PARIS: François Bayrou a dénoncé lundi la "brutalité" de Donald Trump face à Volodymyr Zelensky, lors d'un débat à l'Assemblée nationale sur l'Ukraine et la sécurité en Europe, pour laquelle la France doit, selon lui, jouer "un rôle central".
Revenant sur l'altercation dans le Bureau ovale de la Maison Blanche, le Premier ministre a évoqué "une scène sidérante, marquée de brutalité, de volonté d'humiliation" du président ukrainien. Lequel "n'a pas plié" et dont "l'honneur" mérite "reconnaissance", a-t-il ajouté, applaudi par les députés.
Depuis l'invasion russe de 2022, "nous avons basculé dans un autre monde". Et avec le revirement américain, "c'est à nous, Européens, de garantir la sécurité et la défense de l'Europe", a-t-il lancé.
Car sur le Vieux continent, "nous sommes forts et nous ne le savons pas. Et nous nous comportons comme si nous étions faibles", a ajouté le chef du gouvernement.
"La France peut jouer dans l'édification de ce nouveau monde, de ce nouvel équilibre, un rôle central, mais elle ne le fera que si elle recouvre sa confiance et son unité", a conclu François Bayrou.
Annoncés mi-février, ces débats -- sans vote -- prennent une nouvelle dimension après l'altercation de vendredi dans le Bureau ovale, et le sommet de leaders européens dimanche à Londres.
- "Instinct capitulard" -
L'ambassadeur d'Ukraine en France a assisté aux débats depuis les tribunes, de même que l'eurodéputé (Place Publique) Raphaël Glucksmann.
Parmi les oratrices des groupes, Marine Le Pen (Rassemblement national), si elle a salué l'"héroïsme" de la résistance ukrainienne face à "l'indéfendable agression russe", a également évoqué "l'intransigeance occidentale vis-à-vis de la Russie".
"Nous ne pourrons jamais soutenir une chimérique défense européenne", pas plus que "l'envoi de troupes française combattantes sur le sol ukrainien", "une folie", a-t-elle par ailleurs réaffirmé, également opposée au "partage" de la dissuasion nucléaire française avec les Européens.
"Personne n'a jamais dit qu'on partagerait, personne. Le mot partager n'a jamais été prononcé", lui a répondu le ministre des Armées Sébastien Lecornu.
L'ancien Premier ministre Gabriel Attal (Renaissance) a, lui, dénoncé "l'instinct capitulard" du RN.
Il a par ailleurs demandé l'accélération du processus d'adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne" et appelé la France à "reconsidérer (sa) position" sur "les avoir russes gelés".
Deux options que le chef de la diplomatie Jean-Noël Barrot a écartées. La confiscation représenterait un "risque financier trop important" et il n'y a "pas de raccourci possible" pour rejoindre l'UE, a-t-il argué.
Le président du groupe socialiste Boris Vallaud a, lui, prôné "un grand emprunt commun de 500 milliards" d'euros en Europe, avec des règles budgétaires "revues", et demandé en France que la loi de programmation militaire soit "actualisée".
- Plan franco-britannique -
Dimanche à Londres, le Premier ministre britannique Keir Starmer a indiqué que le Royaume-Uni et la France travaillaient avec l'Ukraine sur un plan pour "cesser les combats".
Dans Le Figaro, Emmanuel Macron a évoqué une trêve "dans les airs, sur les mers et les infrastructures énergétiques". A ce stade, ce n'est qu'une "option", a cependant relativisé Londres lundi matin.
Le président français a par ailleurs estimé que l'Union européenne doit mobiliser "200 milliards d'euros dans un premier temps" pour financer l'effort militaire, et que ses 27 membres doivent porter leur effort de défense autour de 3% à 3,5% de leur produit intérieur brut (PIB) contre 2% aujourd'hui.
Cette montée en puissance sera à l'ordre du jour d'un sommet jeudi à Bruxelles.
- Désaccords sur la table -
Une fois n'est pas coutume, le chef de l'Etat peut compter sur l'appui du Parti socialiste, dont le leader Olivier Faure a dit lundi "se retrouver parfaitement" dans ce qu'il propose.
A droite, le chef des députés LR Laurent Wauquiez a jugé dimanche "indispensable de parler" avec Vladimir Poutine pour "restaurer la paix".
Un rare point commun avec le numéro un du Parti communiste Fabien Roussel, qui ne veut "pas laisser Trump et Poutine discuter ensemble" et "sceller un accord sur le dos des Européens".
La France insoumise avait dénoncé, par la voix de son leader Jean-Luc Mélenchon, la "servilité atlantiste" des dirigeants européens qui ont "diabolisé Poutine". "Nous voici dans une situation de dépendance à l’égard des Etats-Unis qui est critique, et nous n’en sortirons pas sans une volonté ferme et un plan clair", a renchéri lundi le député LFI Aurélien Saintoul.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com