La colère des agriculteurs ne retombe pas malgré les concessions de Bruxelles

En France, les agriculteurs maintiennent la pression sur les autoroutes aux abords de Paris. (AFP).
En France, les agriculteurs maintiennent la pression sur les autoroutes aux abords de Paris. (AFP).
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Publié le Jeudi 01 février 2024

La colère des agriculteurs ne retombe pas malgré les concessions de Bruxelles

  • Mercredi, à la veille du sommet européen, des agriculteurs français et belges ont bloqué "ensemble" un point de passage à la frontière entre les deux pays
  • En France, les agriculteurs maintiennent la pression sur les autoroutes aux abords de Paris

PARIS: Malgré les concessions de Bruxelles, où se réunissent jeudi les dirigeants européens, la colère des agriculteurs dans l'UE ne retombe pas, notamment en France où les blocages d'axes stratégiques doivent se poursuivre pour la quatrième journée consécutive.

Si la colère du monde agricole ne figure pas au menu officiel des discussions du sommet de Bruxelles, plusieurs centaines de tracteurs devraient converger à proximité des lieux de la réunion, devant le Parlement européen, selon les organisateurs.

Mercredi, à la veille du sommet européen, des agriculteurs français et belges ont bloqué "ensemble" un point de passage à la frontière entre les deux pays, dénonçant "la distorsion de concurrence" entérinée par les accords de libre échange, et réclamant  "des annonces très fortes" jeudi.

En France, les agriculteurs maintiennent la pression sur les autoroutes aux abords de Paris. La tension est montée mercredi soir avec les premières interpellations d'agriculteurs qui voulaient bloquer le marché de Rungis, poumon alimentaire de la région parisienne.

Un total de 91 personnes ont été interpellées en fin d'après-midi après une intrusion dans l'enceinte du marché de gros, où des "dégradations" ont été commises, selon une source policière à l'AFP.

Un millier de tracteurs dans les rues de Bruxelles

Un millier de tracteurs bloquent jeudi plusieurs rues de Bruxelles aux abords d'un sommet des dirigeants des Vingt-Sept, sur fond de colère du monde agricole à l'égard de la politique européenne.

"Il y a mille tracteurs ou engins agricoles", a déclaré à l'AFP un porte-parole de la police, précisant que ces agriculteurs provenaient essentiellement de Belgique.

 

Concessions à Bruxelles

Les aides dégagées mercredi par le gouvernement français et les concessions de la Commission européenne, sur les jachères et les importations ukrainiennes, ne semblent pas trouver grâce aux yeux de la profession, également mobilisée en Italie, Espagne et Allemagne.

En Italie, des milliers d'agriculteurs, de la Sardaigne au Piémont, ont encore manifesté mercredi.

La principale confédération syndicale agricole italienne, Coldiretti, prévoit de se rendre jeudi à Bruxelles avec environ un millier d'agriculteurs de la péninsule pour dénoncer "les folies qui menacent l'agriculture".

Le ministre espagnol de l'Agriculture a annoncé qu'il recevrait vendredi les trois principaux syndicats agricoles, qui ont promis des "mobilisations" dans les "prochaines semaines".

Des agriculteurs portugais ont aussi appelé à une mobilisation jeudi matin sur les routes du pays avec des tracteurs et machines agricoles.

Face à la grogne, la Commission européenne a fait des concessions mercredi sur deux sujets principaux: elle propose d'accorder pour 2024 une dérogation "partielle" aux obligations de jachères imposées par la PAC et envisage un mécanisme limitant les importations d'Ukraine, notamment de volaille.

Effort « tardif »

Si Paris s'est félicité que Bruxelles ait "répondu aux demandes de la France", cette dérogation intervient "tardivement" et reste "limitée", a regretté le Copa-Cogeca, organisation des syndicats agricoles majoritaires dans l'UE.

Politique européenne trop complexe, revenus trop bas, inflation, concurrence étrangère, accumulation de normes, flambée des prix du carburant: les mêmes revendications se retrouvent dans la plupart des pays européens.

La colère se cristallise autour de la politique agricole commune (PAC) des Vingt-Sept, jugée par certains déconnectée des réalités.

Mercosur

Un autre sujet de friction reste en suspens à Bruxelles: en charge de la politique commerciale des Vingt-Sept, la Commission négocie actuellement un accord de libre-échange avec les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay) qui inquiète le secteur agricole et dont Paris déclare ne pas vouloir.

Ce traité avec d'importants pays agricoles "n'est pas bon pour nos éleveurs et peut pas, ne doit pas être signé en l'état", a déclaré mercredi le ministre de l'Economie français Bruno Le Maire, se disant prêt à un "bras de fer" avec la Commission.

Le président Emmanuel Macron doit s'entretenir jeudi avec la présidente de la Commission Ursula von der Leyen, en marge d'un sommet européen.

Le patron du puissant syndicat agricole français FNSEA a toutefois appelé ses troupes "au calme et à la raison". "L'attente est énorme" face au "cumul de normes et de règles", a déclaré Arnaud Rousseau. Mais "il y a aussi beaucoup de sujets européens qui ne sont pas des sujets qui se règlent en trois jours".

La nouvelle PAC, qui renforce depuis 2023 les obligations environnementales et les législations du Pacte vert européen (ou "Green Deal") - même si elles ne sont pas encore en vigueur - cristallise la colère. La France est la première bénéficiaire des subventions agricoles européennes, avec plus de 9 milliards d'euros par an.

79 agriculteurs toujours en garde à vue, pas d'incident à Rungis

Les 79 agriculteurs placés en garde à vue mercredi après-midi après une intrusion dans des entrepôts du marché de gros de Rungis (Val-de-Marne) étaient toujours interrogés jeudi matin, a indiqué le parquet de Créteil à l'AFP.

Ils ont été interpellés et placés sous ce régime "pour dégradation du bien d'autrui en réunion et participation à un groupement formé en vue de la préparation de dégradations de bien", avait indiqué la même source mercredi soir.

Le préfet de police de Paris Laurent Nunez a évoqué mercredi soir un total de 91 interpellations en lien avec ces incidents, survenus dans une zone de stockage de Rungis.

Au petit matin, le calme régnait aux abords du marché, cible "symbolique" des agriculteurs en colère qui ont bloqué depuis mardi plusieurs autoroutes menant à la capitale.

A la porte de Chevilly-Larue, qui mène au marché de gros, cinq camions de CRS et deux blindés Centaure de la gendarmerie surveillaient le trafic vers 6h00, a constaté un journaliste de l'AFP.

La circulation était légèrement ralentie à l'entrée du marché, réduite à une voie.

"Le programme, ça va sûrement être repos et retour", a pronostiqué Frédéric Ferrand au téléphone auprès de l'AFP. L'agriculteur avait piloté mercredi un cortège arrivé devant le marché de gros.

En Ile-de-France, sept autoroutes sont entravées par des barrages et fermetures partielles, selon le site de suivi du trafic Sytadin.

La Coordination rurale suggère à «  ceux qui souhaitent monter à Paris » d'aller «  vers l'Assemblée nationale » 

Véronique Le Floch, présidente de la Coordination rurale, a suggéré jeudi sur RMC aux agriculteurs "qui souhaitent monter sur Paris" de "venir à l'Assemblée nationale" afin que les députés "puissent venir à leur rencontre", alors que le mouvement de colère dans le secteur agricole ne retombe pas.

"Cet après-midi, étant donné que de nombreux agriculteurs souhaitent monter sur Paris, on leur passe le message: s'ils souhaitent monter sur Paris, qu'ils se dirigent vers l'Assemblée nationale, pour que chacun des députés, chacune des députées et tous les autres sénateurs puissent venir à la rencontre des agriculteurs", a déclaré la représentante du deuxième syndicat agricole représentatif en France derrière l'alliance FNSEA-Jeunes Agriculteurs.

"Si un maximum d'agriculteurs décident de monter, c'est le cas, qu'ils viennent à l'Assemblée nationale", a ajouté Véronique Le Floch, tout en précisant que "ce n'est pas un appel à manifestation".

"Je n'ai même pas besoin d'appeler" les agriculteurs, "ils s'organisent partout pour remplir des voitures, il y a des départs partout", a-t-elle assuré.

"On nous mène en bateau depuis une dizaine de jours, beaucoup d'agriculteurs n'en peuvent plus", a-t-elle encore ajouté.

Selon la présidente de la Coordination rurale, ces agriculteurs ont "décidé de venir marquer leur soutien pour nos 91 collègues", soit les 91 personnes interpellées mercredi pour s'être introduites à pied dans l'enceinte du marché de gros de Rungis, où des "dégradations" ont été commises, selon le préfet de police de Paris.

Mercredi en fin d'après-midi, plusieurs dizaines d'agriculteurs, dont des membres de la Coordination rurale du Lot-et-Garonne, étaient arrivés devant des entrepôts en lisière du marché de Rungis.

"Nous avions décidé d’investir Rungis, nous avons investi Rungis", s'était félicité auprès de l'AFP Serge Bousquet-Cassagne, président de la chambre d'agriculture du Lot-et-Garonne qui menait le cortège.

Emmanuel Macron doit s'entretenir avant 10H00 avec la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen au sujet du "futur de l'agriculture européenne", a annoncé l'Elysée, avant un Sommet européen extraordinaire consacré au budget de l'UE et à l'aide à apporter à l'Ukraine.


Laurent Wauquiez dépose une proposition de loi pour interdire le voile aux mineures

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  • Sa proposition vise à modifier la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public
  • Il apparaît toutefois peu probable que ce texte soit examiné avant deux mois : la journée annuelle réservée aux propositions du groupe LR n’est prévue que le 22 janvier

PARIS: Le chef des députés Les Républicains Laurent Wauquiez a déposé lundi une proposition de loi pour interdire aux mineures de porter le voile dans l'espace public, mais son examen rapide semble peu probable et sa constitutionnalité mise en doute par des juristes.

M. Wauquiez veut interdire "à tout parent d'imposer à sa fille mineure ou de l'autoriser à porter, dans l'espace public, une tenue destinée à dissimuler sa chevelure", selon l'article unique de sa proposition de loi.

Il s'appuie notamment sur un rapport sur les Frères musulmans commandé par le gouvernement et publié en mai dernier, relatant l'augmentation "massive et visible du nombre de petites filles portant le voile".

Il estime que "le voilement de jeunes filles" heurte les principes républicains "les plus fondamentaux", tels que la "protection de l'enfant", "la liberté de conscience" et "l'égalité entre les hommes et les femmes".

Sa proposition vise à modifier la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public.

Il apparaît toutefois peu probable que ce texte soit examiné avant deux mois : la journée annuelle réservée aux propositions du groupe LR n’est prévue que le 22 janvier.

En outre, des professeurs de droit public interrogés par l'AFP émettent de sérieuses réserves quant à la conformité avec la Constitution de cette proposition déjà formulée, tout en la circonscrivant aux moins de 15 ans, par le patron des députés macronistes Gabriel Attal en mai - même si celui-ci n'avait pas déposé de texte.

Pour la constitutionnaliste Anne-Charlène Bezzina, elle n'a "aucune chance d'être conforme", rappelant que la loi sur la dissimulation du visage que son texte vient modifier a un motif de "sécurité à l'ordre public" et ne "vise aucune religion en particulier".

Or, M. Wauquiez cible très clairement le voile islamique dans l'espace public, contrevenant "au principe de liberté de religion", ajoute l'enseignante.

Jean-Philippe Derosier, professeur de droit public à l’Université de Lille, se dit également "très réservé".

Bien que le texte se heurte au principe de liberté religieuse, Laurent Wauquiez justifie sa démarche par la "préservation des droits de l’enfant", ce qui est "assez habile", reconnaît-il, mais insuffisant pour garantir sa conformité constitutionnelle.

Assimiler le port du voile par une mineure à "une forme d’asservissement" reste juridiquement fragile. "Incontestablement, une fillette de 9 ans pourrait le faire par mimétisme ou sous l'effet d’une instrumentalisation", observe-t-il. "Mais une adolescente de 16 ans peut davantage le porter par conviction personnelle."

Il rappelle par ailleurs que l’interdiction de dissimulation du visage est justifiée par des raisons de sécurité, avec la nécessité de pouvoir "identifier les personnes", un raisonnement difficilement transposable au fait de se couvrir la chevelure.


Quatre associations musulmanes portent plainte contre un sondage Ifop

Le recteur de la grande mosquée de Lyon, Kamel Kabtane, pose dans la grande mosquée de Lyon le 30 septembre 2025. (AFP)
Le recteur de la grande mosquée de Lyon, Kamel Kabtane, pose dans la grande mosquée de Lyon le 30 septembre 2025. (AFP)
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  • Les Conseils départementaux du culte musulman (CDCM) du Loiret, de l'Aube, des Bouches-du-Rhône et de Seine-et-Marne ont déposé plainte contre X auprès du tribunal judiciaire de Paris après la publication le 18 novembre du sondage Ifop
  • Les CDCM sont l'échelon départemental du Conseil français du culte musulman (CFCM), ex-instance de représentation de l'islam auprès des pouvoirs publics, tombée en disgrâce en 2021

PARIS: Quatre associations du culte musulman ont porté plainte lundi pour dénoncer le manque d'objectivité supposé d'un sondage Ifop sur le rapport des fidèles à l'islam, ont annoncé leurs avocats à l'AFP.

Les Conseils départementaux du culte musulman (CDCM) du Loiret, de l'Aube, des Bouches-du-Rhône et de Seine-et-Marne ont déposé plainte contre X auprès du tribunal judiciaire de Paris après la publication le 18 novembre du sondage Ifop "Etat des lieux du rapport à l'islam et à l'islamisme des musulmans de France".

Les CDCM sont l'échelon départemental du Conseil français du culte musulman (CFCM), ex-instance de représentation de l'islam auprès des pouvoirs publics, tombée en disgrâce en 2021.

Ce sondage "viole le principe d'objectivité posé par la loi du 19 juillet 1977 relative à la publication et la diffusion des sondages d'opinion", se "fonde sur des questions orientées" et se "focalise sur des résultats minoritaires mis en avant à des fins polémiques", accusent les avocats Mes Raphaël Kempf et Romain Ruiz, dans un communiqué.

Selon eux, le sondage distille "le poison de la haine dans l'espace public", renforçant "les amalgames".

Contacté par téléphone, François Kraus, directeur du pôle politique/actualités de l'Ifop, a indiqué qu'il répondrait à l'AFP par écrit, ce qu'il n'avait pas fait dans l'après-midi.

Le CFCM avait déjà dans un communiqué vendredi déploré "une nouvelle mise à l’index des citoyens français de confession musulmane et de leurs pratiques religieuses", avec des analyses et données "contestables".

L'enquête Ifop, basée sur un échantillon de 1.005 personnes de religion musulmane, a été commandée par le média confidentiel "Ecran de veille", qui se présente comme "le mensuel pour résister aux fanatismes".

L'attention médiatique et politique s'est beaucoup focalisée sur le sous-échantillon des 15-24 ans, constitué de 291 personnes, et révélant une forte pratique (87% se considèrent religieux, 67% disent prier "au moins une fois par jour", 83% font le ramadan)

François Kraus écrit dans sa conclusion sur le site de l'Ifop que "cette enquête dessine très nettement le portrait d'une population musulmane traversée par un processus de réislamisation, structurée autour de normes religieuses rigoristes et tentée de plus en plus par un projet politique islamiste".

Le sondage a provoqué de vives réactions, l'extrême droite y voyant un signe d'"islamisation", tandis que des représentants de la communauté musulmane ont regretté "une stigmatisation".

"A mal poser les questions, on finit toujours par fabriquer les peurs qu’on prétend mesurer", affirmait dans son billet hebdomadaire le recteur de la Grande mosquée de Paris Chems-eddine Hafiz.

Le politiste Haouès Seniguer qualifie pour sa part de raccourci "grossier et réducteur" l'idée, sous-jacente selon lui au sondage, qu'une observance stricte de l'islam soit la porte d'entrée mécanique vers l'islamisme.


Macron invité de RTL mardi matin

 Emmanuel Macron, en déplacement en Afrique en ce début de semaine, sera l'invité de RTL mardi matin à 07h35, a annoncé la radio lundi dans un communiqué. (AFP)
Emmanuel Macron, en déplacement en Afrique en ce début de semaine, sera l'invité de RTL mardi matin à 07h35, a annoncé la radio lundi dans un communiqué. (AFP)
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  • Après sa participation au G20 ce week-end à Johannesburg et une visite au Gabon, le chef de l'Etat Français a décollé lundi pour l'Angola, où il doit participer au sommet Union européenne-Union africaine
  • Emmanuel Macron se rendra notamment jeudi à Varces (Isère), sur un site de l'armée de terre, où il pourrait annoncer l'instauration d'un service militaire volontaire

PARIS: Emmanuel Macron, en déplacement en Afrique en ce début de semaine, sera l'invité de RTL mardi matin à 07h35, a annoncé la radio lundi dans un communiqué.

Le président de la République sera notamment interrogé sur la situation internationale, alors qu'une nouvelle réunion de la "coalition des volontaires" au soutien de l'Ukraine est prévue mardi en visioconférence.

Après sa participation au G20 ce week-end à Johannesburg et une visite au Gabon, le chef de l'Etat a décollé lundi pour l'Angola, où il doit participer au sommet Union européenne-Union africaine.

M. Macron sera aussi interrogé sur "les menaces qui pèsent sur la France", selon le communiqué de RTL.

Emmanuel Macron se rendra notamment jeudi à Varces (Isère), sur un site de l'armée de terre, où il pourrait annoncer l'instauration d'un service militaire volontaire.