PARIS : Après avoir regardé la neige tomber, la France a commencé à appliquer samedi un couvre-feu généralisé à 18H00, un nouveau tour de vis auquel se plient des commerçants résignés, alors que la France a franchi le même jour le seuil de 70 000 morts.
Plus de 413 000 personnes ont été vaccinées en France, selon un décompte communiqué par le ministère de la Santé.
Au total, 70 142 personnes sont décédées des suites de la maladie depuis le début de l'épidémie, dont 196 dans les dernières 24 heures, selon les derniers chiffres communiqué samedi par Santé publique France.
Le nombre de nouvelles contaminations reste par ailleurs élevé avec 21 406 cas enregistrés dans les dernières 24 heures, sensiblement le même que ces derniers jours.
Avant la publication de ces chiffres, le Premier ministre, en visite à Lyon pour promouvoir le plan de relance du gouvernement, a précisé qu'un million de rendez-vous de vaccination avaient été pris.
Il a appelé à une vaccination «dans le calme», reconnaissant que les cinq millions de personnes de plus de 75 ans ne pourraient pas être vaccinées «en quelques jours».
Et alors que le «monsieur vaccin» du gouvernement, Pr Alain Fischer, n'écarte pas la possibilité de vacciner aussi les enfants, des élus continuent de dénoncer la lenteur de la livraison des vaccins ou les difficultés pour obtenir un rendez-vous.
Après les sueurs froides provoquées par l'annonce d'une baisse de cadence «pour trois à quatre semaines» dans la production de vaccins, le groupe américain Pfizer, associé au laboratoire allemand BioNTech, a annoncé samedi un «plan» pour accélérer le rythme et revenir au calendrier initial de livraisons à l'UE «à partir de la semaine du 25 janvier».
En attendant, le couvre-feu à 18H00, déjà en vigueur dans 25 départements, s'étend désormais à l'ensemble du territoire métropolitain et «pour au moins 15 jours», comme l'a annoncé jeudi M. Castex.
Peu après 18h, les rues de Pantin encore partiellement recouvertes de neige se vidaient progressivement, mais n'étaient pas encore désertes : des clients se dépêchaient de rentrer avec leurs courses, des familles de regagner leur domicile, un homme transportait son sapin de Noël sur un trottoir enneigé...
Face à la menace de nouveaux variants plus contagieux du coronavirus, il s'agit pour le gouvernement de «réduire encore davantage les contacts sociaux sur les heures de fin de journée».
La préfecture de Mayotte a confirmé samedi un premier cas de variant sud-africain et annoncé la suspension des liaisons maritimes et aériennes internationales pour 15 jours à partir de dimanche.
Chiffres d'affaires réduits
Les dérogations restent les mêmes qu'auparavant (déplacements professionnels, pour un rendez-vous médical, pour un motif impérieux...) mais les commerces doivent désormais baisser le rideau à 18H00.
Une mauvaise nouvelle de plus, à quelques jours du début des soldes, pour les commerces mais aussi pour les restaurants également fermés jusqu'à mi-février et qui essaient de surnager grâce aux ventes à emporter.
«C'est la galère. Nos chiffres d'affaires sont réduits et on ne peut pas ouvrir plut tôt que 9h. Aujourd'hui les clients sont venus comme pas possible, ils viennent avant la fermeture», a déclaré quelques minutes avant de baisser le rideau Vanessa A., vendeuse dans un magasin de téléphonie et de réparation à Pantin, aux portes de Paris.
D'ordinaire, «la plupart des gens viennent après 17h, après le boulot donc c'est pas bon pour nous. Mais on respecte la décision du gouvernement, on préfère ça à un reconfinement», confie-t-elle.
Les écoles sont ouvertes mais les activités sportives scolaires et périscolaires en intérieur sont suspendues et le protocole sanitaire dans les cantines sera renforcé.
Parcours du combattant
Lundi, la campagne de vaccination va donc s'élargir aux personnes de plus de 75 ans ne vivant pas en Ehpad, ainsi qu'aux personnes présentant des pathologies à haut risque (insuffisances rénales chroniques, cancer sous traitement...).
Vendredi, 833 centres étaient «ouverts et accessibles à la réservation», a assuré le ministre de la Santé Olivier Véran.
Pourtant, la prise de rendez-vous, possible depuis jeudi matin, s'apparente parfois à un parcours du combattant, même si «plus d'un million de rendez-vous ont été pris vendredi», selon le ministère de la Santé.
Le site sante.fr, qui devait initialement rediriger vers l'une des trois plateformes privées de réservation, n'affichait samedi qu'une liste des lieux de vaccination par département. Et les créneaux de vaccination de nombreux centres affichaient complets à la mi-journée.
Dans les régions les plus affectées par l'épidémie, des maires comme François Rebsamen (PS) à Dijon ou Anne Vignot (EELV) à Besançon ont dénoncé «les carences de l'Etat dans la livraison de vaccins», dans un communiqué commun.
En déplacement dans l'Allier, M. Castex a répliqué: «Nos concitoyens ne comprendraient pas que dans la grave crise sanitaire dans laquelle nous nous trouvons (...) nous nous perdions dans des polémiques et des chicayas inutiles», a-t-il affirmé, aux côtés du président (LR) de la région Auvergne-Rhône-Alpes Laurent Wauquiez.
A Bordeaux, peu après 18H00, une quarantaine de personnes dansent et tapent dans leurs mains en écoutant un chanteur folk gratter sa guitare avec brio. «N'importe quoi !», lance tout fort une femme en passant prestement.
Pour Cédric, 39 ans, «c’est rigolo de voir ce mini acte de résistance de gens qui ne veulent pas rentrer parce que la musique est bonne, sans rébellion et sans rien de politique». Mais à 18H15, quatre policiers à vélo viennent mettre fin à la fête en laissant le chanteur finir un morceau de Bob Marley.