Procès Nemmouche à Paris: les ex-otages de l'Etat islamique commencent à raconter 10 mois d'enfer

Francis Vuillemin, lawyer of defendant and convicted Brussels Jewish Museum killer Mehdi Nemmouche, gestures during a break on the first day of the trial of Mehdi Nemmouche for holding French journalists under the Islamic State in Syria in 2013, at the Special Assize Court of Paris on February 17, 2025. (AFP)
Francis Vuillemin, lawyer of defendant and convicted Brussels Jewish Museum killer Mehdi Nemmouche, gestures during a break on the first day of the trial of Mehdi Nemmouche for holding French journalists under the Islamic State in Syria in 2013, at the Special Assize Court of Paris on February 17, 2025. (AFP)
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Publié le Mercredi 19 février 2025

Procès Nemmouche à Paris: les ex-otages de l'Etat islamique commencent à raconter 10 mois d'enfer

  • La camionnette s'arrête. "A genoux, Allah Akbar, la kalachnikov sur la tête, clac. Premier simulacre d'exécution, ça fait bizarre", mais "on s'habitue", précisera plus tard le photographe
  • Arrivés dans leur premier lieu de détention, ils sont attachés dans des pièces séparées à un radiateur pendant quatre jours, sans eau ni nourriture. Se font tabasser

PARIS: Juin 2013, nord de la Syrie. La voiture des journalistes français Edouard Elias et Didier François est arrêtée. "Cagoule sur la tête, mains dans le dos, on nous embarque dans une camionnette", raconte mercredi le premier ex-otage, devant la cour d'assises spéciale de Paris.

"Je vois les mains de Didier trembler et je me dis que ça pue", ajoute-t-il.

Edouard Elias est photographe, il a 33 ans. Il en avait 22 en 2013 quand il a été enlevé par le groupe jihadiste naissant Etat islamique (EI), explique-t-il devant la cour qui juge depuis lundi Mehdi Nemmouche, le tueur du musée juif de Bruxelles, et quatre autres jihadistes, accusés d'avoir enlevé et détenu plusieurs journalistes français.

La camionnette s'arrête. "A genoux, Allah Akbar, la kalachnikov sur la tête, clac. Premier simulacre d'exécution, ça fait bizarre", mais "on s'habitue", précisera plus tard le photographe.

Arrivés dans leur premier lieu de détention, ils sont attachés dans des pièces séparées à un radiateur pendant quatre jours, sans eau ni nourriture. Se font tabasser.

"On a aucun répit. A côté, on entend des hurlements à mort, on ne sait pas ce qu'il se passe. On est des loques", décrit d'une voix rapide et calme Edouard Elias, grand, fin, chemise blanche sous une veste noire.

Ensuite, ils sont emmenés à l'hôpital d'Alep (ils l'apprendront plus tard), transformé en prison.

Là, c'est l'enfer: "c'est continuellement, continuellement, des cris de gens en train de mourir. Tout le temps, le jour la nuit, un abattage systématique de Syriens. C'était une machine, une horreur absolue".

Dans les couloirs, des rangées d'hommes suspendus au plafond - les images de la vidéosurveillance de l'époque ont été diffusées à l'audience la veille - frappés par des gardiens à grands coups de bâtons.

Au sol, des "monceaux d'êtres humains en train de geindre, des cadavres vivants". Les otages occidentaux sont privés de nourriture et frappés - "je vois mon visage en cellule, il est bleu, littéralement bleu" - mais se rendent vite qu'ils sont "à part", qu'ils ont de la valeur et qu'on ne les tuera pas comme ça, dans un sous-sol d'hôpital parmi des milliers d'anonymes.

"J'entendais des gens hurler, ils ont égorgé des gens juste devant ma porte". Il s'arrête un instant. "Là c'est compliqué car je ne sais pas où est Didier" François.

"Cette voix" 

Et puis un jour il entend un cri en français dans une cellule voisine. "AMI !", a crié la voix.

"Et je sais pas ce qui me prend, je me mets à chanter. Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu'on enchaîne", entonne Edouard Elias, reprenant le Chant des partisans dans le micro.

"Et là Didier reprend et chante avec moi, et je comprends qu'il est à côté de moi. Et je ne suis plus seul".

Il poursuit son récit, les changements de lieux de détention, les retrouvailles avec les autres otages - "John (Cantlie), Federico (Motka), James (Foley), David (Haines)", énumère-t-il. Les deux derniers seront exécutés à genoux les mains derrière le dos en tenue orange, dans des vidéos de propagande qui avaient révélé au monde la cruauté de ce nouveau groupe jihadiste.

"Il y a une voix que j'ai entendue ici, dans cette salle. Je l'ai reconnue formellement", dit Edouard Elias sans un regard pour Mehdi Nemmouche dans le box, qui a lui soutenu n'avoir "jamais" été geôlier.

"Cette voix" dit-il sans prononcer son nom, "c'est celle que j'ai entendue en Syrie, je suis formel parce que c'est au fond de mes tripes".

"C'est la voix qui m'emmerdait pendant des heures", qui "me terrorisait, qui me faisait chier en cellule". Celle de celui "qui parlait trop, qui parlait tout le temps, qui disait "+mon ptit Didiiiier", imite Edouard Elias d'un ton chantant.

"Cette diction, cette tournure de phrases, ce cynisme, cette arrogance, cette forme d'ironie: +je suis un ancien délinquant reconverti en nettoyeur ethnique islamique+", reproduit-il encore.

Et physiquement ?, demande plus tard le président Laurent Raviot.

Cette fois, Edouard Elias se tourne vers le box.

"Levez-vous", dit le président à Mehdi Nemmouche. Les deux hommes se toisent, pendant de longues secondes, à trois mètres l'un de l'autre. "Il était cagoulé, je peux pas dire, je sais pas". Mais "dès que cette personne parle", dit-il portant sa main au cœur, "je ressens cette peur".


Violence à l'école: fouilles inopinées des sacs à partir du printemps, annonce Borne

Avant les vacances d'hiver de la zone C, plus d'une vingtaine de collèges et lycées de Seine-Saint-Denis ont été placés sous la surveillance de 100 fonctionnaires de police, déployés pour "prévenir la réitération d'actes de violence" aux abords des établissements scolaires à la suite d'une série d'incidents. (AFP)
Avant les vacances d'hiver de la zone C, plus d'une vingtaine de collèges et lycées de Seine-Saint-Denis ont été placés sous la surveillance de 100 fonctionnaires de police, déployés pour "prévenir la réitération d'actes de violence" aux abords des établissements scolaires à la suite d'une série d'incidents. (AFP)
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  • Ces fouilles inopinées seraient réalisées avec des "forces de l'ordre puisque ça ne rentre pas dans les prérogatives des personnels de l'Education", a précisé la ministre, inquiète d'"un usage beaucoup plus répandu des armes blanches" chez les jeunes
  • A ce titre, elle a redit son intention de modifier le code de l'éducation pour que, si un port d'arme blanche est constaté dans un établissement scolaire, l'élève mis en cause "passe systématiquement devant un conseil de discipline"

PARIS: Des "fouilles inopinées de sacs" seront mises en place à partir du printemps pour tenter de lutter contre les violences à l'école ou aux abords des établissements scolaires, affirme vendredi la ministre de l'Education nationale Elisabeth Borne.

"Je souhaite qu'on puisse, avec le préfet, le procureur, le représentant de l'Education nationale, pouvoir organiser régulièrement des fouilles de sac à l'entrée des établissements" et ce à partir du printemps, a déclaré la ministre, interrogée sur BFMTV/RMC.

Ces fouilles inopinées seraient réalisées avec des "forces de l'ordre puisque ça ne rentre pas dans les prérogatives des personnels de l'Education", a précisé la ministre, inquiète d'"un usage beaucoup plus répandu des armes blanches" chez les jeunes.

A ce titre, elle a redit son intention de modifier le code de l'éducation pour que, si un port d'arme blanche est constaté dans un établissement scolaire, l'élève mis en cause "passe systématiquement devant un conseil de discipline".

Jusqu'ici "c'était à l'appréciation du chef d'établissement", a commenté Mme Borne.

Cela fera également "systématiquement" l'objet d'un signalement au procureur.

Début février, un lycéen de 17 ans a été grièvement blessé à l'arme blanche dans la cour de son établissement à Bagneux (Hauts-de-Seine).

Avant les vacances d'hiver de la zone C, plus d'une vingtaine de collèges et lycées de Seine-Saint-Denis ont été placés sous la surveillance de 100 fonctionnaires de police, déployés pour "prévenir la réitération d'actes de violence" aux abords des établissements scolaires à la suite d'une série d'incidents.


Des cercueils en plein Paris pour alerter sur le sort des journalistes ukrainiens

Vingt cercueils ont été déposés jeudi matin en plein centre de Paris pour rappeler le sort des journalistes ukrainiens tués ou emprisonnés en Russie, à l'approche des trois ans de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. (AFP)
Vingt cercueils ont été déposés jeudi matin en plein centre de Paris pour rappeler le sort des journalistes ukrainiens tués ou emprisonnés en Russie, à l'approche des trois ans de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. (AFP)
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  • Cette action a été menée place de la République par une trentaine de membres de l'ONG Reporters sans frontières, qui défend la liberté de la presse dans le monde
  • Dix-neuf cercueils ouverts, sans couvercle, ont été déposés sur le parvis pour représenter les 19 journalistes ukrainiens détenus par la Russie, certains depuis plus de dix ans

PARIS: Vingt cercueils ont été déposés jeudi matin en plein centre de Paris pour rappeler le sort des journalistes ukrainiens tués ou emprisonnés en Russie, à l'approche des trois ans de l'invasion de l'Ukraine par la Russie.

Cette action a été menée place de la République par une trentaine de membres de l'ONG Reporters sans frontières, qui défend la liberté de la presse dans le monde.

"Au moment où l'on parle de trêve, il y a des journalistes ukrainiens qui sont interrogés, torturés, humiliés dans des prisons russes. Des journalistes qui ne font que leur travail. C'est inacceptable", a déclaré à l'AFP Thibaut Bruttin, directeur général de Reporters sans frontières.

Dix-neuf cercueils ouverts, sans couvercle, ont été déposés sur le parvis pour représenter les 19 journalistes ukrainiens détenus par la Russie, certains depuis plus de dix ans.

Un cercueil fermé, avec gerbe et bougies, était lui à l'avant, en hommage à la journaliste d’investigation Victoria Rochtchina, morte le 19 septembre 2024 dans les geôles russes dans des circonstances troubles.

"Il y a une menace qui pèse sur ces journalistes, il en va de leur vie. On espère ne pas avoir à refermer ces cercueils !", a lancé Thibaut Bruttin.

RSF appelle l'Ukraine et l'Union européenne à exiger la libération de ces 19 journalistes.

Selon l'ONG, 11 journalistes ont perdu la vie dans l'exercice de leurs fonctions depuis le début de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le 24 février 2022.


Ukraine: Macron réunit les chefs de partis face à la "menace existentielle" russe

Le président français Emmanuel Macron fait un geste alors qu'il attend le président par intérim de la Roumanie pour des entretiens au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 19 février 2025, au lendemain d'une réunion avec sept pays européens, axée sur l'Ukraine, dans la conviction que "la Russie est une menace existentielle" pour le continent. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron fait un geste alors qu'il attend le président par intérim de la Roumanie pour des entretiens au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 19 février 2025, au lendemain d'une réunion avec sept pays européens, axée sur l'Ukraine, dans la conviction que "la Russie est une menace existentielle" pour le continent. (AFP)
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  • Emmanuel Macron reçoit jeudi les chefs de partis pour faire le point sur la situation en Ukraine et les efforts supplémentaires de défense à fournir alors que la Russie devient une "menace existentielle"
  • Le chef de l'Etat renoue ainsi avec les rencontres au "format Saint-Denis" initiées en août 2023 dans cette ville limitrophe du nord de Paris pour renouveler la pratique du pouvoir dans la concertation avec les partis

PARIS: Emmanuel Macron reçoit jeudi les chefs de partis pour faire le point sur la situation en Ukraine et les efforts supplémentaires de défense à fournir alors que la Russie devient une "menace existentielle", en plein rapprochement avec Donald Trump.

A gauche, Manuel Bompard (LFI), Fabien Roussel (PCF), Marine Tondelier (Ecologistes), Olivier Faure (PS) et Guillaume Lacroix (Parti radical de gauche) ont fait savoir qu'ils se rendraient à 11H00 à l'Elysée.

Côté Rassemblement national, Louis Aliot sera présent, le président du parti, Jordan Bardella, devant se rendre au même moment à Washington.

Gabriel Attal (Renaissance) et Marc Fesneau (MoDem) sont également attendus.

Le chef de l'Etat renoue ainsi avec les rencontres au "format Saint-Denis" initiées en août 2023 dans cette ville limitrophe du nord de Paris pour renouveler la pratique du pouvoir dans la concertation avec les partis.

Ces consultations, regardées avec méfiance par certaines formations qui y voyaient un moyen de contourner le Parlement, ont eu un succès très relatif, la dernière édition remontant à mars 2024, déjà sur l'Ukraine.

S'ensuivra un débat sans vote, début mars au Parlement, sur les conséquences du contexte géopolitique en Europe pour la France.

L'exécutif a commencé à préparer l'opinion à la nécessité d'un plus grand effort de défense alors que la paix en Ukraine esquissée par Donald Trump pourrait ressembler à une capitulation pour Kiev.

Le nouveau président américain entend la négocier directement avec son homologue russe Vladimir Poutine, dont le pays avait pourtant attaqué l'Ukraine il y a bientôt trois ans, le 24 février 2022.

- "Dictateur" -

L'administration Trump exclut le retour de l'Ukraine dans ses frontières d'avant 2014, c'est-à-dire avant l'annexion de la Crimée et la conquête de l'est du pays par les Russes, ainsi que son entrée dans l'Otan ou le déploiement de soldats américains pour garantir la paix.

Le locataire de la Maison Blanche a en outre été d'une rare violence verbale avec son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky qui réclame une place à la table des négociations, le traitant de "dictateur" au bilan "épouvantable" et suggérant qu'à ce rythme, il n'allait bientôt "pas lui rester de pays".

Emmanuel Macron, qui a réuni par deux fois des partenaires européens lundi et mercredi - près d'une trentaine au total -, pointe "une très forte convergence pour dire que la Russie constitue une menace existentielle pour les Européens".

"Nous souhaitons une paix en Ukraine qui soit durable et solide", a-t-il encore répété mercredi.

Les autorités américaines ont en outre indiqué mercredi soir que le chef de l'Etat français était attendu "en début de semaine prochaine" à Washington.

De son côté, le Premier ministre François Bayrou a martelé devant sa majorité que "jamais depuis 1945, le risque d'une guerre en Europe n'avait été aussi élevé".

Dans un tel contexte, "le réveil européen passe par une augmentation des dépenses militaires" qui aura "des conséquences pour nos finances publiques", a averti la porte-parole du gouvernement, Sophie Primas.

Les Européens craignent que Vladimir Poutine ne soit encouragé à poursuivre son offensive en Ukraine, voire à l'étendre à des pays voisins, s'il n'est pas clairement "forcé" à la paix, y compris par le déploiement de forces étrangères le long de la ligne de démarcation.

Emmanuel Macron a assuré mardi que "la France ne s'apprête pas à envoyer des troupes au sol, belligérantes dans un conflit, sur le front".

Mais il a aussi évoqué la possibilité "d'avoir, sous mandat des Nations unies, une opération de maintien de paix, qui elle se tiendrait le long de la ligne de front".