Accord sur un gouvernement intérimaire libyen lors des pourparlers de Genève

Les participants au dialogue interlibyen réunis sous les auspices de l'ONU en Suisse (Photo, AFP)
Les participants au dialogue interlibyen réunis sous les auspices de l'ONU en Suisse (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 06 février 2021

Accord sur un gouvernement intérimaire libyen lors des pourparlers de Genève

  • Abdel Hamid Dbeibah désigné comme Premier ministre par intérim
  • Le Premier ministre désigné devra «dans un délai ne dépassant pas 21 jours, former son cabinet», a expliqué vendredi l'émissaire par intérim de l'ONU en Libye Stephanie Williams

 GENÈVE: Les participants au dialogue interlibyen réunis sous les auspices de l'ONU en Suisse ont désigné vendredi Abdel Hamid Dbeibah comme Premier ministre par intérim, ainsi que les trois membres du Conseil présidentiel, un vote surprise pour préparer le scrutin national prévu en décembre.

Cette équipe temporaire devra « réunifier les institutions de l'Etat et assurer la sécurité » jusqu'aux élections, a souligné l'ONU, alors que le pays est en proie au chaos depuis la chute de Mouammar Kadhafi en 2011. 

Deux autorités s'y disputent le pouvoir sur fond d'ingérences étrangères: dans l'Ouest, le Gouvernement d'union nationale (GNA à Tripoli), reconnu par l'ONU et soutenu par la Turquie, et une autorité incarnée par Khalifa Haftar, homme fort de l'Est, soutenu par la Russie et les Emirats arabes unis notamment. 

 

Riyad et l’OCI saluent

LONDRES: L'Arabie saoudite a salué vendredi l'annonce de la formation d’un gouvernement de transition en Libye. Un communiqué du ministère des Affaires étrangères a déclaré que le Royaume espérait que cette démarche «assurera la sécurité, la stabilité et le développement», en saluant les efforts de l'ONU qui ont beaucoup aidé à parvenir à cet accord. Le Royaume espère également que «cet exploit préservera l'unité et la souveraineté de la Libye, ce qui conduira, sans aucun doute,  au départ de tous les combattants et mercenaires étrangers, et créera une solution permanente qui empêchera ainsi toute ingérence extérieure et évitera de mettre en péril la sécurité régionale arabe», a ajouté le communiqué.

De son côté, l'Organisation de la coopération islamique (OCI) a souligné qu'elle souhaiterait que la formation d'un gouvernement de transition en Libye mènera à l'instauration de la sécurité et de la stabilité dans l’ensemble du pays.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

Réunis depuis lundi dans les environs de Genève, dans un endroit tenu secret, les 75 membres du Forum du dialogue politique libyen (FDPL) ont voté en faveur de la liste d'Abdel Hamid Dbeibah avec 39 voix sur 73.  

21 jours 

Originaire de Misrata (nord-ouest), cet ingénieur, fondateur du mouvement Libya al-Mostakbal, a occupé un poste clé sous le régime Kadhafi en présidant la Compagnie libyenne d'investissement et de développement (Lidco).  

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« Vous avez surmonté vos différences, vos défis (...) dans l'intérêt de votre pays et du peuple libyen », s'est félicitée l'émissaire par intérim de l'ONU en Libye Stephanie Williams

Son colistier Mohammed Younes el-Menfi, originaire de Cyrénaïque (est), a pour sa part été élu président du Conseil présidentiel transitoire.  

Ce diplomate sera épaulé par deux vice-présidents: Moussa Al-Koni, un Touareg, et Abdallah Hussein Al-Lafi, un député de Zaouia (ouest). 

La liste de M. Dbeibah faisait figure d'outsider par rapport à celle du puissant ministre de l'Intérieur Fathi Bashagha et du président du Parlement Aguila Saleh. 

Ces derniers mois, après des années d'impasse et de violences meurtrières, des progrès politiques « tangibles » ont été accomplis dans ce riche pays pétrolier, s'est récemment félicité le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, avec un cessez-le-feu et un rebond de la production pétrolière, secteur névralgique de l'économie. 

Le Premier ministre désigné devra « dans un délai ne dépassant pas 21 jours, former son cabinet », a expliqué vendredi l'émissaire par intérim de l'ONU en Libye Stephanie Williams. 

Il disposera ensuite de 21 jours supplémentaires pour obtenir le vote de confiance au Parlement. En cas d'échec, la question sera tranchée par les participants au dialogue interlibyen, a-t-elle dit. 

 

Réactions internationales

Les gouvernements d'Allemagne, d'Italie, de France, des États-Unis et du Royaume-Uni ont salué vendredi le nouveau gouvernement intérimaire de Libye mais ont prévenu qu'un « long chemin » restait à parcourir. « L'autorité exécutive unifiée devra mettre en œuvre l'accord de cessez-le-feu, fournir les services publics essentiels au peuple libyen, lancer un programme de réconciliation significatif, faire face aux besoins critiques du budget national et organiser des élections nationales », ont-ils déclaré dans un communiqué conjoint publié par le ministère allemand des Affaires étrangères. « Un long chemin reste à parcourir ».

Un premier tour avait eu lieu mardi mais aucun des candidats n'ayant atteint le seuil des 70% des voix requises, un second tour a été organisé vendredi sous le format de listes cette fois. 

« Vous avez surmonté vos différences, vos défis (...) dans l'intérêt de votre pays et du peuple libyen », s'est félicitée Mme Williams.  

La prudence reste néanmoins de mise: plusieurs accords ont été conclus ces dernières années mais sans être appliqués. Et même si cette désignation constitue une avancée, le Premier ministre désigné va devoir affirmer rapidement sa légitimité sur le terrain auprès d'une myriade d'acteurs politiques, dont certains ont déjà pris leurs distances avec les pourparlers de Genève. 

« Amnistie » 

Après l'échec d'une offensive lancée par le maréchal Haftar en avril 2019 pour conquérir Tripoli, les deux camps ont conclu un cessez-le-feu en octobre et retrouvé le chemin du dialogue.

Le Conseil de sécurité de l'ONU a ordonné jeudi à Antonio Guterres de déployer une avant-garde d'observateurs du cessez-le-feu en Libye.

Mme Williams a souligné la nécessité d'appliquer le cessez-le-feu, disant que le gouvernement devait notamment s'assurer « du départ des mercenaires et forces étrangères» .

Elle a en outre appelé le nouvel exécutif à « lancer un processus global de réconciliation nationale basé sur les principes de la justice transitionnelle»  et « à promouvoir la culture de l'amnistie et de la tolérance parallèlement à la recherche de la vérité et des réparations» .

La Russie, la Turquie, l'Italie et l'Egypte ont salué la désignation de la nouvelle équipe.

Le dialogue interlibyen a été lancé en Tunisie en novembre 2020, et ses participants se sont mis d'accord sur la tenue d'élections « nationales»  le 24 décembre 2021.


Au Liban, la plupart des sites militaires du Hezbollah ont été cédés à l'armée dans le sud du pays

L'armée libanaise est entrée mercredi dans la ville de Hawsh Al-Sayyid Ali, à la frontière orientale du Liban avec la Syrie. (X/@mdbarakat)
L'armée libanaise est entrée mercredi dans la ville de Hawsh Al-Sayyid Ali, à la frontière orientale du Liban avec la Syrie. (X/@mdbarakat)
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  • « Sur les 265 positions militaires du Hezbollah identifiées au sud du fleuve Litani, le mouvement en a cédé environ 190 à l'armée », a indiqué la source, qui a requis l'anonymat.
  • Le président libanais, Joseph Aoun, dont l'élection a été permise par l'affaiblissement du Hezbollah, a affirmé lundi que la question devait être résolue « par le dialogue », car le « Hezbollah est une composante libanaise ».

BEYROUTH : Selon une source proche du mouvement pro-iranien, l'AFP a appris samedi que la plupart des sites militaires du Hezbollah dans le sud du Liban avaient été placés sous le contrôle de l'armée libanaise.

« Sur les 265 positions militaires du Hezbollah identifiées au sud du fleuve Litani, le mouvement en a cédé environ 190 à l'armée », a indiqué la source, qui a requis l'anonymat.

Dimanche, une émissaire américaine en visite à Beyrouth a exhorté les autorités libanaises à accélérer le désarmement du Hezbollah.

« Nous continuons d'exhorter le gouvernement à aller jusqu'au bout pour mettre fin aux hostilités, ce qui inclut le désarmement du Hezbollah et de toutes les milices », a déclaré Morgan Ortagus sur la chaîne locale LBCI. 

Le président libanais, Joseph Aoun, dont l'élection a été permise par l'affaiblissement du Hezbollah, a affirmé lundi que la question devait être résolue « par le dialogue », car le « Hezbollah est une composante libanaise ».

« Nous allons bientôt élaborer une stratégie de défense nationale dans ce cadre », a-t-il ajouté.

Le Hezbollah est le seul groupe libanais à avoir conservé ses armes après la fin de la guerre civile en 1990, au nom de la « résistance » contre Israël.

Depuis le début de la guerre à Gaza, le Hezbollah a ouvert un front contre Israël en tirant des roquettes à partir du sud du Liban pour soutenir son allié palestinien.

Ces hostilités ont dégénéré en guerre ouverte en septembre 2006 avec des bombardements israéliens intenses au Liban, principalement contre les bastions du Hezbollah, dont la direction a été quasiment décimée. La guerre a fait plus de 4 000 morts.

Israël, qui a maintenu sa présence militaire au Liban dans cinq points « stratégiques » le long de la frontière, continue de mener régulièrement des frappes au Liban, disant viser des infrastructures et des membres du Hezbollah.


Gaza : une délégation du Hamas est attendue au Caire samedi pour discuter d'une trêve

Des Palestiniens prient pour l'Aïd Al-Adha près des ruines de la mosquée Al-Al Rahma détruite par les frappes aériennes israéliennes à Khan Younis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 juin 2024. Le Hamas a déclaré qu'il était prêt à conclure un accord global pour la paix à Gaza. (Reuters)
Des Palestiniens prient pour l'Aïd Al-Adha près des ruines de la mosquée Al-Al Rahma détruite par les frappes aériennes israéliennes à Khan Younis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 juin 2024. Le Hamas a déclaré qu'il était prêt à conclure un accord global pour la paix à Gaza. (Reuters)
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  • « Nous espérons que cette rencontre permettra d'avancer concrètement vers un accord mettant fin à la guerre a déclaré ce responsable sous couvert d'anonymat.
  • « Mais les contacts et les discussions avec les médiateurs sont en cours », a-t-il affirmé.

LE CAIRE : Une délégation du Hamas est attendue samedi au Caire pour des discussions avec les médiateurs égyptiens en vue d'une nouvelle trêve dans la bande de Gaza, a indiqué à l'AFP un responsable du mouvement islamiste palestinien.

« Nous espérons que cette rencontre permettra d'avancer concrètement vers un accord mettant fin à la guerre et à l'agression, et garantissant le retrait complet des forces d'occupation de la bande de Gaza », a déclaré ce responsable sous couvert d'anonymat, en référence à Israël.

Selon lui, le Hamas n'a reçu aucune nouvelle offre de trêve, malgré des informations de médias israéliens rapportant que l'Égypte et Israël avaient échangé des projets de documents portant sur un accord de cessez-le-feu et de libération d'otages.

« Mais les contacts et les discussions avec les médiateurs sont en cours », a-t-il affirmé.

La délégation est conduite par Khalil al-Hayya, le négociateur en chef du Hamas, a-t-il précisé.

Selon le Times of Israel, la proposition égyptienne prévoirait le retour en Israël de 16 otages, huit vivants et huit morts, en échange d'une trêve de 40 à 70 jours ainsi que de la libération d'un grand nombre de prisonniers palestiniens.


Reconnaissance de l'État palestinien : de nombreuses conditions à réunir pour que la France agisse

Emmanuel Macron a répété vendredi dans un message posté sur X en français, anglais, arabe et hébreu que la seule solution au conflit israélo-palestinien était « politique » (Photo AFP)
Emmanuel Macron a répété vendredi dans un message posté sur X en français, anglais, arabe et hébreu que la seule solution au conflit israélo-palestinien était « politique » (Photo AFP)
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  • - Le projet du président français : « Je défends le droit légitime des Palestiniens à un État et à la paix, comme celui des Israéliens à vivre en paix et en sécurité, l'un et l'autre reconnus par leurs voisins », a résumé Emmanuel Macron. 
  • Il a dévoilé le projet d'une telle reconnaissance par Paris dans une « dynamique collective », impliquant la reconnaissance de l'État d'Israël par les pays avoisinants.

PARIS : Toute reconnaissance de l'État palestinien par la France ne contribuera à mettre la solution des deux États avec Israël sur les rails que si elle réunit une myriade de conditions qui semblent pour le moment inatteignables.

Emmanuel Macron a répété vendredi dans un message posté sur X en français, anglais, arabe et hébreu que la seule solution au conflit israélo-palestinien était « politique ». Les obstacles sont de taille.

- Le projet du président français : « Je défends le droit légitime des Palestiniens à un État et à la paix, comme celui des Israéliens à vivre en paix et en sécurité, l'un et l'autre reconnus par leurs voisins », a résumé Emmanuel Macron. 

L'an passé, il avait déclaré que la reconnaissance d'un État palestinien n'était pas un tabou, à condition que ce geste symbolique soit « utile ».

Mercredi, il a dévoilé le projet d'une telle reconnaissance par Paris dans une « dynamique collective », impliquant la reconnaissance de l'État d'Israël par les pays avoisinants.

La conférence pour les deux États, prévue en juin à New York sous l'égide de la France et de l'Arabie saoudite, doit être « un tournant », a-t-il dit. 

Des frontières à définir 

« Les attributs juridico-politiques de l'État palestinien en question n'existent pas aujourd'hui. C'est une pure fiction diplomatique », souligne néanmoins David Khalfa, de la Fondation Jean-Jaurès à Paris.

« Pour qu'un État palestinien soit viable, il faut une continuité territoriale entre Gaza et la Cisjordanie », note Karim Bitar, enseignant à Sciences Po Paris. Or, « on ne voit pas aujourd'hui le gouvernement israélien accepter d'entamer un processus de décolonisation, de mettre un terme à l'occupation de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est, et de demander aux 700 ou 800 000 colons israéliens de quitter ces territoires occupés », dit-il. 

Une autre question épineuse est celle du désarmement du Hamas, qui a perpétré les attentats sanglants du 7 octobre 2023 en Israël et provoqué les représailles meurtrières de l'armée israélienne à Gaza.

Israël a fait de l'éradication du groupe sa priorité. 

Démilitarisation du Hamas et exfiltration

Quoiqu'affaibli, le groupe « a réussi à recruter des milliers de jeunes miliciens » et dispose encore d'un arsenal lui permettant de « mener des actions de guérilla contre les soldats israéliens et de réprimer dans le sang les leaders de la contestation anti-Hamas à Gaza », observe-t-il.

S'agissant de l'exfiltration de certains cadres du Hamas, la question est complexe à explorer avec ceux qui parlent au Hamas, reconnaît-on à Paris. Comment les exfiltrer et vers quelle destination, en plus du Qatar et de la Turquie ? Des interrogations  qui restent sans réponse actuellement. 

Revitaliser l'Autorité Palestinienne

« Les Israéliens doivent être convaincus que le Hamas va être désarmé, qu'il est exclu de la gouvernance de Gaza et que l'Autorité palestinienne va réellement se réformer », a expliqué à l'AFP une source diplomatique française.

Cela passe par le renforcement de la légitimité de l'Autorité palestinienne, alors que la popularité du Hamas augmente au sein de la population. 

Normalisation avec Israël

Selon Hasni Abidi, enseignant au Global Studies Institute de l'Université de Genève, il faut un changement de personnel politique en son sein pour qu'une Autorité palestinienne revitalisée soit en mesure d'assurer une gouvernance crédible dans la bande de Gaza. Or, ses dirigeants ne manifestent aucun désir de passer la main, ce qui permet à Israël d'entretenir l'idée qu'ils n'ont pas d'interlocuteur crédible.

La source diplomatique rappelle que la normalisation est un processus et pas un acte isolé. Elle souligne que ce processus peut se faire progressivement et que d'autres pays peuvent participer. Cependant, la France est réaliste et ne s'attend pas à un règlement immédiat du conflit israélo-palestinien.