Trump remporte la primaire du New Hampshire, vers un match retour contre Biden

L'ancien président américain Donald Trump lève le poing lors d'une soirée électorale à Nashua, dans le New Hampshire, le 23 janvier 2024. (AFP)
L'ancien président américain Donald Trump lève le poing lors d'une soirée électorale à Nashua, dans le New Hampshire, le 23 janvier 2024. (AFP)
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Publié le Mercredi 24 janvier 2024

Trump remporte la primaire du New Hampshire, vers un match retour contre Biden

  • Selon des projections de télévisions et plus de 60% des bulletins dépouillés, Donald Trump a remporté environ 54% des voix contre 44% pour Haley
  • Les primaires du New Hampshire ont connu une «participation très forte» selon les autorités locales

MANCHESTER: L'archi-favori de la droite américaine Donald Trump a remporté mardi soir la primaire républicaine dans le New Hampshire face à sa rivale Nikki Haley, se rapprochant un peu plus de l'investiture et d'un match retour contre Joe Biden à la présidentielle de novembre.

Selon des projections de télévisions et plus de 60% des bulletins dépouillés, Donald Trump a remporté environ 54% des voix contre 44% pour son ex-ambassadrice à l'ONU, Mme Haley.

Si elle a aussitôt félicité l'ancien locataire de la Maison Blanche (2017-2021) pour sa victoire dans ce petit Etat du nord-est où elle a fait bonne figure et a nombre de partisans, Nikki Haley a affirmé que "la course (était) loin d'être terminée". Et elle a averti son camp républicain qu'"une investiture de Trump serait une victoire pour Biden" le 5 novembre prochain.

Depuis sa défaite en novembre 2020, qu'il n'a jamais reconnue face au président Biden et alors qu'il fait face cette année à quatre procès au pénal, Donald Trump est déterminé à prendre sa revanche sur son rival démocrate.

Dans un discours de "victoire", le magnat de l'immobilier qui a bouleversé en dix ans la démocratie américaine, a de nouveau moqué son unique concurrente qu'il a pressée de se retirer. A 77 ans, il s'en est pris une nouvelle fois au président Biden, 81 ans, "le pire de l'histoire" des Etats-Unis, "un pays en déclin et défaillant".

L'équipe de la campagne Biden a reconnu qu'avec sa victoire dans le New Hampshire, Donald Trump avait "quasiment verrouillé l'investiture par le Parti républicain".

De fait, "il s'agit maintenant d'une course à deux entre Trump et Biden", a résumé pour l'AFP l'analyste Keith Nahigian, ancien de l'équipe de l'homme d'affaires.

Cinq choses à retenir de la primaire républicaine dans le New Hampshire

Donald Trump a vaincu mardi soir sa rivale Nikki Haley lors de la primaire républicaine du New Hampshire, confortant sa position d'ultra-favori de la droite et avançant encore un peu plus vers l'investiture de son parti pour la présidentielle de novembre.

Voici cinq choses à retenir de ce scrutin.

Trump l'invincible?

Aucun républicain ayant remporté à la fois les primaires de l'Iowa et du New Hamsphire n'a jamais perdu l'investiture de son parti. Fort de ce fait, Donald Trump a le vent en poupe.

D'autant plus que pour l'instant, ses ennuis judiciaires ne semblent pas avoir d'impact sur sa popularité. Inculpé quatre fois au pénal, poursuivi en diffamation, l'ex-président se présente régulièrement au tribunal entre deux meetings de campagne.

Les regards sont maintenant tournés vers le Nevada, où M. Trump assure que sa victoire est garantie, puis vers la Caroline du Sud le mois prochain, l'Etat dont Nikki Haley a été gouverneure et où il la devance d'une trentaine de points dans les sondages.

Les 50 Etats américains auront leur mot à dire dans le long processus des primaires, mais il est possible que les républicains aient leur candidat dès avril, voire plus tôt.

"Je dis que l'élection commence ce soir", a lancé Vivek Ramaswamy, qui fut candidat à la Maison Blanche avant de se rallier à M. Trump, en allusion à un duel avec le président Joe Biden.

Haley ne jette pas l'éponge

Nikki Haley a reconnu sa défaite mais a tenu à dire qu'elle était "une battante".

Et "cette course est loin d'être terminée", a-t-elle insisté.

Sa position est toutefois précaire. Elle avait fini troisième dans l'Iowa et se retrouve à une dizaine de points derrière le magnat de l'immobilier dans le New Hampshire.

Ses donateurs risquent de l'abandonner et de la forcer à jeter l'éponge.

"Si Haley n'arrive pas à rivaliser avec Trump en Caroline du Sud, sa course est terminée", dit à l'AFP Russ Muirhead, professeur à Dartmouth College.

Un discours colérique

Il a eu beau se féliciter d'une "grande soirée", Donald Trump a aussi tenu un discours empreint de colère, qualifiant les Etats-Unis de "pays en faillite" et tempêtant contre une Nikki Haley refusant de lui jurer allégeance.

Il s'est également lancé dans des tirades sur l'immigration et les prix de l'essence, et a affirmé - sans autres détails - que Mme Haley pourrait se retrouver bientôt visée par une "enquête".

Il a enfin promis de se venger de ceux qui le fâchent.

"Je ne me mets pas trop en colère, je rends la pareille", a-t-il lancé.

L'équipe de campagne de Nikki Haley a rapidement répliqué à son discours "furieux" et "décousu".

"Si Trump est en si bonne forme, pourquoi est-il si en colère?", a-t-elle demandé.

Sondages détaillés

Des sondages sortie des urnes ont donné des détails sur les électeurs républicains, soulevant des questions sur la capacité de Donald Trump à mobiliser en dehors de ses partisans les plus fervents.

Ces derniers le soutiennent coûte que coûte. A la question de savoir s'il était apte à être président même s'il était reconnu coupable d'un crime, 87% ont dit oui.

Mais chez les soutiens de Mme Haley, plus modérés, seuls 12% ont donné la même réponse.

86% des partisans de M. Trump ont aussi dit ne pas croire que Joe Biden ait remporté l'élection de 2020, contre 13% de ceux de Mme Haley.

Biden vainqueur sans être sur les bulletins

Joe Biden a lui aussi engrangé une victoire mardi dans le New Hamsphire: il a remporté la primaire démocrate alors qu'il ne figurait même pas sur les bulletins de vote, en raison d'un désaccord avec l'antenne locale du Parti sur le calendrier électoral.

Et pendant que Donald Trump et Nikki Haley s'affrontaient dans cet Etat du nord-est, lui faisait campagne pour défendre le droit à l'avortement en Virginie. Un thème qui risque de peser lourd lors de la présidentielle.

Après le vote du New Hampshire, le président a affirmé que M. Trump serait de toute évidence le candidat des républicains. "Les enjeux ne pourraient être plus importants. Notre démocratie. Nos libertés individuelles (...). Notre économie (...). Tout est en jeu", a-t-il écrit.

«Relativement bon pour Nikki Haley»

"Biden va être balayé, il est fini", lance un électeur trumpiste de New York, Luis Ferre, 72 ans, venu spécialement soutenir son candidat dans le New Hampshire.

Pour affronter Joe Biden le 5 novembre, il faudra que Donald Trump soit investi cet été par la convention de son parti, au terme de toutes les primaires dans les Etats américains face à Nikki Haley, si elle se maintient.

Le magnat avait déjà emporté haut la main la première primaire dans l'Iowa le 15 janvier et, par le passé, tous les candidats qui ont remporté les deux premiers votes ont été investis par le parti.

Les primaires du New Hampshire ont connu une "participation très forte" selon les autorités locales

Le ralliement à Donald Trump ce week-end du gouverneur de Floride, Ron DeSantis, un temps considéré comme son principal rival républicain, a ramené le trio de tête à un duel.

Si la bataille est très inégale, l'analyste politique Aron Salomon a reconnu auprès de l'AFP que ce fut "un mardi soir relativement bon pour les partisans de Nikki Haley", laquelle tente de rallier les républicains modérés et les indépendants.

«Démocratie en jeu»

L'ancienne gouverneure de Caroline du Sud, Etat qui votera ses primaires républicaines le 24 février, reproche à l'ancien président populiste très à droite de charrier le "chaos", allusion aux multiples poursuites pénales notamment pour tentatives illicites d'inverser les résultats de la présidentielle de 2020.

Ces derniers jours, Nikki Haley s'est également interrogée sur ses capacités cognitives "déclinantes" après des propos dans lesquels M. Trump semblait la confondre avec l'ex-présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi.

Un comble pour Donald Trump, qui se gausse à l'envi de Joe Biden, de son âge et de ses bourdes, imitant même pendant ses meetings sa démarche parfois hésitante.

Côté démocrate, Joe Biden a lui aussi remporté la primaire démocrate dans le New Hampshire.

L'hôte de la Maison Blanche était en campagne en Virginie, près de Washington, avec sa vice-présidente Kamala Harris, sur le thème du droit à l'avortement, accusant Donald Trump de vouloir "à tout prix" le restreindre toujours plus.

Et après l'annonce de la victoire de son rival, Joe Biden a averti que la démocratie était "en jeu", autre grand argument de campagne du président.

Le New Hampshire ne représente que 22 délégués, sur 1.215 nécessaires pour être officiellement désigné candidat républicain.

Mais par rapport à des Etats plus conservateurs, il donne une meilleure indication d'un possible succès électoral national et des primaires suivantes, notamment le "Super Tuesday" du 5 mars.


Biden recevra le roi de Jordanie «la semaine prochaine»

Le roi Abdallah II de Jordanie a rencontré pour la dernière fois le président américain Joe Biden à la Maison Blanche en février (Photo, AFP).
Le roi Abdallah II de Jordanie a rencontré pour la dernière fois le président américain Joe Biden à la Maison Blanche en février (Photo, AFP).
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  • Il s'agira d'une «rencontre privée» dont un compte-rendu officiel sera publié par la Maison Blanche après sa conclusion
  • Mi-avril, Amman a abattu des drones iraniens tirés sur Israël

WASHINGTON: Le président américain Joe Biden recevra le roi Abdallah II de Jordanie "la semaine prochaine" à la Maison Blanche, a annoncé vendredi sa porte-parole Karine Jean-Pierre.

Il s'agira d'une "rencontre privée" dont un compte-rendu officiel sera publié par la Maison Blanche après sa conclusion, a-t-elle ajouté, sans donner de date précise.

L'annonce intervient alors que les discussions sur un cessez-le-feu à Gaza, accompagné d'une libération d'otages détenus dans le territoire palestinien, sont entrées dans une phase critique.

Le Hamas doit répondre à la dernière proposition israélienne, jugée "extraordinairement généreuse" par les Américains, très investis dans ces discussions.

Rencontre privée 

Mais le mouvement palestinien a accusé vendredi le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu de chercher à entraver ces efforts, alimentant les doutes sur un accord de cessez-le-feu rapide.

La Jordanie, qui entretient des relations diplomatiques avec Israël et compte une importante population palestinienne, est particulièrement sensible aux tensions au Proche-Orient.

Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken s'est récemment rendu dans le royaume, au moment où un premier convoi d'aide humanitaire jordanien partait pour la bande de Gaza, via un passage nouvellement ouvert par Israël.

Mi-avril, Amman a abattu des drones iraniens tirés sur Israël. Tout en travaillant avec les Etats-Unis, le royaume veut éviter d'être touché par un éventuel conflit.


Poutine ordonne des exercices nucléaires en réponse à des «menaces» occidentales

Le président Vladimir Poutine a ordonné à l'armée russe d'organiser des exercices d'armes nucléaires impliquant la marine et les troupes basées près de l'Ukraine (Photo, AP).
Le président Vladimir Poutine a ordonné à l'armée russe d'organiser des exercices d'armes nucléaires impliquant la marine et les troupes basées près de l'Ukraine (Photo, AP).
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  • Parallèlement, au moins six personnes ont été tuées et 35 autres blessées dans la matinée dans une attaque ukrainienne de drones explosifs sur la région russe de Belgorod
  • Depuis le début du conflit en Ukraine en février 2022, Vladimir Poutine a soufflé le chaud et le froid sur un possible recours à l'arme nucléaire

MOSCOU: Le président russe Vladimir Poutine a ordonné la tenue d'exercices nucléaires "dans un futur proche" impliquant notamment des troupes basées près de l'Ukraine, en réponse "aux menaces" de dirigeants occidentaux envers Moscou, selon le ministère de la Défense lundi.

Parallèlement, au moins six personnes ont été tuées et 35 autres blessées dans la matinée dans une attaque ukrainienne de drones explosifs sur la région russe de Belgorod, frontalière de l'Ukraine et régulièrement visée par les forces de Kiev.

Depuis le début du conflit en Ukraine en février 2022, Vladimir Poutine a soufflé le chaud et le froid sur un possible recours à l'arme nucléaire.

Cette fois, les exercices visent à "maintenir la préparation" de l'armée pour protéger le pays, "en réponse aux déclarations provocatrices et menaces de certains responsables occidentaux proférées à l'encontre de la Russie", a déclaré son ministère de la Défense dans un communiqué.

"Une série de mesures seront prises pour s'entraîner à la préparation et à l'utilisation d'armes nucléaires non stratégiques", a-t-il ajouté.

Ces armes, également appelées armes nucléaires tactiques, sont conçues pour être utilisées sur le champ de bataille et peuvent être lancées par missiles.

Le ministère russe a ajouté que la mesure avait été prise "sur instruction du Commandant en chef suprême des forces armées de la Fédération de Russie", Vladimir Poutine.

Cela impliquera l'aviation, la marine et des forces du district militaire Sud, qui est basé tout près de l'Ukraine et couvre notamment des régions ukrainiennes dont Moscou revendique l'annexion.

La date et le lieu de ces exercices n'ont pas été précisés, tout comme le nombre de soldats mobilisés.

Mi-mars, le président russe avait jugé les armes nucléaires russes "plus avancées" que celles des États-Unis, assurant que son arsenal était toujours "prêt" à un conflit nucléaire, mais qu'il n'avait jamais songé à l'utiliser en Ukraine.

Frappe près de Belgorod 

Une frappe ukrainienne de drones explosifs dans le petit village de Beriozovka, dans la région russe de Belgorod, a fait au moins six morts et 35 blessés, selon le gouverneur Viatcheslav Gladkov.

Deux petits camions "qui transportaient des employés vers leur lieu de travail, et une voiture ont été attaquées par l'armée ukrainienne à l'aide de drones kamikazes", a détaillé le responsable sur Telegram.

Un homme se trouve dans "un état grave", a précisé M. Gladkov, tandis que les autres personnes, blessées "plus ou moins gravement en raison des éclats d'obus", ont été transportées "vers des centres médicaux de la région".

Selon les autorités régionales, les véhicules touchés appartenaient à une entreprise locale de production de viande.

Une enquête a été ouverte par le Comité d'enquête russe, en charge des principales investigations dans le pays.

La région de Belgorod est régulièrement visée par des attaques de l'armée ukrainienne, Kiev disant agir ainsi en réponse aux bombardements quotidiens des forces russes sur les villes d'Ukraine depuis plus de deux ans.

Le 30 décembre 2023, la ville de Belgorod, capitale de la région éponyme et située à 60 km du village de Beriozovka, a été frappée par l'attaque la plus meurtrière sur le sol russe depuis l'offensive de Moscou contre son voisin ukrainien en février 2022 (25 morts et une centaine de blessés).

Cette nouvelle attaque ukrainienne intervient à la veille de l'investiture au Kremlin de Vladimir Poutine, qui entamera officiellement mardi un cinquième mandat de président, et trois jours avant les célébrations du 9 mai sur la victoire soviétique contre l'Allemagne nazie.

Une partie de ces festivités, qui attirent généralement de grandes foules partout dans le pays, a été annulée par les autorités pour des raisons sécuritaires liées notamment au conflit en Ukraine.


Les musulmans de Monfalcone, en Italie, privés de mosquée

Des musulmans se rassemblent sur le parking privé d'un chantier pour la demi-journée de prière à Monfalcone, le 26 avril 2024 (Photo, AFP).
Des musulmans se rassemblent sur le parking privé d'un chantier pour la demi-journée de prière à Monfalcone, le 26 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • La maire d'extrême droite a interdit aux musulmans de la ville de prier dans leurs deux centres culturels
  • Ils en sont donc réduits à se rassembler dans ce lieu désolé en attendant que la justice tranche sur ce qu'ils considèrent comme une atteinte à leur droit constitutionnel à la prière

MONFALCONE: C'est la prière du vendredi à Monfalcone, ville du nord-est de l'Italie, et des centaines d'hommes sont à genoux sur un parking improvisé, le front au sol.

La maire d'extrême droite a interdit aux musulmans de la ville de prier dans leurs deux centres culturels. Ils en sont donc réduits à se rassembler dans ce lieu désolé en attendant que la justice tranche sur ce qu'ils considèrent comme une atteinte à leur droit constitutionnel à la prière.

Parmi eux, Rejaul Haq, propriétaire du bâtiment et devenu citoyen italien après être arrivé du Bangladesh en 2006, exprime sa frustration envers ce qu'il juge être de la discrimination.

"Dites-moi où je devrais aller. Pourquoi je dois quitter Monfalcone ? Je vis ici, je paye mes impôts ici !", lance-t-il. "Catholiques, orthodoxes, protestants, témoins de Jéhovah... Si tout le monde a son église, pourquoi ne pouvons-nous pas en avoir une ?".

Les immigrés représentent le tiers des habitants de cette ville, qui en compte 30.000, en périphérie de Trieste. Beaucoup d’entre eux sont des musulmans bangladais recrutés à partir de la fin des années 1990 pour construire des navires de croisière pour le groupe de chantiers navals Fincantieri.

Celui de Monfalcone, le plus grand d’Italie, a fait vivre la ville pendant plus d'un siècle. Ces dernières décennies, il a fait de plus en plus recours à des ouvriers employés par des sous-traitants, moins chers et nés à l'étranger.

«Ils sont trop nombreux»

Pour la maire Anna Cisint, cette restriction de prière est une question d’aménagement du territoire, pas de discrimination. En tant qu'élue locale d'une république laïque, elle n'a pas à trouver des terrains pour un lieu de culte.

"En tant que maire, je ne suis contre personne (...), je suis ici pour faire respecter la loi", explique Mme Cisint à l'AFP.

Toujours est-il que la population musulmane immigrée, qui a augmenté avec les regroupements familiaux et les nouvelles naissances, est devenue "trop importante pour Monfalcone", estime-t-elle. "Ils sont trop nombreux (...). Il faut dire les choses telles qu’elles sont".

Les déclarations d'Anna Cisint lui valent une place sur la liste pour les élections européennes de la Ligue, le parti antimigrants de Matteo Salvini, membre de la coalition gouvernementale de Giorgia Meloni.

La Ligue s’oppose depuis des décennies à l’ouverture de mosquées dans son bastion du nord.

Dans une Italie à forte majorité catholique, il y a moins de dix mosquées officiellement reconnues, selon Yahya Zanolo de la Communauté religieuse islamique d’Italie (COREIS).

Même si l'islam est la première religion minoritaire du pays, son manque de reconnaissance par l'État complique la construction de lieux de culte pour les deux millions de musulmans qui y vivent, selon la COREIS, alors que presque la moitié d'entre eux sont des citoyens italiens.

Ce qui laisse la responsabilité des mosquées aux villes et aux régions et relègue les fidèles dans des milliers de lieux de prière improvisés qui "alimentent les préjugés et la peur dans la population non-musulmane", estime Yahya Zanolo.

Anna Cisint, qui bénéficie d’une protection policière depuis qu'elle a reçu des menaces de mort, assure avoir "tout essayé" mais que la communauté musulmane, “très renfermée”, refuse de s'intégrer et impose sa culture à Monfalcone.

Elle s'insurge contre l'enseignement de l'arabe dans les centres communautaires, le fait que des femmes marchent derrière leur mari ou que des écolières portent un voile. Elle assure aussi que Monfalcone dépense 95% de son aide sociale en faveur de la communauté immigrée, un chiffre que l'AFP n'a pas été mesure de vérifier.

Les musulmans de Monfalcone, eux, font valoir leurs permis de travail et leurs passeports.

"Ce n’est pas pour la beauté de la ville que nous sommes venus à Monfalcone", ironise Rejaul Haq. "C’est parce qu’il y a du travail ici".

«Trop c'est trop»

Aux européennes, la Ligue compte une fois de plus sur l'immigration illégale pour gagner des voix, alors que 160.000 personnes sont arrivées par bateau l’année dernière en Italie, principalement en provenance de pays musulmans. Matteo Salvini a présenté le scrutin de juin comme "un référendum" sur l'avenir de l'Europe face à l'afflux de migrants.

Malgré leur statut légal, beaucoup de musulmans ont confié à l'AFP ressentir de la méfiance, voire de la haine, à leur encontre.

Ahmed Raju, 38 ans, est ouvrier chez Fincantieri. "Nous sommes étrangers. Nous ne pouvons pas changer la situation", confie celui qui s'est résolu à prier chez lui.

À la sortie d'un cours d'italien dispensé par des bénévoles à des femmes récemment immigrées, Sharmin Islam, 32 ans, explique que son jeune fils, né en Italie, ressent fortement cette animosité: “Il rentre de l’école et me demande : +Maman, est-ce que nous sommes méchants, nous les musulmans ?+".

Le tribunal administratif de Trieste doit se prononcer le 23 mai sur l’interdiction de prier dans les centres culturels.

En attendant, Gennaro Pomatico, un barman de 24 ans originaire de Naples, se dit tout aussi immigré dans la ville que les derniers arrivés. "Les locaux ne les accepteront jamais", prévient-il, alors qu'"au fond ils ne dérangent personne".