Paris espère renouer avec Rabat sans renoncer à Alger

Emmanuel Macron a missionné le ministre des Affaires étrangères Stéphane Séjourné d'écrire un nouveau chapitre des relations avec le Maroc après des années de brouilles diplomatiques liées notamment au rapprochement de Paris et Alger. (AFP)
Emmanuel Macron a missionné le ministre des Affaires étrangères Stéphane Séjourné d'écrire un nouveau chapitre des relations avec le Maroc après des années de brouilles diplomatiques liées notamment au rapprochement de Paris et Alger. (AFP)
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Publié le Vendredi 15 mars 2024

Paris espère renouer avec Rabat sans renoncer à Alger

  • Emmanuel Macron a clairement signalé que renouer les relations avec Rabat ne signifiait pas renoncer à se rapprocher d'Alger
  • Les experts rappellent que pour le Maroc, la question de la reconnaissance de la «marocanité» du Sahara reste incontournable pour une pleine réconciliation avec Paris

PARIS: La France persiste et signe dans son ambition de réchauffer ses relations simultanément avec l'Algérie et le Maroc, une diplomatie qui a échoué jusqu'alors mais qui revient avec force dans un contexte international périlleux.

En annonçant cette semaine que le président algérien Abdelmadjid Tebboune effectuerait une visite d'Etat en France à l'automne, le président français Emmanuel Macron a clairement signalé que renouer les relations avec Rabat ne signifiait pas renoncer à se rapprocher d'Alger.

"Le président n'a jamais fait un choix qui était l'Algérie donc pas le Maroc. Il n'a jamais pensé non plus à faire l'inverse: le Maroc donc pas l'Algérie", explique une source diplomatique. "Nous ne percevons pas les relations franco-algériennes et franco-marocaines comme des vases communicants", insiste-t-elle.

Emmanuel Macron a missionné le ministre des Affaires étrangères Stéphane Séjourné d'écrire un nouveau chapitre des relations avec le Maroc après des années de brouilles diplomatiques liées notamment au rapprochement de Paris et Alger.

Lors de sa visite à Rabat le 26 février, Stéphane Séjourné avait affirmé avoir "choisi" le Maroc pour sa première visite au Maghreb en tant que nouveau chef de la diplomatie française.

Cette visite avait été précédée par l'accueil, à l'Elysée, par l'épouse du président, Brigitte Macron, des soeurs du roi du Maroc Mohammed VI.

Pour Pierre Vermeren, historien et professeur à l'Université de la Sorbonne, le "en même temps" voulu par l'Elysée "n'est ni une option, ni un choix, c'est une obligation pour la France qui se doit d'avoir des relations correctes à la fois avec le Maroc et avec l'Algérie".

"Les événements au Moyen Orient, l'intensification de la guerre en Ukraine, les difficultés au Sahel obligent un retour à la raison", dit-il, relevant que ce retour est "partagé" par les trois pays qui "ont besoin les uns des autres".

Sur le plan intérieur, Emmanuel Macron subissait en outre "une pression forte" pour rééquilibrer sa diplomatie au Maghreb, de nombreux parlementaires français, "ténors" de la politique et même l'ancien président Nicolas Sarkozy ayant poussé pour renouer avec Rabat, ajoute Hasni Abidi, du Centre d'études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen à Genève.

Le message a été clairement passé que "non seulement la France ne gagnera pas l'Algérie mais qu'elle risquait de perdre le Maroc", souligne-t-il.

Du côté de Rabat, la France se révèle être finalement un partenaire plus fiable "sur le long terme" que les Etats-Unis ou Israël, décrypte Pierre Vermeren. Car le Maghreb n'est pas une priorité de Washington tandis qu'Israël, avec qui le Maroc a normalisé ses relations, est désormais "discrédité" sur la scène arabe depuis la guerre avec le Hamas à Gaza.

«Corde raide»

Parallèlement, le moment semble plus propice au rapprochement avec Alger qui n'a pas profité du vide laissé par les Français au Sahel. Pire, l'Algérie semble se retrouver dans la même position que la France au Mali, alors que la junte au pouvoir a mis fin à l'accord d'Alger signé en 2015 avec les groupes indépendantistes du nord du pays, longtemps considéré comme essentiel pour stabiliser le pays.

"Le Sahel (...) attire toutes les puissances hégémoniques, surtout les puissances impériales islamistes. Cela dérange le Maroc, l'Algérie et la France, ce qui crée un terrain de consensus", poursuit le professeur de la Sorbonne.

La question du Sahel n'est pas centrale dans la réconciliation mais "elle y participe", dit-il.

Renouer durablement avec les deux pays simultanément relève néanmoins de la quadrature du cercle.

Les experts rappellent que pour le Maroc, la question de la reconnaissance de la "marocanité" du Sahara reste incontournable pour une pleine réconciliation avec Paris.

Sur ce sujet hautement sensible, le ministre français des Affaires étrangères s'est montré "d'une extrême prudence", note Hasni Abidi. Certes, il a reconnu que c'était "un enjeu existentiel pour le Maroc".

Cette question est aussi centrale pour la France, observe-t-il. Le Sahara occidental, une ancienne colonie espagnole, est contrôlé en majeure partie par le Maroc mais revendiqué par les indépendantistes sahraouis du Front Polisario, soutenus par l'Algérie.

Reconnaître la souveraineté marocaine, c'est s'exposer à de nouvelles frictions avec Alger.

"La France est constamment sur une corde raide", conclut Hasni Abidi.


Censure : Barnier sonne l'alarme, sa succession est déjà dans tous les esprits

Le Premier ministre français Michel Barnier prononce un discours lors de la séance de vote sur le projet de loi sur la sécurité sociale 2025 à l'Assemblée nationale, la chambre basse du Parlement français, à Paris, le 2 décembre 2024. (Photo AFP)
Le Premier ministre français Michel Barnier prononce un discours lors de la séance de vote sur le projet de loi sur la sécurité sociale 2025 à l'Assemblée nationale, la chambre basse du Parlement français, à Paris, le 2 décembre 2024. (Photo AFP)
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  • Michel Barnier a prévenu que la censure « rendrait tout plus difficile et plus grave ». Cette annonce a déjà avivé les spéculations sur sa succession à Matignon.
  • Le chef du gouvernement en sursis s'est invité à 20 heures sur TF1 et France 2, où il répondra en direct depuis Matignon aux questions d'Anne-Sophie Lapix et Gilles Bouleau, ont annoncé les deux chaînes.

PARIS : Mardi, à la veille du vote d'une motion par la gauche et l'extrême droite qui peut faire tomber son gouvernement, Michel Barnier a prévenu que la censure « rendrait tout plus difficile et plus grave ». Cette annonce a déjà avivé les spéculations sur sa succession à Matignon.

L'ambiance agitée dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale quand le Premier ministre s'est exprimé avait aussi un parfum de fin de règne, au lendemain du déclenchement du 49.3 pour faire adopter le budget de la Sécurité sociale, qui a été suivi par le dépôt de plusieurs motions de censure.

Baroud d'honneur ou tentative ultime d'éviter la chute ? Le chef du gouvernement en sursis s'est invité à 20 heures sur TF1 et France 2, où il répondra en direct depuis Matignon aux questions d'Anne-Sophie Lapix et Gilles Bouleau, ont annoncé les deux chaînes.

La conférence des présidents de groupe à l'Assemblée a fixé à mercredi 16 heures l'examen des motions de censure déposées par la gauche et le RN. Celle de la gauche, qui sera votée en premier, a toutes les chances d'être adoptée, le RN ayant annoncé la soutenir. En ajoutant leurs voix, la gauche et le RN peuvent réunir autour de 330 suffrages, soit largement plus que les 288 requis.

- « Trou noir » -

« Nous aurions probablement parfois pu faire mieux. Mais c'est aujourd'hui de votre responsabilité d'envoyer ce pays dans un trou noir », a lancé la porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, aux députés, à l'unisson des ministres qui, dans les médias, ont multiplié les appels à la « responsabilité ».

« Est-ce que nous voulons vraiment le chaos ? Ou une crise économique qui toucherait les plus fragiles ? »
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a mis en garde : « Je fais même le pari qu'avec Michel Barnier, nous parviendrons à écarter la motion de censure. »

Mais pour la cheffe des députés insoumis Mathilde Panot, « la chute de Barnier est actée ».

Nommé le 5 septembre, il aura tenu trois mois grâce au « soutien sans participation du RN » et, « ce qui le fera tomber, c'est justement que le RN aura cessé de le soutenir », a souligné le député PS Arthur Delaporte.

Lundi, le Premier ministre a sans surprise engagé la responsabilité de son gouvernement sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), assurant avoir été « au bout du dialogue » avec les groupes politiques, y compris le Rassemblement national.

- « Sans plan derrière » -

Les gestes annoncés par Michel Barnier pour répondre aux exigences du parti à la flamme n'auront toutefois pas suffi : « Censurer ce budget est, hélas, le seul moyen que nous offre la Constitution pour protéger les Français d'un budget dangereux, injuste et punitif », a justifié mardi Marine Le Pen sur X.

« Je ne croyais pas qu'elle oserait », a lâché le Premier ministre lundi après une conversation téléphonique avec la cheffe de file des députés RN, bien décidée à voter la censure malgré les multiples concessions obtenues, a raconté mardi un président de groupe du bloc central.

« C'est le RN qui a obtenu le plus de gains politiques », mais Mme Le Pen « préfère les sacrifier sur le dos des Français » et « sans plan derrière », déplore-t-on dans l'entourage de M. Barnier. Elle aurait un agenda personnel, ajoute-t-on de même source, dans une allusion au procès des assistants du RN au Parlement européen, où Marine Le Pen risque l'inéligibilité.

L'adoption d'une telle motion constituerait une première depuis le renversement du gouvernement de Georges Pompidou en 1962. Le gouvernement Barnier deviendrait alors le plus court de l'histoire de la Ve République.

Si l'exécutif tombait, la France s'enfoncerait encore plus dans la crise politique créée par la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron en juin.

- Spéculations -

Face aux incertitudes, les taux d'intérêt auxquels emprunte la France se sont tendus sur les marchés financiers. Mais la Bourse de Paris évoluait en hausse mardi, les investisseurs se focalisant pour le moment sur les avantages d'un statu quo budgétaire en cas de censure.

L'Élysée n'a fait aucun commentaire sur la nouvelle donne politique, alors qu'Emmanuel Macron est en visite d'État de trois jours à Ryad. Mais c'est bien le chef de l'État qui aura rapidement la main car, si le scénario d'une censure se confirme, il devra nommer un nouveau Premier ministre.

Les spéculations vont déjà bon train sur les successeurs potentiels de Michel Barnier, parmi lesquels le ministre des Armées Sébastien Lecornu ou le centriste François Bayrou dans le camp présidentiel.

L'équation reste toutefois la même à l'Assemblée : aucune configuration ne semble promettre une majorité pour faire adopter un budget pour 2025.

Le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, a appelé Emmanuel Macron à nommer un « Premier ministre de gauche » capable de faire des compromis avec le bloc central, se disant prêt à prendre ses responsabilités à Matignon et rejetant les appels à la démission du chef de l'État lancés par Jean-Luc Mélenchon.


La fonction publique lance le bras de fer avec le gouvernement en pleine crise politique

Le ministre français de la Fonction publique, de la Rationalisation et de la Transformation du secteur public, Guillaume Kasbarian, quitte le Palais présidentiel de l'Elysée après la réunion hebdomadaire du cabinet, le 27 novembre 2024. (Photo AFP)
Le ministre français de la Fonction publique, de la Rationalisation et de la Transformation du secteur public, Guillaume Kasbarian, quitte le Palais présidentiel de l'Elysée après la réunion hebdomadaire du cabinet, le 27 novembre 2024. (Photo AFP)
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  • Jeudi, les agents de la fonction publique se mobilisent pour une journée d'action et de grève à l'appel des syndicats, menaçant d'ouvrir un nouveau front social en pleine crise politique.
  • Et malgré la menace d'une censure du gouvernement mercredi, « nous serons dans la mobilisation du 5 décembre », a affirmé Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT, dont l'organisation fait partie de l'intersyndicale.

PARIS : Jeudi, les agents de la fonction publique se mobilisent pour une journée d'action et de grève à l'appel des syndicats, menaçant d'ouvrir un nouveau front social en pleine crise politique, alors que le gouvernement est en sursis.

Après les cheminots et les agriculteurs, l'exécutif se prépare à un nouvel avis de tempête sociale alors qu'une semaine à haut risque débute, puisqu'il va devoir affronter, mercredi, les motions de censure déposées par la gauche et le Rassemblement national.

Jeudi, plusieurs dizaines de rassemblements sont prévus en France à l'appel d'une intersyndicale, notamment à Paris.

Dans la capitale, le rendez-vous est donné en début d'après-midi près du ministère de l'Économie et des Finances, d'où un cortège doit rejoindre la place d'Italie. Selon le site de l'Unsa, l'un des syndicats, une cinquantaine de rassemblements sont recensés dans tout le pays.

Le syndicat majoritaire FSU-SNUIpp a annoncé que les professeurs des écoles « ont répondu à l'appel à la grève des organisations syndicale.

Et malgré la menace d'une censure du gouvernement mercredi, « nous serons dans la mobilisation du 5 décembre », a affirmé Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT, dont l'organisation fait partie de l'intersyndicale.

L'annonce fin octobre par le gouvernement d'un plan de lutte contre l'absentéisme des fonctionnaires, qui doit permettre de dégager 1,2 milliard d'euros d'économies, a progressivement tendu les relations entre les syndicats d'agents et le ministre de la Fonction publique, Guillaume Kasbarian, jusqu'à provoquer la rupture du dialogue social.

Les syndicats exigent notamment que le ministre renonce à trois mesures qui cristallisent la colère : le passage d'un à trois jours de carence pour les fonctionnaires malades, la réduction de 100 % à 90 % de la rémunération en cas d'arrêt maladie, et la non-reconduction du versement d'une prime en soutien au pouvoir d'achat.

Cet épisode survient dans une séquence politique tumultueuse, marquée lundi par l'engagement de la responsabilité du gouvernement sur le projet de loi de finance de la sécurité sociale, provoquant le dépôt de motions de censure.

À cela s'ajoute une incertitude budgétaire : le gouvernement est toujours à la recherche de 60 milliards d'euros pour redresser les finances publiques en berne et ramener le déficit à 5 % du PIB en 2025, contre 6,1 % en 2024.

- « Acte fort » -

Si Guillaume Kasbarian avait acté l'abandon d'une proposition contestée de fusion des catégories de fonctionnaires envisagée par son prédécesseur, il est resté inflexible sur les autres mesures. Son entourage justifie ces décisions « difficiles mais assumées », destinées à « aligner » les secteurs publics et privé, et rendues indispensables par la situation délicate des finances publiques.

La mobilisation de jeudi doit permettre de « poser un acte fort » après des « preuves d'hostilité à la fonction publique », estime Benoît Teste, secrétaire général du syndicat très implanté dans l'éducation FSU, qui devrait fortement se mobiliser.

Plus de sept mois après le dernier mouvement social, peu suivi, des fonctionnaires, « on est parti sur quelque chose de bien plus gros jeudi », assure Luc Farré, secrétaire général de l'UNSA fonction publique, dont l'organisation a décidé mi-novembre de ne plus siéger dans les « instances de dialogues social présidées par le ministre ».

Selon Gaëlle Martinez, secrétaire générale de Solidaires fonction publique, l'hypothèse d'une censure du gouvernement d'ici jeudi « ne changerait rien pour la manifestation et la grève », car « si le gouvernement tombe, et cela reste sous réserve, cela permettra de montrer la détermination du prochain gouvernement à ce que les agents ne soient pas sacrifiés ».

L'intersyndicale large (CGT, CFDT, UNSA, FSU, CFE-CGC, Solidaires et FA-FP) compte toutefois un absent de taille : Force ouvrière, premier syndicat représentatif dans l'ensemble de la fonction publique.

Tout en soutenant les revendications, FO ne s'est pas associé à la mobilisation nationale du 5 décembre, disant privilégier une grève de trois jours reconductible les 10, 11 et 12 décembre, en « convergence » avec d'autres secteurs. L'organisation participe toutefois localement à diverses mobilisations.


France: vote mercredi sur la censure, le gouvernement Barnier appelle à la responsabilité

Si l'exécutif tombait, la France s'enfoncerait encore plus dans la crise politique créée par la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron en juin. (AFP)
Si l'exécutif tombait, la France s'enfoncerait encore plus dans la crise politique créée par la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron en juin. (AFP)
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  • Menacé d'un vote de censure mercredi à l'Assemblée nationale, le Premier ministre de centre droit, nommé il y a seulement trois mois, s'adressera à la télévision à 20H00
  • Lundi, le dirigeant de 73 ans a engagé la responsabilité de l'exécutif en faisant adopter sans vote le budget de la Sécurité sociale

PARIS: Ambiance de fin de règne en France : la coalition de l'ancien commissaire européen Michel Barnier en sursis a appelé mardi à la responsabilité pour ne pas faire tomber le gouvernement et éviter un "chaos" politique et budgétaire.

Menacé d'un vote de censure mercredi à l'Assemblée nationale, le Premier ministre de centre droit, nommé il y a seulement trois mois, s'adressera à la télévision à 20H00 répondant à des questions de la presse sur deux chaînes de télévision, en direct depuis sa résidence de l'hôtel Matignon.

Lundi, le dirigeant de 73 ans a engagé la responsabilité de l'exécutif en faisant adopter sans vote le budget de la Sécurité sociale, assurant avoir été "au bout du dialogue" avec les groupes politiques et exposant son gouvernement à une motion de censure.

Sauf retournement spectaculaire, la motion a toutes les chances d'être approuvée, la gauche et l'extrême droite avec Marine Le Pen ayant annoncé qu'ils la voteraient. Le débat aura lieu mercredi à 16H00 (15h00 GMT) et le premier résultat est attendu vers 20h00 (19h00 GMT), selon plusieurs sources parlementaires. Pour faire chuter le gouvernement, 288 sur 577 seront nécessaires.

"La chute de Barnier est actée", a affirmé la cheffe des députés de La France Insoumise (LFI), formation de la gauche radicale, Mathilde Panot. Nommé le 5 septembre, il aura tenu trois mois grâce au "soutien sans participation du RN" et, "ce qui le fera tomber, c'est justement que le RN aura cessé de le soutenir", a jugé le député socialiste Arthur Delaporte.

Alors que la France voit son déficit public déraper, Michel Barnier est sous le feu croisé des oppositions qui rejettent les efforts d'austérité demandés en 2025 et accusent, pour la gauche, Emmanuel Macron d'avoir fait trop de cadeaux fiscaux aux plus riches et aux entreprises.

Michel Barnier a multiplié les concessions pour amadouer l'extrême droite, acceptant par exemple de surseoir au déremboursement des médicaments, mais cela n'a pas suffi.

"Censurer ce budget est, hélas, la seule manière que nous donne la Constitution pour protéger les Français d’un budget dangereux, injuste et punitif", a décrété mardi Marine Le Pen sur X.

Voter la censure, "c'est notre devoir", a estimé mardi l'un de ses principaux lieutenants, le député RN Jean-Philippe Tanguy sur Europe1/Cnews, alors que le manque d'argent public aiguise la contestation dans de nombreux secteurs.

A Lyon (est), pour le deuxième jour consécutif, des blocages routiers ont eu lieu organisés par des taxis en colère contre une baisse de la tarification du transport de malades. A Lille (nord), l'université est restée fermée pour alerter sur la situation financière "intenable" des universités.

Jeudi, une grève des enseignants contre le durcissement des règles en cas d'absence maladie s'annonce très suivie, au moins dans les écoles primaires dont beaucoup devraient rester fermées.

"Risque de chaos" 

Mardi matin, les ministres se sont succédé sur les radios et télévisions pour agiter le risque du "chaos". "C'est le pays qu'on met en danger", s'est inquiété le ministre de l'Economie Antoine Armand.

"Le Rassemblement national cherchait surtout un prétexte pour mettre le pays à terre", a fustigé le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, sur RTL. "Est-ce qu'on veut vraiment le chaos ? Est ce qu'on veut une crise économique qui touchera les plus fragiles ?", a lancé sur TF1 le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau.

L'adoption par l'Assemblée nationale d'une telle motion serait une première en France depuis 1962. Le gouvernement Barnier deviendrait alors le plus court de l'histoire de la Ve République.

Si l'exécutif tombait, la France s'enfoncerait encore plus dans la crise politique créée par la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron en juin, avec en outre le risque d'entamer la capacité des pouvoirs publics à emprunter sur les marchés à de faibles taux.

La France enregistre cette année un sérieux dérapage de son déficit public par rapport au PIB, à 6,1% attendu en 2024 et ne prévoit de parvenir à respecter à nouveau la règle européenne des 3% qu'en 2029.

Michel Barnier avait initialement proposé 60 milliards d'euros d'effort budgétaire en 2025.

Muet en public sur cette crise qui pourrait l'obliger à se chercher un nouveau Premier ministre, alors qu'il n'a pas de majorité à l'Assemblée, Emmanuel Macron a atterri lundi à Ryad pour une visite d'Etat de trois jours en Arabie saoudite.

Dans un sondage paru lundi, 52% des Français se sont déclarés favorables à sa démission mais surtout préoccupés par leur pouvoir d'achat.