La laïcité est «aujourd'hui plus que jamais menacée», selon Attal

Le Premier ministre français Gabriel Attal regarde son téléphone dans son bureau de l'hôtel Matignon, à Paris, le 13 mars 2024. (AFP)
Le Premier ministre français Gabriel Attal regarde son téléphone dans son bureau de l'hôtel Matignon, à Paris, le 13 mars 2024. (AFP)
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Publié le Jeudi 14 mars 2024

La laïcité est «aujourd'hui plus que jamais menacée», selon Attal

  • «Ce qui m'inquiète le plus aujourd'hui, c'est qu'on assiste à une augmentation du nombre de signalements pour contestation d'enseignement», affirme Attal
  • «Il y a trois groupes selon le niveau de difficulté des élèves, avec un objectif, qu'on puisse faire le point sur le niveau des élèves, ce qui permettra de changer de groupe», explique le Premier ministre

PARIS: La laïcité est "aujourd’hui plus que jamais menacée", estime le Premier ministre Gabriel Attal dans un entretien mercredi à l'AFP, où il affirme aussi que les groupes de niveau en français et maths au collège l'an prochain seront "la règle", "au moins sur les trois quarts de l'année", et la classe entière "l'exception".

QUESTION: 20 ans après la loi sur la laïcité, où en est-on ?

REPONSE: "La laïcité est menacée. Elle l’est probablement aujourd’hui plus que jamais. Elle a ses ennemis, ils sont politiques, religieux. Mais elle a aussi ses défenseurs: nos professeurs, nos fonctionnaires, nos forces de l’ordre.

J’ai toujours été et reste engagé pour le plein respect de notre laïcité, de la loi de 2004 (qui interdit le port de signes religieux ostentatoires à l'école), ce qui m'a conduit à interdire le port de l'abaya et du qamis dans nos établissements scolaires. Je constate qu'aujourd'hui, les signalements pour port de signes et de tenues religieuses sont au plus bas. C'est une victoire sans précédent pour la laïcité depuis 2004.

Ce qui m'inquiète le plus aujourd'hui, c'est qu'on assiste à une augmentation du nombre de signalements pour contestation d'enseignement. J'y vois à la fois le signe que les ennemis de la laïcité sont toujours présents et cherchent à infiltrer l'école et à l'affaiblir. J'y vois aussi le signe qu'une parole se libère. Notre mobilisation sera absolue sur cet enjeu".

Q: Que répondez-vous au sentiment d'insécurité des enseignants ?

R: "Accepter qu'un enseignant ait peur d'enseigner, c'est une défaite pour la République. Donc on va mettre en place avec la ministre (Nicole Belloubet) des cellules d'appui pédagogiques, joignables directement par les professeurs qui appréhendent une séquence d'enseignement, qui font face à des résistances, voire des contestations.

Il faut qu'il y ait un contact au niveau du rectorat qui puisse leur proposer trois grandes solutions: un accompagnement pédagogique avec des professeurs référents qui peuvent leur donner des conseils pour aborder certaines séquences du programme; une présence physique d'un personnel non enseignant au sein de la classe; ou la présence physique d'un personnel formé, faisant partie par exemple des équipes académiques +valeurs de la République+."

Q: Que proposez-vous pour sécuriser les établissements ?

R: "On tient nos engagements. En cinq mois (depuis l'attentat d'Arras, ndlr), près de 150 établissements ont déjà été sécurisés. Et ça se poursuit partout en France.

Ensuite, il y a les établissements, comme à Nîmes, qui se situent dans des îlots de délinquance et d'insécurité. Il y a autour de 150 établissements qui nous préoccupent particulièrement. Là, il faut avoir une action spécifique. Il faut mettre ces établissements totalement à l'abri du deal et des gangs.

C'est vraiment une action transversale. Et donc je réunirai les ministres de l'Intérieur, de la Justice, de l'Éducation et des Collectivités territoriales pour lancer une démarche qui doit être à la fois sécuritaire, éducative, judiciaire, d'ensemble."

Q: Où en est le le projet de regrouper les élèves radicalisés ?

R: "Il y a un travail interministériel qui se poursuit. Il y a plusieurs pistes qui sont à l'étude pour permettre de sortir de leur établissement ce type d’élèves. Ce travail aboutira d'ici à la fin de l'année scolaire."

Q: L'expression «groupe de niveau» fait polémique. Figurera-t-elle dans les textes officiels sur le «choc des savoirs» publiés vendredi ?

R: "Qu'importe le nom, pourvu qu'il y ait la mesure. Pour ma part, je trouve le nom groupe de niveau plus clair pour les Français : adapter l’enseignement du français et des mathématiques aux besoins de chaque élève pour faire progresser le niveau général.

Il y a trois groupes selon le niveau de difficulté des élèves, avec un objectif, qu'on puisse faire le point sur le niveau des élèves, ce qui permettra de changer de groupe".

Q : Y aura-t-il toujours des enseignements en classe entière, en français et en mathématiques?

R : "Oui. Vous ne pouvez pas démarrer un groupe de niveau dès le premier jour de la rentrée parce qu'il faut d'abord évaluer le niveau des élèves.

Je pense que sur les trois quarts de l'année au moins, il faut que les élèves suivent leurs enseignements en français et en mathématiques dans les groupes de niveau. Donc la règle, c'est le groupe, et l’exception très encadrée, c'est la classe".

Laïcité à l'école: 20 ans après la loi de 2004, toujours des remous

Le 15 mars 2004, l'interdiction du port de signes religieux à l'école était inscrite dans la loi: ce texte est venu clarifier la situation mais vingt ans après sa promulgation, l'application du principe de laïcité à l'école continue à faire des remous.

Le sujet arrive sur le devant de la scène en 1989, avec l'affaire de Creil (Oise): trois adolescentes sont exclues d'un collège pour port du voile, et l'opinion se déchire sur la question de la laïcité.

Après des années de tâtonnements, le président Jacques Chirac charge à l'été 2003 le médiateur de la République Bernard Stasi de diriger une commission de sages. Celle-ci préconise de légiférer: ce sera la loi interdisant "le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse" (voiles, kippas, grosses croix...).

Vingt ans plus tard, "d’un point de vue strictement quantitatif, la loi a atteint son objectif", estime Ismail Ferhat, spécialiste de la laïcité et enseignant à l'Université de Nanterre. "Les atteintes à la laïcité liées au port de vêtements restent relativement limitées".

Un constat partagé par des chefs d'établissements. Pour Kamel Aït Bouali, proviseur de la cité scolaire Paul Bert à Paris et responsable syndical du Sgen-CFDT Paris, "il y a eu un avant et un après la loi de mars 2004".

"Les personnels de direction devaient presque quotidiennement régler des questions de port du voile", se souvient ce proviseur, en Seine-Saint-Denis à l'époque. "La loi de 2004 a clarifié la situation", et même s'il y a "quelques élèves qui retirent le voile à la limite de l’établissement comme une sorte de petite provocation, ça n’a rien de comparable".

 

 

Q: Quels moyens supplémentaires allez-vous donner ?

R: "Encore ministre de l'Education, j'avais obtenu des moyens supplémentaires, avec plus de 2.000 postes pour la mise en place des effectifs réduits dans les groupes de niveau.

Si on se rend compte ici ou là, dans telle académie, dans tel établissement, que des postes supplémentaires sont nécessaires, on continuera à y ajouter des moyens".

Q: Que répondez-vous à ceux qui manifestent contre cette réforme, notamment en Seine-Saint-Denis ?

R: "Je vois que la principale inquiétude de beaucoup de parents, c'est de savoir si l'organisation de l'école va permettre à leurs enfants de progresser et d'élever le niveau général.

On a investi massivement en Seine-Saint-Denis : ce département sera parmi les premiers bénéficiaires des postes supplémentaires pour mettre en place les groupes de niveau, avec l'arrivée de 95 postes supplémentaires".

Q Etes-vous en accord avec Nicole Belloubet sur ces groupes ?

R: "Il n’y a aucune divergence avec la ministre qui a redit hier (mardi, ndlr) qu'elle ne céderait rien de l'ambition et de la feuille de route du choc des savoirs.

Chacun sait combien il faut qu'on soit unis pour notre école. Le cap est très clair. Il a été fixé par le président de la République. La feuille de route est là. L'école est, avec Nicole Belloubet, entre de très bonnes mains".

Q: Il n’y a pas de reprise en main de votre part?

R: "Jamais. J'ai dit le premier jour de ma nomination à Matignon que j'emmenais avec moi la cause de l'école. J'ai été très mobilisé ces dernières semaines sur d'autres sujets comme la crise agricole. Je n'ai jamais perdu le fil."


Censure : Barnier sonne l'alarme, sa succession est déjà dans tous les esprits

Le Premier ministre français Michel Barnier prononce un discours lors de la séance de vote sur le projet de loi sur la sécurité sociale 2025 à l'Assemblée nationale, la chambre basse du Parlement français, à Paris, le 2 décembre 2024. (Photo AFP)
Le Premier ministre français Michel Barnier prononce un discours lors de la séance de vote sur le projet de loi sur la sécurité sociale 2025 à l'Assemblée nationale, la chambre basse du Parlement français, à Paris, le 2 décembre 2024. (Photo AFP)
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  • Michel Barnier a prévenu que la censure « rendrait tout plus difficile et plus grave ». Cette annonce a déjà avivé les spéculations sur sa succession à Matignon.
  • Le chef du gouvernement en sursis s'est invité à 20 heures sur TF1 et France 2, où il répondra en direct depuis Matignon aux questions d'Anne-Sophie Lapix et Gilles Bouleau, ont annoncé les deux chaînes.

PARIS : Mardi, à la veille du vote d'une motion par la gauche et l'extrême droite qui peut faire tomber son gouvernement, Michel Barnier a prévenu que la censure « rendrait tout plus difficile et plus grave ». Cette annonce a déjà avivé les spéculations sur sa succession à Matignon.

L'ambiance agitée dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale quand le Premier ministre s'est exprimé avait aussi un parfum de fin de règne, au lendemain du déclenchement du 49.3 pour faire adopter le budget de la Sécurité sociale, qui a été suivi par le dépôt de plusieurs motions de censure.

Baroud d'honneur ou tentative ultime d'éviter la chute ? Le chef du gouvernement en sursis s'est invité à 20 heures sur TF1 et France 2, où il répondra en direct depuis Matignon aux questions d'Anne-Sophie Lapix et Gilles Bouleau, ont annoncé les deux chaînes.

La conférence des présidents de groupe à l'Assemblée a fixé à mercredi 16 heures l'examen des motions de censure déposées par la gauche et le RN. Celle de la gauche, qui sera votée en premier, a toutes les chances d'être adoptée, le RN ayant annoncé la soutenir. En ajoutant leurs voix, la gauche et le RN peuvent réunir autour de 330 suffrages, soit largement plus que les 288 requis.

- « Trou noir » -

« Nous aurions probablement parfois pu faire mieux. Mais c'est aujourd'hui de votre responsabilité d'envoyer ce pays dans un trou noir », a lancé la porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, aux députés, à l'unisson des ministres qui, dans les médias, ont multiplié les appels à la « responsabilité ».

« Est-ce que nous voulons vraiment le chaos ? Ou une crise économique qui toucherait les plus fragiles ? »
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a mis en garde : « Je fais même le pari qu'avec Michel Barnier, nous parviendrons à écarter la motion de censure. »

Mais pour la cheffe des députés insoumis Mathilde Panot, « la chute de Barnier est actée ».

Nommé le 5 septembre, il aura tenu trois mois grâce au « soutien sans participation du RN » et, « ce qui le fera tomber, c'est justement que le RN aura cessé de le soutenir », a souligné le député PS Arthur Delaporte.

Lundi, le Premier ministre a sans surprise engagé la responsabilité de son gouvernement sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), assurant avoir été « au bout du dialogue » avec les groupes politiques, y compris le Rassemblement national.

- « Sans plan derrière » -

Les gestes annoncés par Michel Barnier pour répondre aux exigences du parti à la flamme n'auront toutefois pas suffi : « Censurer ce budget est, hélas, le seul moyen que nous offre la Constitution pour protéger les Français d'un budget dangereux, injuste et punitif », a justifié mardi Marine Le Pen sur X.

« Je ne croyais pas qu'elle oserait », a lâché le Premier ministre lundi après une conversation téléphonique avec la cheffe de file des députés RN, bien décidée à voter la censure malgré les multiples concessions obtenues, a raconté mardi un président de groupe du bloc central.

« C'est le RN qui a obtenu le plus de gains politiques », mais Mme Le Pen « préfère les sacrifier sur le dos des Français » et « sans plan derrière », déplore-t-on dans l'entourage de M. Barnier. Elle aurait un agenda personnel, ajoute-t-on de même source, dans une allusion au procès des assistants du RN au Parlement européen, où Marine Le Pen risque l'inéligibilité.

L'adoption d'une telle motion constituerait une première depuis le renversement du gouvernement de Georges Pompidou en 1962. Le gouvernement Barnier deviendrait alors le plus court de l'histoire de la Ve République.

Si l'exécutif tombait, la France s'enfoncerait encore plus dans la crise politique créée par la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron en juin.

- Spéculations -

Face aux incertitudes, les taux d'intérêt auxquels emprunte la France se sont tendus sur les marchés financiers. Mais la Bourse de Paris évoluait en hausse mardi, les investisseurs se focalisant pour le moment sur les avantages d'un statu quo budgétaire en cas de censure.

L'Élysée n'a fait aucun commentaire sur la nouvelle donne politique, alors qu'Emmanuel Macron est en visite d'État de trois jours à Ryad. Mais c'est bien le chef de l'État qui aura rapidement la main car, si le scénario d'une censure se confirme, il devra nommer un nouveau Premier ministre.

Les spéculations vont déjà bon train sur les successeurs potentiels de Michel Barnier, parmi lesquels le ministre des Armées Sébastien Lecornu ou le centriste François Bayrou dans le camp présidentiel.

L'équation reste toutefois la même à l'Assemblée : aucune configuration ne semble promettre une majorité pour faire adopter un budget pour 2025.

Le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, a appelé Emmanuel Macron à nommer un « Premier ministre de gauche » capable de faire des compromis avec le bloc central, se disant prêt à prendre ses responsabilités à Matignon et rejetant les appels à la démission du chef de l'État lancés par Jean-Luc Mélenchon.


La fonction publique lance le bras de fer avec le gouvernement en pleine crise politique

Le ministre français de la Fonction publique, de la Rationalisation et de la Transformation du secteur public, Guillaume Kasbarian, quitte le Palais présidentiel de l'Elysée après la réunion hebdomadaire du cabinet, le 27 novembre 2024. (Photo AFP)
Le ministre français de la Fonction publique, de la Rationalisation et de la Transformation du secteur public, Guillaume Kasbarian, quitte le Palais présidentiel de l'Elysée après la réunion hebdomadaire du cabinet, le 27 novembre 2024. (Photo AFP)
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  • Jeudi, les agents de la fonction publique se mobilisent pour une journée d'action et de grève à l'appel des syndicats, menaçant d'ouvrir un nouveau front social en pleine crise politique.
  • Et malgré la menace d'une censure du gouvernement mercredi, « nous serons dans la mobilisation du 5 décembre », a affirmé Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT, dont l'organisation fait partie de l'intersyndicale.

PARIS : Jeudi, les agents de la fonction publique se mobilisent pour une journée d'action et de grève à l'appel des syndicats, menaçant d'ouvrir un nouveau front social en pleine crise politique, alors que le gouvernement est en sursis.

Après les cheminots et les agriculteurs, l'exécutif se prépare à un nouvel avis de tempête sociale alors qu'une semaine à haut risque débute, puisqu'il va devoir affronter, mercredi, les motions de censure déposées par la gauche et le Rassemblement national.

Jeudi, plusieurs dizaines de rassemblements sont prévus en France à l'appel d'une intersyndicale, notamment à Paris.

Dans la capitale, le rendez-vous est donné en début d'après-midi près du ministère de l'Économie et des Finances, d'où un cortège doit rejoindre la place d'Italie. Selon le site de l'Unsa, l'un des syndicats, une cinquantaine de rassemblements sont recensés dans tout le pays.

Le syndicat majoritaire FSU-SNUIpp a annoncé que les professeurs des écoles « ont répondu à l'appel à la grève des organisations syndicale.

Et malgré la menace d'une censure du gouvernement mercredi, « nous serons dans la mobilisation du 5 décembre », a affirmé Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT, dont l'organisation fait partie de l'intersyndicale.

L'annonce fin octobre par le gouvernement d'un plan de lutte contre l'absentéisme des fonctionnaires, qui doit permettre de dégager 1,2 milliard d'euros d'économies, a progressivement tendu les relations entre les syndicats d'agents et le ministre de la Fonction publique, Guillaume Kasbarian, jusqu'à provoquer la rupture du dialogue social.

Les syndicats exigent notamment que le ministre renonce à trois mesures qui cristallisent la colère : le passage d'un à trois jours de carence pour les fonctionnaires malades, la réduction de 100 % à 90 % de la rémunération en cas d'arrêt maladie, et la non-reconduction du versement d'une prime en soutien au pouvoir d'achat.

Cet épisode survient dans une séquence politique tumultueuse, marquée lundi par l'engagement de la responsabilité du gouvernement sur le projet de loi de finance de la sécurité sociale, provoquant le dépôt de motions de censure.

À cela s'ajoute une incertitude budgétaire : le gouvernement est toujours à la recherche de 60 milliards d'euros pour redresser les finances publiques en berne et ramener le déficit à 5 % du PIB en 2025, contre 6,1 % en 2024.

- « Acte fort » -

Si Guillaume Kasbarian avait acté l'abandon d'une proposition contestée de fusion des catégories de fonctionnaires envisagée par son prédécesseur, il est resté inflexible sur les autres mesures. Son entourage justifie ces décisions « difficiles mais assumées », destinées à « aligner » les secteurs publics et privé, et rendues indispensables par la situation délicate des finances publiques.

La mobilisation de jeudi doit permettre de « poser un acte fort » après des « preuves d'hostilité à la fonction publique », estime Benoît Teste, secrétaire général du syndicat très implanté dans l'éducation FSU, qui devrait fortement se mobiliser.

Plus de sept mois après le dernier mouvement social, peu suivi, des fonctionnaires, « on est parti sur quelque chose de bien plus gros jeudi », assure Luc Farré, secrétaire général de l'UNSA fonction publique, dont l'organisation a décidé mi-novembre de ne plus siéger dans les « instances de dialogues social présidées par le ministre ».

Selon Gaëlle Martinez, secrétaire générale de Solidaires fonction publique, l'hypothèse d'une censure du gouvernement d'ici jeudi « ne changerait rien pour la manifestation et la grève », car « si le gouvernement tombe, et cela reste sous réserve, cela permettra de montrer la détermination du prochain gouvernement à ce que les agents ne soient pas sacrifiés ».

L'intersyndicale large (CGT, CFDT, UNSA, FSU, CFE-CGC, Solidaires et FA-FP) compte toutefois un absent de taille : Force ouvrière, premier syndicat représentatif dans l'ensemble de la fonction publique.

Tout en soutenant les revendications, FO ne s'est pas associé à la mobilisation nationale du 5 décembre, disant privilégier une grève de trois jours reconductible les 10, 11 et 12 décembre, en « convergence » avec d'autres secteurs. L'organisation participe toutefois localement à diverses mobilisations.


France: vote mercredi sur la censure, le gouvernement Barnier appelle à la responsabilité

Si l'exécutif tombait, la France s'enfoncerait encore plus dans la crise politique créée par la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron en juin. (AFP)
Si l'exécutif tombait, la France s'enfoncerait encore plus dans la crise politique créée par la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron en juin. (AFP)
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  • Menacé d'un vote de censure mercredi à l'Assemblée nationale, le Premier ministre de centre droit, nommé il y a seulement trois mois, s'adressera à la télévision à 20H00
  • Lundi, le dirigeant de 73 ans a engagé la responsabilité de l'exécutif en faisant adopter sans vote le budget de la Sécurité sociale

PARIS: Ambiance de fin de règne en France : la coalition de l'ancien commissaire européen Michel Barnier en sursis a appelé mardi à la responsabilité pour ne pas faire tomber le gouvernement et éviter un "chaos" politique et budgétaire.

Menacé d'un vote de censure mercredi à l'Assemblée nationale, le Premier ministre de centre droit, nommé il y a seulement trois mois, s'adressera à la télévision à 20H00 répondant à des questions de la presse sur deux chaînes de télévision, en direct depuis sa résidence de l'hôtel Matignon.

Lundi, le dirigeant de 73 ans a engagé la responsabilité de l'exécutif en faisant adopter sans vote le budget de la Sécurité sociale, assurant avoir été "au bout du dialogue" avec les groupes politiques et exposant son gouvernement à une motion de censure.

Sauf retournement spectaculaire, la motion a toutes les chances d'être approuvée, la gauche et l'extrême droite avec Marine Le Pen ayant annoncé qu'ils la voteraient. Le débat aura lieu mercredi à 16H00 (15h00 GMT) et le premier résultat est attendu vers 20h00 (19h00 GMT), selon plusieurs sources parlementaires. Pour faire chuter le gouvernement, 288 sur 577 seront nécessaires.

"La chute de Barnier est actée", a affirmé la cheffe des députés de La France Insoumise (LFI), formation de la gauche radicale, Mathilde Panot. Nommé le 5 septembre, il aura tenu trois mois grâce au "soutien sans participation du RN" et, "ce qui le fera tomber, c'est justement que le RN aura cessé de le soutenir", a jugé le député socialiste Arthur Delaporte.

Alors que la France voit son déficit public déraper, Michel Barnier est sous le feu croisé des oppositions qui rejettent les efforts d'austérité demandés en 2025 et accusent, pour la gauche, Emmanuel Macron d'avoir fait trop de cadeaux fiscaux aux plus riches et aux entreprises.

Michel Barnier a multiplié les concessions pour amadouer l'extrême droite, acceptant par exemple de surseoir au déremboursement des médicaments, mais cela n'a pas suffi.

"Censurer ce budget est, hélas, la seule manière que nous donne la Constitution pour protéger les Français d’un budget dangereux, injuste et punitif", a décrété mardi Marine Le Pen sur X.

Voter la censure, "c'est notre devoir", a estimé mardi l'un de ses principaux lieutenants, le député RN Jean-Philippe Tanguy sur Europe1/Cnews, alors que le manque d'argent public aiguise la contestation dans de nombreux secteurs.

A Lyon (est), pour le deuxième jour consécutif, des blocages routiers ont eu lieu organisés par des taxis en colère contre une baisse de la tarification du transport de malades. A Lille (nord), l'université est restée fermée pour alerter sur la situation financière "intenable" des universités.

Jeudi, une grève des enseignants contre le durcissement des règles en cas d'absence maladie s'annonce très suivie, au moins dans les écoles primaires dont beaucoup devraient rester fermées.

"Risque de chaos" 

Mardi matin, les ministres se sont succédé sur les radios et télévisions pour agiter le risque du "chaos". "C'est le pays qu'on met en danger", s'est inquiété le ministre de l'Economie Antoine Armand.

"Le Rassemblement national cherchait surtout un prétexte pour mettre le pays à terre", a fustigé le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, sur RTL. "Est-ce qu'on veut vraiment le chaos ? Est ce qu'on veut une crise économique qui touchera les plus fragiles ?", a lancé sur TF1 le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau.

L'adoption par l'Assemblée nationale d'une telle motion serait une première en France depuis 1962. Le gouvernement Barnier deviendrait alors le plus court de l'histoire de la Ve République.

Si l'exécutif tombait, la France s'enfoncerait encore plus dans la crise politique créée par la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron en juin, avec en outre le risque d'entamer la capacité des pouvoirs publics à emprunter sur les marchés à de faibles taux.

La France enregistre cette année un sérieux dérapage de son déficit public par rapport au PIB, à 6,1% attendu en 2024 et ne prévoit de parvenir à respecter à nouveau la règle européenne des 3% qu'en 2029.

Michel Barnier avait initialement proposé 60 milliards d'euros d'effort budgétaire en 2025.

Muet en public sur cette crise qui pourrait l'obliger à se chercher un nouveau Premier ministre, alors qu'il n'a pas de majorité à l'Assemblée, Emmanuel Macron a atterri lundi à Ryad pour une visite d'Etat de trois jours en Arabie saoudite.

Dans un sondage paru lundi, 52% des Français se sont déclarés favorables à sa démission mais surtout préoccupés par leur pouvoir d'achat.