Pendant des mois, des manifestants du monde entier ont réclamé un cessez-le-feu dans la farouche guerre de représailles menée par Israël contre les Palestiniens de Gaza. Le lundi 25 mars, après cent soixante et onze jours de carnage, le Conseil de sécurité des nations unies a finalement pris acte de la situation et a voté en faveur de l'adoption d'une résolution appelant à un cessez-le-feu.
Le vote au siège des Nations unies à New York est intervenu alors que le coût de la guerre à Gaza est élevé en vies palestiniennes et en destruction de biens.
La résolution du Conseil de sécurité doit désormais servir de base à un véritable effort pour parvenir à une percée dans les pourparlers de paix indirects entre Israël et le Hamas, avec l'aide de médiateurs régionaux et internationaux.
En dépit des problèmes inhérents à la résolution, le fait que la communauté internationale ait enfin prononcé le mot «cessez-le-feu» à l'unisson devrait suffire à provoquer un véritable changement sur le terrain à Gaza.
Cependant, le texte de la résolution semble présenter des échéances contradictoires. D'une part, il «exige un cessez-le-feu immédiat pour le mois du ramadan», mais il indique ensuite qu'il s'attend à ce que cette cessation des hostilités conduise à «un cessez-le-feu durable et viable».
Les responsables de l'ONU ont déclaré que la référence au ramadan inclut également les fêtes de l'Aïd al-Fitr, qui durent trois jours à la fin du mois sacré, ce qui signifie qu'au mieux, un cessez-le-feu pendant le ramadan se poursuivrait jusqu'aux alentours du 13 avril.
Certes, cette résolution n'est pas parfaite, mais elle représente tout de même une avancée significative, car le principal mécanisme mondial pour la paix et la sécurité a enfin pris position pour exiger que les belligérants mettent fin à cette spirale de violence. Le Hamas s'est empressé d'accepter la résolution et il a exprimé sa volonté de la respecter. Israël, quant à lui, a affiché son mécontentement envers son plus grand allié, les États-Unis, pour n'avoir pas réussi à la bloquer.
L'essentiel est que les deux parties ne s'enlisent pas dans des questions mineures et qu'elles reconnaissent l'importance et l’enjeu de cette résolution.
Daoud Kuttab
Avant le vote du Conseil de sécurité, les négociateurs du Hamas à Doha avaient formulé certaines exigences après avoir reçu une offre de cessez-le-feu humanitaire de six semaines et d'échange de prisonniers parrainée par les États-Unis. Cette offre, qui avait été acceptée par Israël, a été rejetée par le Hamas parce qu'elle ne faisait aucune référence à un cessez-le-feu permanent, à la fourniture d'une aide humanitaire solide, au retrait de l'armée israélienne de Gaza ou à l'autorisation pour les 1,1 million de Palestiniens déplacés qui s’entassent actuellement dans la ville méridionale de Rafah, et qui sont confrontés à la menace d'une offensive israélienne majeure dans cette ville, de retourner chez eux dans le centre et le nord de la bande de Gaza.
Si la résolution du Conseil de sécurité répond à certaines de ces demandes, elle manque toutefois de clarté quant à un cessez-le-feu permanent. Néanmoins, l'acceptation de cette résolution par le Hamas témoigne de la confiance du groupe dans la décision de la communauté internationale.
Par ailleurs, si Israël ne renie pas son soutien à la proposition présentée par les Américains avant le vote de l'ONU et si le Hamas fait preuve d'un peu plus de flexibilité lors des négociations en cours au Qatar, une lumière pourrait pointer au bout de ce tunnel.
La résolution du Conseil de sécurité appelant à un cessez-le-feu, aussi incomplète soit-elle, offre néanmoins aux négociateurs du Qatar une chance de s'appuyer sur une décision claire prise par la communauté internationale.
L'accord proposé au Qatar, basé sur une proposition présentée par William Burns, directeur de la CIA, pourrait en réalité offrir une durée de cessez-le-feu plus longue, s’étendant sur six semaines, plutôt que les trois semaines indiquées par la résolution du Conseil de sécurité.
Il est essentiel que les deux parties ne s'enlisent pas dans des questions mineures et qu’elles reconnaissent l'importance de cette résolution, qui bénéficie du soutien de la communauté internationale.
Pour renforcer cette position, la communauté internationale, en particulier les pays ayant le plus d'influence sur Israël, doit clairement indiquer, sans équivoque, qu’elle met en pratique ce qu’elle prêche.
En effet, les insinuations diplomatiques, les fuites dans la presse et les menaces publiques ne suffisent clairement pas à motiver un gouvernement israélien dirigé par un Premier ministre inculpé à quatre reprises, qui sait pertinemment que lorsque la guerre prendra fin, il sera le premier tenu pour responsable par le peuple israélien.
La décision des États-Unis de s'abstenir lors du vote, mais de ne pas le bloquer, est un premier pas vers la concrétisation des paroles en actes, mais ce sera vain si elle n'est pas appuyée par d'autres actions plus puissantes, telles que des sanctions.
Fournir des armes à Israël, un pays qui défie clairement le droit international et les résolutions contraignantes du Conseil de sécurité des nations unies, ne devrait pas être toléré. La Charte des nations unies prévoit dans son chapitre VII un mécanisme clair pour l'application des résolutions que les pays ne respectent pas. Un recours à ce chapitre doit être clairement indiqué à Israël ainsi qu’à ses amis et alliés qui continuent jusqu'à présent à lui fournir armes et munitions. Personne ne doit être au-dessus du droit international, peu importe ses relations diplomatiques.
Cette même logique peut être appliquée aux jeux Olympiques de Paris cet été. Dans le passé, les pays qui bafouaient les règles du droit international ont été exclus des principaux événements sportifs internationaux, à l’instar de l'Afrique du Sud pendant l'ère de son gouvernement d'apartheid.
La résolution du Conseil de sécurité des nations unies arrive malheureusement trop tard pour les dizaines de milliers de civils qui ont déjà perdu la vie dans cette guerre vindicative menée par Israël contre le peuple palestinien.
Mais pour que cette importante résolution soit prise au sérieux et qu’elle permette d’éviter de nouvelles effusions de sang, le Conseil de sécurité qui l'a adoptée et les États membres qui ont permis son adoption doivent prendre d'autres mesures.
Tous les regards sont désormais tournés vers les pourparlers de paix à Doha. Les autorités israéliennes doivent comprendre que le monde ne leur permettra plus de persister dans leur guerre génocidaire sans en subir les conséquences.
Daoud Kuttab est un journaliste palestinien plusieurs fois primé. Il est directeur du Community Media Network.
X : @daoudkuttab
NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est celle de l’auteur et ne reflète pas nécessairement le point de vue d’Arab News en français.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com