La laïcité est «aujourd'hui plus que jamais menacée», selon Attal

Le Premier ministre français Gabriel Attal regarde son téléphone dans son bureau de l'hôtel Matignon, à Paris, le 13 mars 2024. (AFP)
Le Premier ministre français Gabriel Attal regarde son téléphone dans son bureau de l'hôtel Matignon, à Paris, le 13 mars 2024. (AFP)
Short Url
Publié le Jeudi 14 mars 2024

La laïcité est «aujourd'hui plus que jamais menacée», selon Attal

  • «Ce qui m'inquiète le plus aujourd'hui, c'est qu'on assiste à une augmentation du nombre de signalements pour contestation d'enseignement», affirme Attal
  • «Il y a trois groupes selon le niveau de difficulté des élèves, avec un objectif, qu'on puisse faire le point sur le niveau des élèves, ce qui permettra de changer de groupe», explique le Premier ministre

PARIS: La laïcité est "aujourd’hui plus que jamais menacée", estime le Premier ministre Gabriel Attal dans un entretien mercredi à l'AFP, où il affirme aussi que les groupes de niveau en français et maths au collège l'an prochain seront "la règle", "au moins sur les trois quarts de l'année", et la classe entière "l'exception".

QUESTION: 20 ans après la loi sur la laïcité, où en est-on ?

REPONSE: "La laïcité est menacée. Elle l’est probablement aujourd’hui plus que jamais. Elle a ses ennemis, ils sont politiques, religieux. Mais elle a aussi ses défenseurs: nos professeurs, nos fonctionnaires, nos forces de l’ordre.

J’ai toujours été et reste engagé pour le plein respect de notre laïcité, de la loi de 2004 (qui interdit le port de signes religieux ostentatoires à l'école), ce qui m'a conduit à interdire le port de l'abaya et du qamis dans nos établissements scolaires. Je constate qu'aujourd'hui, les signalements pour port de signes et de tenues religieuses sont au plus bas. C'est une victoire sans précédent pour la laïcité depuis 2004.

Ce qui m'inquiète le plus aujourd'hui, c'est qu'on assiste à une augmentation du nombre de signalements pour contestation d'enseignement. J'y vois à la fois le signe que les ennemis de la laïcité sont toujours présents et cherchent à infiltrer l'école et à l'affaiblir. J'y vois aussi le signe qu'une parole se libère. Notre mobilisation sera absolue sur cet enjeu".

Q: Que répondez-vous au sentiment d'insécurité des enseignants ?

R: "Accepter qu'un enseignant ait peur d'enseigner, c'est une défaite pour la République. Donc on va mettre en place avec la ministre (Nicole Belloubet) des cellules d'appui pédagogiques, joignables directement par les professeurs qui appréhendent une séquence d'enseignement, qui font face à des résistances, voire des contestations.

Il faut qu'il y ait un contact au niveau du rectorat qui puisse leur proposer trois grandes solutions: un accompagnement pédagogique avec des professeurs référents qui peuvent leur donner des conseils pour aborder certaines séquences du programme; une présence physique d'un personnel non enseignant au sein de la classe; ou la présence physique d'un personnel formé, faisant partie par exemple des équipes académiques +valeurs de la République+."

Q: Que proposez-vous pour sécuriser les établissements ?

R: "On tient nos engagements. En cinq mois (depuis l'attentat d'Arras, ndlr), près de 150 établissements ont déjà été sécurisés. Et ça se poursuit partout en France.

Ensuite, il y a les établissements, comme à Nîmes, qui se situent dans des îlots de délinquance et d'insécurité. Il y a autour de 150 établissements qui nous préoccupent particulièrement. Là, il faut avoir une action spécifique. Il faut mettre ces établissements totalement à l'abri du deal et des gangs.

C'est vraiment une action transversale. Et donc je réunirai les ministres de l'Intérieur, de la Justice, de l'Éducation et des Collectivités territoriales pour lancer une démarche qui doit être à la fois sécuritaire, éducative, judiciaire, d'ensemble."

Q: Où en est le le projet de regrouper les élèves radicalisés ?

R: "Il y a un travail interministériel qui se poursuit. Il y a plusieurs pistes qui sont à l'étude pour permettre de sortir de leur établissement ce type d’élèves. Ce travail aboutira d'ici à la fin de l'année scolaire."

Q: L'expression «groupe de niveau» fait polémique. Figurera-t-elle dans les textes officiels sur le «choc des savoirs» publiés vendredi ?

R: "Qu'importe le nom, pourvu qu'il y ait la mesure. Pour ma part, je trouve le nom groupe de niveau plus clair pour les Français : adapter l’enseignement du français et des mathématiques aux besoins de chaque élève pour faire progresser le niveau général.

Il y a trois groupes selon le niveau de difficulté des élèves, avec un objectif, qu'on puisse faire le point sur le niveau des élèves, ce qui permettra de changer de groupe".

Q : Y aura-t-il toujours des enseignements en classe entière, en français et en mathématiques?

R : "Oui. Vous ne pouvez pas démarrer un groupe de niveau dès le premier jour de la rentrée parce qu'il faut d'abord évaluer le niveau des élèves.

Je pense que sur les trois quarts de l'année au moins, il faut que les élèves suivent leurs enseignements en français et en mathématiques dans les groupes de niveau. Donc la règle, c'est le groupe, et l’exception très encadrée, c'est la classe".

Laïcité à l'école: 20 ans après la loi de 2004, toujours des remous

Le 15 mars 2004, l'interdiction du port de signes religieux à l'école était inscrite dans la loi: ce texte est venu clarifier la situation mais vingt ans après sa promulgation, l'application du principe de laïcité à l'école continue à faire des remous.

Le sujet arrive sur le devant de la scène en 1989, avec l'affaire de Creil (Oise): trois adolescentes sont exclues d'un collège pour port du voile, et l'opinion se déchire sur la question de la laïcité.

Après des années de tâtonnements, le président Jacques Chirac charge à l'été 2003 le médiateur de la République Bernard Stasi de diriger une commission de sages. Celle-ci préconise de légiférer: ce sera la loi interdisant "le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse" (voiles, kippas, grosses croix...).

Vingt ans plus tard, "d’un point de vue strictement quantitatif, la loi a atteint son objectif", estime Ismail Ferhat, spécialiste de la laïcité et enseignant à l'Université de Nanterre. "Les atteintes à la laïcité liées au port de vêtements restent relativement limitées".

Un constat partagé par des chefs d'établissements. Pour Kamel Aït Bouali, proviseur de la cité scolaire Paul Bert à Paris et responsable syndical du Sgen-CFDT Paris, "il y a eu un avant et un après la loi de mars 2004".

"Les personnels de direction devaient presque quotidiennement régler des questions de port du voile", se souvient ce proviseur, en Seine-Saint-Denis à l'époque. "La loi de 2004 a clarifié la situation", et même s'il y a "quelques élèves qui retirent le voile à la limite de l’établissement comme une sorte de petite provocation, ça n’a rien de comparable".

 

 

Q: Quels moyens supplémentaires allez-vous donner ?

R: "Encore ministre de l'Education, j'avais obtenu des moyens supplémentaires, avec plus de 2.000 postes pour la mise en place des effectifs réduits dans les groupes de niveau.

Si on se rend compte ici ou là, dans telle académie, dans tel établissement, que des postes supplémentaires sont nécessaires, on continuera à y ajouter des moyens".

Q: Que répondez-vous à ceux qui manifestent contre cette réforme, notamment en Seine-Saint-Denis ?

R: "Je vois que la principale inquiétude de beaucoup de parents, c'est de savoir si l'organisation de l'école va permettre à leurs enfants de progresser et d'élever le niveau général.

On a investi massivement en Seine-Saint-Denis : ce département sera parmi les premiers bénéficiaires des postes supplémentaires pour mettre en place les groupes de niveau, avec l'arrivée de 95 postes supplémentaires".

Q Etes-vous en accord avec Nicole Belloubet sur ces groupes ?

R: "Il n’y a aucune divergence avec la ministre qui a redit hier (mardi, ndlr) qu'elle ne céderait rien de l'ambition et de la feuille de route du choc des savoirs.

Chacun sait combien il faut qu'on soit unis pour notre école. Le cap est très clair. Il a été fixé par le président de la République. La feuille de route est là. L'école est, avec Nicole Belloubet, entre de très bonnes mains".

Q: Il n’y a pas de reprise en main de votre part?

R: "Jamais. J'ai dit le premier jour de ma nomination à Matignon que j'emmenais avec moi la cause de l'école. J'ai été très mobilisé ces dernières semaines sur d'autres sujets comme la crise agricole. Je n'ai jamais perdu le fil."


Des cercueils en plein Paris pour alerter sur le sort des journalistes ukrainiens

Vingt cercueils ont été déposés jeudi matin en plein centre de Paris pour rappeler le sort des journalistes ukrainiens tués ou emprisonnés en Russie, à l'approche des trois ans de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. (AFP)
Vingt cercueils ont été déposés jeudi matin en plein centre de Paris pour rappeler le sort des journalistes ukrainiens tués ou emprisonnés en Russie, à l'approche des trois ans de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. (AFP)
Short Url
  • Cette action a été menée place de la République par une trentaine de membres de l'ONG Reporters sans frontières, qui défend la liberté de la presse dans le monde
  • Dix-neuf cercueils ouverts, sans couvercle, ont été déposés sur le parvis pour représenter les 19 journalistes ukrainiens détenus par la Russie, certains depuis plus de dix ans

PARIS: Vingt cercueils ont été déposés jeudi matin en plein centre de Paris pour rappeler le sort des journalistes ukrainiens tués ou emprisonnés en Russie, à l'approche des trois ans de l'invasion de l'Ukraine par la Russie.

Cette action a été menée place de la République par une trentaine de membres de l'ONG Reporters sans frontières, qui défend la liberté de la presse dans le monde.

"Au moment où l'on parle de trêve, il y a des journalistes ukrainiens qui sont interrogés, torturés, humiliés dans des prisons russes. Des journalistes qui ne font que leur travail. C'est inacceptable", a déclaré à l'AFP Thibaut Bruttin, directeur général de Reporters sans frontières.

Dix-neuf cercueils ouverts, sans couvercle, ont été déposés sur le parvis pour représenter les 19 journalistes ukrainiens détenus par la Russie, certains depuis plus de dix ans.

Un cercueil fermé, avec gerbe et bougies, était lui à l'avant, en hommage à la journaliste d’investigation Victoria Rochtchina, morte le 19 septembre 2024 dans les geôles russes dans des circonstances troubles.

"Il y a une menace qui pèse sur ces journalistes, il en va de leur vie. On espère ne pas avoir à refermer ces cercueils !", a lancé Thibaut Bruttin.

RSF appelle l'Ukraine et l'Union européenne à exiger la libération de ces 19 journalistes.

Selon l'ONG, 11 journalistes ont perdu la vie dans l'exercice de leurs fonctions depuis le début de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le 24 février 2022.


Ukraine: Macron réunit les chefs de partis face à la "menace existentielle" russe

Le président français Emmanuel Macron fait un geste alors qu'il attend le président par intérim de la Roumanie pour des entretiens au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 19 février 2025, au lendemain d'une réunion avec sept pays européens, axée sur l'Ukraine, dans la conviction que "la Russie est une menace existentielle" pour le continent. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron fait un geste alors qu'il attend le président par intérim de la Roumanie pour des entretiens au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 19 février 2025, au lendemain d'une réunion avec sept pays européens, axée sur l'Ukraine, dans la conviction que "la Russie est une menace existentielle" pour le continent. (AFP)
Short Url
  • Emmanuel Macron reçoit jeudi les chefs de partis pour faire le point sur la situation en Ukraine et les efforts supplémentaires de défense à fournir alors que la Russie devient une "menace existentielle"
  • Le chef de l'Etat renoue ainsi avec les rencontres au "format Saint-Denis" initiées en août 2023 dans cette ville limitrophe du nord de Paris pour renouveler la pratique du pouvoir dans la concertation avec les partis

PARIS: Emmanuel Macron reçoit jeudi les chefs de partis pour faire le point sur la situation en Ukraine et les efforts supplémentaires de défense à fournir alors que la Russie devient une "menace existentielle", en plein rapprochement avec Donald Trump.

A gauche, Manuel Bompard (LFI), Fabien Roussel (PCF), Marine Tondelier (Ecologistes), Olivier Faure (PS) et Guillaume Lacroix (Parti radical de gauche) ont fait savoir qu'ils se rendraient à 11H00 à l'Elysée.

Côté Rassemblement national, Louis Aliot sera présent, le président du parti, Jordan Bardella, devant se rendre au même moment à Washington.

Gabriel Attal (Renaissance) et Marc Fesneau (MoDem) sont également attendus.

Le chef de l'Etat renoue ainsi avec les rencontres au "format Saint-Denis" initiées en août 2023 dans cette ville limitrophe du nord de Paris pour renouveler la pratique du pouvoir dans la concertation avec les partis.

Ces consultations, regardées avec méfiance par certaines formations qui y voyaient un moyen de contourner le Parlement, ont eu un succès très relatif, la dernière édition remontant à mars 2024, déjà sur l'Ukraine.

S'ensuivra un débat sans vote, début mars au Parlement, sur les conséquences du contexte géopolitique en Europe pour la France.

L'exécutif a commencé à préparer l'opinion à la nécessité d'un plus grand effort de défense alors que la paix en Ukraine esquissée par Donald Trump pourrait ressembler à une capitulation pour Kiev.

Le nouveau président américain entend la négocier directement avec son homologue russe Vladimir Poutine, dont le pays avait pourtant attaqué l'Ukraine il y a bientôt trois ans, le 24 février 2022.

- "Dictateur" -

L'administration Trump exclut le retour de l'Ukraine dans ses frontières d'avant 2014, c'est-à-dire avant l'annexion de la Crimée et la conquête de l'est du pays par les Russes, ainsi que son entrée dans l'Otan ou le déploiement de soldats américains pour garantir la paix.

Le locataire de la Maison Blanche a en outre été d'une rare violence verbale avec son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky qui réclame une place à la table des négociations, le traitant de "dictateur" au bilan "épouvantable" et suggérant qu'à ce rythme, il n'allait bientôt "pas lui rester de pays".

Emmanuel Macron, qui a réuni par deux fois des partenaires européens lundi et mercredi - près d'une trentaine au total -, pointe "une très forte convergence pour dire que la Russie constitue une menace existentielle pour les Européens".

"Nous souhaitons une paix en Ukraine qui soit durable et solide", a-t-il encore répété mercredi.

Les autorités américaines ont en outre indiqué mercredi soir que le chef de l'Etat français était attendu "en début de semaine prochaine" à Washington.

De son côté, le Premier ministre François Bayrou a martelé devant sa majorité que "jamais depuis 1945, le risque d'une guerre en Europe n'avait été aussi élevé".

Dans un tel contexte, "le réveil européen passe par une augmentation des dépenses militaires" qui aura "des conséquences pour nos finances publiques", a averti la porte-parole du gouvernement, Sophie Primas.

Les Européens craignent que Vladimir Poutine ne soit encouragé à poursuivre son offensive en Ukraine, voire à l'étendre à des pays voisins, s'il n'est pas clairement "forcé" à la paix, y compris par le déploiement de forces étrangères le long de la ligne de démarcation.

Emmanuel Macron a assuré mardi que "la France ne s'apprête pas à envoyer des troupes au sol, belligérantes dans un conflit, sur le front".

Mais il a aussi évoqué la possibilité "d'avoir, sous mandat des Nations unies, une opération de maintien de paix, qui elle se tiendrait le long de la ligne de front".


Conseil constitutionnel: Ferrand confirmé à une voix près, et déjà attaqué sur sa légitimité

 Une approbation fragile à une voix près et avec l'abstention du RN : Richard Ferrand, proposé par Emmanuel Macron, est en route pour devenir le prochain président du Conseil constitutionnel, même si certains l'appellent déjà à renoncer. (AFP)
Une approbation fragile à une voix près et avec l'abstention du RN : Richard Ferrand, proposé par Emmanuel Macron, est en route pour devenir le prochain président du Conseil constitutionnel, même si certains l'appellent déjà à renoncer. (AFP)
Short Url
  • Marie-Pierre de la Gontrie, sénatrice PS, suggère un "nouveau candidat" ou président issu du Conseil actuel, évoquant par exemple l'ex-Premier ministre Alain Juppé
  • La cheffe des députés insoumis Mathilde Panot a dénoncé un candidat "parrainé" par le Rassemblement national, s'interrogeant sur un "accord secret"

PARIS: Une approbation fragile à une voix près et avec l'abstention du RN : Richard Ferrand, proposé par Emmanuel Macron, est en route pour devenir le prochain président du Conseil constitutionnel, même si certains l'appellent déjà à renoncer.

La candidature de ce fidèle historique du chef de l’État a passé mercredi l'obstacle des commissions des Lois des deux chambres du Parlement. Trente-neuf parlementaires ont voté pour et 58 contre. Mais il aurait fallu 59 voix, soit trois cinquièmes des suffrages exprimés, pour entraver la nomination.

Et ses opposants n'ont pas manqué de fustiger cette nomination de justesse.

"Nous appelons le président de la République à ne pas procéder à sa nomination", a lancé la sénatrice écologiste Mélanie Vogel. Marie-Pierre de la Gontrie, sénatrice PS, suggère un "nouveau candidat" ou président issu du Conseil actuel, évoquant par exemple l'ex-Premier ministre Alain Juppé.

La cheffe des députés insoumis Mathilde Panot a dénoncé un candidat "parrainé" par le Rassemblement national, s'interrogeant sur un "accord secret".

"Le sort de Marine Le Pen sera donc dans les mains de Richard Ferrand", a jugé de son côté le Secrétaire national du PCF Fabien Roussel, faisant le lien avec une décision attendue du Conseil.

Celle-ci concerne une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par un élu mahorais condamné à une peine d'inéligibilité avec exécution immédiate. Or, Marine Le Pen est elle-même sous la menace d'une inéligibilité immédiate, requise au procès des assistants d'eurodéputés RN.

Et le Conseil constitutionnel pourrait potentiellement rendre sa décision avant le jugement RN prévu le 31 mars. "Quelle que soit la décision du Conseil constitutionnel, elle sera délégitimée", a jugé sur X Nicolas Hervieu, professeur de droit public à Sciences Po.

Champ du référendum 

Les députés RN, qui avaient assuré ces derniers jours qu'ils prendraient leur décision après l'audition de Richard Ferrand, ont choisi de s'abstenir, se disant rassurés par certaines prises de position.

M. Ferrand a ainsi estimé que l'institution devait se garder de tendre vers "un gouvernement des juges, ni constituant, ni législateur".

Une déclaration que le député RN Matthias Renault interprète positivement au regard de la question controversée du champ du référendum autorisé par l'article 11 de la Constitution.

Cet article limite ce champ à "l'organisation des pouvoirs publics", et "à la politique économique, sociale ou environnementale" du pays. Mais le RN, et des élus de droite, entendent depuis longtemps en convoquer un sur la politique migratoire en cas d'arrivée au pouvoir. Reste à savoir si le Conseil constitutionnel abondera ou estimera qu'il est compétent pour y faire obstacle.

Interrogé, M. Ferrand a botté en touche, soulignant qu'il n'y avait "pas d'exemple de jurisprudence" où le Conseil constitutionnel se serait saisi d'une hypothèse de référendum, tout en précisant que "ce n'est pas fermé", mais refusant de se prononcer en amont de sa nomination.

"Pas un professionnel" 

La candidature de l'ancien député (2012-2022) était attaquée à gauche comme à droite pour sa proximité avec Emmanuel Macron, pour sa compétence juridique jugée trop faible, ou en raison de sa mise en examen pour "prise illégale d'intérêts" dans l'affaire des Mutuelles de Bretagne - la justice a conclu à un non-lieu pour prescription.

"Je ne suis pas un professionnel du droit c'est vrai, mais comme vous un serviteur de la République", a fait valoir M. Ferrand devant les parlementaires.

Se dépeignant en "homme libre", il a assuré que, s'il avait regretté "à titre personnel" la limitation du nombre de mandats présidentiels consécutifs en 2023, il ne prônait pas de troisième mandat pour Emmanuel Macron: cela "n'a jamais été ma pensée, ni mon désir", a-t-il assuré.

Sorti du jeu politique par la petite porte après une défaite aux législatives de 2022 dans le Finistère, Richard Ferrand revient sur le devant de la scène, et est amené à succéder à Laurent Fabius, qui arrivera en fin de mandat début mars.

Autre nomination actée mercredi, le sénateur LR Philippe Bas, candidat du président du Sénat Gérard Larcher, a convaincu sans surprise les membres de la commission des Lois du Sénat de l'envoyer au Conseil constitutionnel, fort d'un CV copieux et d'une connaissance pointue de la Constitution.

La députée MoDem Laurence Vichnievsky, ex-juge d'instruction proposée par la présidente de l'Assemblée de Yaël Braun-Pivet a commencé à être auditionnée en commission des Lois de l'Assemblée à 15H00. Elle part avec moins de certitudes dans une commission plus éclatée que celle du Sénat.