Brahim Ben Ali, cauchemar d'Uber devenu candidat LFI aux européennes

Le Roubaisien Brahim Ben Ali fait ses premiers pas en politique, sur la liste LFI aux européennes. (AFP)
Le Roubaisien Brahim Ben Ali fait ses premiers pas en politique, sur la liste LFI aux européennes. (AFP)
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Publié le Vendredi 31 mai 2024

Brahim Ben Ali, cauchemar d'Uber devenu candidat LFI aux européennes

  • «Ce qui est bien chez La France insoumise, c'est que si j'ai une prise de position différente d'une autre personne, on ne m'empêche pas de l'avoir», affirme Brahim Ben Ali
  • Si sa 20e position sur la liste conduite par Manon Aubry lui laisse peu de chances d'obtenir un siège à Strasbourg, il espère devenir un jour un élu «connecté avec le terrain»

ROUBAIX: Il est l'un des leaders syndicaux des chauffeurs VTC évoluant dans ce qu'il appelle le "Far West numérique" et la bête noire d'Uber. Le Roubaisien Brahim Ben Ali fait ses premiers pas en politique, sur la liste LFI aux européennes.

Carrure imposante, collier de barbe et visage bonhomme, cet hyperactif de 41 ans retrace son parcours d'autodidacte au volant de sa voiture, dans les rues de Roubaix. Sur son téléphone, d'innombrables groupes WhatsApp où il échange avec des chauffeurs français, belges, pakistanais.

Ici, il vivait avec sa mère illettrée, ses frères, ses soeurs, dans une maison inchauffable. Là, âgé d'une dizaine d'années, il travaillait dans une épicerie pour faire bouillir la marmite familiale.

De cette "enfance de la débrouille", ce père de trois enfants dit conserver une sensibilité aux injustices et un sens de l'entraide, matérialisés par son association d'aide aux locataires de logements vétustes.

L'influence de son grand-père, originaire du Rif marocain, région berbérophone historiquement frondeuse, et venu en France travailler dans le bâtiment, contribua également à semer chez lui "la graine du militantisme", confie-t-il.

En 2014, il vit de petits boulots lorsqu'est lancé en France UberPop, service organisant le transport de passagers entre particuliers contre rémunération. Il saute sur l'occasion mais deux proches chauffeurs de taxi l'alertent sur le caractère illégal de l'activité, finalement interdite en France.

«Contre-lobbying»

Il obtient alors sa carte professionnelle de chauffeur VTC et passe chez Uber. Très vite, il constate la vulnérabilité des chauffeurs, censés être indépendants, vis-à-vis de la plateforme, dénonce les "désactivations arbitraires" et l'"opacité dans l'attribution des courses".

Il lance l'Union des VTC des Hauts-de-France, puis l'Intersyndicale nationale VTC. En 2019, il organise le blocage trois mois durant des locaux d'Uber à Paris. L'entreprise résilie son contrat de prestataire. Il ne travaillera plus pour elle.

Il crée ensuite Maze, coopérative de VTC visant une clientèle professionnelle, qui regroupe aujourd'hui plus de 500 chauffeurs.

Bien que ne parlant pas anglais, Brahim Ben Ali poursuit son engagement à l'échelle européenne et mondiale en contribuant notamment à la création d'une alliance internationale des travailleurs des plateformes (IAATW).

"Il a compris qu'un changement de règlementation en faveur des travailleurs uberisés passait par le niveau européen", constate l'eurodéputée (LFI) Leïla Chaibi, avec qui il a lutté pour l'adoption d'une directive contre le faux travail indépendant.

"Les lobbies des plateformes étaient très présents dans cette négociation à Bruxelles et il a vraiment réussi à faire du contre-lobbying", assure l'eurodéputée, que le syndicaliste cite comme celle qui lui a donné envie de faire de la politique.

Adoptée en avril, cette directive introduit une présomption de salariat et contraint les plateformes à prouver que les chauffeurs sont indépendants.

«Aucune avancée notable»

Une victoire, affirme-t-il, même si les modalités de requalification des contrats restent dépendantes des règlementations nationales.

Si sa 20e position sur la liste conduite par Manon Aubry lui laisse peu de chances d'obtenir un siège à Strasbourg, il espère devenir un jour un élu "connecté avec le terrain".

"Ce qui est bien chez La France insoumise, c'est que si j'ai une prise de position différente d'une autre personne, on ne m'empêche pas de l'avoir", affirme celui qui dit aimer dialoguer avec les chauffeurs VTC "qui votent RN ou Macron".

Soucieux de "s'améliorer", il a passé un diplôme d'accès aux études universitaires, prépare une capacité en droit et vient de créer un cabinet de conseil aux chauffeurs de VTC.

"Il défend des idées fermes, mais paisiblement", décrit un autre proche, l'avocat Jérôme Giusti, qui représente des chauffeurs en quête de requalification de leur contrat. Lui comme Leïla Chaibi louent son humilité.

Sans commenter son parcours, la communication d'Uber note que comme d'autres "figures historiques des livreurs et des chauffeurs", il s'était "soustrait au jeu des élections" lors des premières organisées dans ce secteur en 2022, avant de participer à celles de 2024.

Un aveu, selon l'entreprise, que ses méthodes initiales --blocages, médiatisation-- n'ont "mené à aucune avancée notable pour les travailleurs indépendants".


Il n'est "pas question" de "gouverner demain avec LFI", lance Macron en Conseil des ministres (participants)

Le président français Emmanuel Macron passe en revue les troupes qui participeront au défilé du 14 juillet de la Bastille à Paris, le 2 juillet 2024. (Photo: AFP)
Le président français Emmanuel Macron passe en revue les troupes qui participeront au défilé du 14 juillet de la Bastille à Paris, le 2 juillet 2024. (Photo: AFP)
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  • "Se désister aujourd’hui pour des élus de gauche face au Rassemblement national ne signifie pas gouverner demain avec LFI", a déclaré le chef de l'Etat
  • "Se désister ce n’est pas se rallier, ce n’est pas se compromettre", a renchéri la porte-parole du gouvernement, Prisca Thevenot, à l'issue du Conseil des ministres

PARIS: Emmanuel Macron a martelé mercredi en Conseil des ministres qu'il n'était "pas question" de "gouverner" avec La France insoumise (LFI) au lendemain des législatives, malgré les désistements du camp présidentiel en faveur du Nouveau Front populaire (NFP) pour faire barrage au Rassemblement national.

"Se désister aujourd’hui pour des élus de gauche face au Rassemblement national ne signifie pas gouverner demain avec LFI", a déclaré le chef de l'Etat, selon plusieurs participants. "Il n’en est pas question", a-t-il ajouté.

Dans un message posté sur X, le Premier ministre Gabriel Attal a insisté en affirmant qu'"il n'y a pas et il n'y aura jamais d'alliance avec La France insoumise".

"Se désister ce n’est pas se rallier, ce n’est pas se compromettre", a renchéri la porte-parole du gouvernement, Prisca Thevenot, à l'issue du Conseil des ministres.

"Combattre le Rassemblement national aujourd'hui, ce n’est pas s’allier à la LFI demain", a-t-elle insisté, en pointant au passage de possibles fractures avec les autres forces du NFP (communistes, socialistes et écologistes) au lendemain du scrutin.

"Est-ce qu'on considère qu'aujourd'hui cette alliance électorale est déjà en train de s'effriter au sein de la gauche ? Je pense que oui", a-t-elle lancé. "On ne peut pas faire de la LFI l’alpha et l'omega de la gauche en France", a-t-elle ajouté.


Pour Thévenot, Le Pen "a une très mauvaise compréhension" du Conseil des ministres

La ministre déléguée au Renouveau démocratique et porte-parole du gouvernement, Prisca Thevenot, prononce un discours lors d'une conférence de presse après la réunion hebdomadaire du cabinet au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 3 juillet 2024. (Photo: AFP)
La ministre déléguée au Renouveau démocratique et porte-parole du gouvernement, Prisca Thevenot, prononce un discours lors d'une conférence de presse après la réunion hebdomadaire du cabinet au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 3 juillet 2024. (Photo: AFP)
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  • Marine Le Pen a "une très mauvaise compréhension de ce qui se passe en Conseil des ministres", a ironisé mercredi la porte-parole du gouvernement Prisca Thevenot
  • "Elle connaît très peu la Constitution et le fonctionnement de nos institutions, elle connaît aussi très peu les personnes avec qui elle voudra siéger demain à l'Assemblée nationale", a-t-elle ajouté

PARIS: Marine Le Pen, qui avait accusé mardi Emmanuel Macron de préparer "un coup d'Etat administratif" par une série de nominations, a "une très mauvaise compréhension de ce qui se passe en Conseil des ministres", a ironisé mercredi la porte-parole du gouvernement Prisca Thevenot.

"Qu'il y ait des nominations pendant le Conseil des ministres, ce n'est pas nouveau. Visiblement, elle (Marine Le Pen) s'en inquiète aujourd'hui, mais ça se passe sur chaque conseil des ministres et ça se passe aussi précisément à la veille de la période estivale pour préparer la rentrée", a déclaré Mme Thevenot à l'issue du Conseil.

"On savait que Marine Le Pen mentait, on sait maintenant qu'elle manipule l’information", a-t-elle critiqué.

Selon Mme Thevenot, qui a cité celles d'un directeur de la police et d'un préfet, "il y a eu moins d'une dizaine" de nominations au conseil des ministres ce mercredi et "rien de spécifique". Elles seront "publiques comme à chaque fois", a-t-elle souligné.

Marine Le Pen "a une très mauvaise compréhension de ce qui se passe en Conseil des ministres. Mais on ne le découvre pas", a-t-elle jugé.

"Elle connaît très peu la Constitution et le fonctionnement de nos institutions, elle connaît aussi très peu les personnes avec qui elle voudra siéger demain à l'Assemblée nationale, puisque chaque jour arrive une monstruosité sur le profil de ses candidats", a-t-elle conclu.


Législatives en France : le Sénat se prépare au grand bouleversement

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Très influent ces dernières années malgré des prérogatives limitées, le Sénat français se prépare à servir de "stabilisateur des institutions" après les élections législatives, voire de "rempart" face au parti d'extrême droite Rassemblement national, arrivé en tête du premier tour.

Dans le décor fastueux du Palais du Luxembourg, la chambre haute du parlement bicaméral français vit au ralenti depuis le 9 juin. La dissolution de l'Assemblée nationale annoncée dans la foulée des élections européennes a entraîné l'ajournement de la quasi-totalité des travaux du Sénat, une coutume républicaine.

Les 348 sénateurs sont sans crainte pour leur mandat, au contraire des députés, puisque le Sénat ne se dissout pas. Ils se tiennent prêts à reprendre leur mission au sein d'un Parlement totalement recomposé, avec une progression historique probable du Rassemblement national (RN) à l'Assemblée nationale.

"Quel que soit le scénario qui sortira le 7 juillet", date du second tour des législatives, "le Sénat aura un rôle majeur : plus que jamais nous aurons besoin de cette deuxième chambre, de ce balancier stabilisateur des institutions", a récemment prévenu Gérard Larcher.

Chef d'une alliance majoritaire de la droite et du centre à la Haute assemblée, le ténor des Républicains (droite) a défendu depuis 2017 un rôle de "contre-pouvoir" face au président Emmanuel Macron, avec de retentissantes missions de contrôle, par exemple sur le recours abusif aux cabinets de conseil par les ministères.

 

- Verrou constitutionnel -

 

La marge de manœuvre du Sénat est limitée : le gouvernement peut donner le dernier mot à l'Assemblée nationale sur ses projets de loi, après au moins deux lectures successives dans les deux chambres. Mais, exception de taille, la chambre haute ne peut être contournée pour les réformes constitutionnelles.

Le RN, qui base une large partie de son programme sur une modification du texte suprême, sur l'immigration notamment, pourrait ainsi être freiné en cas d'arrivée au pouvoir, même avec une majorité absolue à l'Assemblée nationale.

"Nous détenons le verrou constitutionnel et je peux vous assurer que le serrurier n'a nulle envie de donner la combinaison de ce verrou face à la folie des extrêmes", lance Gérard Larcher, qui s'oppose avec la même force au RN et à La France insoumise (gauche radicale), tous deux quasiment absents à la chambre haute (le RN compte trois sénateurs, LFI aucun).

"La stabilité, qui a été la marque de fabrique du Sénat, doit être absolument préservée dans la période de grande turbulence qui nous attend", affirme aussi le chef des sénateurs socialistes Patrick Kanner à l'AFP, en promettant "un bicamérisme qui fonctionnera à plein régime".

La centaine de sénateurs de gauche compte se faire entendre, surtout dans l'hypothèse d'une majorité du RN qui s'étendrait à une partie de la droite républicaine.

 

- "Eriger un rempart" -

 

Car si le groupe LR (Les Républicains) du Sénat a voté unanimement contre un accord avec le RN, une petite poignée de ses sénateurs, interrogés après la dissolution, n'étaient pas farouchement opposés à l'hypothèse d'un accord de gouvernement avec le parti à la flamme.

Sans doute encore trop peu pour constituer un nouveau groupe, mais "ce sera l'épreuve de vérité", reconnaît M. Kanner.

Dans un courrier à Gérard Larcher, les trois présidents de groupe de gauche ont affiché mardi leur volonté de voir le Sénat comme "l'un des remparts les plus solides au recul de (l') État de droit" français.

"Vous serez de ceux qui auront érigé un rempart contre l'extrême droite, ou bien de ceux qui lui auront facilité l'accès vers le pouvoir", lui ont-ils écrit, en l'appelant à "s'engager clairement pour faire obstacle systématiquement à une victoire du RN".

Preuve de son importance, M. Larcher, très offensif envers le président Macron ces derniers jours, a été reçu par ce dernier mardi, une rencontre purement "institutionnelle" et non "politique", a-t-on assuré dans son entourage.

Comme pour balayer l'hypothèse d'une alliance possible dans un potentiel "gouvernement d'union nationale" après le second tour ? Le nom de Gérard Larcher était déjà revenu avec insistance comme un recours éventuel au poste de Premier ministre, avant les européennes, une option finalement rejetée par l'intéressé, défenseur d'une ligne "indépendante" et "sans compromission" pour Les Républicains.