CASABLANCA: La visite s’effectue en quelques clics, et ravira les amateurs d’art contemporain. L’exposition virtuelle autour de la résilience artistique Nzaha, créée à l’initiative du collectif des structures d’art et de culture Dar Do, se tient du 23 janvier au 3 février sur des plateformes digitales. L’événement virtuel se déroule à Fès, à l’endroit même où se trouve le premier générateur électrique au Maroc, datant de 1913, dans l’enceinte du Palais El Mokri.
Un lieu qui fait écho à la création, à l’énergie et au renouveau. D’ailleurs, c’est la première fois depuis sa restauration, que cet endroit, devenu au fil des années une friche, accueille un tel événement. L’exposition 100% digitale rassemble une quinzaine d’œuvres et d’artistes originaires de Fès.
Les organisateurs ont mis les petits plats dans les grands et proposent un programme artistique varié, quelque peu décalé, avec, entre autres, de la musique électronique, de la photographie, de la peinture mais aussi de la dramaturgie, de la danse contemporaine et une réinterprétation de contes populaires. Une exposition pluridisciplinaire, mais avec un même leitmotiv: la résilience artistique en réponse à la paralysie du secteur culturel, très limité en raison des restrictions liées à la crise sanitaire.
À cet égard, les artistes de la capitale spirituelle n’ont pas hésité à poursuivre leur combat en faveur de la culture, malgré la situation difficile, en laissant s’exprimer pleinement leur passion. Hors de question donc, pour les membres du collectif Dar Do de faire taire leur art. Ils ont de ce fait décidé de se réinventer en exposant leurs œuvres, d’une autre manière. C’est en effet sur la Toile que ces amoureux d’art en tous genres, partagent leurs créations, avec un large public connecté depuis les quatre coins de la planète.
L’art pour tous
Né d’une initiative venue de la rencontre de plusieurs structures d'art et de cultures, Dar Do se veut être un incubateur culturel pour la ville de Fès et sa région. Pour Mohammed Hamdouni, chercheur en art contemporain et directeur artistique du collectif, cet événement permet d’offrir à la fois une tribune aux artistes mais pas seulement: cette galerie digitale va également apporter une bouffée d’oxygène aux internautes et aux férus d’art en particulier.
«Nous n’avons pas mesuré l’impact de la crise sanitaire sur le bien-être et la psychologie des gens avec l’arrêt quasi total de la culture. Cette exposition est une manière pour notre collectif de faire revivre la Nzaha (une tradition populaire au Maroc, notamment à Fès, qui permet aux habitants de se réunir autour d’un pique-nique avec de la musique melhoun et andalouse, ndlr)», assure-t-il.
Par ailleurs, les œuvres présentées racontent une histoire et sont, pour certaines, représentatives de la personnalité de leurs créateurs. Ainsi, parmi les installations proposées aux internautes, celle de Souad el-Maysour est particulièrement chargée d’émotion. Un style propre à l’artiste plasticienne, militante féministe et engagée. Dans ses œuvres, la franco-marocaine, diplômée en politiques culturelles, œuvre pour la mémoire de l’esclavage en dénonçant la traite des êtres humains, et met également en lumière les questions postcoloniales. «Mon installation présente deux espaces: l’espace d’installation lui-même, dans lequel on peut déambuler, et l’espace vidéo. Dans celui-ci, l’œil de la caméra permet de scruter les détails comme les gestes d’un homme lavant les pieds d’un autre homme.»
On découvre aussi le travail d’Amine Houari, mis en avant à travers cette exposition. Le jeune artiste de 20 ans est en effet l’un des 14 photographes du collectif Noorseen, venus de différentes villes du Royaume. Il présente une série de photographies en noir et blanc se focalisant sur le lieu qui abrite l’événement. Par ces clichés, Amine Houari entend faire du générateur le point de départ du renouveau de l’activité culturelle. «C’est ma première exposition depuis le début de la crise, j’espère qu’elle marquera un nouveau départ. Exposer en ligne nous offre une belle visibilité, on s’adapte à la situation. Les galeries virtuelles pourraient perdurer même après la crise. C’est une nouvelle voie à explorer», confie-t-il.
Le collectif Dar Do espère que la première édition du Festival Nzaha pourra connaitre un véritable succès. Les créateurs comptent davantage sur une deuxième édition en présentiel, cette fois-ci, car l’art c’est aussi et surtout l’interaction, la rencontre entre l’artiste et son public...