PARIS: Les fêtes passées, le gouvernement guette désormais un rebond épidémique, prélude à de possibles nouvelles restrictions, tout en essayant d'étouffer la polémique grandissante autour de la lenteur de la campagne de vaccination.
Vivement critiqué pour le nombre très modeste de vaccins administrés en comparaison avec d'autres pays européens, l'exécutif répète qu'il met les bouchées doubles. Dans Le Parisien dimanche, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal annonce une accélération de l'arrivé des doses chaque semaine et un renforcement des moyens pour les transférer aux Ehpad.
Mais les attaques ne faiblissent pas face à une campagne au compte-gouttes qui comprend une visite pré-vaccinale pour déceler d'éventuelles contre-indications et recueillir le consentement des personnes.
« Toute la communauté soignante ne comprend pas pourquoi il y a un tel écart avec l'Allemagne: l'Allemagne vaccine 20.000 personnes par jour, nous sommes à 50 », dénonçait samedi le Pr Mehdi Mejdoubi, du centre hospitalier de Valenciennes.
Dans une tribune publiée dans Télérama, la directrice du Théâtre du Soleil Ariane Mnouchkine a exhorté le gouvernement à accélérer la campagne en vue de la réouverture, entre autres, des théâtres et des cinémas, fermés depuis le 30 octobre.
« Que ceux qui ne veulent pas se faire vacciner ne le fassent pas, c’est leur droit, mais en leur nom, allez-vous prétendre empêcher les volontaires de le faire au plus vite? », s'agace-t-elle.
« Pour la première phase, (...) ce sont les vaccins qui se déplacent à nos aînés, pas l'inverse. Les Allemands ont eux un champ plus large en ciblant d'autres populations », a rappelé Gabriel Attal au Parisien.
« Pour la deuxième phase, dès début février, (le ministre de la Santé) Olivier Véran a annoncé des +centres de vaccination en ville+: ce ne seront pas des +vaccinodromes+ géants nécessitant des kilomètres de déplacement mais, à terme, des lieux en grande proximité dans nos communes », a-t-il ajouté.
Le Premier ministre Jean Castex a assuré que « dans les mois qui viennent, à l’arrivée, la situation sera totalement équilibrée en terme de vaccination en Europe ».
« Attentif au milieu scolaire »
Dès lundi, les soignants à partir de 50 ans pourront tous commencer à être vaccinés, Olivier Véran ayant avancé leur tour de plusieurs semaines. Certains n'ont même pas attendu cette date: à l'Hôtel-Dieu à Paris et dans le CHRU de Nancy, les premières injections ont été faites ce week-end.
Quant à la circulation du virus proprement dite, si l'effet des fêtes ne sera connu que dans une semaine, « la tendance est déjà préoccupante » depuis début décembre, affirme le directeur général de la Santé Jérôme Salomon au JDD.
Il s'inquiète à la fois des conséquences des vacances, du froid qui favorise les transmissions, des deux variantes identifiées en Grande-Bretagne et en Afrique du Sud déjà détectées en France mais aussi du brassage d’élèves avec la rentrée.
« Les enfants reviennent de différents endroits, en France ou à l'étranger, ça peut rebattre les cartes de la situation épidémiologique », affirme-t-il. Quant aux deux souches, elles « ne sont pas forcément plus dangereuses mais elles sont nettement plus contagieuses. Elles toucheraient aussi davantage les jeunes (...) Il faut donc qu’on soit très attentif au milieu scolaire et universitaire ».
Après plus de deux mois de « distanciel », les universités pourront dès lundi accueillir quelques élèves, mais beaucoup attendront la semaine suivante pour concilier au mieux contraintes sanitaires, examens et fatigue.
Les perspectives sont par ailleurs sombres pour les bars et les restaurants, un poids lourd du gouvernement jugeant « très, très peu probable » une réouverture dès le 20 janvier.
Le Conseil scientifique a d'ores et déjà dit craindre un rebond « incontrôlé » dans les prochaines semaines, notamment en raison des fêtes de fin d'année --marquées aussi par l'organisation de quelques fêtes clandestines pour le réveillon.
Les chiffres inquiétants dans l'Est ont poussé le gouvernement à renforcer le couvre-feu dès samedi dans 15 départements.
Les données de Santé Publique France samedi montrent une légère hausse du nombre de patients hospitalisés et en réanimation, après une baisse continue ces derniers jours.
L'épidémie pèsera « au moins jusqu'au printemps », avait prévenu lors de ses voeux le chef de l'Etat, qui a toutefois exprimé son espoir pour 2021 grâce au vaccin.
Pour Jérôme Salomon, « on a encore quatre mois d'efforts collectifs à faire ».