Il est difficile de lire une analyse ou un rapport dans les journaux occidentaux sans qu’un aspect de l’article ne comporte une discussion sur l’avenir de Gaza. Il y a une discussion sur les scénarios à prévoir, les parties impliquées, les possibilités de succès ou d’échec et les positions des personnes impliquées dans ces scénarios.
Quel est le dénominateur commun de toutes ces discussions? Les pays du Conseil de Coopération du Golfe (CCG), en particulier l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.
Depuis le début de la crise, ces pays font parler d’eux pour financer les plans de reconstruction et assurer la sécurité et la stabilité de la bande de Gaza, si elle n’est plus sous le contrôle des groupes et organisations impliqués dans le conflit actuel avec Israël.
Outre la complexité des scénarios de gouvernance civile dans la phase d’après-guerre de Gaza et la possibilité de réaliser l’un ou l’autre de ces scénarios, d’autant plus que la guerre dure depuis plus de trois mois sans aucune confirmation de la possibilité d’un retrait complet de l’idéologie du Hamas de Gaza, il s’agit pour les pays du CCG de ne pas répéter les erreurs du passé. Ils ne veulent pas que leurs fonds, qui sont censés assurer la sécurité et la stabilité, soient utilisés pour gagner du temps avant un nouveau cycle de conflit entre Israël et les Palestiniens.
L’attitude des États du CCG à l’égard de la reconstruction de la bande de Gaza s’inscrit sans aucun doute dans le cadre des nouvelles tendances de la politique étrangère de ces États.
De nombreux médias occidentaux font état de la position de certains États du Golfe et de leur condition exclusive pour financer la reconstruction de la bande de Gaza dans une perspective claire et réaliste d’un État palestinien viable.
Les intérêts et les priorités ont changé en fonction des besoins de la population de ces pays. Les alliances internationales se sont élargies, offrant de nombreuses alternatives et des visions stratégiques qui se reflètent dans les positions et les politiques de ces pays ces dernières années. Par conséquent, ce thème n’est pas lié à un parti en particulier.
En outre, les positions présentées sont rationnelles et dans l’intérêt du peuple palestinien. Elles représentent un soft power habile qui fait pression pour que tout le sang versé ne l’ait pas été en vain et qui garantit les droits légitimes des Palestiniens, à l’abri du battage médiatique et de la propagande.
De nombreux médias occidentaux font état de la position de certains États du Golfe et de leur condition exclusive pour financer la reconstruction de la bande de Gaza dans une perspective claire et réaliste d’un État palestinien viable. C’est la première expérience d’une bataille diplomatique difficile qui attend de nombreux acteurs dans notre région.
Il ne s’agit pas seulement de rétablir la vie à Gaza et de faire respecter les droits des Palestiniens qui ont été violés par les mouvements et les factions, mais également d’éviter que ce qui s’est passé ne se répète et de ne pas commettre d’erreurs qui entraînent des civils palestiniens innocents dans des conflits entre factions qui leur coûteront cher.
La période qui suivra la guerre de Gaza ne sera en aucun cas facile. La fin de cette guerre ne signifie pas le début de la stabilité, mais le début de la recherche de la stabilité. La route peut être longue, les chemins peuvent se séparer, les efforts peuvent être dispersés.
La réalisation de ces objectifs exigera des efforts considérables, plus encore que ceux qui ont été nécessaires pour mettre fin à la guerre et trouver une solution. Des questions telles que le financement de la reconstruction face aux difficultés économiques et les priorités de développement pour tous les pays désireux de financer ces plans ne sont pas aussi simples que certains l’imaginent.
L’époque des liquidités inconditionnelles, ou plutôt des fonds gratuits, est révolue. On ne peut plus compter sur des milliards de dollars sans condition. Le passé a montré que de telles pratiques échouent malgré les bonnes intentions et les motifs politiques ou nationaux humanitaires.
Le processus de reconstruction de Gaza est cette fois différent des précédents, non seulement en raison de l’ampleur des destructions consécutives à l’attaque aveugle contre Israël le 7 octobre, mais aussi parce qu’Israël lui-même a cette fois des vues divergentes. Je ne peux pas imaginer qu’un plan réaliste de reconstruction de Gaza et de préservation de son identité palestinienne soit facile à mettre en œuvre. Par conséquent, il faudra déployer beaucoup d’efforts au lendemain des négociations pour formuler une forme de gouvernance qu’Israël acceptera et qui garantira sa sécurité et sa stabilité.
En même temps, elle garantira le retour de quelque deux millions de personnes déplacées dans leurs foyers, villes et villages.
La question qui se pose est de savoir quand et comment ces objectifs pourront être atteints. En effet, la reconstruction des écoles, des hôpitaux, des routes et d’autres installations vitales ne se fera pas du jour au lendemain, en particulier dans des conditions de sécurité complexes, avec des difficultés de transport et des problèmes d’acheminement des matériaux et des biens nécessaires.
La réalité, lorsqu’on discute de scénarios pour la crise de Gaza, c’est qu’on ne peut pas ignorer les faits et aller trop vite en besogne. Il ne faut pas oublier qui a provoqué la catastrophe pour près de deux millions de Palestiniens. S’obstiner à blâmer les pays qui ont normalisé leurs relations avec Israël, comme le font certains imbéciles, naïfs, bonimenteurs ignorants, nationalistes et chauvins, sur les plates-formes médiatiques, sans preuve claire de la pertinence de cette normalisation par rapport à ce qui est arrivé à ces personnes innocentes, est une erreur.
Selon moi, ni les pays qui ont procédé à la normalisation ni Israël lui-même ne voulaient se retrouver dans cette situation. Il faut donc faire taire les colporteurs et laisser les pays arabes, qui n’ont d’autre choix que de faire face aux conséquences de ce qui s’est passé, prendre les devants.
Cependant, ils doivent le faire en toute sécurité afin d’éviter que ce qui s’est passé ne se reproduise et de s’assurer que leurs ressources et leurs efforts sont dirigés vers la bonne cible, à savoir les Palestiniens innocents qui supportent le coût de leurs actions irréfléchies.
Salem AlKetbi est un politologue émirati et ancien candidat au Conseil national fédéral.
X : @salemalketbieng
NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français