MOSCOU/ BERLIN/ BRUXELLES: Moscou a déclaré vendredi persona non grata des diplomates d'Allemagne, de Pologne et Suède accusés d'avoir participé à une manifestation en faveur de l'opposant incarcéré Alexeï Navalny, annonce intervenant le jour de la visite du chef de la diplomatie européenne.
Ces diplomates, dont le nombre n'est pas précisé, sont accusés d'avoir participé à ces rassemblements « illégaux le 23 janvier » à Saint-Pétersbourg et Moscou, a indiqué le ministère russe des Affaires étrangères.
La diplomatie russe juge de « telles actions inacceptables et incompatibles avec leur statut diplomatique ».
« La partie russe s'attend à ce qu'à l'avenir les missions diplomatiques du Royaume de Suède, de la République de Pologne et de la République fédérale d'Allemagne et leurs personnels respectent scrupuleusement les normes de droit international », a-t-elle poursuivi.
L'Allemagne dénonce l'expulsion et convoque l'ambassadeur russe
L'expulsion par Moscou de diplomates européens, en lien avec l'affaire Navalny, est « injustifiée », a dénoncé vendredi le gouvernement allemand qui a convoqué l'ambassadeur de Russie à Berlin pour une explication.
La chancelière Angela Merkel a fustigé « une expulsion injustifiée », montrant selon elle « une facette supplémentaire de ce qui se passe actuellement en Russie et qui a peu à voir avec un Etat de droit », au cours d'une conférence de presse commune avec Emmanuel Macron.
Berlin a réagi en invitant l'ambassadeur de Russie à se présenter au ministère des Affaires étrangères dès vendredi pour une « conversation urgente ». Ce diplomate de haut rang s'est vu « très clairement » signifier la position allemande à propos de ces expulsions, a dit une source ministérielle.
Le ministre allemand des Affaires étrangères, Heiko Maas, a lui aussi condamné en des termes très fermes l'expulsion de diplomates européens, menaçant de possibles représailles.
« La décision de la Russie d'expulser plusieurs diplomates de l'UE, dont un employé de l'ambassade (d'Allemagne) à Moscou, n'est en aucun cas justifiée et nuit encore davantage aux relations avec l'Europe », a-t-il dénoncé dans un communiqué.
« Le diplomate allemand en question ne faisait que remplir son devoir, en vertu de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques, à savoir obtenir des informations par des moyens légaux sur l'évolution de la situation sur le terrain », a expliqué M. Maas.
« Si la Fédération de Russie ne reconsidère pas cette mesure, elle ne restera pas sans réponse », a mis en garde le chef de la diplomate allemande.
Mme Merkel a toutefois redit, malgré les critiques à l'encontre de Moscou, son attachement au projet controversé Nord Stream 2, un gazoduc qui reliera la Russie à l'Allemagne. Il convient toutefois, selon elle, d'éviter toute »dépendance énergétique » vis-à-vis de Moscou.
« Il est nécessaire de parler avec la Russie », a-t-elle fait valoir.
EMMANUEL MACRON CONDAMNE L'EXPULSION DE TROIS DIPLOMATES ALLEMAND
Emmanuel Macron a condamné « avec la plus grande fermeté » l'expulsion de trois diplomates allemand, suédois et polonais par la Russie, et au-delà l'ensemble de la gestion par Moscou de l'affaire de l'opposant Alexei Navalny
« Sur l'affaire Navalny, je condamne avec la plus grande fermeté du début à la fin ce qui s'est passé, de l'empoisonnement (...) à la condamnation, et aujourd'hui l'expulsion des diplomates allemand, polonais, suédois, qui a été décidée par la Russie », a déclaré le président français à l'issue d'un conseil de défense franco-allemand avec Angela Merkel.
Borrell «condamne fermement » l'expulsion des trois diplomates
Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a « fermement condamné » la décision de la Russie d'expulser trois diplomates européens, alors qu'il est en visite à Moscou, et a demandé que cette décision soit « reconsidérée », a annoncé son porte-parole.
« Josep Borrell a appris pendant sa réunion avec (le ministre russe des Affaires étrangères) Sergueï Lavrov que trois diplomates européens allaient être expulsés de Russie. Il a fermement condamné cette décision et a rejeté les allégations selon lesquelles ils auraient mené des activités incompatibles avec leur statut de diplomates étrangers », a déclaré Peter Stano.
M. Borrell a jugé que cette décision « devrait être reconsidérée » et il a « souligné l'unité et la solidarité de l'UE avec les États membres concernés », a ajouté le porte-parole.
Ces diplomates sont accusés d'avoir pris part à ces rassemblements « illégaux le 23 janvier » à Saint-Pétersbourg et à Moscou, a dit le ministère russe des Affaires étrangères, jugeant de « telles actions inacceptables et incompatibles avec leur statut diplomatique ».
Josep Borrell est arrivé jeudi pour une visite de deux jours à Moscou, jusqu'au 6 février, destinée à demander la libération de l'opposant Alexeï Navalny et à sonder la possibilité d'une normalisation des relations entre l'UE et la Russie.
Ces relations sont « sévèrement tendues et l'affaire Navalny est un plus bas », a-t-il déclaré au début de sa rencontre avec Sergueï Lavrov.
« Notre principal problème est l'absence de normalité dans les relations Russie-UE (...) c'est une situation malsaine qui ne sert personne », a pour sa part commenté le ministre russe.
« Nous avons relevé notre disposition à coopérer de manière pragmatique là où il y un intérêt commun », a-t-il toutefois assuré, citant »la culture, la recherche, la santé, le Covid-19, le climat ».
LA SUÈDE DÉNONCE L'EXPULSION « COMPLÈTEMENT INFONDÉE »
La Suède a jugé « complètement infondée » la décision de Moscou d'expulser un de ses diplomates, réfutant les accusations russes selon lesquelles son représentant aurait « participé » à une manifestation en faveur de l'opposant incarcéré Alexeï Navalny.
Le diplomate suédois se trouvait à cette manifestation comme un « observateur » dans le cadre de ses fonctions et n'y a pas participé de façon active, a affirmé une porte-parole du ministère suédois des Affaires étrangères.
« C'est une partie naturelle des fonctions essentielles d'un diplomate d'observer les évènements politiques de son pays hôte », a-t-elle poursuivi.
Le ministère considère donc la décision d'expulsion « comme complètement infondée, ce qu'il a également fait savoir côté russe » et « se réserve le droit de réagir de façon appropriée », indique-t-il dans une déclaration écrite.
La ministre suédoise des Affaires étrangères Ann Linde, qui assure la présidence de l'OSCE, s'était rendue cette semaine à Moscou, où elle avait rencontré le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov.