Beyrouth détruite: « c’était comme l’apocalypse »

« Ce qui s'est passé aujourd'hui ne restera pas impuni », a déclaré le Premier ministre dans un discours télévisé. (AFP)
« Ce qui s'est passé aujourd'hui ne restera pas impuni », a déclaré le Premier ministre dans un discours télévisé. (AFP)
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Publié le Mercredi 05 août 2020

Beyrouth détruite: « c’était comme l’apocalypse »

  • Des explosions au Port de Beyrouth ont fait plus de 70 morts, des milliers de blessés et ont causé des dégâts matériels considérables
  • « L’explosion était 100 fois plus puissante que celle qui a visé Rafic Hariri »

DJEDDAH: Deux énormes explosions hier ont fait plus de 73 morts et au moins 3700 blessés, causant le chaos total au Liban.

Les explosions ont eu lieu dans un entrepôt du port de la ville peu après 18 heures. Malgré les guerres, conflits ou attentats qu’a connus le pays, jamais de telles explosions n’avaient été ressenties. Les secousses ont été si fortes qu’elles ont été ressenties jusqu’à Chypre, à 200 km.

Des vidéos ont montré une explosion initiale et un incendie, suivis d'une autre explosion massive et d'une onde de choc se propageant à travers les bâtiments de la ville. « C'était comme une explosion nucléaire », a déclaré Walid Abdo, un instituteur âgé de 43 ans dans le quartier de Gemayzeh, à l’agence AP.

« Beyrouth est une ville dévastée »

Les gens hurlaient dans les rues, croyant avoir été frappés par un tremblement de terre. Beaucoup se sont réfugiés dans des restaurants, ou des endroits à l’abri. Les bâtiments de toute la ville ont été endommagés, les fenêtres ont été fracassées et les plafonds se sont effondrés. À la tombée de la nuit, les blessés inondaient les hôpitaux de la ville, beaucoup d’entre eux étant vus par des médecins sur les trottoirs à l’extérieur.

Le responsable de la Croix-Rouge libanaise, Georges Kettaneh, a déclaré que les blessés étaient emmenés dans des hôpitaux à l'extérieur de la capitale car les établissements y étaient déjà pleins. Sur les lieux de l'explosion, les équipes de pompiers ont combattu l'incendie dans la soirée. Des hélicoptères ont déversé de l'eau sur des bâtiments aplatis alors qu'un navire du port était toujours en proie aux flammes.

Une vidéo de l'intérieur des bureaux du journal Daily Star montrait des scènes de dévastation, avec des ordinateurs éparpillés sur le sol et des plafonds effondrés. La journaliste libanaise Rima Maktabi a décrit en larmes les dégâts causés à son domicile. « Je pense que ma maison n’existe plus », a-t-elle déclaré à Al Arabiya, la chaîne où elle travaille.

Le musicien libanais  Jad Choueiri, a raconté, horrifié, que les scènes près de son domicile dans le quartier d'Achrafieh « ressemblaient à l'Apocalypse ». Il a affiché une image des fenêtres de son appartement fracassées dans son salon. « J'aurais pu y laisser ma peau. Le sang est partout dans les rues ». Les foyers des hôtels les plus célèbres de la ville - le Four Seasons et l'InterContinental Phoenicia Beirut - étaient parsemés de verre brisé. Le gouverneur de Beyrouth, Marwan Abboud, en larmes, a visité le Port et n’a pu trouver que ces quelques mots : « Beyrouth est une ville dévastée. »

Raja Farah, un chef pâtissier,  se trouvait lui à un demi-kilomètre des explosions. « Il est impossible d'expliquer l'ampleur de cette explosion. J'étais à peu près aussi loin de l'explosion qui a visé Hariri il y a quelques années, et c'était 100 fois plus puissant », a-t-il affirmé.

Les explosions ont d’ailleurs  eu lieu quelques jours avant le jugement du Tribunal spécial sur le Liban sur l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, tué lors d’un assassinat à la bombe en 2005, où quatre hommes appartenant au Hezbollah sont mis en accusation.

Un entrepôt abritant des matériaux dangereux au cœur de l’explosion

« Ce qui s'est passé aujourd'hui ne restera pas impuni », a déclaré le Premier ministre dans un discours télévisé. « Les responsables de cette catastrophe en paieront le prix ». Hassan Diab a lancé un appel désespéré à la communauté internationale pour obtenir de l’aide. « Je demande à tous les pays amis et frères et aiment le Liban, de se tenir à ses côtés et de nous aider à soigner ces blessures profondes », a-t-il déclaré. Le mercredi a été déclaré jour de deuil national, et la ville a été déclarée comme « sinistrée ». Cette explosion arrive dans un contexte déjà catastrophique au Liban, qui souffre d’une grave crise économique sans précédent, et qui est victime d’une seconde vague de Covid-19.

Le Directeur général de la Sûreté Générale du Liban, Abbas Ibrahim, a annoncé que les explosions se sont produites dans une section du port abritant des matériaux hautement explosifs qui y avaient été confisqués et stockés pendant des années. Hassan Diab a déclaré que « l'entrepôt dangereux » se trouvait dans le port depuis 2014.

Alors que dans un premier temps, les suspicions portaient sur Israël, qui a mené de nombreuses frappes meurtrières au Liban par le passé, un responsable israélien a déclaré que son pays n’avait rien à voir avec les explosions. 

Face à l’ampleur de la tragédie, les gouvernements étrangers, dans le monde arabe et au-delà, ont offert leur soutien.

L’Arabie saoudite a annoncé qu’elle suivait la tragédie avec une grande inquiétude et a affirmé le soutien et la solidarité du Royaume avec le peuple libanais. Le prince héritier des Émirats arabes unis, Sheikh Mohammed bin Zayed, a déclaré : « Nous prions pour que Dieu vous accorde patience et réconfort. Que Dieu bénisse le Liban et le peuple libanais. »

Des offres de soutien similaires ont été envoyées du Bahreïn, du Koweït, de l'Égypte et de la Jordanie. Israël, qui est techniquement toujours en guerre avec le Liban, a également offert une aide médicale et humanitaire. Le département d’Etat des Etats-Unis s’est aussi porté volontaire pour aider. Le président Emmanuel Macron se rendra aujourd’hui sur place au Liban.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur ArabNews.com


Le désarmement du Hezbollah est une question "délicate", souligne le président libanais

Une photo fournie par les forces armées libanaises le 20 avril 2025 montre des armes qui, selon l'armée, ont été saisies après la perquisition d'un appartement dans la région de Sidon-Zahrani, dans le sud du Liban. L'armée a déclaré le 20 avril que ses forces avaient confisqué des roquettes et des lanceurs dans la région de Sidon-Zahrani, dans le sud du Liban, et arrêté un certain nombre de personnes en raison d'un projet de tir en direction du territoire tenu par Israël, sans préciser si les personnes arrêtées étaient affiliées à un groupe quelconque. (Photo de l'armée libanaise / AFP)
Une photo fournie par les forces armées libanaises le 20 avril 2025 montre des armes qui, selon l'armée, ont été saisies après la perquisition d'un appartement dans la région de Sidon-Zahrani, dans le sud du Liban. L'armée a déclaré le 20 avril que ses forces avaient confisqué des roquettes et des lanceurs dans la région de Sidon-Zahrani, dans le sud du Liban, et arrêté un certain nombre de personnes en raison d'un projet de tir en direction du territoire tenu par Israël, sans préciser si les personnes arrêtées étaient affiliées à un groupe quelconque. (Photo de l'armée libanaise / AFP)
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  • M. Aoun a fait cette déclaration après que le ministère libanais de la Santé a annoncé la mort de deux personnes dans de nouvelles attaques israéliennes dans le sud du pays, malgré la trêve en vigueur entre Israël et le Hezbollah.
  • M. Aoun a fait cette déclaration après que le ministère libanais de la Santé a annoncé la mort de deux personnes dans de nouvelles attaques israéliennes dans le sud du pays, malgré la trêve en vigueur entre Israël et le Hezbollah.

BEYROUTH : Le président libanais, Joseph Aoun, a qualifié dimanche le désarmement du Hezbollah de question « délicate », avertissant que l'imposer par la force pourrait conduire le pays à la « ruine ».

M. Aoun a fait cette déclaration après que le ministère libanais de la Santé a annoncé la mort de deux personnes dans de nouvelles attaques israéliennes dans le sud du pays, malgré la trêve en vigueur entre Israël et le Hezbollah.

Le monopole étatique des armes est une « question sensible, délicate et fondamentale pour la préservation de la paix civile », a déclaré M. Aoun à des journalistes, soulignant qu'elle devait être abordée avec « discernement et responsabilité ».

« Nous le mettrons en place, mais il faut d'abord que les circonstances le permettent », a-t-il assuré. Personne ne parle de calendrier ou de pression. »

« Les questions intérieures controversées ne peuvent être abordées que dans un esprit de dialogue et de concertation, sans confrontation. Sinon, nous mènerons le Liban à la ruine », a-t-il mis en garde. 

Le Hezbollah pro-iranien, longtemps force dominante au Liban, est sorti affaibli de plus d'un an d'hostilités avec Israël, dont deux mois de conflit ouvert, déclenchées par la guerre à Gaza.

« Le Hezbollah ne permettra à personne de le désarmer », a affirmé vendredi son secrétaire général, Naïm Qassem, alors que Washington, grand allié d'Israël, fait pression sur Beyrouth pour cela.

Il s'est dit prêt à engager un « dialogue » voulu par l'État libanais sur une « stratégie de défense », « mais pas sous la pression de l'occupation et de l'agression israéliennes. 

Israël  poursuit ses attaques au Liban, ciblant le Hezbollah, en dépit du cessez-le-feu en vigueur depuis le 27 novembre. Le pays occupe toujours cinq positions qu'il juge « stratégiques » dans le sud du pays.

Dimanche encore, le ministère de la Santé a fait état d'un raid israélien « contre un véhicule à Kaouthariyet al-Saiyad », entre les villes méridionales de Saïda et Tyr, qui a fait un mort et deux blessés.

Peu après, il a annoncé qu'une attaque séparée de l'« ennemi israélien » sur « une maison à Houla », à proximité de la frontière, avait fait un mort.

L'armée israélienne ne s'est pas exprimée dans l'immédiat sur ces attaques.

Vendredi, un autre haut responsable du Hezbollah avait affirmé que le mouvement refuserait toute discussion sur la remise de ses armes tant qu'Israël ne se serait pas totalement retiré du Liban. 

Morgan Ortagus, émissaire américaine adjointe pour le Moyen-Orient, a récemment déclaré que le désarmement du Hezbollah devait se faire dans les meilleurs délais.

L'accord de trêve prévoit notamment le démantèlement de l'infrastructure militaire du Hezbollah entre le fleuve Litani et la frontière israélienne, ainsi que le retrait total des forces israéliennes d'une trentaine de kilomètres au sud.

L'armée libanaise a entamé ces derniers mois son déploiement dans le sud, près de la frontière avec Israël, parallèlement au retrait israélien et au démantèlement des infrastructures militaires du Hezbollah.

Dimanche, elle a indiqué y avoir saisi des roquettes et leurs lanceurs dans la région de Saïda-Zahrani, et arrêté plusieurs personnes soupçonnées de préparer des tirs vers des zones sous contrôle israélien, sans préciser leur obédience.

Mercredi, elle avait indiqué avoir interpellé plusieurs suspects de tirs de roquettes vers Israël le mois dernier, parmi lesquels, selon un responsable de la sécurité, trois membres du Hamas palestinien.

 


Gaza: la Défense civile annonce 25 morts dans des frappes israéliennes dimanche

Des personnes en deuil font leurs adieux à un enfant palestinien tué lors d'une frappe israélienne, à l'hôpital Nasser de Khan Yunis, dans le sud de la bande de Gaza, le 19 avril 2025. (Photo par AFP)
Des personnes en deuil font leurs adieux à un enfant palestinien tué lors d'une frappe israélienne, à l'hôpital Nasser de Khan Yunis, dans le sud de la bande de Gaza, le 19 avril 2025. (Photo par AFP)
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  • La Défense civile palestinienne a annoncé dimanche que des frappes aériennes israéliennes avaient fait au moins 25 morts, dont des femmes et des enfants, depuis le début de la journée dans la bande de Gaza.
  • Rompant une trêve de près de deux mois, Israël a repris le 18 mars son offensive aérienne, puis terrestre, contre le mouvement islamiste palestinien Hamas à Gaza.

GAZA, TERRITOIRES PALESTINIENS : La Défense civile palestinienne a annoncé dimanche que des frappes aériennes israéliennes avaient fait au moins 25 morts, dont des femmes et des enfants, depuis le début de la journée dans la bande de Gaza.

Rompant une trêve de près de deux mois, Israël a repris le 18 mars son offensive aérienne, puis terrestre, contre le mouvement islamiste palestinien Hamas à Gaza.

Samedi, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a déclaré être déterminé à poursuivre le conflit et a rejeté les « diktats » du Hamas.

« Depuis l'aube, les frappes aériennes de l'armée israélienne ont tué 20 personnes et en ont blessé des dizaines d'autres, dont des enfants et des femmes, dans toute la bande de Gaza », a déclaré à l'AFP Mahmoud Bassal, le porte-parole de la Défense civile.

Dans un communiqué, cette organisation de secours a ensuite fait état de cinq morts dans une frappe de drone sur un groupe de civils dans l'est de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza.

Selon M. Netanyahu, seule une pression militaire permettra le retour des otages encore détenus à Gaza.

« Nous sommes dans une phase décisive du conflit, et cette étape exige de la patience et de la détermination », a-t-il affirmé samedi, en excluant de retirer les troupes israéliennes du territoire comme l'exige le Hamas.

 


Dans Gaza affamée, des Palestiniens se rabattent sur la viande de tortue

(Photo AFP)
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  • Faute de mieux, c'est la troisième fois que cette Palestinienne de 61 ans prépare un repas à base de tortue pour sa famille déplacée, qui vit aujourd'hui sous une tente à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza.
  • « La famine n'est pas seulement un risque, mais elle semble se développer rapidement dans presque toutes les régions de Gaza », a averti un collectif d'ONG internationales cette semaine.

KHAN YOUNES, TERROIRES PALESTINIENS : Dans une bande de Gaza où les protéines sont rares, certains se résignent à manger des tortues marines.

« Les enfants étaient réticents, on leur a dit que c'était aussi délicieux que du veau », explique Majida Qanan, qui surveille les morceaux de viande rouge mijotant sur un feu de bois.

« Certains en ont mangé, d'autres pas. »

Faute de mieux, c'est la troisième fois que cette Palestinienne de 61 ans prépare un repas à base de tortue pour sa famille déplacée, qui vit aujourd'hui sous une tente à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza.

Depuis 18 mois de guerre dévastatrice entre Israël et le mouvement islamiste Hamas, le territoire et ses 2,4 millions d'habitants se trouvent dans une situation humanitaire critique.

« La famine n'est pas seulement un risque, mais elle semble se développer rapidement dans presque toutes les régions de Gaza », a averti un collectif d'ONG internationales cette semaine.

Depuis le 2 mars, Israël bloque toute livraison humanitaire, accusant le Hamas de détourner l'aide. Le mouvement palestinien dément ces accusations et accuse en retour Israël d'utiliser « la famine comme arme de guerre ».

Selon le Bureau des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA), la bande de Gaza est aujourd'hui probablement plongée dans « la pire » situation humanitaire depuis le début de la guerre déclenchée le 7 octobre 2023 par une attaque sans précédent du Hamas contre Israël.

En juin dernier, les acteurs du secteur humanitaire avaient évoqué des Palestiniens si démunis qu'ils en étaient parfois réduits à se nourrir d'aliments pour animaux ou d'herbe, et à boire l'eau des égouts.

Entretemps, une trêve, entrée en vigueur le 19 janvier, a permis d'augmenter les livraisons humanitaires, jusqu'au nouveau blocage israélien du 18 mars, suivi de la reprise de ses opérations militaires.

Les tortues, elles, sont tuées selon les rites halal, c'est-à-dire conformément aux préceptes de la religion musulmane, affirme Abdul Halim Qanan.

« S'il n'y avait pas de famine, on n'en mangerait pas, mais il faut bien compenser le manque de protéines avec quelque chose ».