PARIS : Le projet de loi pour la reconstruction de Mayotte sera présenté mercredi en Conseil des ministres. Ce texte permettra notamment de déroger pendant deux ans aux règles d'urbanisme, mais il est critiqué par des élus qui lui reprochent de ne pas s'attaquer aux bidonvilles.
Selon l'exposé des motifs du projet de loi d'urgence pour Mayotte, dévasté le 14 décembre par le cyclone Chido, l'objectif est de permettre aux acteurs publics de « rétablir les conditions de vie des habitants » tout « en préparant la reconstruction » du petit archipel français de l'océan Indien.
Concernant les mesures à plus long terme, notamment en matière d'immigration, de sécurité et de développement économique, le gouvernement prévoit un autre projet de « loi programme » qui sera élaboré dans les trois mois, indique Matignon.
Selon la même source, le texte de mercredi vise à déroger « pendant deux ans » aux règles d'urbanisme et des marchés publics, afin de faciliter la reconstruction des écoles, ainsi que des infrastructures et des logements.
La loi prévoit ainsi que « les constructions à usage d'hébergement d'urgence édifiées à Mayotte (...) postérieurement au 14 décembre 2024 et jusqu'à l'expiration d'un délai de deux ans suivant la publication de la présente loi (...) sont dispensées de toute formalité au titre du code de l'urbanisme ».
Concernant les écoles, durement touchées alors que Mayotte est le département le plus jeune de France avec un habitant sur deux mineur, le projet prévoit que l'État ou l'un de ses établissements publics puisse assurer leur construction, leur reconstruction ou leur rénovation, en lieu et place des collectivités locales, jusqu'au 31 décembre 2027.
Pour mener à bien cette mission, le texte prévoit d'élargir les missions de l'établissement public foncier et d'aménagement de Mayotte (EPFAM), afin qu'il coordonne les travaux de reconstruction de l'île.
Une personnalité devra être nommée à sa tête, selon Matignon.
- « Vraies urgences » -
Sur le foncier, alors qu'il est souvent difficile d'identifier formellement les propriétaires des terrains à Mayotte, le texte prévoit de déroger aux règles habituelles et de pouvoir exproprier avant qu'un propriétaire ait été identifié, sous réserve de l'indemniser a posteriori.
Le texte contiendra aussi plusieurs mesures économiques qui resteront en vigueur « jusqu'au 31 mars 2025 », comme la suspension du recouvrement des cotisations sociales des travailleurs indépendants, la prolongation des droits des assurés sociaux et des chômeurs, ou l'augmentation de la prise en charge au titre du chômage partiel.
En revanche, rien n'est prévu concernant l'habitat précaire, alors que François Bayrou avait promis, lors de son déplacement fin décembre, « d'empêcher la reconstruction » des bidonvilles à Mayotte.
« Le texte est inacceptable parce qu'il n'apporte aucune réponse aux vraies urgences de Mayotte », estime Mansour Kamardine, ancien député et vice-président LR en charge des Outre-mer, qui réclame « une mesure qui inscrit l'interdiction des bidonvilles » dans l'archipel.
De son côté, la députée Liot de Mayotte, Estelle Youssouffa, a réclamé que « les entrepreneurs de Mayotte soient prioritaires sur les contrats » de reconstruction de l'archipel, sans commenter le projet de loi d'urgence.
Selon des sources parlementaires, le texte sera examiné en commission des Affaires économiques de l'Assemblée nationale dès le 13 janvier, jour de la reprise de l'activité à l'Assemblée. Son examen en commission pourrait se prolonger mardi, puis le texte sera examiné en séance le 20 janvier.
Chido, le cyclone le plus dévastateur à Mayotte depuis 90 ans, a causé la mort d'au moins 39 personnes et fait plus de 5 600 blessés le 14 décembre, selon le dernier bilan publié par les autorités.