En Tunisie, une présidentielle pratiquement jouée d'avance pour Kais Saied

Des partisans de l'opposition tunisienne participent à un rassemblement contre le coup de force du président Kais Saied et la crise économique dans ce pays d'Afrique du Nord, dans la capitale Tunis, le 13 mars 2022. (AFP)
Des partisans de l'opposition tunisienne participent à un rassemblement contre le coup de force du président Kais Saied et la crise économique dans ce pays d'Afrique du Nord, dans la capitale Tunis, le 13 mars 2022. (AFP)
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Publié le Jeudi 03 octobre 2024

En Tunisie, une présidentielle pratiquement jouée d'avance pour Kais Saied

  • Près de dix millions de Tunisiens sont invités à voter dimanche lors d'une présidentielle qui paraît jouée d'avance, selon les experts, en faveur du président sortant Kais Saied
  • Pas de meetings électoraux, ni débats ou posters dans les rues, juste des affichettes sur des bâtiments publics, la plupart avec seulement une photo de M. Saied

TUNIS: Près de dix millions de Tunisiens sont invités à voter dimanche lors d'une présidentielle qui paraît jouée d'avance, selon les experts, en faveur du président sortant Kais Saied, accusé de dérive autoritaire par ses opposants et la société civile.

Pas de meetings électoraux, ni débats ou posters dans les rues, juste des affichettes sur des bâtiments publics, la plupart avec seulement une photo de M. Saied.

Rien à voir avec l'engouement, il y a cinq ans, autour de cet expert de la Constitution à la réputation de probité qui s'était fait connaître via des interventions télévisées et avait été élu à près de 73% (et une participation d'environ 58%), avec la promesse de remettre de l'ordre après 10 ans de déclin socio-économique et d'instabilité politique.

M. Saied bénéficiait encore d'une forte popularité le 25 juillet 2021 quand il s'était emparé des pleins pouvoirs, limogeant son gouvernement et suspendant le Parlement, avant de réformer la Constitution en 2022 pour instaurer un système ultra-présidentialiste.

Ces dernières années, l'opposition et des ONG tunisiennes et étrangères ont dénoncé une régression des libertés, la mise sous tutelle de la justice et l'arrestation des principaux opposants, dont le chef du mouvement islamo-conservateur Ennadha, Rached Ghannouchi, et à l'autre bout du spectre, d'Abir Moussi, cheffe du Parti destourien libre (PDL), nostalgique des autocrates Ben Ali et Bourguiba.

Le pouvoir est aussi accusé d'avoir muselé la presse via un décret controversé sur les "fausses nouvelles" et d'étouffer la société civile avec des arrestations de syndicalistes, militants ou commentateurs politiques.

Pour le vote de dimanche, seuls trois des 17 candidats ont été retenus, au terme d'un processus électoral critiqué pour un nombre de parrainages difficile à obtenir et l'exclusion par l'autorité électorale Isie des concurrents les plus sérieux de M. Saied.

"Depuis le 25 juillet 2021, la parenthèse de démocratisation a commencé à se fermer" mais "un cap supplémentaire a été franchi avec la tentative d'empêcher toute possibilité d'alternance", dénonce à l'AFP l'expert politique tunisien Hatem Nafti.

"Le scrutin est joué d'avance tant les déséquilibres de toute nature entre les candidats sont manifestes", abonde le politologue français Pierre Vermeren, spécialiste du Maghreb, estimant que "tout a été fait pour qu'un second tour n'ait pas lieu".

M. Saied, 66 ans, fera face à Zouheir Maghzaoui, 59 ans, un défenseur du panarabisme, fort d'"une vraie base électorale" mais qui "reste associé au coup d'Etat" de l'été 2021 qu'il a soutenu, souligne M. Nafti, auteur de l'essai "Notre ami Kais Saïed", paru fin septembre.

Pour M. Vermeren, "laisser concourir une personnalité secondaire (comme M. Maghzaoui) de même obédience idéologique que le président est un moyen de neutraliser son potentiel d'opposant".

- "Excellent garde-frontières" -

Le troisième postulant, Ayachi Zammel, un industriel de l'agro-alimentaire et politicien libéral de 47 ans, a été emprisonné le jour de la confirmation de sa candidature le 2 septembre pour falsification de parrainages et a déjà été condamné à plus de 14 ans de prison dans divers procès express.

Cela ne l'empêche pas d'être candidat: il y avait eu un précédent en 2019 avec Nabil Karoui, arrivé au deuxième tour, mais il était "patron d'une chaîne de télévision à forte audience et connu du grand public", rappelle M. Nafti.

Des formations de gauche et des proches d'Ennahdha ont appelé à voter pour M. Zammel mais "pourra-t-il aller au-delà de ces cercles élitistes?", s'interroge M. Nafti.

Pour M. Vermeren, "s'il pouvait représenter un pôle pour les opposants, sa qualité de prisonnier condamné ne peut qu'inciter les électeurs au découragement et à l'abstention".

L'affluence risque d'ailleurs d'être faible compte tenu d'une désaffection croissante pour les urnes. La participation tombée à 30,5% lors du référendum sur la Constitution en 2022, a chuté à 11,3% lors des législatives de début 2024.

Les 12 millions de Tunisiens se focalisent surtout sur la cherté de la vie avec une forte inflation (environ 7%), une croissance faible (autour de 1%) et un chômage élevé (16%) particulièrement chez les jeunes, qui sont désormais sept sur 10 à vouloir quitter le pays légalement ou clandestinement (source Arab Barometer, août 2024).

La question migratoire, justement, "est au coeur des préoccupations des Européens", ce qui explique, selon M. Nafti, la passivité de Bruxelles face aux atteintes croissantes aux droits fondamentaux, puisque "Kais Saied est un excellent garde-frontières". Pour M. Vermeren, il y a en outre chez les Occidentaux "une polarisation vers les tragédies d'Ukraine d'une part, d'Israël-Palestine et maintenant du Liban, de l'autre".


Six morts dans un raid israélien sur un centre de secouristes du Hezbollah en plein cœur de Beyrouth

Des personnes se rassemblent sur le site d'une frappe aérienne israélienne qui a visé un immeuble d'habitation dans le quartier de Bashura à Beyrouth, le 3 octobre 2024. (AFP)
Des personnes se rassemblent sur le site d'une frappe aérienne israélienne qui a visé un immeuble d'habitation dans le quartier de Bashura à Beyrouth, le 3 octobre 2024. (AFP)
De la fumée s'élève du site d'une frappe aérienne israélienne qui a ciblé un quartier de la banlieue sud de Beyrouth, le 3 octobre 2024. (AFP)
De la fumée s'élève du site d'une frappe aérienne israélienne qui a ciblé un quartier de la banlieue sud de Beyrouth, le 3 octobre 2024. (AFP)
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  • Six personnes ont été tuées dans une frappe israélienne qui a visé dans la nuit de mercredi à jeudi un centre de secours du Hezbollah en plein cœur de Beyrouth, selon le ministère de la Santé libanais
  • Un responsable de l'organisation de secouristes du mouvement chiite a indiqué à l'AFP que le raid "avait visé le centre de protection civile de l'autorité" dans le quartier de Bachoura, au centre de la capitale

BEYROUTH: Six personnes ont été tuées dans une frappe israélienne qui a visé dans la nuit de mercredi à jeudi un centre de secours du Hezbollah en plein cœur de Beyrouth, selon le ministère de la Santé libanais et une source proche du mouvement islamiste libanais.

Le raid a fait "deux morts sur le coup" et "le nombre de morts a grimpé à six après que quatre blessés ont succombé à leurs blessures", a indiqué le ministère. Sept autres blessés ont été transférés vers des hôpitaux, a ajouté cette source.

Un responsable de l'organisation de secouristes du mouvement chiite a indiqué à l'AFP que le raid "avait visé le centre de protection civile de l'autorité" dans le quartier de Bachoura, au centre de la capitale.

Des journalistes de l'AFP à Beyrouth ont entendu une explosion et rapporté que certains immeubles avaient tremblé, avant que des ambulances ne se dirigent vers le lieu visé.

Il s'agit de la deuxième frappe israélienne visant le cœur de la capitale libanaise depuis le début du conflit entre le mouvement islamiste pro-iranien et Israël, le 8 octobre 2023.

Elle a visé la capitale plus au centre cette fois-ci, après une frappe israélienne qui avait tué trois membres du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), une organisation palestinienne laïque de gauche lundi dans le quartier de Cola.

La frappe sur le quartier de Bachoura intervient après une série de bombardements visant la banlieue sud mercredi soir, troisième série de raids israéliens visant ce fief du Hezbollah en dehors de Beyrouth en moins de 24 heures et régulièrement visé depuis une dizaine de jours.

L'armée israélienne a par ailleurs émis dans la nuit de mercredi à jeudi un nouvel ordre d'évacuation de secteurs du sud de Beyrouth, annonciateur de probables frappes contre le Hezbollah, qui affirme résister à l'avancer des forces israéliennes dans le sud du Liban.

Le ministère libanais de la Santé a annoncé mercredi soir que 46 personnes avaient été tuées et 85 autres blessées par des "frappes de l'ennemi israélien" au cours des dernières 24 heures dans plusieurs régions du pays.

Le Centre de crise libanais avait annoncé avant la publication de ce bilan quotidien que 1.928 personnes avaient été tuées au Liban depuis octobre 2023.


Escalade entre Israël et l'Iran : la Jordanie « fera face à toute menace »

Le roi de Jordanie, Abdullah II ibn Al Hussein, s’adresse à la 79e Assemblée générale des Nations Unies, au siège de l’ONU à New York, aux États-Unis, le 24 septembre 2024. (Reuters)
Le roi de Jordanie, Abdullah II ibn Al Hussein, s’adresse à la 79e Assemblée générale des Nations Unies, au siège de l’ONU à New York, aux États-Unis, le 24 septembre 2024. (Reuters)
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  • "La Jordanie ne sera le champ de bataille de personne", a affirmé le ministre lors d'un entretien téléphonique avec son homologue britannique David Lammy, selon un communiqué du ministère jordanien des Affaires étrangères.
  • Après l'attaque mardi, la Jordanie avait fermé son espace aérien après que l'armée de l'air et les défenses anti-aériennes du royaume, voisin d'Israël, avaient intercepté des missiles et des drones.

AMMAN : Le chef de la diplomatie jordanienne, Ayman Safadi, a prévenu Israël et l'Iran que son pays "ferait face avec toutes ses capacités à toute menace", au lendemain d'une attaque iranienne de missiles sur le territoire israélien ayant traversé l'espace aérien du royaume.

"La Jordanie ne sera le champ de bataille de personne", a affirmé le ministre lors d'un entretien téléphonique avec son homologue britannique David Lammy, selon un communiqué du ministère jordanien des Affaires étrangères.

Le royaume "fera face avec toutes ses capacités à toute menace à sa sécurité, à sa stabilité et à la sécurité de ses citoyens", a-t-il ajouté, précisant que "la Jordanie avait clairement informé l'Iran et Israël de cette position".

Israël a promis de riposter à l'attaque massive de missiles menée mardi par l'Iran en réponse notamment à l'assassinat en juillet du chef du Hamas sur son sol et la mort dans une frappe israélienne il y a une semaine du chef du mouvement islamiste pro-iranien Hezbollah dans la banlieue sud de Beyrouth.

Après l'attaque mardi, la Jordanie avait fermé son espace aérien après que l'armée de l'air et les défenses anti-aériennes du royaume, voisin d'Israël, avaient intercepté des missiles et des drones.

Selon le ministère de l'Intérieur jordanien, des citoyens ont été légèrement blessés par la chute de débris.

M. Safadi a souligné "la nécessité de lancer immédiatement une action internationale efficace pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat et durable à Gaza et au Liban afin de mettre fin à cette dangereuse escalade qui pousse la région vers une guerre globale".

Israël est engagé sur plusieurs fronts depuis près d'un an: dans la bande de Gaza contre le mouvement islamiste palestinien Hamas, et au Liban, où ses troupes mènent depuis lundi des incursions terrestres visant le Hezbollah.

Dans ce contexte, le ministre a mis en garde contre "les conséquences catastrophiques de l'extension de la guerre israélienne au Liban et du lancement d'une offensive terrestre contre ce pays, et son impact sur la sécurité de toute la région".


Attaque iranienne en Israël : le président iranien promet une réponse plus forte en cas de représailles

Le président iranien Masoud Pezeshkian s’exprime lors de la 79e session de l’Assemblée générale des Nations Unies au siège des Nations Unies à New York, le 24 septembre 2024 (photo AFP)
Le président iranien Masoud Pezeshkian s’exprime lors de la 79e session de l’Assemblée générale des Nations Unies au siège des Nations Unies à New York, le 24 septembre 2024 (photo AFP)
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  • Si Israël "veut réagir, nous aurons une réponse plus forte", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse conjointe avec l'émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, à Doha.
  • Avec ses attaques contre le Hezbollah au Liban, Israël pousse la région "au bord de l'abîme", a prévenu l'émir du Qatar.

DOHA : Le président iranien, Massoud Pezeshkian, a affirmé mercredi que l'Iran "ne cherchait pas la guerre", tout en promettant "une réponse plus forte" en cas de représailles israéliennes à l'attaque massive de missiles menée la veille par Téhéran contre Israël.

Si Israël "veut réagir, nous aurons une réponse plus forte", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse conjointe avec l'émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, à Doha.

L'Iran "ne cherche pas la guerre, c'est Israël qui nous pousse à réagir", a ajouté M. Pezeshkian.

Ses déclarations interviennent au lendemain d'une attaque iranienne menée contre Israël à l'aide d'environ 200 missiles, dont 90% selon Téhéran ont atteint leur cible.

Un grand nombre ont été interceptés par le système antimissile, a indiqué pour sa part l'armée israélienne qui a précisé mercredi que des missiles étaient tombés sur des bases aériennes dans le pays, sans faire de dégâts.

Cette attaque iranienne directe contre Israël, la deuxième depuis avril, a fait retentir les sirènes à travers le pays, blessant deux personnes en Israël et tuant un Palestinien en Cisjordanie occupée, selon les secours et un responsable palestinien.

"L'objectif malveillant du régime sioniste est de semer l'insécurité et de propager la crise dans la région", a également accusé le président iranien.

"Ce que nous demandons aux Etats-Unis et aux pays européens, c'est de dire à l'entité qu'ils ont implantée dans la région (Israël) d'arrêter l'effusion de sang", a-t-il encore dit.

Avec ses attaques contre le Hezbollah au Liban, Israël pousse la région "au bord de l'abîme", a prévenu l'émir du Qatar.

Il a également fustigé les attaques israéliennes dans la bande de Gaza, affirmant que Doha poursuivrait ses efforts de médiation pour négocier un accord de cessez-le-feu dans la guerre déclenchée il y a bientôt un an par une attaque du Hamas palestinien sur le sol israélien.