Chlordécone: les députés votent pour reconnaître la «  responsabilité » de l'Etat

Des participants se tiennent à côté d'une pancarte indiquant "Respect, réparation, vérité, justice pour les victimes, non au non-lieu" lors d'une manifestation pour "la vérité et les réparations" pour les victimes du chlordécone dans l'archipel des Antilles, place de la Nation à Paris, le 28 octobre 2023. (AFP).
Des participants se tiennent à côté d'une pancarte indiquant "Respect, réparation, vérité, justice pour les victimes, non au non-lieu" lors d'une manifestation pour "la vérité et les réparations" pour les victimes du chlordécone dans l'archipel des Antilles, place de la Nation à Paris, le 28 octobre 2023. (AFP).
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Publié le Jeudi 29 février 2024

Chlordécone: les députés votent pour reconnaître la «  responsabilité » de l'Etat

  • "Flou artistique", texte symbolique ou "première étape essentielle" à une vraie reconnaissance des ravages de la chlordécone?
  • Les députés examinent jeudi une proposition de loi socialiste visant à reconnaître "la responsabilité" de l'Etat dans ce scandale sanitaire qui empoisonne les Antilles

PARIS: "Flou artistique", texte symbolique ou "première étape essentielle" à une vraie reconnaissance des ravages de la chlordécone? Les députés examinent jeudi une proposition de loi socialiste visant à reconnaître "la responsabilité" de l'Etat dans ce scandale sanitaire qui empoisonne les Antilles.

Adopté par les députés en commission le 14 février, le texte porté par le député de Guadeloupe Elie Califer prévoit que la "République française reconna(isse) sa responsabilité dans les préjudices sanitaires, écologiques et économiques" causés par l'utilisation de ce pesticide en Martinique et en Guadeloupe.

La France doit avoir pour objectif "la dépollution des terres" et "l'indemnisation des victimes", poursuit le texte.

Le chlordécone, pesticide répandu dans les bananeraies pour lutter contre le charançon, a été interdit aux Etats-Unis dès 1975, mais est resté autorisé en France jusqu'en 1990, et même jusqu'en 1993 - quinze ans après les premières alertes de l'OMS - aux Antilles, où il a bénéficié d'une dérogation.

Par cette loi, le groupe PS dit espérer "enfin une reconnaissance officielle de la responsabilité de l'Etat" dans ce "scandale environnemental et sanitaire".

"C'est une première étape essentielle" qui permettra "d'introduire dans la loi les objectifs" de dépollution des terres et des eaux et d'indemnisation des victimes, note le PS.

Mais le texte a surtout une valeur symbolique. "C'est très important, même si ça ne changera pas le montant des indemnisations", reconnaît un cadre du groupe.

Une trentaine d'amendements ont été déposés, dont deux de la députée Charlotte Parmentier-Lecocq, exprimant les réserves macronistes.

L'un vise à remplacer la "responsabilité" de la République française dans les "préjudices" subis par sa "part de responsabilité dans l'ampleur des dommages", l'autre réclame une "instance indépendante" pour évaluer les actions de dépollution et de protection des populations.

"C'est important de reconnaître une part de responsabilité de l'Etat, mais la responsabilité est partagée, sinon c'est un peu facile", dit-elle à l'AFP, citant les fabricants du chlordécone, les propriétaires d'exploitations qui l'utilisaient et les élus locaux "qui plaidaient à l'époque pour des dérogations".

Dénonçant le "flou artistique" du texte initial d'Elie Califer, elle estime qu'il n'apporte pas de "réponses concrètes sur la dépollution et l'indemnisation" des victimes.

« Bras de fer »

Elie Califer, à l'origine de la proposition de loi, s'insurge et dénonce "une réécriture" du texte. "C'est inacceptable. Ça va être un bras de fer", prévient-il à l'AFP.

"On a besoin que la reconnaissance de la responsabilité de l'Etat soit inscrite dans le marbre de la loi. C'est important pour nous. Les territoires des Antilles se sentent abandonnés à leur sort. Après, viendront les questions d'organisation et du fonds d'indemnisation", poursuit le député de Guadeloupe.

Aux Antilles, où le non-lieu prononcé en janvier 2023 par deux juges d'instruction parisiennes enquêtant sur le scandale avait provoqué beaucoup d'amertume, le vote sera scruté de près.

Christophe Lèguevaques, avocat des parties civiles dans l'information judiciaire, note l'absence de reconnaissance du préjudice moral et regrette lui aussi que seule la responsabilité de l'Etat soit engagée.

Un positionnement qui rejoint celui du collectif "Lyannaj pou dépoliyé Gwadloup" (Alliance pour la dépollution de la Guadeloupe), pour qui le texte ne va pas assez loin, notamment en n'impliquant pas les producteurs de l'époque.

"Nous sommes favorables, bien sûr, à une reconnaissance de la responsabilité de l'Etat", souligne Laurence Maquiaba, membre de ce collectif, "mais nous ne pouvons pas considérer que l'Etat est seul responsable, les pollueurs doivent aussi être concernés".

En Martinique aussi, les militants attendent plus. Pour Philippe Pierre-Charles, porte-parole du collectif "Simenn Matinik doubout, gaoulé kont chlordécone" (Semaine de la Martinique debout - révolte contre le chlordécone), cette reconnaissance serait "un élément non négligeable" mais doit ouvrir la porte à un programme de réparation".

"Et là, ce n'est pas encore ce qui est mis clairement sur la table", regrette-t-il.

Comme nombre d'acteurs engagés dans le dossier, Philippe Pierre-Charles reste marqué par le non-lieu prononcé en janvier 2023, vu à l'époque comme un "déni de justice".

En cas d'échec au Parlement, les Martiniquais resteront "déterminés", prévient-il: "C'est la pression populaire qui compte. Si jamais les macronistes ne le comprennent pas, il faudra une mobilisation".


Macron appelle à intégrer Mayotte dans la Commission de l'océan Indien

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  • "Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo
  • Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale

ANTANANARIVO: Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores.

"Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo.

La COI réunit les États insulaires (Madagascar, Comores, Maurice, Seychelles et La Réunion pour la France) dans le sud-ouest de l'océan Indien.

Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale.

"L'implication de nos populations, l'intégration de toutes nos îles dans les efforts de la COI pour la prospérité et la sécurité, dans la pluralité de ses dimensions maritime, alimentaire et pour la santé sont dans l'intérêt de nos peuples et de la région", a insisté M. Macron.

Il a suggéré toutefois d'"avancer de manière pragmatique vers cet objectif", sans réclamer l'intégration pleine et entière immédiate de l'archipel.

"La France est le premier bailleur de la COI", a-t-il aussi souligné, en précisant que l'Agence française du développement (AFD) gérait un "portefeuille de 125 millions d'euros de projets" de l'organisation.

"La COI est un modèle de coopération (...) Aucune de nos îles ne peut relever seule le défi", a-t-il ajouté, évoquant un "océan Indien profondément bousculé" par les défis planétaires actuels.

"Ensemble, en conjuguant nos atouts (..) nous pouvons tracer une voie nouvelle singulière", a-t-il assuré.

L'Union des Comores s'oppose à l'intégration de Mayotte dans la COI car elle conteste la souveraineté de la France sur Mayotte, restée française lorsque l'archipel des Comores est devenu indépendant en 1975.

Mayotte, tout comme les îles Éparses, autre territoire français hérité de la colonisation et revendiqué par Madagascar, sont au cœur du canal du Mozambique, voie majeure de transport maritime qui renferme d'importantes réserves en hydrocarbures.


Narcobanditisme à Marseille: le ministre de l'Intérieur annonce 21 arrestations dans «le haut du spectre»

Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
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  • Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme"
  • Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail

MARSEILLE: Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a annoncé jeudi un coup de filet avec 21 interpellations de trafiquants appartenant au "haut du spectre" du narcobanditisme marseillais, lors d'un déplacement à Marseille.

Une opération "a eu lieu très tôt ce matin avec 21 interpellations liées au narcobanditisme, dans le haut de spectre, qui doit nous permettre de démanteler un réseau important sur Marseille", qui tenait la cité de la Castellane, dans les quartiers populaires du nord de la ville, a déclaré Bruno Retailleau lors d'une conférence de presse.

Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme", a insisté M. Retailleau.

Selon une source policière, cette enquête portait notamment sur du blanchiment.

Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail.

Au total, 170 enquêteurs ont été mobilisés pour ce coup de filet qui est, selon le ministre, "un coup dur", "sinon mortel", porté à ce réseau.

La cité de la Castellane, vaste ensemble d'immeubles blancs en bordure d'autoroute, est connue pour être un haut lieu marseillais de ces trafics de stupéfiants qui empoisonnent le quotidien des habitants. En mars 2024, Emmanuel Macron s'y était rendu pour lancer des opérations "place nette XXL" contre les trafiquants et depuis la présence policière y était quasi constante, mais si le trafic était moins visible il se poursuivait notamment via les livraisons.

Ce coup de filet n'a a priori "pas de lien" avec les récents faits visant des prisons en France, a également précisé le ministre.

Le ministre était à Marseille pour dresser un premier bilan des plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien, lancés en février, avec par exemple mercredi 1.000 fonctionnaires mobilisés dans les Bouches-du-Rhône qui ont procédé à 10.000 contrôles d'identité.

Au total, 106 personnes ont été interpellées, dont une trentaine d'étrangers en situation irrégulière, dans le cadre d'une opération "massive" et "visible".


Le lycée Averroès, «un bastion de l'entrisme islamiste», selon Retailleau

Le lycée musulman lillois Averroès, dont le contrat d'association avec l'Etat a été rétabli mercredi par la justice administrative, "est un bastion de l'entrisme islamiste", a affirmé jeudi le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau. (AFP)
Le lycée musulman lillois Averroès, dont le contrat d'association avec l'Etat a été rétabli mercredi par la justice administrative, "est un bastion de l'entrisme islamiste", a affirmé jeudi le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau. (AFP)
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  • "Les faits sont graves, ils sont significatifs de l'entrisme islamiste que je veux combattre avec la plus grande fermeté. Et le lycée Averroès est pour nous un bastion de cet entrisme"
  • "On a des éléments extrêmement graves, extrêmement lourds, l'argent des Français n'a rien à faire dans ce genre d'organisation"

MARSEILLE: Le lycée musulman lillois Averroès, dont le contrat d'association avec l'Etat a été rétabli mercredi par la justice administrative, "est un bastion de l'entrisme islamiste", a affirmé jeudi le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, disant souhaiter "que l'Etat fasse appel".

"Les faits sont graves, ils sont significatifs de l'entrisme islamiste que je veux combattre avec la plus grande fermeté. Et le lycée Averroès est pour nous un bastion de cet entrisme", a déclaré le ministre. "On a des éléments extrêmement graves, extrêmement lourds, l'argent des Français n'a rien à faire dans ce genre d'organisation", a-t-il ajouté, lors d'un déplacement à Marseille.