AL-MUKALLA: Plusieurs ambassadeurs européens au Yémen ont visité samedi le port sud d'Aden, la capitale provisoire du pays, au moment où des responsables yéménites ont rapporté que les Houthis n’ont pas cessé de créer des obstacles lors des pourparlers d'échange de prisonniers à Amman.
L'ambassadeur de l'UE et les ambassadeurs de la France, de l’Allemagne, des Pays-Bas, de la Belgique, de la Suède, de l’Irlande et de la Finlande, ainsi que le vice-ambassadeur de la Norvège, ont atterri à Aden, où ils ont discuté des efforts de paix avec de hauts responsables gouvernementaux yéménites.
Ahmed Awad bin Moubarak, ministre des Affaires étrangères du Yémen, a remercié les ambassadeurs de l'UE pour leur visite à Aden qui porte un « message politique important » de soutien au gouvernement yéménite. Il a également ajouté qu'il avait discuté avec les ambassadeurs de l'accord de Riyad, de l’opposition des Houthis à la réparation du pétrolier Safer, des efforts du gouvernement pour rétablir les services dans les provinces libérées et de la volonté du gouvernement de parvenir à une paix « réelle, globale et durable » au Yémen.
La délégation de l’UE est le plus haut groupe d’envoyés étrangers à visiter Aden depuis l’arrivée du nouveau gouvernement du Yémen, qui a été formé dans le cadre de l’accord de Riyad.
La délégation du gouvernement yéménite lors des pourparlers d'échange de prisonniers à Amman a déclaré que les pourparlers avaient rencontré une pierre d'achoppement après que les Houthis soutenus par l'Iran avaient refusé d'échanger des journalistes et des militants enlevés ainsi que des personnes gravement malades.
«La délégation du gouvernement yéménite a fait des concessions pour que les pourparlers aboutissent à des solutions fiables», a déclaré samedi à Arab News Majed Fadhail, vice-ministre des droits de l'homme et membre de la délégation gouvernementale aux pourparlers, ajoutant que les Houthis étaient devenus plus intransigeants en faisant obstacle aux pourparlers.
Fadhail a attribué le nouveau comportement radical des Houthis lors des pourparlers à la décision des États-Unis d’annuler la désignation des Houthis comme organisation terroriste.
« Tout le monde doit savoir que cette milice criminelle et terroriste refuse de libérer les journalistes qui sont en détention ou même d'envisager de les échanger avec leurs combattants capturés sur les champs de bataille», a révélé Fadhail.
Les représentants du gouvernement yéménite et des Houthis ont repris le mois dernier les pourparlers d'échange de prisonniers soutenus par l'ONU dans le but de libérer 301 prisonniers des deux côtés.
En même temps, l’Association des mères des personnes enlevées, une organisation qui regroupe des milliers de proches de personnes enlevées au Yémen, a appelé à la libération immédiate de 127 prisonniers gravement malades détenus par la milice houthie et le gouvernement yéménite.
Fadhail a également affirmé que la délégation gouvernementale avait présenté les noms de dizaines de personnes enlevées qui sont malades parmi les prisonniers des houthis et exigeait leur libération au cours de cette série de pourparlers. « Nous avons donné leurs noms pendant les pourparlers, mais les Houthis ont refusé de discuter de leur libération », a souligné Fadhail.
Dans une campagne sur les médias sociaux, des militants, des journalistes et des politiciens yéménites ont revendiqué la fin des crimes des Houthis contre les Yéménites, tout en critiquant la décision américaine d'abandonner la désignation des Houthis en tant qu’organisation terroriste.
En utilisant le hashtag #StopHouthiTerrorismIn Yémen (Arrêtez le terrorisme HouthiAuYémen), des dizaines de Yéménites ont confié que les Houthis avaient déplacé des milliers de personnes, enlevé des milliers d'autres, fait sauter les maisons de leurs opposants et parsemé le territoire yéménite de dizaines de milliers de mines terrestres.
Jamal Al-Mamari, un ancien enlevé, a rappelé à la nouvelle administration américaine dans un tweet que les Houthis avaient torturé et tué John Hamen, un entrepreneur américain, décédé pendant sa détention en 2015.
«Pour les Yéménites, le mot Houthis signifie mort, destruction, enlèvement, déplacement, prisons, torture, maladies, famine et viol», a expliqué Mohammed Al-Asal, vice-gouverneur de la province de Raymah.
Les militants yéménites ont également exprimé leur opposition à tout accord de paix avec les Houthis qui ne les rend pas responsables pour les toutes les violations des droits de l’homme.
«Le Yémen ne veut pas d'une paix partielle avec la milice houthie qui ne croit qu'au langage de l'exclusion, du meurtre, de la torture, du pillage et du manque de l'égalité des citoyens. Notre revendication est une paix globale et juste, qui tient les Houthis pour responsables de toutes les violations et tous les crimes qu'ils ont commis et les désarme entièrement », a déclaré Huda Al-Sarari, une avocate yéménite et militante des droits de l’homme qui documente les violations des droits humains dans la ville méridionale de Taiz.
L'administration américaine aurait dû utiliser la désignation des Houthis comme organisation terroriste pour faire pression afin de les forcer à cesser d'entraver la mission de l'ONU de réparer le pétrolier Safer, ont signalé des experts en conflit yéménite.
« En révoquant inconditionnellement la désignation des Houthis comme une organisation terroriste, l'administration Biden a commis une énorme erreur. Cette désignation aurait pu être utilisé comme un moyen de pression sur les Houthis afin de donner quelque chose en retour - au moins pour permettre aux ingénieurs de vider le Safer de sa cargaison de pétrole. Les États-Unis viennent de perdre cette carte d’échange pour rien », a déclaré Nadwa Al-Dawsari, analyste du conflit yéménite et chercheuse non-résidente au Middle East Institute.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com