PARIS: L'Ukraine a alerté jeudi sur une "pénurie de munitions" de son armée, au jour du lancement par ses alliés à Paris d'une coalition "artillerie" pour répondre à ses besoins criants, à l'approche du deuxième anniversaire du début de l'invasion par l'armée russe.
Sur le terrain, l'armée russe a revendiqué jeudi la prise d'un village dans la région de Donetsk, dans l'Est de l'Ukraine où elle exerce une pression accrue depuis plusieurs semaines. L'armée ukrainienne a de son côté attaqué un dépôt pétrolier du nord de la Russie dans la nuit à l'aide de drones, a indiqué jeudi à l'AFP une source sécuritaire ukrainienne.
"La pénurie de munitions est un problème très réel et pressant auquel nos forces armées sont actuellement confrontées", a déploré le ministre ukrainien de la Défense Roustem Oumerov sur X (ex-Twitter), à l'occasion du lancement d'une "coalition artillerie" pilotée par la France et les Etats-Unis. "Nous devons renforcer les capacités de défense ukrainiennes pour protéger le monde libre contre le danger russe".
La "coalition" artillerie est l'un des volets du groupe de contact pour la défense de l'Ukraine dit groupe de Ramstein, réunissant plus de 50 pays en plusieurs sous-groupes, du déminage à la défense aérienne.
"ll n'y a pas d'alternative à une artillerie moderne, nous devons continuer nos efforts et augmenter notre production de munitions", a déclaré en visioconférence M. Oumerov lors de la cérémonie d'ouverture, après avoir annulé sa venue à Paris "pour des raisons de sécurité".
La France a proposé à cette occasion de "débloquer une somme de 50 millions d'euros" pour "acheter douze Caesar" supplémentaires et annoncé qu'elle avait la capacité d'en produire 60 de plus - à charge aux alliés de les financer, à hauteur d'environ 250 millions d'euros.
"Une somme qui me semble-t-il est accessible pour les différents budgets des alliés", a martelé le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, devant les représentants de 23 pays soutenant la défense de l'Ukraine.
Kiev a déjà déployé 49 Caesar, produits par Nexter (groupe franco-allemand KNDS), dont 30 fournis par la France et 19, des exemplaires blindés à huit roues, par le Danemark. Six autres seront livrés "dans les prochaines semaines", selon le ministère français des Armées. Monté sur camion, le Caesar peut tirer des obus de 155 mm à 40 kilomètres de distance.
"J'ai appelé @EmmanuelMacron pour remercier la France d'avoir lancé la coalition +artillerie+ pour l'Ukraine et de s'être engagé à produire des dizaines de Caesar", a déclaré le président Volodymyr Zelensky sur le réseau social X.
Les deux dirigeants ont également discuté "de la nécessité de renforcer davantage la défense aérienne de l'Ukraine", visée presque chaque nuit par des drones et des missiles de Moscou, a ajouté M. Zelensky.
Le président Macron a pour sa part redit "le soutien indéfectible" de la France à Kiev et réitéré son intention de se rendre en Ukraine en février, selon l'Elysée.
Munitions
Pour alimenter les canons, l'UE entend fournir à l'Ukraine un million de munitions d'ici le printemps 2024. Mais seuls 300.000 obus ont été livrés à ce jour, selon des parlementaires européens.
Les Ukrainiens tirent entre 5.000 et 8.000 obus quotidiennement, contre entre 10 et 15.000 côté russe, avait souligné mercredi Cédric Perrin, président de la Commission des Affaires étrangères du Sénat français, estimant que "la production nationale et européenne (était) extrêmement faible, (...) pas à la hauteur des attentes" ukrainiennes.
M. Lecornu a pour sa part insisté sur le triplement des livraisons de munitions françaises à l'Ukraine, passées de 1.000 unités par mois à 2.000 durant la première année de guerre, et qui devraient grimper à 3.000 obus à partir de janvier.
"On est en train de remettre la main sur des stocks de poudre. On recycle des poudres sur des munitions qui n'ont pas été utilisées", a-t-il déclaré à des journalistes.
Le ministre a aussi annoncé la livraison d'une cinquantaine de kits de guidage air-sol A2SM par mois à partir de janvier, durant toute l'année. De moyenne portée, ils peuvent être adaptés sur des avions "de classe soviétique" comme des Mig et des Sukhoï, que l'Ukraine utilise, a-t-il assuré.
La France est "en train de finaliser un accord" de sécurité avec Kiev du type de celui conclu vendredi entre le Royaume-uni et l'Ukraine sur dix ans, avait par ailleurs indiqué mardi M. Macron.
Paris a enfin démenti jeudi avoir déployé des "mercenaires" en Ukraine, en réaction aux affirmations de Moscou qui assure avoir visé mardi un bâtiment abritant des "mercenaires français" à Kharkiv (nord-est).