme de vaccination de masse pourrait être complexe du point de vue logistique », a toutefois nuancé Eleanor Riley, infectiologue à l'université d'Edimbourg, citée par l'organisme britannique Science Media Centre.